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29/03/2018 | FRANCE | N°16PA01198

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 29 mars 2018, 16PA01198


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association de valorisation du quartier Paris Maillot Dauphine, l'association " Coordination pour la sauvegarde du bois de Boulogne ", M. A...D..., M. F... H... et M. G...E...ont demandé au tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler la délibération des 16 et 17 juin 2014 par laquelle le conseil de Paris a autorisé le maire de Paris à signer une convention d'occupation du domaine public avec la société Kali Production sur une parcelle située square Parodi dans le 16ème arrondissement de Paris

et, d'autre part, d'enjoindre sous astreinte à la ville de Paris de rés...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association de valorisation du quartier Paris Maillot Dauphine, l'association " Coordination pour la sauvegarde du bois de Boulogne ", M. A...D..., M. F... H... et M. G...E...ont demandé au tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler la délibération des 16 et 17 juin 2014 par laquelle le conseil de Paris a autorisé le maire de Paris à signer une convention d'occupation du domaine public avec la société Kali Production sur une parcelle située square Parodi dans le 16ème arrondissement de Paris et, d'autre part, d'enjoindre sous astreinte à la ville de Paris de résilier la convention conclue le 19 juin 2014 avec la société Kali Production.

Par un jugement n° 1414887 du 8 février 2016, le tribunal administratif de Paris a annulé la délibération du conseil de Paris des 16 et 17 juin 2014 et enjoint à la ville de Paris de prononcer la résiliation de la convention d'occupation temporaire du square Parodi dans le délai de deux mois.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête enregistrée le 6 avril 2016 sous le n° 16PA01198 et un mémoire enregistré le 15 septembre 2017, la ville de Paris, représentée par la SCP Foussard-Froger, avocats au Conseil d'État et à la Cour de cassation, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1414887 du 8 février 2016 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter la demande présentée par l'association de valorisation du quartier Paris Maillot Dauphine, la coordination pour la sauvegarde du bois de Boulogne, M. A...D..., M. F...H...et M. G...E...devant le tribunal administratif de Paris ;

3°) de mettre à la charge solidaire de l'association de valorisation du quartier Paris Maillot Dauphine, de la coordination pour la sauvegarde du bois de Boulogne, de M. A...D..., de M. F...H...et de M. G...E...le versement d'une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est intervenu au terme d'une procédure irrégulière, en violation du principe du contradictoire et du respect des droits de la défense, dès lors que deux des mémoires produits par les requérants de première instance ne lui ont pas été communiqués ;

- il est entaché d'erreur de droit pour avoir décidé que la délibération qui autorise la signature d'une convention d'occupation domaniale peut faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, alors qu'il s'agit d'un acte préparatoire dont la légalité ne peut être contestée qu'à l'occasion du recours de plein contentieux ouvert pour contester les concessions domaniales, contrats administratifs par détermination de la loi ; la requête de première instance était irrecevable et devait être rejetée ;

- si les intimés soutiennent, en appel, qu'ils sont recevables à présenter une demande dans le cadre du recours en appréciation de validité du contrat résultant de la jurisprudence du Conseil d'État " Département du Tarn-et-Garonne ", il s'agit d'une demande nouvelle en appel, et tardive ; en outre, ils ne justifient dans ce cas d'un intérêt lésé de manière suffisamment directe et certaine pour leur donner qualité pour agir, ni n'invoquent de moyens en lien avec les intérêts lésés ;

- la délibération attaquée ne contient pas d'autre décision que l'autorisation de signer la convention ; les conclusions subsidiaires, nouvelles en appel, sont irrecevables ;

- le montant de la redevance acquittée par la société Kali Production n'est pas manifestement insuffisant, puisqu'il s'explique par l'octroi d'une subvention de la ville de Paris à la même société, qui est légale ; la redevance est proportionnée aux avantages que la société Kali production retire de l'occupation du site et aux retombées positives de cette occupation pour la ville de Paris ;

- dès lors que s'appliquent en l'espèce les dispositions de l'ordonnance du 13 octobre 1945 relative aux spectacles, la méconnaissance des dispositions relatives au régime des aides économiques des collectivités territoriales issues des articles L. 1511-1 et suivants du code général des collectivités territoriales ne peut être utilement invoquée ;

