Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'article 1er de l'arrêté du maire de Paris du 30 juillet 2014 faisant opposition à la déclaration de travaux qu'elle avait déposée pour la fermeture d'une loggia au 9ème étage de l' immeuble sis 35-37 avenue Paul Doumer à Paris 16ème, ainsi que la décision du maire de Paris du 10 novembre 2014 rejetant son recours gracieux.
Par un jugement n° 1500349/7-3 du 21 janvier 2016, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et deux mémoires enregistrés le 18 mars 2016, le 9 septembre 2016 et le 14 juin 2018, Mme B..., représentée par Me Lorit, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1500349/7-3 du 21 janvier 2016 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'article 1er de l'arrêté du maire de Paris du 30 juillet 2014 faisant opposition à la déclaration de travaux portant sur la fermeture d'une loggia et la décision du maire de Paris du 10 novembre 2014 confirmant, sur recours gracieux, l'arrêté du 30 juillet 2014 ;
3°) de mettre à la charge de la ville de Paris une somme de 5 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté attaquée est insuffisamment motivé, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 424-5 du code de l'urbanisme ;
- la largeur de l'avenue Paul Doumer au droit de l'immeuble en cause est supérieure à 20 m et le gabarit-enveloppe qui lui est opposé est inapplicable ; si nécessaire il est sollicité en application des dispositions de l'article R. 622-1 du code de justice administrative une visite sur place pour établir la largeur de la voie ;
- la fermeture de la terrasse couverte n'a pas eu d'incidence sur le dépassement du gabarit-enveloppe ;
- la décision attaquée méconnaît les dispositions de l'article L. 123-1-9 du code de l'urbanisme relatives aux adaptations mineures ;
- la construction existante ne méconnait pas les règles de gabarit-enveloppe ; une éventuelle irrégularité de cette construction ne peut être opposée, au égard aux dispositions de l'article L. 111-2 du code de l'urbanisme sur la prescription décennale et du VI des dispositions générales du règlement du plan local d'urbanisme de Paris.
Par un mémoire en défense enregistré le 27 avril 2018, la ville de Paris, représentée par Me Falala, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme B... une somme de 2 500 euros à lui verser sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Legeai,
- les conclusions de M. Romnicianu, rapporteur public,
- les observations de Me Lorit, avocat de Mme B..., et de Me Falala, avocat de la ville de Paris.
1. Considérant que Mme B...a déposé le 16 mai 2014, auprès des services de la ville de Paris, une déclaration préalable de travaux en vue du remplacement, d'une part, de l'ensemble des menuiseries extérieures de l'appartement qu'elle a acquis en janvier 2012 aux 8ème et 9ème étages de l'immeuble des 35 et 37 avenue Paul Doumer dans le seizième arrondissement de Paris et, d'autre part, du garde-corps de la terrasse supérieure de cet appartement, sise au 10ème étage en toiture ; que la déclaration portait en outre sur la fermeture, par la pose de double-vitrages supportés par des menuiseries en aluminium, de la terrasse se situant côté cour au 9ème étage du bâtiment et le remplacement de sa couverture en fibrociment par une couverture en double vitrage ; que cette déclaration a été déposée à titre de régularisation, alors que les travaux avaient déjà été effectués ; que par l'article 1er d'un arrêté du 30 juillet 2014, le maire de Paris a fait opposition aux travaux " d'extension de la loggia " au motif que cette extension ne respectait pas les règles de gabarit-enveloppe, alors que l'article 2 du même arrêté autorisait les autres travaux déclarés, soit le remplacement de l'ensemble des menuiseries extérieures, du garde corps et de la couverture de la terrasse ; que Mme B...a formé, par un courrier du 25 septembre 2014, un recours gracieux à l'encontre du refus de fermeture de la terrasse, recours rejeté par une décision expresse du 10 novembre 2014 ; qu'elle fait appel du jugement du 21 janvier 2016 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'article 1er de l'arrêté du 30 juillet 2014 et de la décision du 10 novembre 2014 rejetant son recours gracieux ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 424-5 du code de l'urbanisme : " Si la décision comporte rejet de la demande, si elle est assortie de prescriptions ou s'il s'agit d'un sursis à statuer, elle doit être motivée (...) " ;
