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12/04/2018 | FRANCE | N°17PA03307

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 12 avril 2018, 17PA03307


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 17 mars 2017 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant son pays de destination.

Par un jugement n° 1706926/4-1 du 19 septembre 2017, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 24 octobre 2017, M. D..., r

eprésenté par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1706926/4-1 du 19 sept...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 17 mars 2017 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant son pays de destination.

Par un jugement n° 1706926/4-1 du 19 septembre 2017, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 24 octobre 2017, M. D..., représenté par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1706926/4-1 du 19 septembre 2017 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 17 mars 2017 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à lui verser sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement du tribunal administratif de Paris n'est pas suffisamment motivé ;

- l'arrêté n'est pas suffisamment motivé ;

- il est entaché d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- le préfet était tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour en application des dispositions de l'article L. 313-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant à la situation personnelle et professionnelle du requérant et quant aux conséquences du refus de titre de séjour.

Par un mémoire en défense enregistré le 20 mars 2018, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête sont infondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Legeai a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. D..., ressortissant égyptien né le 30 janvier 1951, a sollicité le 20 décembre 2016 un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 17 mars 2017, le préfet de police a opposé un refus à sa demande, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel l'intéressé pourrait être reconduit d'office à la frontière à l'expiration de ce délai ; que M. D... relève régulièrement appel du jugement du 19 septembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'il ressort de l'examen du jugement attaqué que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à chaque argument de la demande de M. D..., ont répondu de manière suffisamment précise sur l'ensemble des moyens invoqués par le requérant à l'encontre de l'arrêté du 17 mars 2017 ; que, par suite, le jugement du tribunal administratif de Paris est suffisamment motivé ;

Sur la légalité de l'arrêté du 17 mars 2017 :

3. Considérant, en premier lieu, que le refus de titre de séjour opposé à M. D... le 17 mars 2017 comporte de façon suffisamment précise l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que s'il ne précise pas pour quelles années le préfet a considéré que M. D... ne démontrait pas une résidence habituelle en France, il est constant qu'une résidence habituelle de dix ans en France ne crée pour un ressortissant égyptien aucun droit à la délivrance d'un titre de séjour mais seulement le droit d'être entendu, le cas échéant, par la commission du titre de séjour si le préfet n'envisage pas de régulariser l'intéressé ; que, dans ces circonstances, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du refus de titre de séjour doit être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aucun élément du dossier ne permet d'estimer que la situation personnelle du requérant n'aurait pas fait l'objet de la part de l'administration d'un examen particulier ; que, par suite, le moyen de M. D... tiré de ce que le préfet de police n'aurait pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation doit être écarté ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans " ;

6. Considérant, d'une part, que M. D... soutient résider habituellement en France depuis plus de dix ans à la date de la décision litigieuse et produit de nombreuses pièces à l'appui de cette affirmation ; que, toutefois, si le requérant établit de manière probante sa présence sur le territoire de 2010 à 2016 en produisant notamment un contrat de travail à durée indéterminée, les bulletins de salaire y afférant, plusieurs cartes d'adhésion à l'aide médicale d'Etat et des attestations de rechargement de sa carte de transport, il ne fournit pas les preuves suffisantes de sa présence pour les années 2007, 2008 et 2009 ; qu'en effet, le requérant, domicilié... ; que le relevé de carrière ne mentionne aucune activité de 2006 à 2009 et que plusieurs courriers intervenus à cette période font mention d'un défaut de réponse de sa part ; que, par suite, M. D... ne justifie pas avoir résidé habituellement sur le territoire français depuis plus de dix ans à la date de la décision attaquée ; qu'ainsi il n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police était tenu de saisir la commission du titre de séjour avant de prendre la décision de refus de séjour litigieuse et le moyen tiré du vice de procédure doit être écarté ;

7. Considérant, d'autre part, qu'en présence d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée sur le fondement de l'article L. 313-14, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et, à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " ; que, dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifie d'une promesse d'embauche ou d'un contrat de travail ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi ; qu'en effet, il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si cette promesse d'embauche ou ce contrat de travail, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de la motivation de la décision contestée, que, contrairement à ce qui est soutenu, le préfet a pris en compte les éléments pertinents de la situation personnelle de l'intéressé avant de décider de ne pas régulariser sa situation sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'en effet, M. D..., célibataire et sans charge de famille en France, se borne à faire état de son intégration à la société française et de l'ancienneté de sa présence sur le territoire sans justifier effectivement qu'il y réside de manière habituelle depuis la date qu'il allègue, soit le 20 mars 2003 ; qu'en outre, le fait que M. D...ait été employé en qualité de maître d'hôtel au sein de l'ambassade du Koweït en France entre 1987 et 1992, qu'il ait exercé les fonctions de plongeur, aide-cuisinier et cuisinier à Paris au cours des années 2010 à 2013 et qu'il produise une demande d'autorisation de travail, datée du 15 décembre 2016, pour un emploi de cuisinier au sein d'une entreprise de restauration à domicile ou dans des lieux choisis par le client, ne suffisent pas à constituer un motif exceptionnel de nature à lui ouvrir un droit au séjour sur le fondement des dispositions précités de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il ne justifie, au surplus, d'aucune considération humanitaire ; qu'ainsi, le préfet de police a pu sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation refuser de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

9. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que, pour l'application de ces stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine ;

10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. D..., né en 1951, est célibataire et sans charge de famille en France, alors qu'il est le père de trois enfants majeurs vivant en Egypte ; qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, il ne justifie pas résider habituellement en France depuis le 20 mars 2003 ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, le préfet de police n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels les décisions de refus de titre de séjour et faisant obligation à M. D... de quitter le territoire français ont été prises ; que, par suite, le préfet de police n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

11. Considérant, enfin, que, pour les mêmes motifs qu'exposés au point 10, le préfet de police a pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de ces décisions sur la situation personnelle du requérant, lui refuser la délivrance d'un titre de séjour et l'obliger à quitter la France ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 17 mars 2017 ; que sa requête d'appel, y compris, par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peut qu'être rejetée ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 29 mars 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente de chambre,

- M. Diémert, président assesseur,

- M. Legeai, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 avril 2018.

Le rapporteur,

A. LEGEAILa présidente,

S. PELLISSIERLe greffier,

M. C...La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA03307


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17PA03307
Date de la décision : 12/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Alain LEGEAI
Rapporteur public ?: M. ROMNICIANU
Avocat(s) : SOW

Origine de la décision
Date de l'import : 24/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-04-12;17pa03307 ?
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