- les aides aux spectacles vivants font également l'objet d'un dispositif spécial en droit communautaire, conformément au § 3 de l'article 107 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et au règlement UE n°651/2014 du 17 juin 2014, dont les dispositions combinées des articles 4 et 53 regardent comme par principe compatibles avec le droit communautaire les aides d'un montant inférieur à 50 millions d'euros, destinées à subventionner des événements et performances artistiques ou culturelles, les festivals, les expositions et les autres activités culturelles similaires ;

- l'illégalité résultant du caractère anormalement bas de la redevance n'imposait pas, en tout état de cause, d'ordonner à la ville de résilier la convention litigieuse, car cette irrégularité pouvait faire l'objet d'une régularisation par voie d'avenant ;

- l'affectation d'une parcelle à la promenade publique, tel un jardin public ou espace vert, n'est pas incompatible avec des activités de loisirs et de détente, et notamment l'accueil d'une fête foraine sous réserve que l'activité de fête foraine soit encadrée, par des restrictions de lieu, afin de ne pas compromettre la destination du jardin public ; en l'espèce, la convention ne porte que 1 840 m² sur les 23 595 m² du square ; le moyen tiré de ce que la convention d'occupation du domaine public serait incompatible avec l'affectation du site et son caractère de site classé pittoresque, en tant qu'il dépend du Bois de Boulogne, est inopérant ; ce moyen manque d'ailleurs en fait, eu égard aux conditions imposées par la convention quant aux conditions d'implantation des installations du cirque.

Par un mémoire en défense enregistré le 30 septembre 2016, l'association de valorisation du quartier Paris Maillot Dauphine, l'association " coordination pour la sauvegarde du bois de Boulogne ", M. A...D..., M. F...H...et M. G... E..., représentés par MeB..., concluent :

1°) au rejet de la requête ;

2°) subsidiairement, à l'annulation de la délibération des 16 et 17 juin 2014 en tant qu'elle accorde à la société Kali Production une subvention de 21 704 euros ;

3°) à ce qu'il soit mis à la charge de la ville de Paris la somme de 1 000 euros à verser à chacun d'eux en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils font valoir que :

- le jugement est régulier ;

- leur demande de première instance était recevable ; la jurisprudence " Département du Tarn-et-Garonne " ne s'applique pas aux conventions d'occupation du domaine public ; en faire application serait méconnaitre le droit au recours garanti par l'article 6, § 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et ferait obstacle aux règles du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne relatives aux aides publiques ;

- si la Cour estimait que le recours relève du recours prévu par la jurisprudence " Département du Tarn-et-Garonne ", la requête de première instance resterait recevable tant au regard des délais que de la justification d'un intérêt lésé ;

- ils sont en tout état de cause recevables à contester la décision distincte, contenue dans la délibération litigieuse, prévoyant l'attribution d'une subvention ;

- en vertu des articles L. 2251-1 et L. 2251-2 du code général des collectivités territoriales, les communes peuvent intervenir de manière économique et sociale à condition de se soumettre aux conditions posées notamment aux articles L. 1511-2 et suivants dudit code ; ces aides doivent respecter les conditions de forme énoncées notamment aux articles R. 1511-4 et suivants du même code ; ces dispositions n'ont pas été respectées par la ville de Paris en l'espèce ;

- l'article 1-2 de l'ordonnance du 13 octobre 1945 n'exclut en rien l'application des dispositions du code général des collectivités territoriales qui ont été adoptées pour se conformer aux dispositions des articles 106 et 107 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ; il ne saurait donc être interprété comme faisant exception aux règles communautaires applicables aux aides publiques ;

- le projet de convention et l'aide accordée par la ville n'ont pas fait l'objet de l'avis préalable prévu par l'article R. 1511-4 du code général des collectivités territoriales ;

- la SARL Kali Production n'a pas non plus mentionné l'ensemble des aides qu'elle a reçues ou sollicitées pour la réalisation de son projet, en violation de l'article R. 1511-4-2 du même code ;

