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23/10/2018 | FRANCE | N°16PA01665

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 23 octobre 2018, 16PA01665


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris :

1°) d'annuler les décisions par lesquelles La Poste a rejeté ses demandes préalables d'indemnisation et de nomination au grade de contrôleur avec effet rétroactif au 4 janvier 2010 ;

2°) d'enjoindre à La Poste de le nommer au grade de contrôleur avec effet rétroactif au 4 janvier 2010 ;

3°) de condamner La Poste à lui verser une indemnité de 80 000 euros.

Par un jugement n° 1410283/5-2 du 10 mars 2016, le Tribunal

administratif de Paris a partiellement fait droit à la demande de M. B...en condamnant La Poste à lu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris :

1°) d'annuler les décisions par lesquelles La Poste a rejeté ses demandes préalables d'indemnisation et de nomination au grade de contrôleur avec effet rétroactif au 4 janvier 2010 ;

2°) d'enjoindre à La Poste de le nommer au grade de contrôleur avec effet rétroactif au 4 janvier 2010 ;

3°) de condamner La Poste à lui verser une indemnité de 80 000 euros.

Par un jugement n° 1410283/5-2 du 10 mars 2016, le Tribunal administratif de Paris a partiellement fait droit à la demande de M. B...en condamnant La Poste à lui verser une somme de 6 000 euros, et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée par télécopie le 11 mai 2016, régularisée le 17 mai 2016 par la production de l'original, La Poste, représentée par MeD..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 10 mars 2016 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B...devant le Tribunal administratif de Paris ;

3°) de mettre à la charge de M. B...le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La Poste soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé en ce qui concerne la perte pour M. B..., d'une chance sérieuse de promotion par la voie du concours ;

- le jugement attaqué est entaché d'erreur de droit en ce qu'il retient l'existence d'une chance de promotion sans s'attacher à la valeur professionnelle de l'agent ;

- il est entaché de contradiction de motifs en ce qu'il retient à la fois que M. B...n'établit pas qu'il disposait de chances sérieuses d'accéder au grade de contrôleur par la voie de la liste d'aptitude, et qu'il aurait été privé d'une chance sérieuse d'accéder à une promotion ;

- il a à tort, accordé à M. B...une indemnité de 3 000 euros en réparation de la perte d'une chance sérieuse d'accéder à une promotion ;

- il a inexactement apprécié le préjudice moral en accordant à M. B...une indemnité de 3 000 euros ; ce préjudice et les troubles dans ses conditions d'existence ne pouvaient être évalués qu'entre 1 000 et 3 000 euros ;

- la créance correspondant au préjudice moral était atteinte par la prescription de l'article 2224 du code civil depuis le 19 juin 2013, lorsque M. B...a, le 24 octobre 2014, présenté sa demande devant le tribunal administratif.

La requête a été communiquée à M.B..., qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Une mise en demeure a été adressée le 12 décembre 2016, sur le fondement de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, à M.B....

Par une ordonnance du 2 mars 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au 20 mars 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;

- la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 ;

- le décret n° 72-503 du 23 juin 1972;

- le décret n° 90-1237 du 31 décembre 1990 ;

- le décret n° 2009-1555 du 14 décembre 2009 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Niollet,

- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public.

- et les observations de MeC..., pour La Poste.

1. Considérant que M. A...B...a intégré le service public des Postes et Télécommunications en 1990 au grade d'agent d'exploitation du service général à la suite d'un concours externe ; qu'à la suite des modifications des statuts des agents de La Poste, M. B...a choisi de conserver son grade de reclassement ; que, par lettre du 3 mars 2014, M. B...a demandé au président de La Poste de l'indemniser du préjudice de carrière qu'il estime avoir subi ; que sa demande a été rejetée par lettre du 17 mars 2014 ; qu'il a présenté le 24 mars 2014 un recours gracieux, resté sans réponse ; qu'il a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler les décisions de rejet de sa réclamation, de condamner La Poste à lui verser une somme de 80 000 euros en réparation de son préjudice financier et moral, et d'enjoindre à La Poste de le nommer au grade de contrôleur avec effet rétroactif au 4 janvier 2010 ; que, par un jugement du 10 mars 2016, le tribunal administratif a partiellement fait droit à sa demande en condamnant La Poste à lui verser une somme totale de 6 000 euros ; que La Poste fait appel de ce jugement ;

2. Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce que soutient La Poste, les premiers juges ont suffisamment motivé leur jugement en estimant que l'absence de concours interne à compter de 1993 a entraîné pour M. B...une perte d'une chance d'être promu par la voie du concours ; que le bien-fondé de cette appréciation est sans incidence sur la régularité de leur jugement ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'en se bornant à produire en première instance ses fiches de candidature à la liste d'aptitude au corps des contrôleurs de La Poste pour les années 2010 et 2011, M. B...n'établit pas qu'il aurait été privé d'une chance sérieuse d'être admis au concours interne, ni même qu'il se serait vraisemblablement présenté à ce concours ; que La Poste est donc fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris l'a condamnée à verser à M. B...une somme de 3 000 euros pour l'indemniser de sa perte de chance d'accéder à une promotion par cette voie ;

4. Considérant, en troisième lieu, que La Poste qui, en appel, ne conteste pas sérieusement ses fautes consistant à priver de manière générale les fonctionnaires " reclassés " de toute possibilité de promotion interne entre 1993 et 2009, ne fournit à la Cour aucun élément de nature à remettre en cause l'appréciation à laquelle les premiers juges se sont livrés en évaluant à 3 000 euros le préjudice moral subi par M. B...en raison de ces fautes ;

5. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 2224 du code civil, issu de l'article 1er de la loi du 17 juin 2008, visée ci-dessus : " Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. " ; qu'aux termes du II de l'article 26 de cette loi : " Les dispositions de la présente loi qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la présente loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure. " ;

6. Considérant que, M. B...n'ayant eu connaissance de l'étendue du préjudice qu'il a subi du fait des fautes commises par La Poste qu'à l'occasion de la publication du décret du 14 décembre 2009, visé ci-dessus ouvrant aux fonctionnaires " reclassés " une possibilité de promotion, La Poste n'est pas fondée à soutenir que la créance correspondant au préjudice moral était atteinte par la prescription lorsque M. B...a présenté sa demande d'indemnisation, puis, le 20 juin 2014, sa demande devant le tribunal administratif ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que La Poste est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris l'a condamnée à verser à M. B...une somme totale de 6 000 euros, et à demander que cette somme soit ramenée à 3 000 euros ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. B...la somme que La Poste demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La Poste est condamnée à verser à M. B...la somme de 3 000 euros.

Article 2 : Le jugement 1410283/5-2 du Tribunal administratif de Paris du 10 mars 2016 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de La Poste est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à La Poste et à M. A...B....

Délibéré après l'audience du 9 octobre 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- M. Pagès, premier conseiller.

Lu en audience publique le 23 octobre 2018.

Le rapporteur,

J-C. NIOLLETLe président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

P. TISSERAND

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

4

N° 16PA01665


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA01665
Date de la décision : 23/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Entrée en service - Concours et examens professionnels.

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Effets des annulations - Reconstitution de carrière.

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: M. Jean-Christophe NIOLLET
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : SCP GRANRUT AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 30/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-10-23;16pa01665 ?
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