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15/03/2018 | FRANCE | N°16PA02481

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 15 mars 2018, 16PA02481


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Promogil a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la délibération du 21 mars 2013 par laquelle le conseil municipal de Perthes-en-Gâtinais (Seine-et-Marne) a approuvé le plan local d'urbanisme et la décision du 3 juin 2013 par laquelle le maire de la commune de Perthes-en-Gâtinais a rejeté son recours gracieux contre cette délibération.

Par un jugement n° 1306096 du 15 avril 2016, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande et a mis à sa charge une somme de

1 500 euros à verser à la commune de Perthes-en-Gâtinais au titre de l'article L. 7...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Promogil a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la délibération du 21 mars 2013 par laquelle le conseil municipal de Perthes-en-Gâtinais (Seine-et-Marne) a approuvé le plan local d'urbanisme et la décision du 3 juin 2013 par laquelle le maire de la commune de Perthes-en-Gâtinais a rejeté son recours gracieux contre cette délibération.

Par un jugement n° 1306096 du 15 avril 2016, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande et a mis à sa charge une somme de 1 500 euros à verser à la commune de Perthes-en-Gâtinais au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 26 juillet 2016 et un mémoire enregistré le 14 décembre 2017, la société Promogil, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1306096 du 15 avril 2016 du tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler la délibération du 21 mars 2013 par laquelle le conseil municipal de Perthes-en-Gâtinais a approuvé le plan local d'urbanisme et la décision du 3 juin 2013 par laquelle le maire de la commune de Perthes-en-Gâtinais a rejeté son recours gracieux contre cette délibération ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Perthes-en-Gâtinais le versement d'une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier, faute d'avoir répondu au moyen, par elle soulevé dans son mémoire de première instance du 5 février 2016, tiré de ce que, en violation des articles L. 123-1-3, L. 121-1-4 et L. 123-1-5 du code de l'urbanisme, les orientations et le règlement du plan local d'urbanisme méconnaissent les orientations générales du plan d'aménagement et de développement durable, en tant qu'elles prévoient le développement touristique ;

- le jugement est également irrégulier en tant qu'il se fonde sur des dispositions du code de l'urbanisme antérieures à la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 ;

- le plan local d'urbanisme a été adopté sur le fondement de dispositions législatives devenues inapplicables, eu égard à l'entrée en vigueur de la loi du 12 juillet 2010 ;

- les dispositions de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales ont été méconnues, dès lors qu'un conseiller municipal a indiqué ne pas avoir disposé des informations nécessaires ;

- les dispositions des articles L. 123-9 et L. 123-10 du code de l'urbanisme ont été méconnues, faute pour les personnes publiques associées d'avoir été consultées sur la compatibilité du projet avec le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux ;

- les nombreuses modifications apportées au projet par la délibération litigieuse sont substantielles et altèrent l'économie générale du projet de plan local d'urbanisme arrêté ; elles excèdent ainsi la portée de simples adaptations mineures ; leur adoption postérieurement à l'enquête publique méconnait les dispositions du code de l'urbanisme et entraine l'illégalité de l'ensemble de la délibération ;

- les dispositions du règlement du plan local d'urbanisme applicables à la zone N sont entachées d'incohérence, notamment entre les articles 1er et 2, et d'imprécisions et méconnaissent le principe d'accessibilité et d'intelligibilité des normes ;

- les mêmes dispositions, notamment l'interdiction absolue de créer un parc de loisirs, méconnaissent le principe de liberté du commerce et de l'industrie et la liberté d'entreprendre ;

- ces dispositions sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation puisque le règlement admet explicitement une destination de loisir et de tourisme tout en prohibant les aménagements nécessaires ;

- elles méconnaissent, en violation des dispositions des articles L. 123-1, L. 123-1-4 et L. 123-1-5 du code de l'urbanisme, les orientations générales du plan d'aménagement et de développement durable, qui autorisent la réalisation d'un parc de tourisme et de loisirs sur le domaine de Mémorant ; les documents de présentation au public du plan local d'urbanisme notamment le rapport de présentation indiquaient que pour le domaine de Ménorant les possibilités actuelles d'aménagement seraient reconduites ;

