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27/06/2018 | FRANCE | N°16PA02172

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 27 juin 2018, 16PA02172


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a, par deux requêtes distinctes, demandé au Tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler l'arrêté du 9 mars 2015 par lequel le directeur de l'Assistance

publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident qu'elle a subi le 9 avril 2014 et, d'autre part, de condamner l'AP-HP à lui verser la somme totale de 22 980,34 euros en réparation des divers préjudices subis du fait de cette décision.

Par un jugement nos 1507820/2-2-

1508772/2-2 du 2 mai 2016, le Tribunal administratif de Paris, après avoir joint ces d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a, par deux requêtes distinctes, demandé au Tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler l'arrêté du 9 mars 2015 par lequel le directeur de l'Assistance

publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident qu'elle a subi le 9 avril 2014 et, d'autre part, de condamner l'AP-HP à lui verser la somme totale de 22 980,34 euros en réparation des divers préjudices subis du fait de cette décision.

Par un jugement nos 1507820/2-2-1508772/2-2 du 2 mai 2016, le Tribunal administratif de Paris, après avoir joint ces deux requêtes, a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 4 juillet 2016, MmeA..., représentée par MeD..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris nos 1507820/2-2-1508772/2-2 du 2 mai 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 9 mars 2015 par lequel le directeur de l'Assistance

publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident qu'elle a subi le 9 avril 2014 ;

3°) de condamner l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris à lui verser la somme totale de 22 980,34 euros ;

4°) de mettre à la charge de l'AP-HP la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa demande enregistrée sous le numéro 1507820/2-2 était recevable, le courrier

du 16 février 2015 ayant lié le contentieux en posant le principe d'une indemnisation ;

- sa demande enregistrée sous le numéro 1507872/2-2 était également recevable car dirigée contre une décision de refus du 9 mars 2015 ;

- l'accident du 9 avril 2014 est imputable au service dès lors qu'il s'est produit lors de l'exercice de ses fonctions et qu'il est en lien avec le harcèlement moral qu'elle a subi ;

- elle subit du fait de ce harcèlement une altération de sa santé physique et mentale ;

- elle a été victime d'une discrimination à raison de son état de santé ;

- elle a été illégalement privée d'une partie de son traitement, a exposé des frais médicaux et a subi un préjudice moral.

Par un mémoire en défense enregistré le 25 janvier 2017, l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 440 euros soit mise à la charge de Mme A...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les conclusions indemnitaires sont irrecevables faute de liaison du contentieux ;

- les moyens soulevés par Mme A...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Hamon,

- et les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. MmeA..., aide-soignante à l'hôpital Armand Trousseau, lequel relève de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP), a sollicité auprès de sa cadre de service, le 1er avril 2014, le bénéfice d'une journée de congés le 3 avril suivant. L'absence de Mme A...lors de cette journée du 3 avril 2014 ayant été regardée comme irrégulière par sa hiérarchie, celle-ci l'a convoquée à un entretien au cours duquel lecture lui a été donnée du rapport afférent à cette absence. A la suite de cet entretien, Mme A...a été victime d'un malaise vagal, et placée le lendemain en congé de maladie. L'intéressée ayant, le 23 avril suivant, déclaré ce malaise comme étant imputable à un accident de service, la commission de réforme a été saisie et a émis un avis défavorable à cette imputabilité le 3 mars 2015. Sur la base de cet avis, l'AP-HP a, par un arrêté du 9 mars 2015, refusé de reconnaître cet accident comme imputable au service. Mme A...fait appel du jugement du

2 mai 2016 par lequel le Tribunal administratif de Paris, après les avoir jointes, a rejeté les deux demandes par lesquelles elle avait demandé, d'une part, l'annulation de l'arrêté du 9 mars 2015 et la condamnation de l'AP-HP à lui verser les sommes de 2 150,04 euros à titre de rappel de rémunération et de 830,30 euros au titre du remboursement de ses frais médicaux, et d'autre part, la condamnation l'AP-HP à lui verser la somme de 20 000 euros en réparation du préjudice moral qu'elle estime avoir subi.

Sur la légalité de la décision du 9 mars 2015 et ses conséquences indemnitaires :

2. Aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " Le fonctionnaire en activité a droit : [...]2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...).Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident./Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de la maladie ou de l'accident est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. (...) ". Le bénéfice de ces dernières dispositions est subordonné à l'existence de troubles présentant un lien direct et certain avec l'accident de service.

3. En premier lieu, en se bornant à relever, dans la décision attaquée du 9 mars 2015, que le malaise dont avait été victime Mme A...était " (...) sans conséquence traumatique (et n'a) occasionné aucune blessure (...) ", ainsi que l'avait mentionné l'avis de la commission de réforme, le directeur général de l'AP-HP n'a pas soumis la reconnaissance de l'imputabilité au service d'un accident de service à l'existence de traumatismes physiques et, par suite, n'a pas illégalement ajouté une condition aux dispositions précitées de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986.

