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04/10/2018 | FRANCE | N°18PA00623

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 04 octobre 2018, 18PA00623


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté en date du 31 octobre 2017 par lequel le préfet de police a ordonné son transfert aux autorités suisses, responsables de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 1717449/8 du 29 novembre 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés le 22 février 2018 et le 25 juin 2018, M. A..., représenté par MeC..., deman

de à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1717449/8 du 29 novembre 2017 du Tribunal administr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté en date du 31 octobre 2017 par lequel le préfet de police a ordonné son transfert aux autorités suisses, responsables de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 1717449/8 du 29 novembre 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés le 22 février 2018 et le 25 juin 2018, M. A..., représenté par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1717449/8 du 29 novembre 2017 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de police du 31 octobre 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de l'admettre au séjour au titre de l'asile dans un délai de 24 heures à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 200 euros par jour de retard et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de lui délivrer, pendant cet examen, une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son avocate, Me C..., au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision attaquée est entachée d'une insuffisance de motivation et d'une absence d'examen sérieux de la situation de l'intéressé et qu'elle méconnaît les dispositions de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions des articles 5.4, 5.5 et 5.6 du règlement n° 604/2013 dès lors qu'il n'est pas démontré, en l'absence de mention du nom de l'agent, que l'entretien a été mené par une personne qualifiée et qu'il est impossible de s'assurer du respect de la finalité de l'entretien dès lors que ne peut être vérifiée la durée de cet entretien ni que l'autorité administrative a bien veillé à ce que le requérant comprenne correctement les informations qui lui ont été fournies.

Par des mémoires en défense enregistrés les 19 juin et 4 juillet 2018, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que M. A...est en fuite et que les moyens soulevés par lui ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 février 2018 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement et du Conseil du 26 juin 2013,

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- le code des relations entre le public et l'administration,

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991,

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

M. Lapouzade a présenté son rapport au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., de nationalité soudanaise, relève appel du jugement du 29 novembre 2017 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 31 octobre 2017 ordonnant son transfert aux autorités suisses, responsables de sa demande d'asile.

2. En premier lieu, aux termes de l'alinéa 2 de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Toute décision de transfert fait l'objet d'une décision écrite motivée prise par l'autorité administrative. " et aux termes de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration : " La motivation (...) doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".

3. La décision portant transfert de M. A...aux autorités suisses vise notamment le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013. Elle rappelle la date et le lieu de naissance du requérant et précise que l'attestation de demande d'asile en procédure Dublin a été remise à l'intéressé le 29 août 2017. La décision indique en particulier que les autorités suisses ont été saisies le 1er septembre 2017 d'une demande de reprise en charge sur le fondement des dispositions de l'article 18 1. d) du règlement (UE) n° 604/2013 et que ces autorités ont accepté dès le 4 juillet leur responsabilité concernant la demande d'asile de M. A.... La décision attaqué mentionne également que l'ensemble des éléments de fait et de droit caractérisant la situation de l'intéressé ne relève pas des dérogations prévues par les articles 3 paragraphe 2 et 17 du règlement (UE) n° 604/2013. Enfin, il ressort des mentions de l'arrêté attaqué que le préfet de police a examiné la situation de M. A... au regard des stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et en a conclu à l'absence de risque personnel de nature à constituer une atteinte grave au droit d'asile en cas de remise aux autorités de l'Etat responsable de la demande d'asile. L'arrêté contesté comporte ainsi l'énoncé suffisant des considérations de droit et de fait qui fondent la décision ordonnant son transfert aux autorités suisses et doit être regardé comme suffisamment motivé. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de ladite décision doit être écarté comme manquant en fait.

4. En deuxième lieu, il ne ressort ni des termes de l'arrêté contesté ni d'aucune autre pièce du dossier que le préfet de police n'aurait pas procédé à un examen sérieux de la situation personnelle de M. A... avant d'ordonner son transfert aux autorités suisses.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. /(...) 4 L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les États membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel. / 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. / 6. L'État membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. L'État membre veille à ce que le demandeur et/ou le conseil juridique ou un autre conseiller qui représente le demandeur ait accès en temps utile au résumé. ".

6. D'une part, il résulte de ces dispositions que les autorités de l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable doivent, afin d'en faciliter la détermination et de vérifier que le demandeur d'asile a bien reçu et compris les informations prévues par l'article 4 du même règlement, mener un entretien individuel avec le demandeur. Il ressort des pièces du dossier que M. A...a bénéficié d'un tel entretien le 29 août 2017 dans les locaux de la préfecture de police. L'intéressé ne fait état d'aucun élément laissant supposer que cet entretien ne se serait pas déroulé dans les conditions prévues par les dispositions précitées de l'article 5 du règlement (UE) n° 604-2013. Si le résumé de l'entretien individuel de M. A...ne comporte pas le nom et la qualité de l'agent qui a conduit l'entretien, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a été reçu à la préfecture de police. Dès lors que l'entretien de M. A...a été mené par une personne qualifiée au sens de l'article 5.5 du règlement du 26 juin 2013, l'absence d'indication de l'identité de l'agent ayant conduit l'entretien individuel n'a pas privé M. A...de la garantie tenant au bénéfice de cet entretien et à la possibilité de faire valoir toutes observations utiles.

7. D'autre part, il ressort du compte-rendu d'entretien que celui-ci s'est déroulé par le biais d'un interprète en langue arabe que l'intéressé a déclaré comprendre. M. A...a également déclaré, à la fin de cet entretien, en avoir compris tous les termes. En outre, il ressort des mentions du compte-rendu d'entretien et des pièces du dossier que le guide du demandeur d'asile ainsi que les brochures d'information A et B en langue arabe, contenant toutes les informations relatives à sa situation, lui ont été remis. Par suite, M. A...n'est pas fondé à soutenir que l'administration n'aurait pas veillé à ce qu'il ait pu comprendre les informations qui lui ont été fournies. Enfin, aucune disposition légale ou réglementaire n'oblige l'agent de la préfecture à mentionner sur le compte-rendu d'entretien la durée de celui-ci.

8. Il ressort de ce qui vient d'être dit aux points 5 à 7 du présent arrêt que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article 5 du règlement susvisé n° 604/2013 doit être écarté.

9. Il résulte de ce qui précède que les conclusions aux fins d'annulation présentées par

M. A...doivent être rejetées, ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction et présentées au titre des frais liés à l'instance.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 20 septembre 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Luben, président assesseur,

- Mme Guilloteau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 4 octobre 2018.

Le président assesseur,

I. LUBEN Le président rapporteur,

J. LAPOUZADE

Le greffier,

C. POVSELa République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 18PA00623


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA00623
Date de la décision : 04/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Jacques LAPOUZADE
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : PIERROT

Origine de la décision
Date de l'import : 09/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-10-04;18pa00623 ?
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