Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du préfet de police du 22 novembre 2016 lui refusant la délivrance d'une carte de séjour " étudiant ".
Par jugement n° 1701193 du 25 septembre 2017, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 16 mars 2018, M. A..., représenté par Me Berdugo, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 25 septembre 2017 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler la décision du préfet de police du 22 novembre 2016 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de deux mois suivant la notification de la décision à intervenir et de réexaminer sa situation sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision litigieuse est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les dispositions des articles L. 313-7, R. 313-7 et R. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- les premiers juges ont opéré une substitution de motifs irrégulière.
Par un mémoire en défense enregistré le 19 juillet 2018, le préfet de police conclut à l'annulation du jugement du 25 septembre 2017 et au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés.
Par une décision du 9 février 2018, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris a rejeté la demande d'aide juridictionnelle présentée par M.A....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Legeai,
- et les observations de Me Berdugo, avocat de M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M.A..., ressortissant guinéen né le 16 septembre 1990, est entré en France le 10 novembre 2010, muni d'un visa long séjour portant la mention " étudiant ", valant titre de séjour jusqu'au 8 novembre 2011 et renouvelé jusqu'au 30 novembre 2012. Un deuxième renouvellement de ce titre de séjour lui a été refusé le 2 janvier 2013. Au titre de l'année 2014/2015, M. A... a demandé à nouveau la délivrance d'un titre de séjour " étudiant ", qui lui a été refusée par arrêté du 10 décembre 2014, assorti d'une obligation de quitter le territoire français. Par courrier reçu le 3 août 2016, M. A..., qui s'était maintenu en France où il poursuivait ses études, a à nouveau sollicité auprès des services de la préfecture de police la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " étudiant ", avec dispense de production d'un visa de long séjour sur le fondement des articles L. 313-7 et R. 313-10 (1°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, afin de pouvoir s'inscrire en troisième année de bachelor en informatique et suivre les stages inclus dans la scolarité. Il fait régulièrement appel du jugement du 25 septembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 22 novembre 2016 par laquelle le préfet de police a rejeté cette demande.
2. L'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " I. - La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention " étudiant ". En cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l'étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans et y poursuit des études supérieures, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée et sous réserve d'une entrée régulière en France ". L'article R. 313-10 du même code dispose : " Peut être exempté, sur décision du préfet, de l'obligation de présentation du visa de long séjour prescrite au 2° de l'article R. 313-1 : / 1° L'étranger qui suit en France un enseignement ou y fait des études, en cas de nécessité liée au déroulement des études. Sauf cas particulier, l'étranger doit justifier avoir accompli quatre années d'études supérieures et être titulaire d'un diplôme, titre ou certificat au moins équivalent à celui d'un deuxième cycle universitaire ou d'un titre d'ingénieur. Il est tenu compte des motifs pour lesquels le visa de long séjour ne peut être présenté à l'appui de la demande de titre de séjour, du niveau de formation de l'intéressé, ainsi que des conséquences que présenterait un refus de séjour pour la suite de ses études (...) ".
3. M. A...a sollicité la délivrance d'un titre de séjour étudiant en arguant qu'il ne pouvait interrompre ses études pour regagner son pays et en demandant expressément à être dispensé de produire un visa de long séjour. La décision de rejet contestée vise les articles L. 313-7 et R. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont elle fait application et énonce que " l'intéressé a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français en date du 10 décembre 2014 notifiée le 10 décembre 2014, qu'il n'a pas exécuté cette mesure d'éloignement et se maintient en situation irrégulière depuis cette date " et " qu'en conséquence si M. A...C...entend poursuivre des études en France, il lui appartient de justifier à nouveau des conditions requises pour l'entrée sur le territoire national, notamment de la possession d'une nouveau visa de long séjour ". La circonstance qu'un étudiant étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la validité de son visa ou de son titre de séjour n'est pas de nature, alors même qu'il aurait fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français non exécutée, à faire regarder son entrée sur le territoire français comme irrégulière. Ainsi, M. A... est fondé à soutenir qu'en opposant à sa demande l'irrégularité de sa situation en France, le préfet de police, quand bien même il aurait en réalité entendu se prévaloir de l'irrégularité de son entrée sur le territoire, condition prévue par l'article L. 313-7, a commis une erreur de droit.
4. Le préfet fait valoir en défense devant la Cour que M. A..., qui ne peut être considéré comme un " cas particulier " au sens de l'article R. 313-10 précité, n'était ni scolarisé en France depuis l'âge de seize ans ni titulaire d'un diplôme de second cycle universitaire, et qu'ainsi le titre de séjour sollicité aurait pu lui être refusé sans erreur d'appréciation. Le préfet de police toutefois ne demande pas expressément au juge la substitution de ce nouveau motif au motif erroné figurant dans la décision litigieuse. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être accueilli.
5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet de police du 22 novembre 2016.
6. Le présent arrêt n'implique pas que le préfet de police délivre à M. A... une autorisation provisoire de séjour mais seulement qu'il réexamine sa demande. Il y a lieu de lui enjoindre d'y procéder dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte.
7. Enfin, il est constant que la demande d'aide juridictionnelle présentée par M. A... a été rejetée par une décision devenue définitive du 9 février 2018. Dans ces conditions, Me Berdugo ne peut demander que l'Etat verse à son profit une somme sur le fondement des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1701193 du 25 septembre 2017 du tribunal administratif de Paris et la décision du préfet de police du 22 novembre 2016 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de réexaminer la demande de M. A...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de M. A...est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 15 novembre 2018, à laquelle siégeaient :
- Mme Pellissier, présidente de chambre,
- M. Diémert, président-assesseur,
- M. Legeai, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 29 novembre 2018.
Le rapporteur,
A. LEGEAILa présidente,
S. PELLISSIERLe greffier,
M. B...La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA00892