Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler les arrêtés du 12 mars 2018 par lesquels le préfet de police, d'une part, l'a obligé à quitter le territoire français sans lui accorder de délai de départ volontaire et a fixé le pays de destination et, d'autre part, lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de douze mois.
Par un jugement n° 1803974/8 du 14 mars 2018, le magistrat désigné du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 25 mars 2018, M. B..., représenté par MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 14 mars 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 12 mars 2018 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans lui accorder de délai de départ volontaire et a fixé le pays de destination ;
3°) d'annuler l'arrêté du 12 mars 2018 par lequel le préfet de police lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de douze mois ;
4°) d'enjoindre au préfet de police, en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte d'un montant fixé par la Cour ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- les décisions attaquées du préfet de police sont insuffisamment motivées ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4 10° du même code ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire est illégale en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
- elle est illégale en ce qu'il n'en a pas eu connaissance et en ce que son état de santé nécessite un temps d'organisation ;
- la décision fixant le pays de renvoi est illégale en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- et d'une manière générale, il reprend les moyens invoqués devant le tribunal administratif, à l'exception de celui relatif à la compétence de l'auteur de l'acte.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 octobre 2018, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B...ne sont pas fondés.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 21 mars 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Pagès a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M. C...B..., né le 1er janvier 1974 à Sheikhupura, au Pakistan, de nationalité pakistanaise, entré en France en mars 2011 selon ses déclarations et qui avait notamment présenté en dernier lieu en avril 2016 une demande de titre de séjour implicitement rejetée par le préfet de Seine-Saint-Denis, a fait l'objet d'une interpellation par les services de police en mars 2018 ; qu'à la suite de cette interpellation, le préfet de police a pris, d'une part, un premier arrêté du 12 mars 2018, qui l'a obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et a fixé le pays de renvoi, d'autre part, un second arrêté du même jour, lui interdisant de retourner sur le territoire français pour une durée de douze mois ; que, par un jugement du 14 mars 2018, le magistrat désigné du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces arrêtés ; que M. B...relève appel de ce jugement ;
Sur l'ensemble des décisions :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 211-5 de ce code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;
3. Considérant que les décisions attaquées du préfet de police énoncent les éléments de fait et de droit qui en constituent le fondement et satisfont ainsi aux prescriptions des dispositions précitées du code des relations entre le public et l'administration ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de ces décisions ne peut qu'être écarté ;
4. Considérant que contrairement à ce que soutient M.B..., il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en prenant les décisions attaquées le préfet de police n'aurait pas procédé à un examen approfondi de sa situation personnelle ;
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I.-L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 511-4 de ce code : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié " ; qu'aux termes de l'article R. 511-1 du même code : " L'état de santé défini au 10° de l'article L. 511-4 est constaté au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / Cet avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement l'étranger ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / Toutefois, lorsque l'étranger est retenu en application de l'article L. 551-1, le certificat est établi par un médecin intervenant dans le lieu de rétention conformément à l'article R. 553-8. / En cas de rétention ou d'assignation à résidence en application de l'article L. 561-2, l'avis est émis par un médecin de l'office et transmis sans délai au préfet territorialement compétent " ;
6. Considérant, en premier lieu, que M. B...est entré irrégulièrement en France et ne justifie pas détenir un titre de séjour en cours de validité ; que, dès lors, contrairement à ce qu'il soutient, l'article L. 511-1 I 1° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'a pas été méconnu par le préfet de police ; que la circonstance qu'il n'a eu connaissance du rejet de sa demande de titre de séjour effectuée en avril 2016 auprès des services de la préfecture de Seine-Saint-Denis en qualité d'étranger malade que le jour de l'audience au tribunal, en mars 2018, est sans influence sur l'application à son égard des dispositions précitées de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile ; qu'il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté ;
7. Considérant, en deuxième lieu, que si le requérant soutient que le préfet de police aurait méconnu les dispositions de l'article R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ce moyen ne peut qu'être écarté faute d'être assorti des précisions suffisantes de nature à en apprécier le bien-fondé ;
8. Considérant, en troisième lieu, que le requérant soutient que le préfet de police aurait méconnu les dispositions précitées de l'article L. 511-4-10° du même code ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'un traitement médical approprié à son état de santé est disponible au Pakistan ; que, par suite, le moyen selon lequel le préfet de police aurait méconnu les dispositions précitées doit être écarté ;
9. Considérant, en quatrième lieu, que le requérant soutient que le préfet de police aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation et aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, puisqu'il entretient des liens, avec son cousin et son hébergeur ; que, toutefois ainsi que l'a relevé le premier juge, l'épouse de M. B...et ses deux enfants résident au Pakistan ; que, dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en l'obligeant à quitter le territoire le préfet de police aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; qu'il n'en ressort pas davantage que le préfet de police aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
Sur la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire :
10. Considérant, d'une part, que M. B...n'ayant pas démontré l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français il n'est pas fondé à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de cette mesure d'éloignement à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire ;
11. Considérant, d'autre part, que le requérant allègue qu'il n'aurait pas eu connaissance de cette décision et que son état de santé nécessite un délai d'organisation pour son départ ; que cependant, d'une part, M. B...a bien reçu notification de la décision susvisée alors d'ailleurs qu'en tout état de cause les conditions de la notification d'une décision administrative sont sans incidence sur sa légalité ; que, d'autre part, sur le second point, le requérant n'apporte aucune précision permettant d'apprécier la portée de ses allégations ; que ces moyens doivent donc être écartés ;
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
12. Considérant que M. B...n'ayant pas démontré l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français, il n'est pas fondé à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de cette mesure d'éloignement à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi ; que, par ailleurs, si M. B...soutient qu'il n'a pas été interrogé sur les risques auxquels il serait exposé en cas de retour au Pakistan, il ressort des termes de l'arrêté contesté que le préfet de police a examiné la situation de l'intéressé au regard des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que ces moyens doivent donc être écartés ;
Sur la décision portant interdiction de retourner sur le territoire français :
13. Considérant, d'une part, qu'ainsi qu'il vient d'être dit, M. B...n'ayant pas démontré l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français, il n'est pas fondé à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de cette mesure d'éloignement à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant interdiction de retourner sur le territoire français ;
14. Considérant, d'autre part, que si le requérant mentionne le fait qu'il a dû vendre ses terres et recourir au service d'un passeur, qu'il se serait fait voler ses documents d'identité et que son état de santé serait précaire, ces circonstances, à supposer qu'elles soient établies, ne constituent pas des motifs propres à faire obstacle au prononcé de la mesure d'interdiction au regard des dispositions de l'article L. 511-1 III du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté ;
15. Considérant, enfin, que les autres moyens d'annulation pour lesquels le requérant renvoie la Cour à ses précédents développements dans sa requête introductive d'instance devant le Tribunal administratif de Paris, doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux retenus par le premier juge ;
16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du préfet de police du 12 mars 2018 ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 13 novembre 2018, à laquelle siégeaient :
- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
- M. Niollet, président assesseur,
- M. Pagès, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 27 novembre 2018.
Le rapporteur,
D. PAGES
Le président,
O. FUCHS TAUGOURDEAU
Le greffier,
T. ROBERT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 18PA01009