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21/11/2018 | FRANCE | N°17PA03984

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 21 novembre 2018, 17PA03984


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Fare Tony a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie Française de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt foncier sur les propriétés bâties et de contribution des patentes ainsi que des pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie, d'une part, au titre des années 2012, 2013 et 2014, d'autre part au titre de l'année 2015.

Par un jugement n° 1700001, 1700002 du 29 septembre 2017, le Tribunal administratif de la Polynésie Française a rejeté se

s demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 28 décembre 2017...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Fare Tony a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie Française de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt foncier sur les propriétés bâties et de contribution des patentes ainsi que des pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie, d'une part, au titre des années 2012, 2013 et 2014, d'autre part au titre de l'année 2015.

Par un jugement n° 1700001, 1700002 du 29 septembre 2017, le Tribunal administratif de la Polynésie Française a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 28 décembre 2017, La SCI Fare Tony, représentée par

Me Arcus Usang avocat, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1700001-170002 du 29 septembre 2017 du Tribunal administratif de la Polynésie Française ;

2°) de prononcer la décharge des droits supplémentaires, intérêts, pénalités mis à sa charge au titre des impôts foncier et de la contribution des patentes pour les années 2012 à 2015 ;

3°) de mettre à la charge de la Polynésie française le versement de la somme

de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

- le vérificateur a procédé non pas à une taxation contradictoire mais à une taxation d'office dès lors qu'il a estimé d'office la valeur locative des places de parking en les considérant toutes comme faisant l'objet d'un bail verbal mensuel : il a méconnu les droits de la défense ; ce faisant il a méconnu les articles LP 224-1 et LP. 224-3 du code des impôts qui précisent les méthodes de détermination des valeurs locatives ;

- la Polynésie française n'est pas compétente pour procéder à la liquidation et au recouvrement de la taxe sur la valeur locative des locaux professionnels (TVLLP) et les centimes additionnels perçus au bénéfice de la commune de Papeete et de la chambre de commerce, d'industrie, des services et des métiers (CCISM) ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne l'impôt foncier :

- l'administration ne pouvait estimer la valeur locative des places de stationnement comme elle l'a fait en retenant un montant de loyer qui n'existe pas et aurait dû appliquer la méthode d'évaluation directe ;

- c'est à tort et en méconnaissance de l'article LP 221-1 du code des impôts que les places de parking ont été assujetties à la taxe foncière alors que cet article, contrairement à l'article 1381 du code général des impôts, ne prévoit pas l'assujettissement à l'impôt foncier des places de parking ;

En ce qui concerne la contribution des patentes :

- n'étant pas assujettie à l'impôt foncier au titre des places de parking, elle ne peut l'être en matière de contribution des patentes ;

En ce qui concerne les centimes additionnels :

- s'agissant des centimes additionnels à la contribution des patentes, elle entend se prévaloir de la décision rendue par la cour administrative d'appel de Paris le 8 juillet 2016 sous

le N° 14PA01877 ;

- ces centimes additionnels ne pouvaient lui être appliqués, dès lors que le texte relatif aux centimes additionnels a été adopté par une commission des patentes qui n'était pas compétente pour ce faire ;

- s'agissant des centimes additionnels perçus au profit de la CCISM, la délibération

n° 83-178 du 4 novembre 1983 déterminant le maximum des centimes additionnels perçus au profit de la CCISM a été adoptée par la commission permanente en vertu d'une délégation de pouvoirs accordée par une délibération n° 83-97 du 2 juin 1983 du 2 juin 1983, laquelle n'a pas été rendue exécutoire dès lors que la délégation dont bénéficiait M. A...était irrégulière et ne l'autorisait pas à prononcer le " rendu exécutoire " à la place du Haut-commissaire ;

- si une procédure d'urgence a été mise en oeuvre, la commission permanente devait être saisie sur proposition du Conseil de gouvernement, et ce, en application de l'alinéa 2 de l'article 43 de la loi n° 77-772 du 12 juillet1977 relative à l'organisation de la Polynésie française ;

- elle entend se prévaloir de la décision rendue par la cour administrative d'appel de Paris le 8 juillet 2016 sous le N° 14PA01877 ;

- il appartient à la Polynésie française d'apporter la preuve que le dossier des centimes additionnels a été soumis à l'assemblée territoriale, de caractériser objectivement l'urgence et d'établir que le conseil du gouvernement a statué sur l'urgence ; en l'état, l'arrêté du 26 février 2001 fixant le montant des centimes additionnels est entaché d'incompétence ;

