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26/09/2018 | FRANCE | N°17PA02769

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 26 septembre 2018, 17PA02769


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...Filipowicz a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler le compte rendu de son entretien professionnel établi le 21 mars 2016 au titre de l'année 2015 par le directeur territorial adjoint de la sécurité de proximité de Paris et d'enjoindre audit directeur de faire procéder à l'établissement d'un nouveau compte rendu d'entretien professionnel au titre de l'année 2015 et de supprimer toute mention à un entretien à mi-parcours.

Par un jugement n° 1607266/5-3 du 14 juin 2017, le Tri

bunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...Filipowicz a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler le compte rendu de son entretien professionnel établi le 21 mars 2016 au titre de l'année 2015 par le directeur territorial adjoint de la sécurité de proximité de Paris et d'enjoindre audit directeur de faire procéder à l'établissement d'un nouveau compte rendu d'entretien professionnel au titre de l'année 2015 et de supprimer toute mention à un entretien à mi-parcours.

Par un jugement n° 1607266/5-3 du 14 juin 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 7 août 2017, M. Filipowicz, représenté par Me B...C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1607266/5-3 du 14 juin 2017 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler le compte-rendu d'évaluation et la note chiffrée contestés devant ce tribunal ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de réexaminer son compte rendu d'évaluation en y apportant les rectifications demandées ;

4°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de supprimer, d'une part, la mention d'un entretien à mi-parcours et de préconisations, d'autre part, " les documents se rapportant à une précédente erreur manifeste d'appréciation " ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- son entretien d'évaluation aurait dû être conduit par sa supérieure hiérarchique directe ;

- il n'a pas été informé suffisamment à l'avance de la date fixée pour son entretien, en méconnaissance des dispositions de l'article 2 du décret n°2010-888 du 28 juillet 2010 qui prévoit un délai minimum de huit jours ; il a été convoqué trois heures avant son entretien ;

- le compte rendu d'évaluation fait référence à un entretien à mi-parcours et à des préconisations alors qu'aucun entretien à mi-parcours n'a eu lieu ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que, des retards, absences et négligences lui étant reprochés par sa supérieure hiérarchique directe, la note qui lui a été attribuée était justifiée, alors que ces griefs sont dépourvus de fondement et n'apparaissent nulle part dans l'entretien d'évaluation ;

- ce n'est que le 29 novembre 2016 qu'il a reçu communication d'une note de reproches établie le 3 juillet 2015 sur la base de faits qui, après enquête administrative, n'ont pu être établis et ont fait l'objet d'un classement sans suite ;

- l'absence d'atteinte des objectifs fixés n'est pas établie ; lesdits objectifs, indiqués de manière parcellaire et imprécise, ont bien été atteints.

La requête de M. Filipowicz a été transmise au ministre de l'intérieur qui, malgré la mise en demeure qui lui a été adressée le 2 novembre 2017, n'a pas produit d'observations devant la Cour.

Par une ordonnance du 6 mars 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 27 mars 2018

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983,

- le décret n° 2010-888 du 28 juillet 2010,

- l'arrêté du 6 juin 2006 portant règlement général d'emploi de la police nationale,

- le code de procédure pénale,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Appèche,

- et les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public.

1. Considérant que M. Filipowicz, commissaire de police, a été désigné par arrêté du procureur général près la Cour d'appel de Paris du 18 septembre 2014 en qualité d'officier remplaçant du ministère public près le tribunal de police de Paris ; qu'il a exercé, au cours de l'année 2015, à la direction de la sécurité de proximité de l'agglomération parisienne, les fonctions d'adjoint au chef de service chargé des services de l'officier du ministère public près le tribunal de police de Paris ; qu'après avoir en vain demandé au Tribunal administratif de Paris l'annulation de son compte rendu d'évaluation professionnelle établi le 21 mars 2016 au titre de l'année 2015, il relève appel du jugement de ce tribunal rejetant sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens invoqués par M. Filipowicz :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 17 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Les notes et appréciations générales attribuées aux fonctionnaires et exprimant leur valeur professionnelle leur sont communiquées. / Les statuts particuliers peuvent ne pas prévoir de système de notation " ; qu'aux termes de l'article 55 de loi du 11 janvier 1984 : " Par dérogation à l'article 17 du titre Ier du statut général, l'appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires se fonde sur un entretien professionnel annuel conduit par le supérieur hiérarchique direct " ; qu'aux termes des dispositions de l'article 2 du décret susvisé du 28 juillet 2010 pris pour l'application de ces dispositions : " Le fonctionnaire bénéficie chaque année d'un entretien professionnel qui donne lieu à compte rendu. / Cet entretien est conduit par le supérieur hiérarchique direct. / La date de cet entretien est fixée par le supérieur hiérarchique direct et communiquée au fonctionnaire au moins huit jours à l'avance " ;