- l'entreprise qui bénéficie de l'aide d'une collectivité territoriale doit être en situation régulière au regard de ses obligations fiscales et sociales, ainsi que le prévoit le deuxième alinéa de l'article R. 1511-4-2 du code général des collectivités territoriales ; la ville de Paris avait donc l'obligation de constater dans la délibération attaquée et dans la convention d'occupation du domaine public que la SARL Kali Production était en mesure de justifier de la régularité de sa situation au regard des obligations fiscales et sociales ;

- avant d'instituer tout régime d'aides, la collectivité concernée doit, conformément au premier alinéa de l'article R. 1511-4-2 du même code, déterminer " les conditions d'attribution, de liquidation, de versement, d'annulation et de reversement " des aides qu'elle accorde ; en l'espèce, il n'était fait état d'aucune délibération du conseil de Paris prévoyant le régime de l'aide accordée, dont notamment ses conditions d'annulation et de reversement ;

- le montant de l'aide publique à la location qui peut être accordé par une collectivité territoriale, fixé par les dispositions des articles R. 1511-7 et R. 1511-6 du code général des collectivités territoriales, ne peut excéder un pourcentage du montant des loyers correspondant à la valeur vénale des biens loués ; en l'espèce, et à supposer que la SARL Kali Production soit une petite entreprise, , le montant de l'aide ne pouvait dépasser 20 % du tarif fixé par l'arrêté du 1er mars 2013, soit 5 372 euros ;

- le troisième alinéa de l'article L. 1511-2 du code général des collectivités territoriales prévoit que les aides accordées par les collectivités territoriales ou leurs groupements ont pour objet la création ou l'extension d'activités économiques ; en l'espèce, le projet porte sur le déplacement du cirque et ne prévoit aucune extension, ou création d'une activité économique ;

- en vertu de l'article L. 2251-1 du code général des collectivités territoriales, les communes ne peuvent intervenir en matière économique et sociale que sous réserve du respect de la liberté du commerce et de l'industrie et du principe d'égalité des citoyens devant la loi ; en l'espèce, les avantages procurés à la société Kali Production dépassent manifestement les limites légales et sont intervenus en dehors de tout cadre réglementaire ; ils portent donc atteinte à la liberté du commerce et de l'industrie puisqu'ils accordent un avantage concurrentiel pour lequel aucune justification légale n'est apportée ;

- la mise à disposition du terrain à la SARL Kali Production n'est pas conforme à l'affectation domaniale, dès lors que le terrain d'assiette du projet est en effet situé à l'intérieur du périmètre du site classé du Bois de Boulogne ; les dispositions de l'article L. 2121-1 du code général de la propriété des personnes publiques sont méconnues.

II. Par une requête enregistrée le 6 avril 2016 sous le n° 16PA01199 et un mémoire en réplique enregistré le 15 septembre 2017, la ville de Paris, représentée par la SCP Foussard-Froger, avocats au Conseil d'État et à la Cour de cassation, demande à la Cour d'ordonner qu'il soit sursis à l'exécution du jugement n° 1414887 du 8 février 2016 du tribunal administratif de Paris.

Elle soutient que les moyens soulevés dans le cadre de l'instance au fond répondent à l'exigence posée pour qu'un sursis à exécution du jugement attaqué soit prononcé.

Par un mémoire en défense enregistré le 30 septembre 2016, l'association de valorisation du quartier Paris Maillot Dauphine, la coordination pour la sauvegarde du bois de Boulogne, M. A...D..., M. F...H...et M. G...E..., représentés par MeB..., concluent au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis la somme de 1 000 euros à la charge de la ville de Paris en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils font valoir que :

- les moyens d'appel ne justifient pas l'annulation du jugement attaqué ;

- les moyens de première instance étaient également de nature à justifier l'annulation de la délibération attaquée ;

- l'appelante ne peut obtenir la suspension de l'intégralité du jugement au seul motif que le tribunal n'aurait pas dû prononcer une mesure d'injonction.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- le règlement UE n° 651/2014 du 17 juin 2014 de la Commission déclarant certaines catégories d'aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- l'ordonnance n° 45-2339 du 13 octobre 1945 relative aux spectacles ;

- l'arrêt du Conseil d'État (Assemblée du contentieux) n° 358994 du 4 avril 2014 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Diémert,

- les conclusions de M. Romnicianu, rapporteur public,

- les observations de Me Froger, avocat de la ville de Paris, et de Me Pouilhe, avocat de l'association de valorisation du quartier Paris Maillot Dauphine et autres.

