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14/06/2018 | FRANCE | N°17PA01545

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 14 juin 2018, 17PA01545


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat des copropriétaires du 158 bis rue de la Croix Nivert, le syndicat des copropriétaires du 156/158 rue de la Croix-Nivert, M.F..., M.G..., M. E...et MmeA..., d'une part, la société les Etablissements Moncassin, la société civile immobilière (SCI) des trois Chevrons et la société civile immobilière (SCI) JHD Parisa, d'autre part, ont demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 4 février 2015 par lequel le maire de Paris a délivré un permis de construire à la société

Gecina pour la construction d'un bâtiment d'un étage sur cour à usage de crèche ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat des copropriétaires du 158 bis rue de la Croix Nivert, le syndicat des copropriétaires du 156/158 rue de la Croix-Nivert, M.F..., M.G..., M. E...et MmeA..., d'une part, la société les Etablissements Moncassin, la société civile immobilière (SCI) des trois Chevrons et la société civile immobilière (SCI) JHD Parisa, d'autre part, ont demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 4 février 2015 par lequel le maire de Paris a délivré un permis de construire à la société Gecina pour la construction d'un bâtiment d'un étage sur cour à usage de crèche avec changement partiel de destination du bureau à rez-de-chaussée en crèche, ainsi que la décision du 1er juin 2015 par laquelle la ville de Paris a rejeté le recours gracieux formé par les seconds contre cet arrêté.

Par un jugement n° 1506748-1512949 du 9 mars 2017, le tribunal administratif de Paris a joint les deux demandes, annulé l'arrêté du 4 février 2015 par lequel la ville de Paris a accordé un permis de construire à la société Gecina ainsi que la décision portant rejet du recours gracieux formé contre cet arrêté.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 5 mai 2017 et 9 mars 2018, la société Gecina, représentée par Me Grenier, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1506748-1512949 du 9 mars 2017 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de mettre solidairement à la charge du syndicat des copropriétaires du 158 bis rue de la Croix Nivert, du syndicat des copropriétaires du 156/158 rue de la Croix Nivert, de M.F..., de M.G..., de M.E..., de MmeA..., de la société Les établissements Montcassin, de la SCI des trois chevrons et de la SCI JHD Paris les entiers dépens ;

3°) de mettre solidairement à la charge du syndicat des copropriétaires du 158 bis rue de la Croix Nivert, du syndicat des copropriétaires du 156/158 rue de la Croix Nivert, de M.F..., de M.G..., de M.E..., de MmeA..., de la société les établissements Montcassin, de la SCI des trois chevrons et de la SCI JHD Paris la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le dossier de permis de construire permettait d'apprécier le respect des règles relatives au gabarit enveloppe en limite séparative prévues à l'article UG 10.3 du règlement du plan local d'urbanisme ;

- la largeur des dégagements prévus par le permis de construire était suffisante au regard des exigences du règlement de sécurité ;

- le permis de construire n'a pas méconnu les règles relatives à l'accès au bâtiment des véhicules d'incendie et de secours.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 juillet 2017, la société les Établissements Moncassin, la SCI des trois Chevrons et la SCI JHD Parisa, représentées par Me Azan, concluent au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société Gecina la somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles font valoir que :

- les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés ;

- le dossier de demande de permis de construire ne mentionne pas l'existence de la convention de cours commune et de servitudes en date du 19 février 1975 ;

- le dossier de demande de permis de construire ne comporte pas l'attestation prévue par le e) de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme.

Par un mémoire en défense et un mémoire, enregistrés les 11 décembre 2017 et

15 mai 2018, le syndicat des copropriétaires du 158 bis rue de la Croix Nivert, le syndicat des copropriétaires du 156/158 rue de la Croix-Nivert, M.F..., M.G..., M. E...et MmeA..., représentés par MeD..., concluent :

- à titre principal, au rejet de la requête ;

- à titre subsidiaire, à l'annulation de l'arrêté du 4 février 2015 par lequel le maire de Paris a délivré un permis de construire à la société Gecina ;

- à ce que soit mise à la charge de la société Gecina la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils font valoir que :

- les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés ;

- l'arrêté litigieux méconnaît l'article L. 425-3 du code de l'urbanisme dès lors que, bien que le projet porte sur la construction d'un établissement recevant du public de 4ème catégorie de type R, aucun accord du préfet de police n'a été donné en l'espèce ;

