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29/05/2018 | FRANCE | N°17PA03058

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 29 mai 2018, 17PA03058


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...et M. D...ès qualité de représentants de leur fils mineur G...ont demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 5 décembre 2016 par laquelle le proviseur du lycée Buffon à Paris a indiqué dans le bulletin de notes du premier trimestre que leur fils, Thomas Le Vay, avait fraudé à un devoir sur table de mathématiques, d'enjoindre au lycée Buffon d'éditer et de signer un nouveau bulletin de notes ne comportant aucune mention de la fraude, dans un délai de cinq jours à comp

ter du jugement à intervenir, sous astreinte de 300 euros par jour de retard e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...et M. D...ès qualité de représentants de leur fils mineur G...ont demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 5 décembre 2016 par laquelle le proviseur du lycée Buffon à Paris a indiqué dans le bulletin de notes du premier trimestre que leur fils, Thomas Le Vay, avait fraudé à un devoir sur table de mathématiques, d'enjoindre au lycée Buffon d'éditer et de signer un nouveau bulletin de notes ne comportant aucune mention de la fraude, dans un délai de cinq jours à compter du jugement à intervenir, sous astreinte de 300 euros par jour de retard et de mettre à la charge de l'État la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1701604 du 12 juillet 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté cette requête ;

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête enregistrée le 11 septembre 2017, sous le n°1703058, Mme B...et M. D... représentés par MeC..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 12 juillet 2017 ;

2°) d'annuler la décision du 5 décembre 2016 par laquelle le proviseur du lycée Buffon à Paris a indiqué dans le bulletin de notes du premier trimestre que leur fils, Thomas Le Vay, avait fraudé à un devoir sur table de mathématiques ;

3°) de mettre à la charge du rectorat de l'académie de Paris la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :

- le jugement est insuffisamment motivé dès lors qu'il ne répond pas au moyen tiré de ce que la décision attaquée nuit à leur fils, ni à celui tiré de ce qu'il s'agit d'une sanction déguisée ;

- le jugement est entaché d'erreur de droit car il s'est prononcé sur une demande d'annulation de la mention de la fraude et non, comme cela lui était demandé, sur la décision révélée par cette mention de faire figurer cette indication sur le bulletin ;

- il est entaché d'erreur de droit en ce que l'inscription de la fraude sur le bulletin n'était pas nécessaire pour que cette fraude puisse être prise en considération dans le cadre de la décision de fin d'année sur l'admission aux épreuves du bac, le redoublement ou la réorientation ;

- il est entaché d'erreur de droit en ce qu'il ne pouvait se fonder sur la circonstance que cette mention serait indétachable de la décision d'orientation prise en fin d'année alors qu'aucune décision de ce type n'a été prise ;

- le jugement méconnait le principe du droit au recours garanti par l'article 16 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen et par les articles 6-1 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui posent le principe du droit à un recours effectif ;

- le jugement est entaché d'erreur de droit dès lors que la décision contestée fait grief à Thomas et devait dès lors être regardée comme susceptible de recours compte tenu de son incidence sur sa scolarité ;

- le jugement est entaché d'erreur de droit aussi car la décision est constitutive d'une sanction administrative ;

- les requérants sont fondés à exciper de l'illégalité du règlement intérieur du lycée Buffon qui méconnait les principes applicables aux sanctions administratives, et notamment celui de légalité des délits et des peines, applicable aux sanctions administratives, dès lors que la mention d'une fraude dans le bulletin ne fait pas partie des sanctions prévues par l'article R.511-3 du code de l'éducation ;

- ce règlement intérieur méconnait aussi les principes de nécessité, de proportionnalité et d'individualisation des sanctions administratives par le règlement intérieur ainsi que d'interdiction de cumul de sanctions ;

- il méconnait le principe d'égalité dès lors que cette mention dans le bulletin crée une rupture d'égalité avec les élèves des autres lycées, dont le règlement intérieur ne prévoit pas une telle mesure ;

- le jugement est entaché d'erreur de droit dès lors que la décision attaquée méconnait le principe d'égalité devant le service public de l'enseignement supérieur ;

II. Par une requête enregistrée le 11 septembre 2017 sous le n°1703059, Mme B...et M. D... représentés par MeC..., demandent à la Cour d'ordonner qu'il soit sursis à l'exécution du jugement n°1701604 du 12 juillet 2017 du Tribunal administratif de Paris en application de l'article R.811-17 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'exécution du jugement en cause est susceptible d'avoir des conséquences difficilement réparables sur la scolarité de leur fils puisque les bulletins trimestriels de la classe de terminale sont analysés dans les procédures d'admission dans l'enseignement supérieur ;

- les moyens énoncés dans leur requête au fond, qu'ils reprennent, sont sérieux.

Par une ordonnance du 11 janvier 2018, la clôture de l'instruction du dossier 170PA3058 a été fixée au 13 février 2018.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

-le code de l'éducation,

-le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Labetoulle,

- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,

- et les observations de Me A...pour Mme B...et M.D....