1. Considérant que les requêtes n° 16PA01198 et n° 16PA01199 tendent à l'annulation et au sursis à exécution d'un même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt ;

2. Considérant que, par délibération des 16 et 17 juin 2014, le conseil de Paris a autorisé la maire de Paris à signer avec la société Kali Production, exploitant le cirque Romanès, une convention d'occupation temporaire du square Parodi, situé dans le XVIème arrondissement, pour une durée de trois ans et moyennant une redevance annuelle de 5 160 euros complétée par une subvention en nature de la ville de 21 704 euros par an sur la durée de la convention ; que la convention ayant été conclue le 19 juin 2014, le maire de Paris a, par arrêtés du 20 juin 2014 puis du 16 juin 2015, délivré à la société Kali Production un permis de construire à titre précaire pour l'implantation du chapiteau du cirque tsigane Romanès dans le square Parodi ; que l'association de valorisation du quartier Paris Maillot Dauphine, l'association " Coordination pour la sauvegarde du bois de Boulogne ", M. D..., M. H... et M. E... ayant demandé au tribunal administratif de Paris l'annulation de la délibération du conseil de Paris des 16 et 17 juin 2014 autorisant la signature de la convention, ce tribunal a fait droit à leur demande par un jugement du 8 février 2016 et enjoint à la ville de Paris de prononcer la résiliation de la convention ; que la ville de Paris relève appel de ce jugement et a demandé en outre à la Cour d'ordonner qu'il soit sursis à son exécution ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Considérant que la ville de Paris soutient que le jugement attaqué est intervenu au terme d'une procédure irrégulière, en violation du principe du contradictoire et du respect des droits de la défense, dès lors que deux des mémoires produits par les requérants de première instance le 3 juin 2015 et le 24 juin 2015 ne lui ont pas été communiqués ; que, toutefois, le premier de ces mémoires ne concernait pas la délibération en litige et a été communiqué dans le cadre de procédure contentieuse relative à la contestation du permis de construire accordé à la société Kali production ; que le second de ces mémoires, qui a été visé et analysé par le jugement litigieux, comportait des moyens nouveaux qui n'ont pas été retenus par le tribunal administratif pour fonder l'annulation qu'il a prononcée ; que, par suite, le tribunal administratif a pu statuer sur la demande de première instance sans communiquer ce mémoire ; que la ville de Paris n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier ;

Sur le bien-fondé du jugement :

4. Considérant qu'indépendamment des actions dont disposent les parties à un contrat administratif et des actions ouvertes devant le juge de l'excès de pouvoir contre les clauses réglementaires d'un contrat ou devant le juge du référé contractuel sur le fondement des articles L. 551-13 et suivants du code de justice administrative, tout tiers à un contrat administratif susceptible d'être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles ; que ce recours doit être exercé, y compris si le contrat contesté est relatif à des travaux publics, dans un délai de deux mois à compter de l'accomplissement des mesures de publicité appropriées, notamment au moyen d'un avis mentionnant à la fois la conclusion du contrat et les modalités de sa consultation dans le respect des secrets protégés par la loi ; que la légalité du choix du cocontractant, de la délibération autorisant la conclusion du contrat et de la décision de le signer ne peut être contestée qu'à l'occasion du recours ainsi défini, qui s'exerce à l'encontre des contrats signés à compter du 4 avril 2014 ;

5. Considérant, d'une part, que le régime contentieux exposé ci-dessus s'applique, notamment, dans l'hypothèse où une convention d'occupation du domaine public a été signée entre une collectivité territoriale et une personne privée aux fins de répondre principalement aux besoins de cette dernière et sans la mise en oeuvre d'aucune procédure de publicité et de mise en concurrence préalables ; que si les intimés font valoir que les administrés ont habituellement connaissance de ce type de convention à l'occasion de la publicité donnée à la délibération de l'assemblée de la collectivité qui autorise leur signature, l'impossibilité de demander l'annulation pour excès de pouvoir de l'acte préparatoire que constitue la délibération ne les prive pas de tout recours puisqu'ils peuvent, dès lors qu'ils justifient d'un intérêt lésé, demander au juge du contrat l'annulation de la convention-même, et ce dès sa signature postérieurement à la délibération et jusqu'à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de l'accomplissement de mesures de publicité appropriées ; que le moyen tiré de la méconnaissance du droit au recours et de l'article 6 paragraphe 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