- il méconnaît l'article L. 425-3 du même code, en ce qu'il ne mentionne pas la nécessité d'obtenir une autorisation complémentaire au titre de l'article L. 111-8 du code de la construction et de l'habitation pour l'aménagement intérieur du bâtiment ;

- le dossier de demande de permis de construire ne comporte pas de plan coté par référence au système altimétrique pris en compte dans le plan de prévention des risques, en méconnaissance de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme ;

- ce dossier est en outre insuffisant au regard des dispositions de l'article R. 431-24 du code de l'urbanisme ;

- l'arrêté litigieux méconnaît l'article UG 10.3.1 du règlement du plan local d'urbanisme ;

- il méconnaît également les dispositions de l'article UG 12.1 du même règlement ;

- il méconnaît en outre les dispositions de l'article UG 12.3 du même règlement ;

- il méconnaît les dispositions du § III du C du plan de prévention des risques du département de Paris ;

- l'arrêté litigieux est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, en ce qu'il est de nature à aggraver le risque d'incendie pour les tiers.

Par un mémoire, enregistré le 6 mars 2018, la ville de Paris, représentée par MeC..., conclut à ce qu'il soit fait droit aux conclusions à fin d'annulation présentées par la société Gecina et au rejet des demandes de première instance présentées par la société les Etablissements Moncassin, la SCI des trois Chevrons et la SCI JHD Paris et par le syndicat des copropriétaires du 158 bis rue de la Croix Nivert, le syndicat des copropriétaires du 156/158 rue de la Croix-Nivert, M.F..., M.G..., M. E...et MmeA....

Elle fait valoir que :

- le dossier de permis de construire permettait d'apprécier le respect des règles relatives au gabarit enveloppe en limite séparative prévues à l'article UG 10.3 du règlement du plan local d'urbanisme ;

- la largeur des dégagements prévus par le permis de construire était suffisante au regard des exigences du règlement de sécurité ;

- le permis de construire n'a pas méconnu les règles relatives à l'accès au bâtiment des véhicules d'incendie et de secours.

Un mémoire présenté par la société Gécina a été enregistré le 22 mai 2018 mais n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- l'arrêté du 25 juin 1980 portant approbation des dispositions générales du règlement de sécurité contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public (ERP) ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Nguyên Duy,

- les conclusions de M. Romnicianu, rapporteur public,

- et les observations de Me Grenier, avocat de la société Gecina, les observations de Me Mazeaud, avocat du syndicat des copropriétaires du 158 bis rue de la Croix Nivert et autres, et les observations de Me Azan, avocat de la SCI des trois Chevrons et autres.

Une note en délibéré, a été présentée pour le syndicat des copropriétaires du 158 bis rue de la Croix Nivert et autres, le 1er juin 2018.

1. Considérant que, par un arrêté du 4 février 2015, le maire de Paris a accordé à la société Gecina un permis de construire portant sur la construction d'un bâtiment d'un étage à usage de crèche privée (60 berceaux) avec changement partiel de destination du bureau en rez-de-chaussée en crèche sur une parcelle comportant deux immeubles de niveau R+9 dont l'accès est situé au 166-170 rue de Javel, dans le XVème arrondissement de Paris ; qu'à la suite du rejet par décision du 1er juin 2015 de leur recours gracieux formé le 3 avril 2015 contre cet arrêté, la société les Etablissements Moncassin, la société civile immobilière des Trois Chevrons et la société civile immobilière JHD ont demandé au tribunal administratif de Paris l'annulation de l'arrêté du 4 février 2015, ainsi que de la décision du 1er juin 2015 ; que, saisi d'une demande identique par le syndicat des copropriétaires du 158 bis rue de la Croix Nivert, le syndicat des copropriétaires du 156-158 rue de la Croix Nivert, ainsi que par plusieurs voisins du projet, le tribunal administratif de Paris a joint ces deux demandes et annulé les décisions attaquées par un jugement du 9 mars 2017 dont la société Gecina relève appel ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que le moyen tiré de ce que les premiers juges auraient commis des erreurs de droit et d'appréciation dans des conditions susceptibles d'affecter la validité de la motivation du jugement relève, tend à remettre en cause, non la régularité du jugement attaqué, mais son bien-fondé, dont le contrôle est opéré par l'effet dévolutif de l'appel ; que de telles erreurs resteraient, en tout état de cause, sans incidence sur la régularité du jugement ;