3. Considérant que l'article 1er de l'arrêté litigieux refuse " la fermeture de la loggia sur cour (surface créée : 7 m²) " demandée par Mme B...au motif que " le gabarit-enveloppe applicable sur voie entre bâtiments situés en vis-à-vis sur un même terrain est dépassé (article UG. 10.2.1.3° du PLU de Paris) " ; que cette décision mentionne ainsi de façon exacte la disposition du règlement du plan local d'urbanisme dont elle fait application et le motif de fait, dépassement du gabarit-enveloppe, qui justifie le refus ; que si la référence aux bâtiments sur voie ou en vis-à-vis sur un même terrain est confuse, aucune ambiguïté n'existait sur la situation, coté cour, de la " loggia " à étendre ; qu'ainsi, alors même que l'arrêté ne rappelle pas les données chiffrées, notamment relatives à la largeur de l'avenue Paul Doumer, utiles à l'application au cas d'espèce du gabarit-enveloppe, elle comporte les éléments de droit et de fait permettant au pétitionnaire de connaître les motifs de ce refus et de le contester ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision contestée doit être écarté ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article UG.10.2 du plan local d'urbanisme de la ville de Paris : " Gabarit - enveloppe en bordure de voie " : " Le gabarit - enveloppe en bordure d'une voie s'applique à l'intérieur de la bande E (...) ; qu'aux termes de l'article UG.10.2.1 : " (...) Le gabarit-enveloppe se compose successivement : (...) 3° Voies de largeur égale ou supérieure à 12 mètres et inférieure à 20 mètres : / -a- d'une verticale de hauteur H égale au prospect P sur voie augmenté de 3 mètres, / b -d'une oblique de pente 2/1 élevée jusqu'à une hauteur de 3 mètres au-dessus de la verticale, / c - d'une seconde oblique de pente 1/1 limitée par une horizontale située à 6 mètres au dessus de la verticale ; 4° Voies de largeur égale ou supérieure à 20 mètres : / -a- d'une verticale de hauteur H égale au prospect P sur voie augmenté de 3 mètres et au plus égale à 25 m ; d'un quart de cercle de 6 mètres de rayon, tangent à la verticale en son sommet et limité par une horizontale située à 6 mètres au dessus de la verticale " ; qu'en vertu des " dispositions générales " du règlement du plan local d'urbanisme de Paris, la largeur de la bande E est fixée à 20 mètres à partir de l'alignement de la voie publique et le gabarit-enveloppe " est tracé : / en bordure de voie, dans les plans perpendiculaires à l'alignement " ;
5. Considérant qu'il résulte des plans de coupe joints au dossier de demande que la façade vitrée par laquelle Mme B... souhaite clore sa terrasse prendra appui au niveau du 9ème étage de l'immeuble, à 27 m de hauteur, et culminera, à 30 m de hauteur, au niveau du toit de cette construction ; que la ville de Paris soutient que cette extension, réalisée coté cour mais à l'intérieur de la bande E, aggrave la méconnaissance par l'immeuble existant de la règle de gabarit-enveloppe applicable en bordure de l'avenue Paul Doumer, dès lors que l'application à une largeur de rue de 19,90 m des règles citées au point précédent ne permet pas de construire au-delà de 28,90 m ;
6. Considérant, d'une part, que Mme B...soutient que la largeur de la voie publique au droit du 37 avenue Paul Doumer dépasse, compte tenu de sa rencontre avec la rue Bellini, les 19,90 m retenus par la ville de Paris et produit un constat d'huissier ayant mesuré à 20,18 m la largeur de la voie face à la construction ; que toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette mesure, prise au milieu du terre-plein séparant les deux rues, ait été réalisée, comme il convenait de la faire, en traçant une ligne droite entre les façades des immeubles du coté pair de l'avenue Paul Doumer ; qu'ainsi la ville de Paris est fondée à soutenir que la largeur de la rue, déterminée d'après le cadastre, est de bien de 19,90 mètres ; qu'en tout état de cause, l'application des règles précitées du 4° de l'article UG.10.2.1 du plan local d'urbanisme ne permettent pas de construire, en bordure d'une voie de 20,18 m de large, plus haut que 29,18 m ;
7. Considérant, d'autre part, que Mme B...soutient que, dès lors que la terrasse était d'ores et déjà couverte, sa fermeture était sans incidence sur la méconnaissance des règles de gabarit-enveloppe ; que toutefois, et alors d'ailleurs qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la toiture en fibrociment de la terrasse aurait été précédemment autorisée, sa fermeture par une façade vitrée, qui a pour effet de créer une surface habitable de 7,5 m² et de déplacer vers l'extérieur la façade sur cour de l'immeuble, a pour conséquence d'aggraver la méconnaissance, par l'immeuble existant, du gabarit-enveloppe applicable au droit de l'avenue Paul Doumer ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la construction projetée ne méconnaissait pas les règles de gabarit-enveloppe applicable ;
9. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme : " Le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé que si les travaux projetés sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires relatives à l'utilisation des sols, à l'implantation, la destination, la nature, l'architecture, les dimensions, l'assainissement des constructions et à l'aménagement de leurs abords et s'ils ne sont pas incompatibles avec une déclaration d'utilité publique " ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 123-1-9 du code de l'urbanisme : " Les règles et servitudes définies par un plan local d'urbanisme ne peuvent faire l'objet d'aucune dérogation, à l'exception des adaptations mineures rendues nécessaires par la nature du sol, la configuration des parcelles ou le caractère des constructions avoisinantes " ; qu'il appartient à l'autorité administrative, saisie d'une demande de permis de construire, de déterminer si le projet qui lui est soumis ne méconnaît pas les dispositions du plan local d'urbanisme applicables, y compris telles qu'elles résultent le cas échéant d'adaptations mineures lorsque la nature particulière du sol, la configuration des parcelles d'assiette du projet ou le caractère des constructions avoisinantes l'exige ; que le pétitionnaire peut, à l'appui de sa contestation devant le juge de l'excès de pouvoir du refus opposé à sa demande, se prévaloir de la conformité de son projet aux règles d'urbanisme applicables, le cas échéant assorties d'adaptations mineures dans les conditions précisées ci-dessus, alors même qu'il n'a pas fait état, dans sa demande à l'autorité administrative, de l'exigence de telles adaptations ;
10. Considérant que Mme B...soutient que la décision attaquée méconnaît les dispositions du premier alinéa de l'article L. 123-1-9 du code de l'urbanisme relatives aux adaptations mineures, dès lors que la dérogation demandée à la règle de gabarit-enveloppe est minime, la largeur exacte de l'avenue étant au surplus en débat, et que nombre des constructions avoisinantes dépassent le gabarit qui lui est imposé ; que toutefois il ne ressort pas des pièces du dossier que " l'adaptation " demandée serait rendue nécessaire par la nature du sol, la configuration des parcelles ou le caractère des constructions avoisinantes ; que la ville de Paris fait au contraire valoir en défense que la fermeture de cette terrasse nuirait à l'harmonie architecturale de cet immeuble, alors qu'aucune loggia n'a été autorisée sur cet immeuble et dans les constructions avoisinantes ; que le moyen doit être écarté ;
11. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 111-12 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'une construction est achevée depuis plus de dix ans, le refus de permis de construire ou de déclaration de travaux ne peut être fondé sur l'irrégularité de la construction initiale au regard du droit de l'urbanisme. / Les dispositions du premier alinéa ne sont pas applicables : / (...) e) Lorsque la construction a été réalisée sans permis de construire " ;
12. Considérant que Mme B...soutient que la loggia étant édifiée depuis plus de dix années, le maire ne pouvait se fonder sur son irrégularité pour refuser les travaux ; que toutefois, si la requérante établit l'ancienneté de la couverture de la terrasse, elle ne justifie pas de la régularité de cette construction, alors que le permis de construire de 1954 qu'elle produit ne fait pas état de cette toiture ; qu'en outre il est constant que la terrasse, si elle était couverte, n'était pas fermée jusqu'aux travaux effectués par la requérante, après 2012 et sans autorisation ; qu'au demeurant le maire ne s'est pas fondé sur l'illégalité de la couverture de la terrasse pour refuser sa fermeture ; qu'ainsi le moyen ne peut en tout état de cause qu'être écarté ;
13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la ville de Paris, qui n'est pas partie perdante, verse à Mme B... la somme qu'elle demande au titre des frais exposés pour sa requête ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de Mme B... une somme de 1 500 euros à verser la ville de Paris au titre des frais exposés pour sa défense ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Mme B...versera à ville de Paris la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B...et à la ville de Paris.
Délibéré après l'audience du 21 juin 2018, à laquelle siégeaient :
- Mme Pellissier, présidente de chambre,
- M. Legeai, premier conseiller,
- Mme Nguyên Duy, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 10 juillet 2018.
Le rapporteur,
A. LEGEAILa présidente,
S. PELLISSIER Le greffier,
A. LOUNIS
La République mande et ordonne au préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16PA00998