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10/07/2018 | FRANCE | N°17PA02331

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 10 juillet 2018, 17PA02331


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...C...a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française :

1°) de lui donner acte de ce qu'il entend maintenir sa demande de résiliation de la convention conclue le 19 mai 1980 avec la Polynésie française ;

2°) de condamner la Polynésie française à lui verser des indemnités de 240 770 156 F CFP au titre de son " manque à gagner " et de 204 000 000 F CFP en réparation de son " préjudice d'immobilisation ", outre une demande au titre de l'article L. 761-1 du code de justic

e administrative.

Par un jugement n° 1600458 du 11 avril 2017, le Tribunal administratif...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...C...a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française :

1°) de lui donner acte de ce qu'il entend maintenir sa demande de résiliation de la convention conclue le 19 mai 1980 avec la Polynésie française ;

2°) de condamner la Polynésie française à lui verser des indemnités de 240 770 156 F CFP au titre de son " manque à gagner " et de 204 000 000 F CFP en réparation de son " préjudice d'immobilisation ", outre une demande au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1600458 du 11 avril 2017, le Tribunal administratif de la Polynésie française lui a donné acte de ce qu'il entend maintenir sa demande de résiliation de la convention conclue le 19 mai 1980 avec la Polynésie française pour le reboisement de 15 ha de la terre Aaraeo et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 11 juillet 2017, et un mémoire en réplique, enregistré le 10 mai 2018, M.C..., représenté par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 11 avril 2017 du Tribunal administratif de la Polynésie française ;

2°) de prononcer la résiliation de la convention susvisée conclue le 19 mai 1980 avec la Polynésie française aux torts de celle-ci ;

3°) de condamner la Polynésie française à lui verser des indemnités de 240 770 156 F CFP au titre de son " manque à gagner " et de 204 000 000 F CFP en réparation de son " préjudice d'immobilisation " ;

4°) de mettre à la charge de la Polynésie française une somme de 500 000 F CFP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges lui ont reproché de ne pas avoir démontré la perte de chance sérieuse d'obtenir des revenus de la terre alors que le fondement de ses demandes d'indemnisation est contractuel ;

- la violation des engagements de reboisement par la Polynésie française lui a occasionné un préjudice ;

- par suite, il est fondé, d'une part, à demander la résiliation de la convention conclue le 19 mai 1980 avec la Polynésie française aux torts de celle-ci, d'autre part, la condamnation de la Polynésie française à lui verser des indemnités de 240 770 156 F CFP au titre de son " manque à gagner " et de 204 000 000 F CFP en réparation de son " préjudice d'immobilisation ".

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 janvier 2018, la Polynésie française, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable dans la mesure où les conclusions tendant à la résiliation de la convention conclue le 19 mai 1980 avec la Polynésie française sont nouvelles en appel ;

- les moyens soulevés par M. C...ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 11 mai 2018, la clôture d'instruction a été reportée au 6 juin 2018 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;

- la délibération n° 13-1958 du 7 février 1958 sur le régime des eaux et forêts dans le territoire de la Polynésie française ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pagès,

- et les conclusions de M. Baffray, rapporteur public.

1. Considérant que par un acte transcrit le 21 mai 1985 à la conservation des hypothèques de Papeete, M. B...a vendu à M. C...une propriété d'un seul tenant de 58 ha incluant la terre Aaraeo au sujet de laquelle il avait conclu, le 19 mai 1980, une convention de reboisement dans le cadre de la politique de lutte contre l'érosion et d'amélioration du patrimoine forestier conduite par la Polynésie française sur le fondement des dispositions des articles 16 et suivants de la délibération 7 février 1958 sur le régime des eaux et forêts ; que M. C... a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française, d'une part, de lui donner acte de ce qu'il entend maintenir sa demande de résiliation de la convention conclue le 19 mai 1980 avec la Polynésie française, d'autre part, de condamner la Polynésie française à lui verser des indemnités de 240 770 156 F CFP au titre de son " manque à gagner " et de 204 000 000 F CFP en réparation de son " préjudice d'immobilisation " ; que M. C...relève appel du jugement du 11 avril 2017 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande et demande à la Cour la résiliation de la convention susvisée ;

Sur les conclusions tendant à la résiliation de la convention du 19 mai 1980 :

2. Considérant que la demande formée par M. C...devant le Tribunal administratif de la Polynésie française ne comportait pas de conclusions tendant à ce que le tribunal prononce la résiliation de la convention ou enjoigne à la Polynésie française de le faire, mais seulement à ce qu'il lui soit donné acte de ce qu'il entendait maintenir sa demande de résiliation faite devant l'administration ; que, par suite, la Polynésie française est fondée à soutenir que les conclusions tendant à la résiliation de la convention du 19 mai 1980 constituent des conclusions nouvelles en appel qui doivent être rejetées comme irrecevables ;

