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19/11/2018 | FRANCE | N°18PA01409

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 19 novembre 2018, 18PA01409


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 8 mars 2018 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit.

Par un jugement n° 1801855 du 16 mars 2018, le Tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté attaqué, et a enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de procéder au réexamen de la situation de M.A..., dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la C

our :

Par une requête, enregistrée le 26 avril 2018, le préfet de la Seine-Saint-Denis dem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 8 mars 2018 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit.

Par un jugement n° 1801855 du 16 mars 2018, le Tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté attaqué, et a enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de procéder au réexamen de la situation de M.A..., dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 26 avril 2018, le préfet de la Seine-Saint-Denis demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Melun n° 1801855 du 16 mars 2018 ;

2°) de confirmer la légalité de l'arrêté du 8 mars 2018 ;

3°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Melun.

Il soutient que si M. A...présente des documents délivrés par les autorités italiennes au titre de la protection subsidiaire, il ne démontre pas la réalité de ce statut et les autorités italiennes ont refusé la réadmission de l'intéressé.

Une mise en demeure a été adressée le 5 juin 2018 à M. A...sur le fondement des dispositions de l'article R.612-3 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code pénal ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme d'Argenlieu,

- et les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., ressortissant malien, né le 12 novembre 1989, a été condamné par un jugement du Tribunal de grande instance de Bobigny du 15 juin 2017, à une peine d'emprisonnement pour des faits de détention, importation et trafic de produits stupéfiants, assortie d'une peine complémentaire d'interdiction du territoire français d'une durée de dix ans emportant de plein droit reconduite à la frontière. En exécution de la décision portant interdiction du territoire, le préfet de la Seine-Saint-Denis a, par un arrêté du 8 mars 2018, fixé le pays à destination duquel le requérant sera reconduit. Le préfet de la Seine-Saint-Denis relève appel du jugement n° 1801855 du 16 mars 2018 par lequel le Tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté du 8 mars 2018 fixant le pays à destination duquel M. A...serait reconduit et lui a enjoint de procéder au réexamen de la situation de l'intéressé.

Sur les conclusions en annulation :

2. Pour annuler l'arrêté du 8 mars 2018, le magistrat délégué a considéré qu'en désignant le Mali comme pays à l'égard duquel M. A...pouvait être reconduit, alors qu'il disposait des documents établissant que l'intéressé bénéficiait de la protection subsidiaire et d'un titre de séjour italien valable jusqu'au mois de mars 2021, le préfet de la Seine-Saint-Denis a entaché sa décision d'un défaut d'examen particulier de la situation du requérant. Il ressort toutefois des termes de l'arrêté du 8 mars 2018, que M. A...pouvait être éloigné à destination non seulement du pays dont il a la nationalité, mais également du pays lui ayant délivré un document de voyage en cours de validité. Dans ces conditions, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas exclu la possibilité pour

M. A...d'être reconduit vers l'Italie. Par suite, le préfet ne saurait être regardé comme ayant entaché sa décision d'un défaut d'examen de la situation du requérant. Le fait pour le préfet de la Seine-Saint-Denis, postérieur à la décision en litige, d'avoir pris contact avec le consulat du Mali étant sans incidence sur la légalité de l'arrêté du 8 mars 2018. Par suite, c'est à tort que le Tribunal administratif de Melun s'est fondé sur ce motif pour annuler la décision attaquée.

3. Il appartient toutefois à la Cour, saisi par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés par M.A....

4. Il ressort des termes de l'article L. 541-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La peine d'interdiction du territoire français susceptible d'être prononcée contre un étranger coupable d'un crime ou d'un délit est régie par les dispositions des articles 131-30, 131-30-1 et 131-30-2 du code pénal ci-après reproduites : " Art. 131-30 du code pénal. / " Lorsqu'elle est prévue par la loi, la peine d'interdiction du territoire français peut être prononcée, à titre définitif ou pour une durée de dix ans au plus, à l'encontre de tout étranger coupable d'un crime ou d'un délit. / " L'interdiction du territoire entraîne de plein droit la reconduite du condamné à la frontière, le cas échéant, à l'expiration de sa peine d'emprisonnement ou de réclusion. (...) ". Il ressort des termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration que : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ". Aux termes des articles L. 211-2 et L. 211-5 du même code : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de cette décision ".

5. Lorsqu'un arrêté fixant le pays de renvoi découle d'une décision de justice prononçant une interdiction de retour, il est pris isolément de l'obligation de quitter le territoire. Dans ces conditions, cet arrêté n'est pas soumis aux dispositions du livre V du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui régissent l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse propres à l'obligation de quitter le territoire français. Il entre, par conséquent, dans le champ d'application des dispositions de droit commun issues de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration.

6. Il résulte de ce qui précède que la décision contestée, qui est une décision individuelle défavorable, était donc soumise au respect d'une procédure contradictoire préalable. Or, il ne résulte d'aucune pièce du dossier qu'une telle procédure aurait été respectée. L'arrêté du 8 mars 2018 doit dès lors pour ce motif être annulé.

7. Il résulte de ce qui précède que le préfet n'est pas fondé à se plaindre que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté contesté.

DECIDE :

Article 1er : La requête du préfet de la Seine-Saint-Denis est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., au préfet de la Seine-Saint-Denis et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 5 novembre 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Even, président de chambre,

- Mme Hamon, président assesseur,

- Mme d'Argenlieu, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 novembre 2018.

Le rapporteur,

L. d'ARGENLIEU

Le président,

B. EVENLe greffier,

I. BEDR

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18PA01409


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA01409
Date de la décision : 19/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Lorraine D'ARGENLIEU
Rapporteur public ?: Mme ORIOL

Origine de la décision
Date de l'import : 27/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-11-19;18pa01409 ?
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