Sur la légalité des décisions attaquées :

3. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, il appartient au juge d'appel, saisi d'un jugement par lequel un tribunal administratif a prononcé l'annulation d'un permis de construire en retenant plusieurs moyens, de se prononcer sur le bien-fondé de tous les moyens d'annulation retenus au soutien de leur décision par les premiers juges et d'apprécier si l'un au moins de ces moyens justifie la solution d'annulation ; que, dans ce cas, le juge d'appel n'a pas à examiner les autres moyens de première instance ; que, dans le cas où il estime en revanche qu'aucun des moyens retenus par le tribunal administratif n'est fondé, le juge d'appel, saisi par l'effet dévolutif des autres moyens de première instance, examine ces moyens ; qu'il lui appartient de les écarter si aucun d'entre eux n'est fondé et, à l'inverse, en application des dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, de se prononcer, si un ou plusieurs d'entre eux lui paraissent fondés, sur l'ensemble de ceux qu'il estime, en l'état du dossier, de nature à confirmer, par d'autres motifs, l'annulation prononcée par les premiers juges ;

En ce qui concerne le respect des règles de sécurité liées aux dégagements :

4. Considérant qu'aux termes de l'article CO34 du règlement de sécurité contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public : " § 1. Pour l'application du présent règlement on appelle dégagement toute partie de la construction permettant le cheminement d'évacuation des occupants : porte, sortie, issue, circulation horizontale, zone de circulation, escalier, couloir, rampe... / § 2. On appelle : / Dégagement normal : Dégagement comptant dans le nombre minimal de dégagements imposés en application des dispositions de l'article CO 38. / Dégagement accessoire : Dégagement répondant aux dispositions de l'article CO 41, imposé lorsque exceptionnellement les dégagements normaux ne sont pas judicieusement répartis dans le local, l'étage, le secteur, le compartiment ou l'établissement recevant du public. / Dégagement de secours : Dégagement qui, pour des raisons d'exploitation, n'est pas utilisé en permanence par le public. / Dégagement supplémentaire : Dégagement en surnombre des dégagements définis ci-dessus. " ; qu'aux termes de l'article CO36 de ce règlement : " § 1. Chaque dégagement doit avoir une largeur minimale de passage proportionnée au nombre total de personnes appelées à l'emprunter. § 2. Cette largeur doit être calculée en fonction d'une largeur type appelée unité de passage de 0,60 mètre. Toutefois, quand un dégagement ne comporte qu'une ou deux unités de passage, la largeur est respectivement portée de 0,60 mètre à 0,90 mètre et de 1,20 mètre à 1,40 mètre. (...) " ; qu'aux termes de l'article CO38 : " § 1. Les niveaux, locaux, secteurs ou compartiments doivent être desservis dans les conditions suivantes, en fonction de l'effectif des personnes qui peuvent y être admises : / (...)/ c) De 51 à 100 personnes : / Par deux dégagements d'une unité de passage ou par un de deux unités. Dans ce dernier cas, ce dégagement doit être complété par un dégagement accessoire ; / d) Plus de 100 personnes : / Par deux dégagements jusqu'à 500 personnes, augmentés d'un dégagement par 500 personnes ou fraction de 500 personnes au-dessus des 500 premières. La largeur des dégagements doit être calculée à raison d'une unité de passage pour 100 personnes ou fraction de 100 personnes ; / au-dessous de 501 personnes, le nombre d'unités de passage est majoré d'une unité. / § 2. A chaque niveau l'effectif à prendre en compte pour calculer le nombre et la largeur des escaliers desservant ce niveau doit cumuler l'effectif admis à ce niveau avec ceux des niveaux situés au-dessus pour les niveaux en surélévation, ou avec ceux des niveaux en dessous pour les niveaux en sous-sol. " ;

