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27/11/2018 | FRANCE | N°18PA01928

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 27 novembre 2018, 18PA01928


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E...D...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 26 octobre 2017 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1718217/2-1 du 9 mai 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 7 juin 2018, Mme D...B..., représentée par Me A...C..., demande à

la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 9 mai 2018 ;

2°) d'an...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E...D...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 26 octobre 2017 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1718217/2-1 du 9 mai 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 7 juin 2018, Mme D...B..., représentée par Me A...C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 9 mai 2018 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du préfet de police du 26 octobre 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision de refus du titre de séjour du préfet de police est entachée d'un vice de procédure pour défaut de saisine de la commission du titre de séjour ;

- elle est intervenue en méconnaissance des stipulations de l'article 41-2 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les dispositions du 7°) de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle repose sur une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi est illégale en conséquence de l'illégalité du refus du titre de séjour ;

- elle a également été prise irrégulièrement sans saisine de la commission du titre de séjour ;

- elle est aussi intervenue en méconnaissance des stipulations de l'article 41-2 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 novembre 2018, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Niollet a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que Mme E...D...B..., née le 23 janvier 1992 à Guantanamo, à Cuba, de nationalité cubaine, est entrée en France le 11 septembre 2011 munie d'un visa de long séjour valant titre de séjour ; que, par un arrêté du 26 octobre 2017, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement du 7°) de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que, par un jugement du 9 mai 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de Mme D...B...tendant à l'annulation de cet arrêté ; qu'elle fait appel de ce jugement ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union " ; qu'aux termes du paragraphe 2 de ce même article : " Ce droit comporte notamment : a) le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; b) le droit d'accès de toute personne au dossier qui la concerne, dans le respect des intérêts légitimes de la confidentialité et du secret professionnel et des affaires ; c) l'obligation pour l'administration de motiver ses décisions (...) " ; qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 51 de la Charte : " Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions, organes et organismes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux Etats membres uniquement lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit de l'Union. (...) " ; qu'ainsi que l'ont relevé les premiers juges, l'arrêté en ce qu'il refuse de délivrer un titre de séjour à Mme D...B..., comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, et est ainsi suffisamment motivé ; qu'ainsi que les premiers juges l'ont également relevé, la motivation de l'obligation de quitter le territoire français se confond avec celle de ce refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, de mention spécifique pour que cette obligation de motivation puisse être regardée comme ayant été respectée ; qu'ainsi que les premiers juges l'ont en outre relevé, le droit d'être entendu, satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, n'impose pas à l'autorité administrative de mettre le demandeur à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur la décision portant obligation de quitter le territoire français qui est prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour ; qu'enfin, Mme D...B...ne fait état d'aucune violation de son droit d'accès à son dossier ; que le moyen tiré d'une méconnaissance des stipulations de l'article 41-2 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ne peut dans ces conditions, qu'être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ;

4. Considérant que Mme D...B...fait valoir qu'elle est entrée en France en septembre 2011 à l'âge de dix-neuf ans, après s'être mariée avec un ressortissant français dont elle s'est séparée en 2013, qu'elle a donné naissance à deux filles, nées en France en 2015 et 2016 d'une autre union, qu'elle vit avec ses deux filles qui sont scolarisées, et avec leur père, et se prévaut de ses relations amicales et de sa situation professionnelle d'aide à domicile en France, ainsi que de son adhésion aux " valeurs républicaines " et de sa maitrise de la langue française ; qu'elle ne fait toutefois état d'aucune circonstance particulière de nature à faire obstacle à ce que son nouveau concubin, également cubain, et leurs deux filles l'accompagnent en cas de retour dans son pays ; qu'elle ne conteste d'ailleurs pas ne pas être dépourvue d'attaches familiales à Cuba où demeurent... ; que dans ces conditions, elle n'est pas fondée à soutenir que le préfet de police aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée et qu'il n'aurait pas pris en compte l'intérêt de ses enfants ; que les moyens tirés de méconnaissances des stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, ainsi que des dispositions du 7°) de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent donc être écartés ;

5. Considérant, en troisième lieu, que les diverses circonstances exposées ci-dessus ne permettent pas de regarder l'arrêté attaqué comme reposant sur une erreur manifeste d'appréciation ;

6. Considérant, en quatrième lieu, que la commission du titre de séjour prévue par les dispositions des articles L. 312-2 et R. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne doit être saisie que du cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions mentionnées à l'article L. 313-11 pour lesquels une décision de refus de titre de séjour est envisagée, et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que Mme D...B...ne remplit pas les conditions prévues au 7°) de cet article ; que, ne justifiant d'aucune communauté de vie avec son époux qui réside en Vendée, et reconnaissant vivre avec le père de ses deux filles à Saint-Ouen, elle ne remplit pas non plus les conditions prévues au 4°) du même article qui n'est d'ailleurs pas la disposition sur le fondement de laquelle elle a déposé sa demande de titre de séjour ; que le préfet de police n'était donc pas tenu, avant de rejeter sa demande, de soumettre son cas à la commission du titre de séjour ;

7. Considérant, en dernier lieu, compte tenu de ce qui précède, que Mme D...B...n'est pas fondée à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité du refus de titre de séjour, à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français, ni à soutenir que cette mesure aurait été prise irrégulièrement sans consultation de la commission du titre de séjour, et en méconnaissance des stipulations de l'article 41-2 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme D...B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 26 octobre 2017 ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et celles présentées aux fins d'injonction doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D...B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...D...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 13 novembre 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président assesseur, premier conseiller,

- M. Pagès, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 novembre 2018.

Le rapporteur,

J-C. NIOLLET

Le président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

T. ROBERT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°18PA01928


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA01928
Date de la décision : 27/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: M. Jean-Christophe NIOLLET
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : BEN CHEIKH

Origine de la décision
Date de l'import : 04/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-11-27;18pa01928 ?
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