4. En second lieu, il ressort de l'instruction que si le cadre de santé compétent avait indiqué oralement à Mme A...qu'elle pouvait prendre une journée de congés le 3 avril 2014, c'était à la condition que son remplacement soit assuré. Mme A...ne conteste pas avoir été informée, le

2 avril 2014, que ce remplacement ne serait pas assuré et qu'elle ne pouvait pas dès lors être en position de congé à cette date. En conséquence, son absence du service le 3 avril suivant ayant été considérée comme irrégulière, la tenue de l'entretien le 9 avril suivant, dont aucun élément de l'instruction n'établit qu'il se soit déroulé dans des conditions préjudiciables, relevait d'un exercice normal du pouvoir hiérarchique et constituait un évènement prévisible et habituel de la carrière professionnelle d'un agent public. Il résulte par ailleurs de la note rédigée le 2 octobre 2014 par le médecin statutaire à l'attention de la commission de réforme, laquelle a émis un avis défavorable à l'imputabilité au service par quatre voix contre et deux abstentions, que " le malaise vagal et le syndrome dépressif présentés par l'agent ne peuvent pas être directement et uniquement imputables au fait déclaré ". MmeA..., qui se borne à produire deux courriers de son médecin traitant, peu circonstanciés, dont aucun n'atteste de l'imputabilité directe et certaine de son état de santé à l'entretien du 9 avril 2014 et au malaise vagal qui l'a suivi, ne conteste pas utilement ces constatations. Par suite, le malaise vagal subi par Mme A...ne peut être caractérisé comme constituant un accident de service ouvrant droit au bénéfice des dispositions précitées de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant au remboursement des sommes de 2 150,04 euros au titre du rappel de rémunérations et de 830,30 euros au titre du remboursement de ses frais médicaux, qui ne sont dues qu'en cas d'accident imputable au service, ne sont pas fondées.

Sur les conclusions afférentes à l'existence d'une situation de harcèlement moral :

5. Aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. (...) ". Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement tandis qu'il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

6. Pour soutenir qu'elle a fait l'objet d'un harcèlement moral, Mme A...fait en premier lieu valoir que les restrictions à ses obligations professionnelles imposées par la médecine du travail, après un précédent accident du travail subi en 2009, ne sont pas respectées. Toutefois, elle ne l'établit nullement par la seule production d'une attestation d'une collègue, qui ne comporte aucun élément sur ce point, tandis que l'AP-HP a produit la fiche de poste de MmeA..., aménagée en 2010 pour tenir compte de ces restrictions, ainsi que les instructions du cadre de santé visant à veiller à leur respect. Si la requérante fait également état de l'absence de son nom sur les plannings du personnel depuis le mois d'octobre 2014, ceci est lié à son placement en congé maladie depuis le 10 avril 2014 et relève d'une gestion administrative normale. Si l'intéressée fait valoir que d'autres collègues également en congé de maladie figurent encore sur ces plannings, cette comparaison est en tout état de cause inopérante. De même, la circonstance que Mme A...n'a été convoquée devant la commission de réforme que par un courrier daté du 12 février 2015, ne révèle pas un comportement de harcèlement, compte tenu de la longueur habituelle de ces délais dans un établissement de la taille de l'AP-HP. En outre, le courrier du 9 mars 2015 indiquant à Mme A...qu'elle devra être considérée en absence injustifiée, faute de production de justificatifs médicaux de son absence à compter du 2 février 2015, relève également d'une gestion normale du personnel de l'AP-HP, l'intéressée n'établissant pas qu'à cette date elle avait fourni les justificatifs en cause. Enfin, il résulte de ce qui a été dit au point 4 que le fait d'avoir convoqué Mme A...à un entretien relatif aux conséquences de son absence du service le 3 avril 2014 constitue un exercice normal du pouvoir hiérarchique, la requérante ne contestant pas sérieusement qu'elle avait été informée de ce qu'elle ne pouvait prendre un congé à cette date que dans l'hypothèse d'un remplacement, et qu'elle avait également été informée de l'absence de remplacement le 2 avril 2014. Il résulte de ce qui précède que les éléments soumis par Mme A...ne sont pas de nature à faire présumer un harcèlement moral.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes.

Sur les frais de justice :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'AP-HP, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que Mme A...demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de

Mme A...le versement de la somme que l'AP-HP demande sur le fondement des mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris présentées sur le fondement des dispositions énoncées par l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A...et à l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris.

Délibéré après l'audience du 5 juin 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Even, président de chambre,

- Mme Hamon, président assesseur,

- Mme d'Argenlieu, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 juin 2018.

Le rapporteur,

P. HAMONLe président,

B. EVENLe greffier,

S. GASPARLa République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

6

N° 16PA02172


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA02172
Date de la décision : 27/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-05-04-01-03 Fonctionnaires et agents publics. Positions. Congés. Congés de maladie. Accidents de service.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Perrine HAMON
Rapporteur public ?: Mme ORIOL
Avocat(s) : SCP MAUGENDRE MINIER AZRIA LACROIX SCHWAB

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-06-27;16pa02172 ?
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