- la zone Nc ne pouvait être légalement limitée, sans aucune justification, aux constructions existantes du domaine de Mémorant, en violation des dispositions des articles R. 123-8 et L. 123-1 (1°) du code de l'urbanisme, l'unité d'ensemble du domaine étant méconnue, ainsi que le principe d'affectation dominante de la zone, alors que les surfaces immédiatement adjacentes aux constructions existantes, qui étaient précédemment classées en zone agricole, constituent les accessoires de ces dernières et alors que la charte du parc naturel du Gâtinais n'implique pas un tel classement ;

- le règlement de la zone N est entaché d'erreurs le rendant largement inapplicable, notamment la mention, à l'article 1er, d'un article Nd 2 inexistant ;

- la création d'une zone Nd, qui vise à assurer la pérennité d'une seule entreprise, méconnait le principe d'égalité de traitement entre les administrés et n'est fondée sur aucun motif d'intérêt général ;

- la création de la zone Ne méconnait les dispositions de l'article R. 123-8 du code de l'urbanisme, dès lors que s'y situe une station intercommunale d'épuration, qui porte atteinte au principe de préservation des espaces naturels et agricoles avoisinants ;

- la délibération est entachée de détournement de pouvoir, dès lors que l'aggravation considérable des contraintes imposées au domaine de Mémorant vise à faire obstacle à la réalisation de son projet de création d'un parc de loisirs pour des motifs étrangers à la réglementation de l'urbanisme, l'opposition des autorités communales à la réalisation de ce projet étant liée à leur volonté d'obtenir le contournement de l'ensemble du village par la RD 372, tandis qu'aucune évaluation de l'impact du trafic routier induit par ce projet n'a été réalisée.

Par des mémoires en défense enregistrés le 25 octobre 2016 et le 19 janvier 2018, la commune de Perthes-en-Gâtinais, représentée par Me Rouquette, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis la somme de 3 000 euros à la charge de société Promogil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Diémert,

- les conclusions de M. Romnicianu, rapporteur public,

- les observations de Me Rouquette, avocat de la commune de Perthes-en-Gâtinais.

1. Considérant que le conseil municipal de Perthes-en-Gâtinais (Seine-et-Marne) a prescrit l'élaboration d'un plan local d'urbanisme par une délibération du 26 septembre 2008 ; qu'à la suite de l'arrêt du projet et de la consultation des personnes publiques associées, le conseil municipal a, par une délibération du 15 septembre 2011, décidé de reprendre le projet et de procéder à une nouvelle phase de concertation ; que, par une délibération du 29 juin 2012, le conseil municipal a tiré le bilan de la concertation et arrêté de nouveau le projet de plan local d'urbanisme ; que l'enquête publique s'est tenue du 29 novembre 2012 au 9 janvier 2013 ; que, par une délibération du 21 mars 2013, le conseil municipal a approuvé le plan local d'urbanisme ; que, le 24 mai 2013, la société Promogil a formé un recours gracieux contre cette délibération, rejeté par le maire de Perthes-en-Gâtinais le 3 juin 2013 ; que la société Promogil ayant demandé au tribunal administratif de Melun l'annulation de la délibération du 21 mars 2013 et de la décision du 3 juin 2013, ce tribunal a rejeté sa demande par un jugement du 15 avril 2016 dont l'intéressée relève appel devant la Cour ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen articulé à l'encontre de la régularité du jugement attaqué ;

2. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article R. 741-2 du code de justice administrative, la décision " contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application " ; qu'il est contant que le mémoire en réplique produit par la société Promogil devant le tribunal administratif de Melun le 5 février 2016 comportait l'énoncé du moyen tiré de ce que le règlement du plan local d'urbanisme méconnaissait les orientations du plan d'aménagement et de développement durable ; que le jugement attaqué n'analyse pas ce moyen et omet de l'examiner et d'y répondre ; qu'il s'ensuit que ce jugement est irrégulier et que la société Promogil est fondée à en demander l'annulation ;

3. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la société Promogil ;

Sur la loi applicable au litige :

4. Considérant que l'article 19 de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement a modifié les articles L. 123-1 et suivants du code de l'urbanisme relatifs à l'élaboration et au contenu des plans locaux d'urbanisme ; que le V de ce même article dispose, dans sa version applicable à l'espèce issue de la loi n° 2011-12 du 5 janvier 2011 : " Le présent article entre en vigueur six mois après la promulgation de la présente loi (...) / Toutefois, les plans locaux d'urbanisme en cours d'élaboration ou de révision approuvés avant le 1er juillet 2013 dont le projet de plan a été arrêté par l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale ou le conseil municipal avant le 1er juillet 2012 peuvent opter pour l'application des dispositions antérieures (...) " ;

