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06/07/2018 | FRANCE | N°17PA03841

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 06 juillet 2018, 17PA03841


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G...A...a demandé au tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler l'arrêté du 19 septembre 2017 par lequel le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il serait éloigné et, d'autre part, une décision par laquelle le préfet de police aurait refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1715494 du 10 novembre 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejet

é sa demande dirigée contre l'arrêté en date du 19 septembre 2017.

Procédure devant l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G...A...a demandé au tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler l'arrêté du 19 septembre 2017 par lequel le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il serait éloigné et, d'autre part, une décision par laquelle le préfet de police aurait refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1715494 du 10 novembre 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté en date du 19 septembre 2017.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 15 décembre 2017 et 24 janvier 2018, M. A..., représenté par MeE..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 19 septembre 2017 et la décision par laquelle le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, dans ce même délai et sous la même astreinte, de procéder au réexamen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. A...soutient que :

a) s'agissant de la décision de refus de séjour :

- elle a été signée par une personne incompétence et est entachée d'une insuffisance de motivation ;

- le préfet de police, en refusant d'enregistrer sa demande présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et en se fondant exclusivement sur le 6° de l'article L. 511-1 du même code pour l'obliger à quitter le territoire, a commis une erreur de droit ;

- le préfet de police a commis une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences et a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

b) s'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire :

- elle est entachée d'un vice d'incompétence ;

- elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité entachant la décision de refus de séjour ;

- le préfet de police, en refusant d'enregistrer sa demande présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et en se fondant exclusivement sur le 6° de l'article L. 511-1 du même code pour l'obliger à quitter le territoire, a commis une erreur de droit ;

- le préfet de police a commis une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences et a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

c) s'agissant de la décision fixant le pays de destination :

- elle est entachée d'une insuffisance de motivation ;

- le préfet de police a méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mai 2018, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Le préfet de police soutient que les moyens invoqués par M. A...ne sont pas fondés.

Par un courrier du 5 avril 2018, les parties ont été informées qu'en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, l'arrêt était susceptible d'être fondé sur des moyens relevés d'office.

Par une décision du 18 mai 2018, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris a constaté la caducité de la demande d'aide juridictionnelle présentée par M.A....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Boissy a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., de nationalité malienne, entré en France, de manière irrégulière, le 10 août 2014, a présenté une demande d'asile le 26 novembre 2014 qui a été successivement rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile les 21 juillet 2016 et 2 mai 2017. Par un arrêté du 19 septembre 2017, pris sur le fondement du 6° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français en fixant le pays à destination duquel il serait éloigné. M. A...relève appel du jugement du 10 novembre 2017 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté et d'une décision lui refusant le droit de séjourner en France.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne la décision de refus de séjour :

2. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié (...) a été définitivement refusé à l'étranger (...) à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ".

3. Le préfet de police, dans son arrêté du 19 septembre 2017, n'a pris aucune décision statuant sur le droit au séjour de M. A...mais s'est borné, en application du 6° de l'article L. 511-1 précité, à tirer les conséquences du refus définitif de la demande de l'intéressé tendant à la reconnaissance de la qualité de réfugié en l'obligeant à quitter le territoire français.

4. M. A...n'est dès lors pas recevable à demander l'annulation d'une décision qui n'existe pas.

En ce qui concerne l'arrêté du 19 septembre 2017 :

5. En premier lieu, il résulte de l'arrêté n° 2017-00803 relatif aux missions et à l'organisation de la direction de la police générale de la préfecture de police et de l'arrêté n° 2017-00804 portant délégation de signature, en date du 24 juillet 2017 et publiés au bulletin municipal officiel de la ville de Paris le 1er août 2017, que le préfet de police a délégué sa signature à M. F...D..., chef du 10ème bureau, en cas d'absence ou d'empêchement de M.C..., sous directeur de l'administration des étrangers et de M. B..., adjoint au sous-directeur de l'administration des étrangers, aux fins de signer, notamment, des décisions concernant les demandeurs d'asile. M. A...n'établit ni même n'allègue que M. C... et M. B... n'auraient pas été absents ou empêchés. Par suite, le moyen tiré de ce que M. D... n'était pas compétent pour signer l'arrêté litigieux manque en fait.