- S'agissant des centimes additionnels de la commune de Papeete, la délibération du conseil municipal de la commune de Papeete n° 77-25 du 29 décembre 1977 fixant les centimes additionnels sur la contribution des patentes n'a pas été autorisée par un texte adéquat ; M. B...n'était pas compétent pour l'approuver ;

- l'arrêté n° 3005 BAC du 20 septembre 1972 fixant le maximum des centimes additionnels aux contributions locales votés par le conseil municipal est entaché d'incompétence car la fixation des taux plafonds des centimes additionnels nécessitait au minimum un décret, et son signataire ne disposait pas d'une délégation valable ;

- la loi du 2 février 1995 n'a validé les centimes additionnels, en tant que leur légalité était contestée par le moyen tiré de ce que l'autorité ayant pris l'arrêté du 20 septembre 1972 n'était pas compétente pour déterminer la nature des contributions locales correspondantes, que pour les années 1972 à 1994 ;

En ce qui concerne la TVLLP :

- la délibération n° 3 du 11 janvier 1966 instituant sur la commune de Papeete la taxe sur la valeur locative des locaux professionnels est illégale à défaut d'avoir mentionné dans le corps du texte le visa du chef du service de l'administration générale des finances ;

- la commission permanente n'est pas compétente pour adopter les centimes additionnels.

Par un mémoire en défense enregistré le 5 mai 2018, la Polynésie française, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la société requérante au versement de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par ordonnance en date du 5 juin 2018 la clôture d'instruction a été fixée au 26 juin 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;

- la loi organique n° 96-312 du 12 avril 1996 ;

- la loi organique n° 97-1074 du 22 novembre 1997 ;

- la loi n° 71-1028 du 24 décembre 1971 ;

- la loi n° 77-772 du 12 juillet 1977 ;

- la loi n° 95-97 du 1er février 1995 ;

- la délibération n° 83-97 du 2 juin 1983 ;

- le code des impôts de la Polynésie française ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Appèche

- et les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public.

1. Considérant que la société civile immobilière (SCI) Fare Tony est propriétaire de l'ensemble immobilier Fare Tony situé au centre ville de Papeete, qui comprend des locaux nus à usage commercial, des locaux meublés à usage d'habitation et un parking payant de 120 places ; qu'elle a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française la décharge des impositions supplémentaires mises à sa charge au titre des années 2012 à 2015 à raison de la réintégration, dans ses bases d'imposition à l'impôt foncier et à la contribution des patentes, de la valeur locative du parc de stationnement qu'elle s'était abstenue de déclarer ; qu'elle relève appel du jugement

n°s 1700001, 1700002 en date du 29 septembre 2017 par lequel ce Tribunal a rejeté ses demandes ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant qu'aux termes de l'article LP 421-1 du code des impôts de la Polynésie française : " 1- (...) lorsque l'administration constate une insuffisance, une inexactitude, une omission ou une dissimulation dans les éléments servant de base au calcul des impôts, droits ou taxes dus en vertu du présent code, les rectifications correspondantes sont effectués suivant la procédure suivante. / 2 - L'administration fait connaître au contribuable la nature et les motifs des rectifications envisagées. / Elle l'invite à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la notification. (...) " ; qu'il résulte de l'instruction que la SCI Fare Tony a présenté, le 17 décembre 2015, ses observations après avoir été destinataire de notifications de redressements en date du 13 novembre 2015 concernant les années 2012 à 2014 et en date du 16 novembre 2015 concernant l'année 2015 ; qu'ainsi les rectifications en cause ont été opérées selon la procédure contradictoire et non, comme le soutient à tort la société requérante, qui ne peut à cet égard utilement invoquer les modalités de détermination de la valeur locative du parc de stationnement susmentionné retenues par le service fiscal, selon la procédure de taxation d'office ; que la SCI Fare Tony n'est pas fondée à soutenir qu'elle n'aurait pas bénéficié des garanties attachées à cette procédure et que les droits de la défense aurait été méconnus ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 140 de la loi organique du 27 février 2004 relative à l'autonomie de la Polynésie française : " Les actes de l'assemblée de la Polynésie française, dénommés "lois du pays", sur lesquels le Conseil d'Etat exerce un contrôle juridictionnel spécifique, sont ceux qui, relevant du domaine de la loi, soit ressortissent à la compétence de la Polynésie française, soit sont pris au titre de la participation de la Polynésie française aux compétences de l'Etat et interviennent dans les matières suivantes : (...) 3° Assiette, taux et modalités de recouvrement des impositions de toute nature " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'assemblée territoriale de Polynésie française est seule compétente pour fixer l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions territoriales ; que les centimes additionnels constituent, ainsi qu'il est rappelé au point 14, des contributions accessoires de l'imposition principale de la Polynésie française, qui est donc compétente pour établir les rôles d'imposition, nonobstant la suppression de la contribution territoriale en 2001 ; que, par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la Polynésie française ne pouvait légalement procéder à la liquidation et l'établissement des rôles d'imposition pour le compte de la commune de Papeete et de la chambre de commerce, de l'industrie, des services et des métiers ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne l'impôt foncier sur les propriétés bâties :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 221-1 du code des impôts de la Polynésie française : " L'impôt foncier est établi annuellement sur les propriétés bâties sises en Polynésie française. Il frappe également : / (...) / 2°) Toutes installations commerciales ou industrielles assimilables à des constructions (...). " ; qu'un espace aménagé à usage de parc de stationnement payant constitue une installation commerciale au sens de ces dispositions, dont la rédaction est suffisamment précise, cela alors même qu'elles n'énumèrent pas limitativement les installations concernées et ne mentionnent pas expressément les parcs de stationnement ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article LP 225-2 du code des impôts de la Polynésie française : " (...) La valeur locative est déterminée au moyen des baux authentiques ou des locations verbales passées dans les conditions normales. En l'absence d'actes de l'espèce, la valeur locative est déterminée soit par la méthode par comparaison, soit par la méthode d'évaluation directe. La méthode de l'évaluation directe est mise en oeuvre selon la procédure suivante : / - évaluation de la valeur vénale foncière du bien ; / - détermination du taux d'intérêt, pour chaque nature de propriété dans la région considérée ; / - application du taux d'intérêt à la valeur vénale. (...). "

