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13/04/2018 | FRANCE | N°17PA02651

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 13 avril 2018, 17PA02651


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 17 février 2017 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il serait éloigné.

Par un jugement n° 1704759 du 13 juillet 2017, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 28 ju

illet 2017 et 16 mars 2018, M. B..., représenté par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce ju...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 17 février 2017 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il serait éloigné.

Par un jugement n° 1704759 du 13 juillet 2017, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 28 juillet 2017 et 16 mars 2018, M. B..., représenté par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 17 février 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour et, à défaut, sous la même astreinte, de procéder au réexamen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. B... soutient que :

- l'arrêté contesté est entaché d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle et d'une insuffisance de motivation ;

- le préfet de police, en refusant de lui délivrer la carte de séjour sollicitée sur le fondement du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au motif qu'il ne disposait pas d'un contrat de travail visé, a commis une erreur de droit ;

- l'arrêté contesté a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mars 2018, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Le préfet de police soutient que les moyens invoqués par M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code du travail ;

- l'arrêté du 28 octobre 2016 fixant la liste des pièces à fournir pour l'exercice, par un ressortissant étranger, d'une activité professionnelle salariée ;

- le code de justice administrative.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Boissy, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Mielnik-Meddah, rapporteur public.

1. Considérant que M. B..., de nationalité égyptienne, entré en France, selon ses déclarations, au cours de l'année 2009, a obtenu une carte de séjour temporaire, délivrée sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pour la période allant du 29 novembre 2012 au 28 novembre 2013, puis renouvelée jusqu'au 13 mai 2015 ; qu'il a demandé le renouvellement de ce dernier titre de séjour ainsi que la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié sur le fondement du 1° de l'article

L. 313-10 ou son admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié sur le fondement de l'article L. 313-14 du même code ; que, par un arrêté du 17 février 2017, le préfet de police a refusé de l'autoriser à séjourner en France et lui a fait obligation de quitter le territoire français en fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement ; que M. B... relève appel du jugement du 13 juillet 2017 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Une carte de séjour temporaire, d'une durée maximale d'un an, autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée à l'étranger : 1° Pour l'exercice d'une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée, dans les conditions prévues à l'article L. 5221-2 du code du travail. Elle porte la mention " salarié " " ; qu'aux termes de l'article R. 313-15 du même code : " Pour l'application du 1° de l'article L. 313-10, l'étranger qui demande la carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " doit présenter à l'appui de sa demande, outre les pièces mentionnées aux articles R. 311-2-2 et R. 313-1, les pièces suivantes : (...) 2° Lorsqu'il réside sur le territoire français, un formulaire de demande d'autorisation de travail, pour la conclusion d'un contrat de travail à durée indéterminée avec un employeur établi en France correspondant à l'emploi sollicité. Ce formulaire est conforme au modèle fixé par arrêté du ministre chargé du travail " ; qu'aux termes de l'article R. 313-1 de ce code : " L'étranger qui sollicite la délivrance d'une première carte de séjour doit présenter à l'appui de sa demande, outre les pièces mentionnées à l'article R. 311-2-2, les pièces suivantes : / 1° Les documents, mentionnés à l'article R. 211-1, justifiant qu'il est entré régulièrement en France ; / 2° Sauf stipulation contraire d'une convention internationale applicable en France, un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois autre que celui mentionné au 3° de l'article R. 311-3 ; / 3° Un certificat médical délivré dans les conditions fixées par arrêté conjoint du ministre chargé de la santé et du ministre chargé de l'immigration sauf exemptions prévues par le présent code. La présentation du certificat médical est différée au moment de la remise du titre de séjour à l'étranger ; / 4° Trois photographies de face, tête nue, de format 3,5 × 4,5 cm, récentes et parfaitement ressemblantes ; / 5° Un justificatif de domicile " ; qu'aux termes de l'article R. 313-4-1 de ce code : " L'étranger déjà admis à résider en France qui sollicite le renouvellement d'une carte de séjour (...) doit présenter à l'appui de sa demande, outre les pièces mentionnées à l'article R. 311-2-2, les pièces suivantes : / 1° Un justificatif de domicile ; / 2° Trois photographies de face, tête nue, de format 3,5 × 4,5 cm, récentes et parfaitement ressemblantes ; / 3° La carte de séjour dont il était précédemment titulaire " ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 5221-5 du code du travail : " Un étranger autorisé à séjourner en France ne peut exercer une activité professionnelle salariée en France sans avoir obtenu au préalable l'autorisation de travail mentionnée au 2° de l'article L. 5221-2 (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 5221-2 : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : (...) / 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail " ; qu'aux termes de l'article R. 5221-3 du même code : " L'autorisation de travail peut être constituée par l'un des documents suivants : (...) 8° La carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", délivrée en application du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (...) " ; qu'en vertu de l'article R. 5221-11, la demande d'autorisation de travail relevant du 8° de l'article R. 5221-3 est faite par l'employeur ; qu'aux termes de l'article R. 5221-15 : " Lorsque l'étranger est déjà présent sur le territoire national, la demande d'autorisation de travail mentionnée à l'article R. 5221-11 est adressée au préfet de son département de résidence " ; qu'aux termes de l'article R. 5221-17 : " La décision relative à la demande d'autorisation de travail mentionnée à l'article R. 5221-11 est prise par le préfet. Elle est notifiée à l'employeur ou au mandataire qui a présenté la demande, ainsi qu'à l'étranger " ; qu'aux termes de l'article R. 5221-20 : " Pour accorder ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : / 1° La situation de l'emploi dans la profession et dans la zone géographique pour lesquelles la demande est formulée, compte tenu des spécificités requises pour le poste de travail considéré, et les recherches déjà accomplies par l'employeur auprès des organismes concourant au service public de l'emploi pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail ; / 2° L'adéquation entre la qualification, l'expérience, les diplômes ou titres de l'étranger et les caractéristiques de l'emploi auquel il postule ; / Lorsque la demande concerne un étudiant ayant achevé son cursus sur le territoire français cet élément s'apprécie au regard des seules études suivies et seuls diplômes obtenus en France ; / 3° le respect par l'employeur, l'utilisateur mentionné à l'article L. 1251-1 ou l'entreprise d'accueil de la législation relative au travail et à la protection sociale ; / 4° Le cas échéant, le respect par l'employeur, l'utilisateur, l'entreprise d'accueil ou le salarié des conditions réglementaires d'exercice de l'activité considérée ; / 5° Les conditions d'emploi et de rémunération offertes à l'étranger, qui sont comparables à celles des salariés occupant un emploi de même nature dans l'entreprise ou, à défaut, conformes aux rémunérations pratiquées sur le marché du travail pour l'emploi sollicité ; / 6° Le salaire proposé à l'étranger qui, même en cas d'emploi à temps partiel, est au moins équivalent à la rémunération minimale mensuelle mentionnée à l'article L. 3232-1 (...) " ; qu'enfin la liste des documents à présenter à l'appui d'une demande d'autorisation de travail, prévue par l'article R. 5221-12 du même code, a été fixée par un arrêté du 28 octobre 2016 ;