5. Considérant qu'il ressort de la notice de sécurité jointe au permis de construire que la crèche doit accueillir 164 personnes, dont 82 au rez-de-chaussée et 82 au premier étage ; qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées que cet établissement recevant du public devait comporter, pour chacun de ses deux niveaux dans lesquels peuvent être admises 82 personnes, soit deux dégagements d'une unité de passage chacun, d'une largeur de 0,90 m, soit un dégagement de deux unités de passage, d'une largeur de 1,40 m, avec un dégagement accessoire ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'au rez-de-chaussée, la crèche dispose de deux dégagements d'une unité de passage chacun ainsi que d'une sortie accessoire et d'une sortie destinée à la maintenance et est donc conforme aux dispositions du règlement de sécurité, à supposer que le nombre de personnes susceptibles d'être admises à ce niveau n'ait pas été sous-estimé ; qu'il ressort par ailleurs des pièces du dossier que le premier étage de la crèche comporte un dégagement d'une unité de passage ainsi qu'un escalier, lequel doit également être regardé comme un dégagement au sens des dispositions précitées du §1 de l'article CO 34 ; qu'il s'ensuit que la société Gecina est fondée à soutenir que c'est à tort que, pour annuler le permis de construire litigieux, le tribunal administratif de Paris a retenu le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du règlement de sécurité contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public relatives aux dégagements ;

En ce qui concerne la composition du dossier de permis de construire au regard des règles relatives au gabarit-enveloppe :

6. Considérant qu'aux termes de l'article UG. 10.3 du règlement du plan local d'urbanisme de la ville de Paris : " UG.10.3.1 - Dispositions générales : (...) / 2°- Gabarit-enveloppe au-delà de la bande E : Le gabarit-enveloppe se compose successivement : / a - d'une verticale dont la hauteur H est définie par l'expression H = P + 3,00 + D, dans laquelle : / P est le prospect mesuré jusqu'à la limite séparative, / D est la distance, mesurée dans le prolongement du prospect, entre la limite séparative et toute façade comportant une baie d'une construction située sur le fonds voisin (à l'exclusion des jours de souffrance) ; cette distance D n'est prise en compte qu'à concurrence de 6 mètres. / b - d'une oblique de pente 1/1 élevée au sommet de la verticale et limitée à la hauteur plafond. / Le point d'attache du gabarit-enveloppe est pris au niveau de la surface de nivellement d'îlot en limite séparative, en vis-à-vis de la façade ou partie de façade projetée. / Lorsque la façade ou partie de façade d'une construction projetée n'est pas parallèle à la limite séparative, on peut utiliser une valeur moyenne Pm du prospect mesuré perpendiculairement à la construction, calculée par la moyenne arithmétique du prospect le plus petit et du prospect le plus grand. Cette valeur n'est prise en compte qu'à concurrence des 4/3 du prospect le plus petit. / 3°- Adossement en limite séparative au-delà de la bande E : / Au droit d'un bâtiment ou d'un mur de soutènement implanté en limite séparative sur le fonds voisin, la construction à édifier peut excéder le gabarit-enveloppe pour être adossée à ce bâtiment ou à ce mur, dans la limite des héberges voisines existantes : Toutefois, ces héberges peuvent être dépassées : / - de 3,50 mètres en hauteur au maximum dans le cas d'héberges de hauteur variable, / - au droit de courettes dont la largeur n'excède pas 4 mètres (...) " ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la construction projetée a vocation à être implantée en limite séparative de plusieurs parcelles sur lesquelles sont édifiés trois bâtiments R+1 et un bâtiment R+9 ; que si la hauteur de deux bâtiments R+1 figure sur les plans de coupe C et D, les autres plans joints au dossier de permis de construire ne permettent toutefois pas de déterminer la hauteur de l'autre bâtiment R+1, ni surtout d'apprécier la distance entre la limite séparative et les façades comportant des baies du bâtiment R+9, qui est adossé aux bâtiments R+1 et qui jouxtera également le projet de construction à l'une de ses extrémités ; que la société Gecina fait valoir qu'elle a fait figurer, dans son dossier de demande de permis de construire, la ligne correspondant à la distance D de 6 mètres prévu par le 2° de l'article UG 10.3.1 du règlement du PLU afin de matérialiser l'absence de façade avec baies dans cette bande et produit également, pour la première fois en appel, un relevé établi par un géomètre-expert indiquant que les baies du bâtiment R+9 existant en vis-à-vis du projet sont situées à plus de 6 mètres de la limite séparative ; que toutefois il ressort des pièces du dossier que le bâtiment R+9 comporte deux façades avec baies qui donneront sur la limite séparative et qui constituent donc des vues sur ce terrain, à savoir une façade principale située en vis-à-vis de celle-ci et une façade secondaire non parallèle à la limite séparative ; que dès lors qu'aucune des pièces du dossier du permis de construire ne mentionne cette façade secondaire, qui comporte pourtant des baies situées à moins de 6 mètres de la limite séparative, quand bien même celles-ci seraient obliques, une telle insuffisance a été, dans les circonstances de l'espèce, de nature à fausser l'appréciation portée par le service instructeur sur le respect des règles du gabarit-enveloppe ; qu'il ressort d'ailleurs des pièces du dossier que celui-ci s'est à tort fondé sur le fait que les façades des constructions voisines ne comportaient pas de baies ; qu'ainsi, la société Gecina n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, pour annuler le permis de construire litigieux, le tribunal administratif de Paris a estimé que l'insuffisance du dossier de demande de permis de construire a été de nature à entacher d'illégalité le permis délivré à la société Gecina ;