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les places de stationnement du parc de stationnement en cause exploité par la SCI Fare Tony sont, soit louées par abonnements mensuel, avec des tarifs différents selon que l'abonné est ou non un locataire de l'immeuble, soit louées à l'heure ; que ces modalités constituent des locations verbales passées dans des conditions normales au sens de l'article LP 225-2 du code des impôts de la Polynésie française ; que nonobstant ces différentes modalités d'occupation des places de stationnement, le vérificateur a pu régulièrement, sans recourir à une méthode alternative, retenir, pour chacune des places, lesquelles présentent des caractéristiques physiques analogues, une valeur locative correspondant au montant hors taxe de l'abonnement mensuel le plus bas ; que, par suite, la SCI Fare Tony n'est pas fondée à se prévaloir de l'expertise qu'elle a fait réaliser afin de déterminer la valeur locative du parc de stationnement par la méthode d'évaluation directe ;

En ce qui concerne la contribution des patentes :

7. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus au point 4 que la société requérante n'est pas fondée à soutenir qu'elle n'était pas assujettie à l'impôt foncier au titre du parc de stationnement qu'elle exploite et, qu'en conséquence, elle ne pouvait l'être en matière de contribution des patentes ; qu'en se bornant à invoquer ce moyen, elle ne conteste pas utilement la valeur locative retenue pour l'établissement du droit proportionnel de la contribution des patentes, identique à celle retenue en matière d'impôt foncier mentionnée ci-dessus;

En ce qui concerne la taxe sur la valeur locative des locaux professionnels des communes :

8. Considérant, que la SCI Fare Tony fait valoir que la délibération du 11 janvier 1966 du conseil municipal de Papeete, qui institue sur le territoire communal une taxe sur la valeur locative des locaux à usage professionnel, est illégale faute de viser l'avis du chef du service d'administration générale et des finances qui, en vertu de l'article 47§14 du décret du 20 mai 1890 modifié par l'article 1er du décret du 5 aout 1939, aurait dû être recueilli préalablement à son adoption ; que, cependant, la délibération du 11 janvier 1966 a été approuvée par le gouverneur, et l'avis du chef du service d'administration générale et des finances, qui en l'absence de toute indication contraire, est réputé avoir été recueilli par le gouverneur, n'avait, en tout état de cause, pas à être visé dans la délibération en litige ;

En ce qui concerne les centimes additionnels :

S'agissant des centimes additionnels à la contribution des patentes perçus au profit de la chambre de commerce, d'industrie, des services et des métiers :