1. Considérant que Thomas Le Vay, élève de terminale au lycée Buffon pendant l'année scolaire 2016-2017 a été surpris en train de frauder lors d'un devoir sur table de mathématiques au cours du premier trimestre ; que, indépendamment de la sanction d'exclusion de deux jours prononcée pour ces faits, cette fraude a été mentionnée dans le bulletin de notes du premier trimestre de cet élève en application du règlement intérieur du lycée ; que ses parents, M. D...et Mme B..., ont alors saisi le Tribunal administratif de Paris de deux requêtes à fins de suspension et d'annulation de la décision de porter cette mention sur le bulletin scolaire de leur fils ; que le tribunal a rejeté leur demande , par jugement du 12 juillet 2017 dont les requérants interjettent appel dans l'instance n°17PA03058 et dont ils sollicitent par ailleurs le sursis à exécution dans l'instance n°17PA03059 ;

Sur la requête n°17PA03058 :

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'en relevant, après avoir rappelé les faits, que l'appréciation contestée n' était pas détachable de la décision susceptible d'être prise au terme de l'année scolaire sur l'admission aux épreuves du baccalauréat, l'autorisation de redoubler ou l'orientation vers une autre forme d'enseignement et n'était dès lors pas susceptible d'être déférée au juge de l'excès de pouvoir, les premiers juges ont mis à même les requérants de comprendre les motifs du rejet de leur demande ; qu'ils ont aussi implicitement mais nécessairement écarté les moyens tirés de ce qu'il s'agissait au contraire d'une décision susceptible de recours, puisque cette décision faisait grief à leur fils et qu'elle avait un caractère de sanction ; que le jugement attaqué, qui rejetait ainsi la requête pour irrecevabilité n'avait pas à se prononcer sur les moyens tendant à mettre en cause la légalité de cette décision ; que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement attaqué doit dès lors être écarté ;

3. Considérant que s'il est possible de saisir le juge de l'excès de pouvoir de décisions révélées par un agissement de l'administration, la mention de la fraude sur le bulletin scolaire du fils des requérants ne saurait se distinguer d'une décision autonome de faire apparaitre cette mention, qui serait révélée par cette mention elle-même ; que les requérants ne sont par suite pas fondés à soutenir que le tribunal aurait méconnu le sens de leurs conclusions en se prononçant sur la mention relative à cette fraude dans le bulletin scolaire de leur fils, plutôt que sur la décision de porter une telle mention ; qu'à supposer qu'ils aient entendu soutenir que le tribunal aurait méconnu la portée des conclusions dont il était saisi, le moyen ne pourra dès lors qu'être écarté ;

Sur le bien-fondé du jugement :

4. Considérant que, comme l'ont à juste titre relevé les premiers juges, l'appréciation portée sur un bulletin scolaire n'est pas détachable de la décision susceptible d'être prise au terme de l'année scolaire sur l'admission aux épreuves du baccalauréat, l'autorisation de redoubler ou l'orientation vers une autre forme d'enseignement ; que les requérants ne sont pas fondés à critiquer ce motif du fait qu'aucune décision n'aurait été prise en fin d'année sur l'avenir scolaire de leur fils alors qu'ils indiquent eux-mêmes que celui-ci a, à la fin de l'année scolaire 2016-2017, obtenu le baccalauréat, ce qui révèle une décision du lycée de l'admettre aux épreuves de cet examen ; que par ailleurs la circonstance que la fraude commise puisse, même sans mention dans le bulletin trimestriel, être prise en compte dans le cadre de la décision susceptible d'être prise au terme de l'année scolaire ne permet pas d'établir que la mention de cette fraude revêtirait un caractère décisoire et serait détachable de la décision d'orientation de la fin d'année scolaire ;

5. Considérant que si les requérants font également valoir que les bulletins trimestriels de l'année de terminale sont susceptibles d'être produits dans les dossiers de demande d'admission dans des établissements de l'enseignement supérieur et d'être pris en compte dans le cadre de l'examen de ces dossiers, la mention dans ces bulletins d'une fraude n'est pas d'une nature distincte de toute autre mention y figurant, relatives au travail et au comportement de l'élève et qui, étant susceptibles de comporter le cas échéant des appréciations défavorables, peuvent tout autant faire grief à l'intéressé et le desservir sans pour autant être susceptibles de recours ; que de même la mention d'une telle fraude ne revêt pas davantage le caractère d'une sanction que toute autre mention négative susceptible de figurer sur le bulletin ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le tribunal a pu à bon droit juger que la décision attaquée était insusceptible de recours ; qu'en la rejetant pour irrecevabilité il n'a ainsi pas méconnu les dispositions de l'article 16 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen et les stipulations des articles 6-1 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

7. Considérant que Mme B...et M. D...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté pour irrecevabilité leur demande tendant à l'annulation de la mention, sur le bulletin scolaire de leur fils, de la fraude qu'il avait commise ; que leur requête doit dès lors être rejetée sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les moyens tendant à mettre en cause la légalité de la décision litigieuse ;

Sur la requête n° 17PA03059 à fin de sursis à exécution :

8. Considérant que la Cour, statuant au fond, par le présent arrêt, sur les conclusions de la requête à fin d'annulation du jugement, les conclusions des requérants à fin de sursis à exécution de ce jugement deviennent sans objet ; que, par suite, il n'y a plus lieu d'y statuer ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dans les deux instances :

9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement à Mme B...et M.D... des sommes qu'ils demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur la requête n°17PA03059.

Article 2 : La requête n°17PA03058 de Mme B...et M. D...est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F...B..., à M. E...D...et au ministre de l'éducation nationale.

Délibéré après l'audience du 15 mai 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- Mme Labetoulle, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 mai 2018.

Le rapporteur,

M-I. LABETOULLELe président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

P. TISSERAND

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

3

N° 17PA03058-17PA03059


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA03058
Date de la décision : 29/05/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

30-02-02-01 Enseignement et recherche. Questions propres aux différentes catégories d'enseignement. Enseignement du second degré. Scolarité.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: Mme Marie-Isabelle LABETOULLE
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : HDLA - AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 29/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-05-29;17pa03058 ?
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