4. Considérant qu'il résulte de la conjonction des dispositions précitées qu'un étranger titulaire d'une carte de séjour temporaire qui sollicite, avant l'expiration de la validité de son titre, la délivrance d'une carte de séjour temporaire sur le fondement du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit seulement présenter, à l'appui de sa demande, outre les pièces mentionnées aux articles R. 311-2-2 et R. 313-4-1 du même code, le formulaire mentionné au 2° de l'article R. 313-15 accompagné des pièces spécifiquement exigées à l'article 1er de l'arrêté du 28 octobre 2016 ; qu'il appartient alors au préfet de police, s'il n'envisage pas de rejeter cette demande pour un motif autre que le respect de la réglementation du travail, de statuer sur cette demande après avoir recueilli la position des services compétents en matière d'autorisation de travail et, en particulier, les éléments d'appréciation énoncés à l'article R. 5221-20 du code du travail ; qu'il ne peut en revanche pas rejeter une telle demande au motif que l'étranger n'aurait pas suivi la procédure, définie notamment aux articles R. 5221-11 et R. 5221-15 du code du travail, en vue d'obtenir une autorisation de travail ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et en particulier des termes mêmes de l'arrêté contesté et du courrier du 11 janvier 2017 émanant du conseil de M. B..., que ce dernier a notamment demandé la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " sur le fondement du 1° de l'article L. 313-10 ; qu'il n'est pas sérieusement contesté qu'il a également transmis au préfet de police, à l'appui de sa demande, les pièces réglementaires exigées et, notamment, en application du 2° de l'article R. 313-15, le formulaire de demande d'autorisation de travail renseigné par son employeur et daté du 5 octobre 2016 ; qu'en se bornant à rejeter la demande de titre de séjour présentée sur ce fondement au motif que l'intéressé ne disposait pas " d'un contrat de travail visé par les services de la main-d'oeuvre étrangère ", alors qu'il lui appartenait, s'il l'estimait nécessaire, de recueillir préalablement la position des services compétents en matière d'autorisation de travail, le préfet de police a commis une erreur de droit et entaché, pour ce motif, l'arrêté contesté d'une illégalité ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 février 2017 et à demander l'annulation de ce jugement et de cet arrêté ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé " ; qu'aux termes de l'article L. 911-3 de ce code : " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et

L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet " ;

8. Considérant que si, compte tenu du motif retenu pour annuler l'arrêté en litige, l'exécution du présent arrêt n'implique pas nécessairement que le préfet de police délivre à M. B... un titre de séjour, elle implique en revanche nécessairement qu'il procède au réexamen de sa demande ; que, dès lors, il y a lieu d'ordonner au préfet de police de procéder au réexamen de la demande de l'intéressé dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a en revanche pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances particulières de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros en au titre des frais que M. B... a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1704759 du tribunal administratif de Paris en date du 13 juillet 2017 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du préfet de police en date du 17 février 2017 est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de police de procéder au réexamen de la demande de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à M. B... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 23 mars 2018 à laquelle siégeaient :

- Mme Heers, président de chambre,

- M. Auvray, président assesseur,

- M. Boissy, premier conseiller,

Lu en audience publique le 13 avril 2018.

Le rapporteur,

L. BOISSYLe président,

M. HEERSLe greffier,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 17PA02651 6


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA02651
Date de la décision : 13/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: M. Laurent BOISSY
Rapporteur public ?: Mme MIELNIK-MEDDAH
Avocat(s) : DIOP

Origine de la décision
Date de l'import : 24/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-04-13;17pa02651 ?
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