9. Considérant qu'aux termes de l'article 43 de la loi du 12 juillet 1977 relative à l'organisation de la Polynésie française : " L'assemblée territoriale élit chaque année en son sein une commission permanente (...). / La commission permanente règle les affaires qui lui sont renvoyées par l'assemblée territoriale dans la limite de la délégation qui lui est consentie. Elle peut en cas d'urgence, sur proposition du conseil du gouvernement, décider, par délibération, sous réserve des dispositions de l'article 48, l'ouverture de crédits supplémentaire et des prélèvements sur la caisse de réserve. (...) " ; qu'aux termes de l'article 1er de la délibération du 2 juin 1983 portant délégation de pouvoirs de l'assemblée territoriale à sa commission permanente : " (...) la commission permanente est habilitée à régler les affaires en instance à l'assemblée territoriale et figurant à l'annexe ci-jointe. " ; qu'aux termes de l'article 2 de la même délibération : " De plus, la commission permanente de l'assemblée territoriale est habilitée à régler : / a) les affaires urgentes soumises à l'assemblée territoriale (...) " ; que cette délibération a été régulièrement rendue exécutoire par un arrêté du haut-commissaire de la République du 10 juin 1983 publié au journal officiel de la Polynésie française du 30 juin suivant ; qu'en effet, M.A..., signataire de cet arrêté, alors chargé des fonctions de secrétaire général, bénéficiait, conformément aux dispositions de l'article 63 de la loi du 12 juillet 1977, d'une délégation générale et permanente pour signer tous les actes et arrêtés au nom du haut-commissaire, en vertu d'un arrêté du 17 janvier 1983 publié au journal officiel de la Polynésie française du 4 février suivant ;

10. Considérant, en premier lieu, que la société requérante soutient que la commission permanente n'était pas compétente pour prendre la délibération du 4 novembre 1983 afin de déterminer, en urgence, le montant maximum des centimes additionnels aux patentes perçus au profit de la CCISM ; que, d'une part, elle fait valoir que ladite commission aurait dû être saisie sur proposition du Conseil de gouvernement en application des dispositions du 2ème alinéa de l'article 43 précité applicables en cas d'urgence ; que toutefois, la procédure prévue par les dispositions de cet alinéa ne visent que les cas d'urgence nécessitant l'ouverture de crédits supplémentaires ou des prélèvements sur la caisse de réserve, et non le cas dans lequel a été adoptée ladite délibération ; que d'autre part, si la SCI requérante se prévaut d'un arrêt n° 14PA01877 de la Cour de céans, en date du 8 juillet 2016, elle ne peut utilement le faire dès lors que cet arrêt a été rendu dans un litige ayant un objet différent et opposant la Polynésie française à un autre contribuable et n'est, par suite, pas revêtu, à son égard, de l'autorité de la chose jugée ;

11. Considérant, par ailleurs, qu'il résulte du procès verbal de la séance du 4 novembre 1983 de la commission permanente, produit devant la Cour, que c'est en application du a ) de l'article 2 de la délibération n° 83-97 du 2 juin 1983 portant délégation de pouvoirs de l'assemblée territoriale à sa commission permanente que la délibération du 4 novembre 1983 déterminant le maximum des centimes additionnels perçus au profit de la chambre de commerce, de l'industrie, des services et des métiers de la Polynésie a été adoptée par la commission permanente, justifiée par l'urgence invoquée en début de séance sur ce point, d'ailleurs adoptée à l'unanimité par ses membres ; qu'il ne résulte pas de la délibération 2 juin 1983 que celle-ci aurait entendu réserver aux seules affaires courantes la procédure d'urgence prévue par son article 2 a ) ; que par suite, et en l'absence, en tout état de cause, de tout élément permettant de faire douter de ce que la fixation du maximum des centimes additionnels constituait une affaire urgente dont l'assemblée avait saisie la commission permanente, cette dernière a pu légalement procéder, par sa délibération du 4 novembre 1983, à la fixation de ce maximum ;

12. Considérant, en second lieu, que contrairement à ce que soutient la société requérante, le conseil des ministres est habilité à fixer le montant des centimes additionnels dans la limite du maximum fixé par la délibération du 4 novembre 1983 ; que par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté du 26 février 2001 fixant, dans le respect du montant maximum fixé par une délibération de la commission permanente de l'assemblée territoriale de la Polynésie française du 4 novembre 1983, à 20 % le plafond des centimes additionnels perçus au profit de la chambre de commerce, de l'industrie, des services et des métiers aurait été pris par une autorité incompétente, doit être écarté comme non fondé ;

S'agissant des centimes additionnels versés à la commune de Papeete :

13. Considérant en premier lieu, qu'aux termes de l'article 4 de la loi organique susvisée du 22 novembre 1997 : " Sous réserve des décisions de justice devenues définitives, les impositions et taxes perçues par les communes et mentionnées par le décret du 5 août 1939 sont validées en tant que leur régularité serait contestée sur le fondement de l'absence de base légale des délibérations communales ayant institué lesdites impositions et taxes. (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la loi du 24 décembre 1971 relative à la création et à l'organisation des communes dans le territoire de la Polynésie française, dans sa rédaction issue de l'article 3 de la loi organique du

