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28/06/2018 | FRANCE | N°17PA00789

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 28 juin 2018, 17PA00789


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B...épouse D...a demandé au Tribunal administratif de Melun l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-de-Marne du 13 janvier 2015 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et fixant le pays à destination duquel elle pourra être éloignée d'office passée ce délai.

Par un jugement n° 1501023/8 du 20 septembre 2016, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :
>Par une requête enregistrée le 2 mars 2017, Mme B..., représentée par Me A...E..., demande à la Co...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B...épouse D...a demandé au Tribunal administratif de Melun l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-de-Marne du 13 janvier 2015 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et fixant le pays à destination duquel elle pourra être éloignée d'office passée ce délai.

Par un jugement n° 1501023/8 du 20 septembre 2016, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 2 mars 2017, Mme B..., représentée par Me A...E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté préfectoral contesté devant ce tribunal ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :

- elle est insuffisamment motivée ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle;

- elle méconnaît les dispositions des articles L. 313-11 7° et L. 313-14 et du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle est contraire aux stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est dépourvue de fondement du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est contraire aux stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- elle est privée de base légale en raison de l'illégalité de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Par ordonnance du 12 avril 2017 la clôture d'instruction a été fixée au 28 avril 2017.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 4 mai 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, ensemble le décret du 3 mai 1974 portant publication de la convention ;

- la convention internationale signée à New York le 26 janvier 1990, relative aux droits de l'enfant, publiée par décret du 8 octobre 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Appèche a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que Mme C...B...épouseD..., née le 3 janvier 1963, de nationalité camerounaise, a demandé la délivrance d'un titre de séjour portant la mention

" vie privée et familiale " ; que, par arrêté du 13 janvier 2015, le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle sera susceptible d'être éloignée d'office passé le délai imparti pour quitter la France ; que la requérante, après avoir demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler cet l'arrêté, relève appel du jugement n° 1501023/8 du 20 septembre 2016 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande ;

En ce qui concerne les moyens dirigés contre l'ensemble des décisions contenues dans l'arrêté préfectoral litigieux :

2. Considérant, que l'arrêté litigieux comporte un énoncé suffisamment précis des circonstances de droit et de fait sur lesquelles son auteur s'est fondé pour prendre le refus de titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et la décision fixant le pays à destination duquel Mme B... pourra être reconduite d'office passé ce délai ; que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit dès lors, en tout état de cause, être écarté ;

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

3. Considérant, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l' exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-21 de ce code : " Pour l'application du 7° de l'article L. 313-11, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de la vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine " ;

4. Considérant que Mme B...épouse D...soutient qu'elle est entrée en France en 2009 sous couvert d'un visa de court séjour et que sa vie privée et familiale se situe désormais en France où elle réside depuis lors ; que toutefois, la circonstance qu'elle se soit illégalement maintenue sur le territoire français après l'expiration de son visa et qu'elle réside en France depuis plusieurs années sans détenir de titre de séjour l'y autorisant ne saurait, par elle-même, lui conférer un droit au séjour ni constituer un gage d'insertion dans la société française ; que le caractère habituel de sa présence alléguée depuis son entrée sur le territoire français ne peut au demeurant être tenu pour établi sur l'ensemble des années en cause et notamment en 2009 et en 2010, les justificatifs produits montrant essentiellement la propriété d'immeubles sis en France et productifs de revenus fonciers ; qu'en outre, Mme B...est mariée à un compatriote camerounais, titulaire d'un visa Schengen " court séjour circulation " valable du 1er août 2009 au 31 juillet 2012, dont elle affirme qu'il se rend fréquemment au Cameroun mais pour lequel elle ne soutient ni n'établit qu'il réside habituellement en France ; que si trois de ses enfants, entrés en France en 2008, 2009 et 2010, y ont été tous scolarisés et si sa petite-fille est de nationalité française, deux de ses enfants, Cyrille, titulaire d'une carte de résident valable du 19 juin 2014 au 18 juin 2024 et Lestlie, titulaire d'un titre de séjour ayant expiré le 23 octobre 2014, ont atteint l'âge de la majorité ; qu'elle n'apporte pas d'éléments de nature à démontrer que ses enfants majeurs sont à sa charge ni d'ailleurs que sa présence à leur côté serait indispensable ; que si son troisième enfant, Morgane Cindy, née le

29 novembre 2000 et bénéficiant d'un document de circulation, était âgée de 14 ans à la date de la décision attaquée, rien ne s'oppose, dans les circonstances de l'espèce, à ce qu'elle poursuive sa scolarité hors de France et notamment dans son pays, le Cameroun ; que si Mme B...se prévaut de liens familiaux ou amicaux avec des ressortissants camerounais résidant régulièrement en France ou de nationalité française, elle n'établit pas être dépourvue d'attaches familiales et personnelles dans son pays, où elle a vécu jusqu'à l'âge de 46 ans et n'affirme d'ailleurs pas que son aîné n'y séjourne plus ; qu'en outre, si elle fait valoir qu'elle bénéficie de ressources propres provenant de la location de deux logements dont elle et son mari sont propriétaires, cette circonstance n'est pas, à elle seule, de nature à lui donner un droit au séjour, ni d'ailleurs à démontrer qu'elle disposerait de ce fait des moyens de subvenir par elle-même à ses besoins ; qu'enfin, elle ne justifie d'aucune insertion professionnelle ; que, dès lors, eu égard aux conditions et à la durée du séjour en France de Mme B... épouseD..., l'arrêté contesté n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'est pas davantage entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences du refus d'autorisation de séjour sur la situation personnelle de Mme B...épouse D...; que, par suite, les moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation ainsi que de la méconnaissance, par la décision attaquée, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 doivent être écartés comme non fondés ;

5. Considérant, que Mme B...reprend en appel les moyens invoqués devant le tribunal et tirés de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du

26 janvier 1990 ; qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, d'écarter ces moyens comme non fondés ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant que pour les mêmes motifs, retenus à bon droit par le tribunal et qu'il y a lieu pour la Cour d'adopter, les moyens dirigés contre l'obligation de quitter le territoire français faite à Mme B...et tirés de la violation des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990, doivent être écartés ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus, que Mme B...n'est pas fondée à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination d'un éventuel éloignement d'office :

8. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit plus haut que Mme B...épouse D...n'est pas fondée à demander l'annulation des décisions lui refusant un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français ; que, dès lors, elle n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de ces décisions à l'encontre de la décision fixant le pays de destination ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que les conclusions de sa requête tendant à l'annulation du jugement et des décisions préfectorales litigieuses doivent, par suite, être rejetées ; qu'il en va de même, en conséquence, des conclusions aux fins d'injonction et d'astreintes présentées sur le fondement des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative et de celles présentées sur le fondement l'article

L. 761-1 dudit code et de l'article 37 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B...épouse D...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 20 juin 2018, où siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Appèche, président assesseur,

- Mme Jimenez, premier conseiller

Lu en audience publique, le 28 juin 2018.

Le rapporteur,

S. APPECHELe président,

I. BROTONS

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA00789


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA00789
Date de la décision : 28/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Sylvie APPECHE
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : RIMAILHO

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-06-28;17pa00789 ?
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