6. En deuxième lieu, l'arrêté contesté comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Il n'a dès lors pas méconnu les dispositions des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration.

7. Le requérant soutient, en troisième lieu, qu'il a présenté une demande de titre de séjour, en juillet 2017, sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, après avoir antérieurement présenté au préfet de Paris,

en janvier 2017, une demande d'autorisation de travail et que le préfet de police, en refusant d'enregistrer cette demande et en se fondant exclusivement sur le 6° de l'article L. 511-1 du même code pour l'obliger à quitter le territoire, a commis une erreur de droit.

8. Toutefois, ainsi qu'il vient d'être dit au point 3, le préfet de police s'est borné à appliquer le 6° de l'article L. 511-1 et à tirer les conséquences du refus définitif de la demande de l'intéressé tendant à la reconnaissance de la qualité de réfugié. Il n'a dès lors commis, sur ce point, aucune erreur de droit.

9. Il appartient seulement au requérant, s'il considère que le préfet de police, postérieurement à l'arrêté contesté, a implicitement rejeté, à l'expiration du délai de quatre mois prévu par l'article R. 311-12-1 2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une demande de titre de séjour qu'il aurait par ailleurs présenté, d'exercer un recours administratif ou contentieux contre une telle décision.

10. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

11. M. A...soutient qu'il réside habituellement en France depuis trois ans, qu'il dispose d'une promesse d'embauche au sein de la SARL Lazare en qualité d'employé libre service de vente et que, désormais, toutes ses attaches sont en France. Il ne produit toutefois au soutien de ses allégations aucun élément susceptible d'établir, de manière significative, une insertion personnelle, professionnelle ou sociale. Il ne justifie pas davantage être dépourvu d'attaches familiales et personnelles dans son pays d'origine où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de 22 ans. Dans ces conditions, et compte tenu également de ses conditions de séjour, l'arrêté contesté n'a en l'espèce pas porté au droit de M. A...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

12. En cinquième lieu, le requérant soutient que le préfet de police a méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il n'apporte toutefois au soutien de ce moyen, déjà soulevé, dans les mêmes termes, devant le tribunal administratif de Paris, aucun élément nouveau susceptible de remettre en cause l'appréciation que le premier juge a, à bon droit, portée sur ce moyen qui doit dès lors être écarté par adoption des motifs retenus par ce dernier.

13. En dernier lieu, compte tenu de l'ensemble de ce qui vient d'être dit, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police aurait, dans les circonstances de l'espèce, commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de son arrêté sur sa situation personnelle.

14. Il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation l'arrêté du 19 septembre 2017 et d'une décision lui refusant le droit de séjourner en France. Ses conclusions aux fins d'annulation doivent par suite être rejetées.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

15. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions aux fins d'annulation présentées par M. A..., n'appelle, par lui-même, aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions aux fins d'injonction présentées par le requérant doivent être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions combinées du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

16. Les dispositions combinées du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font en tout état de cause obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, une quelconque somme au bénéfice du conseil de M. A...au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. G...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 22 juin 2018 à laquelle siégeaient :

- Mme Heers, président de chambre,

- M. Auvray, président assesseur,

- M. Boissy, premier conseiller.

Lu en audience publique le 6 juillet 2018

Le rapporteur,

L. BOISSYLe président,

M. HEERSLe greffier,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 17PA03841 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA03841
Date de la décision : 06/07/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: M. Laurent BOISSY
Rapporteur public ?: Mme MIELNIK-MEDDAH
Avocat(s) : CHAUMEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 17/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-07-06;17pa03841 ?
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