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10/07/2018 | FRANCE | N°18PA00170

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 10 juillet 2018, 18PA00170


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 9 février 2017 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1707931 du 25 septembre 2017, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 janvier 2018, MmeA..., représentée

par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1707931 du 25 septembre 2017 du trib...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 9 février 2017 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1707931 du 25 septembre 2017, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 janvier 2018, MmeA..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1707931 du 25 septembre 2017 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 9 février 2017 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en vertu de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, celui-ci s'engageant à renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Elle soutient que :

- le tribunal a commis une double erreur de fait ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur de fait, dès lors qu'elle établit sa présence en France depuis décembre 2010 ;

- l'arrêté attaqué a méconnu l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au regard des critères définis par la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 14 juin 2018, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près du tribunal de grande instance de Paris du 4 décembre 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Nguyên Duy a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que MmeA..., ressortissante ivoirienne née le 31 décembre 1976, a sollicité un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 9 février 2017, le préfet de police a opposé un refus à sa demande, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite ; que Mme A... relève régulièrement appel du jugement du 25 septembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que, dans l'hypothèse où les premiers juges auraient commis, comme le soutient la requérante, des erreurs de fait dans des conditions susceptibles d'affecter la validité de la motivation du jugement dont le contrôle est opéré par l'effet dévolutif de l'appel, ces erreurs resteraient, en tout état de cause, sans incidence sur la régularité du jugement ;

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

3. Considérant que Mme A... soutient que le préfet de police a commis une erreur de fait en indiquant qu'elle est entrée sur le territoire français le 20 février 2013 alors qu'elle y est entrée le 16 décembre 2010 ; que si l'intéressée a indiqué sur sa fiche de salle être entrée en France le 20 février 2013, date qui correspondrait à la date de récépissé de sa première demande de titre de séjour, elle soutient que c'est sur les conseils de l'agent de la préfecture et produit de nombreuses pièces d'origine médicale, telles que des ordonnances, des confirmations de rendez-vous médicaux, des comptes rendus d'examens et des documents relatifs à l'aide médicale d'Etat, qui établissent sa présence en France en 2012 et dès le premier semestre 2011, à tout le moins depuis le 17 mars 2011, ainsi qu'en attestent des résultats d'analyses biologiques ; qu'ainsi, la requérante est fondée à soutenir que la décision attaquée est entachée d'une erreur de fait ;

4. Considérant, toutefois, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ; qu'en présence d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-14, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et, à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ; que, dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifie d'une promesse d'embauche ou d'un contrat de travail ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi ; qu'en effet, il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si cette promesse d'embauche ou ce contrat de travail, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour ;

5. Considérant que, pour demander l'annulation de l'arrêté attaqué, la requérante fait valoir qu'elle réside en France depuis le mois de décembre 2010, qu'elle a travaillé sans interruption du 1er mars 2014 au 30 septembre 2015 en qualité d'aide à domicile pour des personnes âgées et qu'elle bénéficie d'une promesse d'embauche à plein temps en date du 6 juin 2017, pour un salaire brut mensuel de 1 480,27 euros ; qu'elle se prévaut également de sa bonne intégration sociale et professionnelle par la production de quatre attestations de proches et du rapport d'une assistante sociale ; que si, ainsi qu'il a été dit, le préfet de police a considéré à tort que l'intéressée n'établissait pas sa résidence en France depuis fin 2010, il ressort des pièces du dossier qu'il aurait néanmoins pris la même décision s'il n'avait pas commis une telle erreur de fait, dès lors que les circonstances que Mme A... résiderait en France depuis sept ans à la date de la décision attaquée et qu'elle y aurait travaillé sont insuffisantes pour permettre de considérer, compte tenu notamment de l'absence de spécificité de son activité professionnelle et de sa faible durée, que l'intéressée, qui n'est au demeurant pas dépourvue d'attaches dans son pays d'origine où réside sa fille, ferait état de motifs exceptionnels justifiant qu'il lui soit délivré un titre de séjour " salarié " sur le fondement de l'article L. 313-14 précité ;

6. Considérant que Mme A...ne peut utilement se prévaloir à l'encontre de l'arrêté attaqué des énonciations de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière, dès lors que celles-ci constituent uniquement des orientations générales que le ministre de l'intérieur a pu adresser aux préfets pour les éclairer dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation ;

7. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en refusant de délivrer un titre de séjour à MmeA..., le préfet de police aurait, eu égard à la gravité des conséquences de cette décision, commis une erreur manifeste d'appréciation ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. " ; que si Mme A...soutient qu'elle encourt des risques en cas de retour en Côte d'Ivoire en raison de son appartenance au parti politique de l'ancien président Laurent Gbagbo, la requérante, qui n'indique pas avoir déposé de demande d'asile, ne produit aucune pièce permettant d'établir qu'elle serait personnellement exposée à des risques pour son intégrité ou sa liberté en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées, qui ne peut en tout état de cause être utilement invoqué qu'à l'encontre de l'arrêté attaqué qu'en tant qu'il fixe le pays de renvoi, doit être écarté ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les frais liés au litige :

10. Considérant que les dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que le conseil de Mme A...demande au titre des frais que celle-ci aurait exposés si elle n'avait été bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme B...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur. Copie en sera délivrée par le préfet de police.

Délibéré après l'audience du 21 juin 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente de chambre,

- M. Legeai, premier conseiller,

- Mme Nguyên Duy, premier conseiller,

Lu en audience publique le 10 juillet 2018.

Le rapporteur,

P. NGUYEN DUY La présidente,

S. PELLISSIER Le greffier,

A. LOUNISLa République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18PA00170


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18PA00170
Date de la décision : 10/07/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: Mme Pearl NGUYÊN-DUY
Rapporteur public ?: M. ROMNICIANU
Avocat(s) : LOIRE-HENOCHSBERG

Origine de la décision
Date de l'import : 17/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-07-10;18pa00170 ?
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