22 novembre 1997 et maintenu en vigueur par l'ordonnance n° 2007-1434 du 5 octobre 2007 : " Les recettes de la section de fonctionnement du budget communal se composent : / (...) / 2° Du produit des centimes additionnels aux contributions locales votés par le conseil municipal dans la limite du maximum fixé par arrêté du gouverneur après avis du conseil de gouvernement (...) / 12° Généralement, du produit des contributions, taxes, droits et de toutes les ressources annuelles et permanentes, y compris les taxes énumérées au décret du 5 août 1939, étant précisé que la faculté d'instituer lesdites taxes est étendue à l'ensemble des communes de la Polynésie française (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que la SCI Fare Tony n'est fondée à soutenir ni que les communes de Polynésie française n'étaient pas compétentes pour instituer les taxes énumérées par le décret du 5 août 1939, ni que la fixation du maximum des centimes additionnels relevait d'un décret ;

14. Considérant que les centimes additionnels à la contribution des patentes et de l'impôt foncier votés par les communes constituent une contribution calculée en fonction du montant de l'impôt territorial, la commune n'ayant d'autre pouvoir que celui de fixer leur taux, dans la limite d'un plafond ;

15. Considérant qu'il résulte des termes de la délibération du Conseil municipal de Papeete du 29 décembre 1977, prise sur le fondement de la loi susvisée du 24 décembre 1971, que la commune a décidé la perception de 50 centimes additionnels ordinaires aux principaux de l'impôt foncier sur les propriétés bâties, et de 80 centimes additionnels ordinaires aux principaux de la contribution des patentes, et ainsi fixé le taux des centimes additionnels, en application des

dispositions de l'article 8 de cette loi, à un niveau n'excédant pas le maximum déterminé par l'arrêté n° 3005 BAC du 20 septembre 1972 ; que la société requérante ne peut utilement soutenir que cet arrêté gubernatorial ne pouvait valablement autoriser les communes à percevoir cette imposition, dès lors que cet arrêté, qui a été pris pour l'application de la loi du 24 décembre 1971, ne constitue pas la base légale des impositions en litige ; qu'en outre, ainsi qu'il a été dit, les dispositions de l'article 8 de la loi du 24 décembre 1971, dans sa version issue de la loi n°97-1074 du 22 novembre 1997, maintenu en vigueur par l'ordonnance n° 2007-1434 du 5 octobre 2007, autorisent l'ensemble des communes de la Polynésie française à percevoir ces impositions, et ne subordonnent pas à l'instauration préalable d'un plafond pour les centimes additionnels, la faculté conférée aux communes d'établir lesdites impositions ; que dès lors, la circonstance, à la supposer avérée, que l'arrêté du 20 septembre 1972 ait été pris par une autorité incompétente est sans incidence sur le bien-fondé des impositions litigieuses afférentes aux années 2012, 2013 et 2014 ; que par suite, le moyen doit être écarté ;

16. Considérant, qu'ainsi que l'ont relevé les juges de première instance, M. B..., chef de la subdivision administrative des Iles-du-Vent, chargé de la tutelle des communes de cette subdivision en vertu d'un arrêté du gouverneur du 5 août 1977 publié au journal officiel de la Polynésie française du 26 novembre suivant, avait délégation pour approuver, au nom du haut-commissaire, la délibération susmentionnée n° 77-25 du 29 décembre 1977 ;

17. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SCI Fare Tony n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté ses demandes ; que les conclusions de la requête tendant à l'annulation du jugement et à la décharge des impositions litigieuses doivent, par suite, être rejetées ; qu'il en va de même, par voie de conséquence, de celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Polynésie française n'ayant pas dans la présente instance la qualité de partie perdante ; que sur le fondement de ces dispositions, il y a lieu de mettre à la charge de la SCI Fare Tony une somme de 1 500 euros à verser à la Polynésie française ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SCI Fare Tony est rejetée.

Article 2 : La SCI Fare Tony versera une somme de 1 500 euros à la Polynésie française sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à SCI Fare Tony et au gouvernement de la Polynésie française.

Délibéré après l'audience du 7 novembre 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Appèche, président assesseur,

- M. Magnard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 novembre 2018.

Le rapporteur,

S. APPECHELe président,

I. BROTONS

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au ministre des Outre-mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA03984


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA03984
Date de la décision : 21/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Sylvie APPECHE
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : SEP UCJ AVOCATS ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 27/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-11-21;17pa03984 ?
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