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22/06/2018 | FRANCE | N°17PA03402

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 22 juin 2018, 17PA03402


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 12 mai 2016 par lequel le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle serait éloignée.

Par un jugement n° 1613272 du 25 avril 2017, le tribunal administratif de Paris, d'une part, a prononcé, à l'article 1er, un non-lieu à statuer sur les demandes tendant à l'annulation des décisions obligeant Mme B

...à quitter le territoire français et fixant le pays de destination et, d'autre part...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 12 mai 2016 par lequel le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle serait éloignée.

Par un jugement n° 1613272 du 25 avril 2017, le tribunal administratif de Paris, d'une part, a prononcé, à l'article 1er, un non-lieu à statuer sur les demandes tendant à l'annulation des décisions obligeant Mme B...à quitter le territoire français et fixant le pays de destination et, d'autre part, a rejeté, à l'article 2, le surplus de sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 5 novembre 2017, MmeB..., représentée par Me Morel, demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement ;

2°) d'annuler la décision du 12 mai 2016 par laquelle le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour ;

3°) d'enjoindre au préfet de police, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " et, à défaut, dans le même délai et sous la même astreinte, de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme B...soutient que :

- les premiers juges ont omis de statuer sur les moyens tirés du défaut d'examen particulier de sa situation personnelle, de l'irrégularité de l'avis médical et de l'erreur de fait et ont ainsi entaché le jugement attaqué de plusieurs irrégularités ;

- le préfet de police n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ;

- l'avis médical a été établi dans des conditions irrégulières et entache dès lors la décision de refus de séjour d'un vice de procédure ;

- la décision lui refusant le droit de séjourner en France est entachée d'une insuffisance de motivation ;

- la décision lui refusant le droit de séjourner en France est entachée d'une erreur de fait ;

- le préfet de police, en s'étant cru, à tort, en situation de compétence liée par l'avis médical émis par le médecin chef du service médical de la préfecture de police, a méconnu l'étendue de sa compétence ;

- le préfet de police a méconnu le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et, en outre, a entaché sa décision de refus de séjour d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mai 2018, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Le préfet de police soutient que les moyens invoqués par M. B... ne sont pas fondés.

Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris du 13 septembre 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Boissy,

- et les observations de Me Morel, avocat de MmeB... ;

Considérant ce qui suit :

1. MmeB..., de nationalité congolaise, entrée en France, selon ses déclarations, en 2003, a présenté, le 13 mars 2013, une demande de titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle a alors obtenu une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", valable du 6 janvier 2014 au 5 janvier 2015, qui a été renouvelée jusqu'au 5 janvier 2016. Par un arrêté du 12 mai 2016, le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français en fixant le pays à destination duquel elle serait éloignée. Par un arrêté du 3 octobre 2016, le préfet de police a abrogé les décisions obligeant l'intéressée à quitter le territoire français et fixant le pays de destination. Par un jugement du 25 avril 2017, le tribunal administratif de Paris a prononcé un non-lieu à statuer sur ces deux décisions et a rejeté le surplus de la demande de MmeB.... Cette dernière relève appel de ce jugement en tant qu'il lui est défavorable.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. Il ressort des pièces du dossier que, même si le caractère habituel de son séjour n'est pas nécessairement établi pour l'ensemble des années, Mme B...établit cependant avoir séjourné en France au cours des années 2005 à 2013. En indiquant, dans son arrêté du 12 mai 2016, que l'intéressée était entrée en France le 14 mars 2013, alors que cette date correspond à sa première demande de titre de séjour, le préfet de police a nécessairement estimé, comme il l'a d'ailleurs fait dans son arrêté du 3 octobre 2016, que Mme B...n'avait séjourné en France que trois ans à la date de la décision de refus de séjour en litige. Il a ainsi entaché cette décision d'une erreur de fait de nature à influer sur sa décision.

3. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, Mme B...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 12 mai 2016 par laquelle le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour et à demander l'annulation de l'article 2 de ce jugement et de cette décision.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

4. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ". Aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé ". Enfin, aux termes de l'article

L. 911-3 de ce code : " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet ".

5. Si, compte tenu du motif retenu pour annuler la décision de refus de séjour restant en litige, l'exécution du présent arrêt n'implique pas nécessairement que le préfet police délivre à Mme B...un titre de séjour, elle implique en revanche nécessairement qu'il procède au réexamen de la situation personnelle de l'intéressée en appréciant, notamment, l'ancienneté et les conditions de son séjour sur le territoire français, au regard de son droit au séjour.

6. Dès lors, il y a lieu d'ordonner au préfet de police de procéder au réexamen de la demande de l'intéressée dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a en revanche pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions combinées du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi n° 91-467 du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Mme B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Morel, avocat de MmeB..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à son profit de la somme de 1 500 euros.

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 2 du jugement n° 1613272 du tribunal administratif de Paris en date du 25 avril 2017 est annulé.

Article 2 : La décision du 12 mai 2016 par laquelle le préfet de police a refusé de renouveler le titre de séjour de Mme B...est annulée.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de police de procéder au réexamen de la demande de Mme B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à Me Morel la somme de 1 500 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 8 juin 2018 à laquelle siégeaient :

- Mme Heers, président de chambre,

- M. Auvray, président assesseur,

- M. Boissy, premier conseiller,

Lu en audience publique le 22 juin 2018.

Le rapporteur,

L. BOISSYLe président,

M. HEERSLe greffier,

F. DUBUY

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 17PA03402 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA03402
Date de la décision : 22/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: M. Laurent BOISSY
Rapporteur public ?: Mme MIELNIK-MEDDAH
Avocat(s) : MOREL

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-06-22;17pa03402 ?
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