Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
MmeD... B..., épouseA..., a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 5 juillet 2016 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé son pays de destination.
Par un jugement n° 1606649 du 26 octobre 2017, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 1er décembre 2017, Mme B..., représentée par Me Pouget, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1606649 du 26 octobre 2017 du tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler l'arrêté du 5 juillet 2016 du préfet du Val-de-Marne ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à lui verser sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté est insuffisamment motivé ;
- le préfet était tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour ;
- la décision portant refus de certificat de résidence méconnaît les stipulations de l'article 6, notamment paragraphe 5, et de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien modifié, les dispositions de l'article L. 313-11 et L. 131-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité du refus de certificat de résidence qui la fonde ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Legeai,
- et les observations de Me Pouget, avocat de MmeB....
1. Considérant que MmeB..., ressortissante algérienne née en juillet 1992, soutient être entrée en France en mars 2015 ; qu'à la suite de son mariage, le 10 juillet 2015, avec M.A..., de nationalité française, elle a sollicité un certificat de résidence sur le fondement des stipulations de l'article 6-2 de l'accord franco-algérien modifié ; que, par un arrêté du 5 juillet 2016, le préfet du Val-de-Marne a opposé un refus à sa demande, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel Mme B...pourrait être reconduite ; que Mme B... relève régulièrement appel du jugement du 26 octobre 2017 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la décision portant refus de certificat de résidence :
2. Considérant, en premier lieu, que Mme B...reprend en appel, sans apporter d'élément nouveau, le moyen qu'elle avait invoqué en première instance tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté du 5 juillet 2016 ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges aux points 3 et 4 de leur jugement ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 2. Au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français " ; qu'aux termes de l'article 7 bis du même accord : " (...) Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit sous réserve de la régularité du séjour pour ce qui concerne les catégories visées au a) (...) : a) Au ressortissant algérien, marié depuis au moins un an avec un ressortissant de nationalité française, dans les mêmes conditions que celles prévues à l'article 6 nouveau 2) et au dernier alinéa de ce même article (...) " ; que le préfet n'est tenu, en application des dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de saisir la commission du titre de séjour que du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues pour l'obtention d'un titre de séjour de plein droit en application des dispositions de ce code, ou des stipulations équivalentes de l'accord franco-algérien, auxquels il envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...s'est mariée le 10 juillet 2015 à Ivry-sur-Seine avec M. A..., ressortissant français, et soutient résider avec lui ; que, toutefois, la requérante, qui dit être entrée en Espagne le 16 mars 2015 sous couvert d'un visa valable du 10 mars au 9 juin 2015, ne rapporte pas la preuve de son entrée régulière sur le territoire français durant la période de validité de ce visa ; que, par suite, Mme B...n'est pas fondée à soutenir qu'elle remplissait les conditions prévues par les stipulations du paragraphe 2 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; que, faute de résider en France en situation régulière, elle ne remplit pas non plus les conditions prévues par l'article 7 bis a) du même accord ; qu'ainsi le préfet du Val-de-Marne n'a pas commis d'erreur d'appréciation en refusant de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de ces stipulations et n'avait pas à saisir la commission du titre de séjour avant de prendre sa décision ;
4. Considérant, en troisième lieu, que le paragraphe 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 prévoit également la délivrance du certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" " au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
5. Considérant que MmeB..., qui fait valoir être mariée depuis le 10 juillet 2015 à M. A..., ressortissant français, se borne à produire, pour démontrer l'ancienneté de la vie commune, plusieurs quittances de loyer manuscrites au nom des époux pour la période allant d'août 2015 à septembre 2017, dont deux différentes pour le mois de juin 2016, et une attestation sur l'honneur de la gérante de l'hôtel Limousin à Ivry-sur-Seine, lieu de résidence du couple, qui soutient que la requérante et son mari sont clients de son établissement depuis le 1er novembre 2014 ; que, toutefois, cette attestation entre en contradiction avec les déclarations de Mme B... selon lesquelles elle serait entrée en France en mars 2015 ; qu'ainsi, alors qu'aucun document n'établit de vie commune des époux avant août 2015, soit moins d'un an avant la décision litigieuse, et qu'il n'est apporté aucune précision sur les conditions de vie du couple ou les autres attaches personnelles et familiales de MmeB..., il ne ressort pas des pièces du dossier que le refus de délivrer à la requérante un certificat de résidence aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport au but en vue duquel cette décision a été prise ; que, par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations des articles 6 paragraphe 5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés ;
6. Considérant, en quatrième lieu, que Mme B...ne saurait utilement se prévaloir de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-11 (4°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers, dès lors que ces dispositions ne sont pas applicables aux ressortissants algériens dont la situation est réglée par les stipulations équivalentes de l'article 6-2 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
7. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ; que si l'accord franco-algérien ne prévoit pas de modalités d'admission exceptionnelle au séjour telles qu'elles figurent à l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit ; qu'il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressée, l'opportunité d'une mesure de régularisation ; que compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce rappelées aux points 3 et 5 ci-dessus, le préfet du Val-de-Marne a pu estimer sans erreur manifeste d'appréciation que Mme B...ne faisait état d'aucune considération humanitaire et d'aucun motif exceptionnel de nature à justifier sa régularisation ; que, par suite, à supposer que Mme B...ait entendu invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 en mentionnant l'article L. 131-14, ce moyen ne peut qu'être écarté ;
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
8. Considérant, en premier lieu, que si Mme B...soutient que l'illégalité du refus de certificat de résidence prive de base légale la décision portant obligation de quitter le territoire français, il résulte de ce qui a été dit précédemment que ce moyen ne peut être qu'écarté ;
9. Considérant, en deuxième lieu, que MmeB..., ressortissante algérienne, ne peut utilement se prévaloir de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lequel n'est applicable qu'au " citoyen de l'Union européenne " et au " ressortissant d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse " ;
10. Considérant, en troisième lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 5 ;
Sur la décision fixant le pays de destination :
11. Considérant que si Mme B...indique contester le jugement du tribunal administratif de Melun en ce qu'il a retenu que la décision fixant le pays de renvoi ne méconnaissait ni les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, elle n'assortit cette " contestation " d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien fondé ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que sa requête d'appel, y compris, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à la condamnation de l'Etat, qui n'est pas partie perdante, à prendre en charge les frais de procédure sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doit être rejetée ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B..., épouseA..., et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.
Délibéré après l'audience du 4 mai 2018, à laquelle siégeaient :
- Mme Pellissier, présidente de chambre,
- M. Legeai, premier conseiller,
- Mme Nguyên Duy, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 31 mai 2018.
Le rapporteur,
A. LEGEAILa présidente,
S. PELLISSIER Le greffier,
M. C...La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA03662