3. Considérant, en premier lieu, qu'il est constant que M. Filipowicz n'a pas bénéficié au titre de l'année 2015, d'un entretien professionnel conduit par sa supérieure hiérarchique directe ; qu'il soutient que celle-ci s'est bornée à lui remettre un compte rendu d'évaluation prérempli par ses soins en lui demandant d'y porter ses propres observations ; que le caractère tendu des relations prévalant entre M. Filipowicz et sa supérieure hiérarchique directe, et l'existence d'un litige pendant devant le tribunal administratif saisi par M. Filipowicz d'un recours contre des décisions prises par cette dernière, et notamment celle de ne pas proposer au procureur général près la Cour d'appel de Paris le renouvellement de la désignation de l'intéressé en qualité d'officier suppléant du ministère public devant le tribunal de police de Paris, ne pouvaient légalement dispenser l'administration de l'obligation de faire bénéficier son agent d'un entretien annuel d'évaluation conduit par sa supérieure hiérarchique directe ;

4. Considérant, en deuxième lieu, et au surplus, que M. Filipowicz soutient, comme il le faisait, sans être contredit, devant le tribunal administratif, que sa supérieure hiérarchique directe ne lui a transféré que le lundi 21 mars 2016 à 12 h 55 un courriel reçu du directeur territorial adjoint de la sécurité de proximité de Paris, dans lequel celui-ci lui demandait de lui " envoyer le sieur Filipowicz ", le même jour " vers 16 h aux fins de notification de sa bonne note " ; qu'à supposer, qu'en dépit des termes et du ton de ce courriel, le directeur territorial adjoint ait entendu mener lui-même un véritable entretien d'évaluation de M. Filipowicz et ait pu valablement se substituer au supérieur hiérarchique direct de l'intéressé, M. Filipowicz est, en tout état de cause, fondé à soutenir que, la date et l'heure de cet entretien ne lui ayant été communiquées que trois heures auparavant, le délai minimal prévu par les dispositions susénoncées de l'article 2 du décret du 28 juillet 2010 ont été méconnues et qu'il a, de ce fait, été privé d'une garantie reconnue aux agents publics ; que ce vice de procédure, susceptible en l'espèce d'avoir eu une influence sur le contenu de la décision contestée, est de nature à entacher celle-ci d'illégalité et à justifier son annulation ainsi que celle du jugement attaqué ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Considérant que la présente décision implique seulement, eu égard à ses motifs, que l'administration procède à nouveau, dans le respect des règles de compétence et de procédure, à l'évaluation de M. Filipowicz au titre de l'année 2015 et à l'établissement d'un nouveau compte rendu ; qu'il y a lieu d'enjoindre au ministre de l'intérieur d'y faire procéder dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Filipowicz est fondé à obtenir que soient annulés le jugement et la décision attaqués et qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur de faire procéder, dans un délai de trois mois suivant la notification du présent arrêt et après entretien, à l'établissement d'un nouveau compte-rendu d'évaluation professionnelle au titre de l'année 2015 ; qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1607266/5-3 du Tribunal administratif de Paris du 14 juin 2017 et le compte-rendu d'évaluation professionnelle de M. Filipowicz au titre de l'année 2015 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de faire procéder à nouveau, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, à l'évaluation de M. Filipowicz au titre de l'année 2015 et à l'établissement d'un compte rendu.

Article 3 : L'Etat versera à M. Filipowicz une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus de la requête de M. Filipowicz est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... Filipowicz et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 5 septembre 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Appèche, président assesseur,

- M. Magnard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 septembre 2018.

Le rapporteur,

S. APPECHELe président,

I. BROTONS

Le greffier,

P. LIMMOIS

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA02769


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA02769
Date de la décision : 26/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Sylvie APPECHE
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : BOISGARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-09-26;17pa02769 ?
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