6. Considérant, d'autre part, que si l'association de valorisation du quartier Paris Maillot Dauphine et les autres demandeurs de première instance soutiennent qu'ils justifiaient d'un intérêt suffisant pour saisir le juge du contrat et n'étaient pas tardifs pour ce faire, il est constant qu'ils n'ont expressément demandé au juge, tant en première instance qu'en appel, que l'annulation de la délibération du conseil de Paris des 16 et 17 juin 2014, et non l'annulation ou la résiliation du contrat ; qu'ils ne peuvent, dès lors, être regardés, dans les circonstances de l'espèce, comme ayant exercé le recours ouvert aux tiers lésés contre le contrat ;

7. Considérant, enfin, que les défendeurs soutiennent qu'ils sont au moins recevables à demander l'annulation de la délibération des 16 et 17 juin 2014 en tant qu'elle attribue une subvention à la société Kali production ; que cependant il ressort des pièces du dossier que cette subvention est en réalité une subvention " en nature " qui prend la forme d'une minoration de la redevance due pour l'occupation du domaine public, et que son attribution est ainsi inséparable de la signature et de l'exécution du contrat litigieux ; que la décision d'attribuer cette subvention ne constitue donc pas une décision distincte de l'autorisation donnée au maire de signer la convention d'occupation du domaine public, mais un acte préparatoire insusceptible de recours pour excès de pouvoir ;

8. Considérant qu'il résulte ce qui précède que la ville de Paris est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement litigieux, le tribunal administratif de Paris a annulé la délibération des 16 et 17 juin 2014, laquelle n'est qu'un acte préparatoire insusceptible de recours pour excès de pouvoir, et lui a enjoint à titre de mesure d'exécution de prononcer la résiliation de la convention d'occupation du domaine public conclue avec la société Kali productions ; que le jugement ne peut qu'être annulé, et les conclusions à fins d'annulation et d'injonction formulées en première instance et en appel par l'association de valorisation du quartier Paris Maillot Dauphine et autres, rejetées ;

Sur les conclusions à fin de sursis à exécution :

9. Considérant que, dès lors qu'il est statué au fond sur les conclusions de la requête n° 16PA01198, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 16PA1199 qui tendent à ce que la Cour sursoie à l'exécution du jugement attaqué du 8 février 2016 ;

Sur les frais liés au litige :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la ville de Paris, qui n'est pas partie perdante, supporte les frais de procédure exposés, en première instance et en appel, par l'association de valorisation du quartier Paris Maillot Dauphine et autres ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge des intimés la somme que demande la ville de Paris au titre des frais de procédure qu'elle a exposés ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 16PA01199 de la ville de Paris.

Article 2 : Le jugement n° 1414887 du 8 février 2016 du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 3 : La demande de première instance et les conclusions d'appel de l'association de valorisation du quartier Paris Maillot Dauphine et autres sont rejetées.

Article 4 : Les conclusions de la ville de Paris tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la ville de Paris, à l'association de valorisation du quartier Paris Maillot Dauphine, à l'association " coordination pour la sauvegarde du bois de Boulogne ", à M. A... D..., à M. F...H...et à M. G...E....

Copie en sera adressée au préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris.

Délibéré après l'audience du 25 janvier 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- Mme Nguyên-Duy, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 29 mars 2018.

Le rapporteur,

S. DIÉMERTLa présidente,

S. PELLISSIER Le greffier,

M. C...La République mande et ordonne au préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA01198, 16PA01199


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 16PA01198
Date de la décision : 29/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

24-01-02-01-01-02 Domaine. Domaine public. Régime. Occupation. Utilisations privatives du domaine. Contrats et concessions.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Stéphane DIEMERT
Rapporteur public ?: M. ROMNICIANU
Avocat(s) : SCP FOUSSARD-FROGER

Origine de la décision
Date de l'import : 03/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-03-29;16pa01198 ?
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