Sur les conclusions indemnitaires :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 4 de la convention conclue le 19 mai 1980 par M.B... : " (...) Les droits et obligations stipulés par la présente convention (...) constituent une servitude attachée aux immeubles et suivront ceux-ci entre les mains de leurs propriétaires successifs quel que soit le mode de transmission de la propriété : héritage, legs ou vente. / Toutefois, le propriétaire ou ses héritiers auront à tout moment la possibilité d'obtenir l'annulation de la présente convention et de toutes les charges qui y sont attachées. Ils seront tenus dans ce cas de rembourser immédiatement à l'administration toutes les dépenses engagées, telles qu'elles figurent au calepin de reboisement, un intérêt annuel de dix pour cent s'appliquant à chaque dépense à compter de la date à laquelle elle est mentionnée. " ; que cette convention, dont le terme est fixé au moment de la vente des derniers produits du reboisement, porte sur la mise en place de 6 000 plants sur une superficie de 15 ha de la terre Aaraeo ; qu'elle prévoit dans son article 5 que les services de la Polynésie française assureront l'ensemble des travaux de terrassement, de mise en place et d'entretien des pare-feux, de plantation, d'entretien et de gestion des opérations sylvicoles, qu'elle décidera du moment de la coupe des bois, qu'elle en assurera la commercialisation, et que le produit des ventes, diminué des dépenses exposées pour l'exploitation et la commercialisation, sera partagé à raison de 60 % pour le propriétaire et 40 % pour la Polynésie française ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la Polynésie française a seulement mis en place, en 1980, sur une superficie de 0,8 ha, 400 plants d'acajous du Honduras (swietenia macrophylla), réduits en octobre 2014 au nombre de 256, qui ne seront commercialisables, à l'issue de nouvelles sélections des meilleurs individus, qu'après avoir atteint, un diamètre de 45 cm correspondant à une durée totale de croissance de 40 à 50 ans ; que l'absence de reboisement de 14,2 ha de la terre Aaraeo caractérise une méconnaissance des engagements contractuels de la Polynésie française ; que, toutefois, comme l'ont estimé à juste titre les premiers juges, M. C... ne peut prétendre à être indemnisé que des préjudices en lien direct et certain avec ce manquement ; que si M. C...soutient que le fondement de sa demande d'indemnisation est contractuel, aucun article de la convention ne prévoit des modalités d'indemnisation à la charge de la Polynésie française en cas de manquement aux engagements de reboisement ;

5. Considérant que M. C...invoque un " manque à gagner " correspondant à sa part du produit de la commercialisation des acajous du Honduras dans l'hypothèse où 6 000 plants de cette essence auraient été plantés et commercialisés ; qu'ainsi qu'il a été dit au point précédent, les acajous du Honduras plantés en 1980 ne sont pas encore commercialisables ; que le manque à gagner éventuel ne pourra être évalué par extrapolation, qu'au moment de leur commercialisation et si M. C...ne poursuit pas la résiliation de la convention ; que, par suite, comme l'ont estimé à juste titre les premiers juges le préjudice invoqué ne présente, en tout état de cause, pas un caractère réel et actuel ;

6. Considérant que M. C...se prévaut en outre d'un " préjudice d'immobilisation " correspondant aux revenus qu'il aurait pu obtenir en mettant en location la terre Aaraeo ; qu'il résulte de l'instruction qu'alors qu'il a acquis cette terre en 1985, le requérant ne s'est préoccupé de sa mise en valeur qu'à partir du 16 septembre 2014, date à laquelle il a demandé à la Polynésie française un bilan de la gestion du reboisement, et n'a sollicité pour la première fois la résiliation de la convention que par une assignation du 14 janvier 2015 qui avait pour objet principal le versement d'indemnités ; qu'il n'apporte aucun élément, tant en première instance que dans la présente requête d'appel, susceptible de démontrer qu'il aurait perdu une chance sérieuse d'obtenir des revenus de la terre en litige, dont il ne produit pas même un plan de situation permettant d'apprécier si elle pourrait faire l'objet d'une utilisation quelconque susceptible d'intéresser un éventuel locataire ; que dans ces circonstances, l'existence d'un " préjudice d'immobilisation " réclamé n'est pas établie ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté ses conclusions à fin d'indemnisation ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que M.C..., qui est la partie perdante dans la présente instance, n'est pas fondé à demander qu'une somme soit mise à la charge de la Polynésie française au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...C...et à la Polynésie Française.

Délibéré après l'audience du 26 juin 2018 à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- M. Pagès, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 10 juillet 2018.

Le rapporteur,

D. PAGES

Le président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

T. ROBERT

La République mande et ordonne au Haut-commissaire de la République en Polynésie française en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA02331


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA02331
Date de la décision : 10/07/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-04 Marchés et contrats administratifs. Fin des contrats.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : JURISPOL

Origine de la décision
Date de l'import : 17/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-07-10;17pa02331 ?
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