En ce qui concerne le respect des règles de sécurité liées à l'accès du bâtiment :

8. Considérant qu'aux termes du §3 de l'article CO 1 du règlement de sécurité : " Les bâtiments dont le plancher bas du dernier niveau accessible au public est à moins de 8 mètres au-dessus du sol doivent être desservis : - soit par des espaces libres conformes à l'article CO 2, paragraphe 3 ; - soit par des voies engins conformes à l'article CO 2, paragraphe 1. " ; qu'aux termes de l'article CO 2 de ce règlement : " § 1. Voie utilisable par les engins de secours (en abrégé voie engins) : voie, d'une largeur minimale de 8 mètres, comportant une chaussée répondant aux caractéristiques suivantes, quel que soit le sens de la circulation suivant lequel elle est abordée à partir de la voie publique : Largeur, bandes réservées au stationnement exclues : 3 mètres pour une voie dont la largeur exigée est comprise entre 8 et 12 mètres ; 6 mètres pour une voie dont la largeur exigée est égale ou supérieure à 12 mètres. Toutefois, sur une longueur inférieure à 20 mètres, la largeur de la chaussée peut être réduite à 3 mètres et les accotements supprimés, sauf dans les sections de voies utilisables pour la mise en station des échelles aériennes définies au paragraphe 2 ci-dessous. (...) § 3. Espace libre : espace répondant aux caractéristiques minimales suivantes : - la plus petite dimension est au moins égale à la largeur totale des sorties de l'établissement sur cet espace, sans être inférieure à 8 mètres ; - il ne comporte aucun obstacle susceptible de s'opposer à l'écoulement régulier du public ; - il permet l'accès et la mise en oeuvre facile du matériel nécessaire pour opérer les sauvetages et combattre le feu ; - les issues de l'établissement sur cet espace sont à moins de 60 mètres d'une voie utilisable par les engins de secours ; - la largeur minimale de l'accès, à partir de cette voie est de : - 1,80 mètre lorsque le plancher bas du dernier niveau accessible au public est de 8 mètres au plus au-dessus du sol ; - 3 mètres lorsque le plancher bas du dernier niveau accessible au public est à plus de 8 mètres au-dessus du sol. " ; qu'aux termes de l'article CO 3 : " § 1. Chaque bâtiment, en fonction de sa hauteur et de l'effectif du public reçu, doit avoir une ou plusieurs façades accessibles, desservies chacune par une voie ou un espace libre suivant les conditions fixées aux articles CO 1 (§ 3), CO 4 et CO 5. / § 2. Façade accessible : façade permettant aux services de secours d'intervenir à tous les niveaux recevant du public. Elle comporte au moins une sortie normale au niveau d'accès du bâtiment et des baies accessibles à chacun de ses niveaux. " ; qu'aux termes de l'article CO 4 du même règlement : " Le nombre minimal de façades accessibles et de dessertes correspondantes par des voies ou espaces libres est fixé comme suit : (...) e) Etablissements de 4e catégorie : Une façade accessible qui, par dérogation aux dispositions de l'article CO 2 (§ 1 et 2), est desservie : - par une voie de 6 mètres de large comportant une chaussée libre de stationnement de 4 mètres de large au moins ; ou - par une impasse de 8 mètres de large avec une chaussée libre de stationnement de 7 mètres de large au moins. " ;

9. Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées que la desserte des établissements recevant du public dont le plancher bas du dernier niveau accessible au public est à moins de 8 mètres et qui constituent des établissements de catégorie 4, tels que la crèche dont la construction est projetée, peut être assurée, soit par un espace libre remplissant les conditions posées par le §3 de l'article CO 2, soit par une voie engin conforme à l'article CO 2, paragraphe 1, soit par une voie de 6 mètres de large comportant une chaussée libre de stationnement de 4 mètres de large au moins ou par une impasse de 8 mètres de large avec une chaussée libre de stationnement de 7 mètres de large au moins ;

10. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que la seule façade accessible du projet est desservie par deux passages sous porche, l'un destiné aux véhicules, l'autre aux piétons, débouchant sur la rue de Javel ; que cette façade n'est donc desservie ni par une voie engin au sens du §1 de l'article CO 2 précité, ni par une voie de 6 mètres de large ni par une impasse de 8 mètres de large ;

11. Considérant, d'autre part, que la société Gécina soutient que la façade litigieuse est desservie par un espace libre au sens du §3 de l'article CO 2 précité ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'entrée de la crèche donne sur un grand espace dégagé, d'environ 24 mètres de large sur 30 mètres de long, permettant aux engins de secours venant du porche réservé aux véhicules de manoeuvrer ; que si, compte tenu de l'existence du passage sous porche piéton débouchant sur la rue de Javel, la distance séparant l'établissement de cette voie est inférieure à 60 mètres, il ressort toutefois des photographies produites par les intimés que la largeur de cet accès, lequel est constitué de deux portails séparés par un bloc central scellé, est inférieure à 1,80 mètre ; qu'il ressort cependant des plans joints à la demande de permis de construire que la distance séparant l'issue principale de l'établissement de la rue de Javel, en passant par le porche réservé aux véhicules, est d'environ 60 mètres ; que toutefois la seconde issue de l'établissement ne débouche pas sur cet espace libre, mais sur une cour close qui ne sera pas accessible depuis une voie engins ; que la société Gecina n'est donc pas fondée à soutenir que, quand bien même elle aurait reçu un avis favorable de la commission locale de sécurité, la façade de la crèche serait desservie par un espace libre répondant aux exigences du §3 de l'article CO 2 ; qu'il résulte de ce qui précède que le permis de construire doit être regardé comme ne respectant pas les règles d'accessibilité prévues par le règlement de sécurité des établissements recevant du public précitées ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Gecina n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé le permis de construire qui lui a été délivré par le maire de Paris le 4 février 2015 ;

Sur les frais liés au litige :

13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge des intimés, qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la société Gecina demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

14. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Gecina la somme globale de 1 500 euros au titre des frais exposés par le syndicat des copropriétaires du 158 bis rue de la Croix Nivert, le syndicat des copropriétaires du 156/158 rue de la Croix-Nivert, M.F..., M.G..., M. E...et Mme A...pour leur défense, ainsi que la somme globale de 1 500 euros au titre de ceux exposés par la société les Etablissements Moncassin, la société civile immobilière des trois Chevrons et la société civile immobilière JHD ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Gécina est rejetée.

Article 2 : La société Gécina versera la somme globale de 1 500 euros au syndicat des copropriétaires du 158 bis rue de la Croix Nivert, au syndicat des copropriétaires du 156/158 rue de la Croix-Nivert, à M.F..., à M.G..., à M. E...et à MmeA..., et la somme globale de 1 500 euros à la société les Etablissements Moncassin, à la société civile immobilière des trois Chevrons et à la société civile immobilière JHD.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Gécina, au syndicat des copropriétaires du 158 bis rue de la Croix Nivert, au syndicat des copropriétaires du 156/158 rue de la Croix-Nivert, à M.F..., à M.G..., à M. E...et à MmeA..., à la société les Etablissements Moncassin, à la société civile immobilière des trois Chevrons, à la société civile immobilière JHD et à la ville de Paris.

Délibéré après l'audience du 24 mai 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Diémert, président de la formation de jugement en application des articles L. 234-3

(1er alinéa) et R. 222-6 (1er alinéa) du code de justice administrative,

- M. Legeai, premier conseiller,

- Mme Nguyên Duy, premier conseiller.

Lu en audience publique le 14 juin 2018.

Le rapporteur,

P. NGUYÊN DUY Le président,

S. DIÉMERT Le greffier,

M. B...La République mande et ordonne au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris en ce qui le concerne ou à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA01545


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17PA01545
Date de la décision : 14/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Légalité interne du permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. DIEMERT
Rapporteur ?: Mme Pearl NGUYÊN-DUY
Rapporteur public ?: M. ROMNICIANU
Avocat(s) : CABINET AZAN

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-06-14;17pa01545 ?
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