5. Considérant que le projet de plan local d'urbanisme contesté a été arrêté par une délibération du conseil municipal de la commune de Perthes-en-Gâtinais du 29 juin 2012, date à prendre en compte pour l'application des dispositions précitées de l'article 19 de la loi du 12 juillet 2010 alors même que la délibération n'a été transmise à la préfecture que le 6 juillet 2012 ; que le plan a ensuite été approuvé le 21 mars 2013 par la délibération objet du présent litige ; qu'il s'ensuit qu'il entre dans le champ d'application des dispositions précitées de la loi du 12 juillet 2010 ; que la délibération du 21 mars 2013 prévoit expressément, dans ses motifs, que le plan local d'urbanisme qu'elle approuve demeure soumis aux dispositions législatives antérieures à ladite loi ; qu'ainsi le conseil municipal de Perthes-en Gâtinais, qui n'avait pas à mentionner expressément dès la délibération du 29 juin 2012 qu'il exercerait cette option, a valablement opté pour l'application des dispositions législatives antérieures à la loi du 12 juillet 2010 ;

Sur la légalité externe de la délibération litigieuse :

En ce qui concerne la méconnaissance de l'obligation d'information des conseillers municipaux :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales : " Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération " ;

7. Considérant que la société Promogil, se fondant sur les propos tenus par un conseiller municipal, repris dans le compte-rendu de la réunion du conseil municipal du 21 mars 2013 selon lequel " Monsieur B...rappelle sa demande de disposer de documents relatifs au PLU restée sans réponse et fait savoir qu'il est dommage que la traduction visuelle de la réunion du 8 mars ne lui ait pas été transmise pour l'étudier avant de délibérer sur ce point ", soutient que l'information des conseillers municipaux était, préalablement à l'approbation du plan local d'urbanisme, insuffisante ; que toutefois, d'une part, il ressort des pièces du dossier que M. B... a reçu communication de l'ensemble des documents relatifs au plan local d'urbanisme en sa qualité de membre du groupe de travail relatif à ce plan, lequel s'est réuni les 29 janvier et 19 février 2013, et qu'une réunion préparatoire à la séance du conseil municipal, au cours de laquelle un rapport de synthèse a été remis aux élus présents, et envoyé à ceux absents, s'est tenue le 8 mars 2013, réunion lors de laquelle ont été présentées les adaptations au projet arrêté de plan local d'urbanisme, proposées pour tenir compte des avis des personnes publiques associées et des observations du public formulées lors de l'enquête publique ; que, d'autre part, il ressort du procès-verbal de la réunion du conseil municipal du 21 mars 2013 que les conseillers municipaux ont délibéré sur chacune des modifications ainsi proposées au projet de plan local d'urbanisme arrêté ; qu'enfin, la société requérante n'établit pas que les documents demandés par M. B... étaient nécessaires à sa bonne information, ni que leur absence de communication aurait, par elle-même, vicié la procédure d'adoption de la délibération litigieuse ; qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré du caractère incomplet de l'information des conseillers municipaux préalablement à l'approbation du plan local d'urbanisme doit être écarté ;

En ce qui concerne la consultation des personnes publiques associées :

8. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 123-9 du code de l'urbanisme, dans sa version applicable au litige : " (...) le conseil municipal arrête le projet de plan local d'urbanisme. Celui-ci est alors soumis pour avis aux personnes publiques associées à son élaboration ainsi que, à leur demande, aux communes limitrophes, aux établissements publics de coopération intercommunale directement intéressés, à la commission départementale de la consommation des espaces agricoles prévue à l'article L. 112-1-1 du code rural et de la pêche maritime, ainsi qu'à l'établissement public chargé d'un schéma de cohérence territoriale dont la commune est limitrophe, lorsqu'elle n'est pas couverte par un tel schéma " ;

9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est pas contesté que les personnes publiques associées ont été consultées sur le projet de plan local d'urbanisme tel qu'il a été arrêté par la délibération du conseil municipal de Perthes-en-Gâtinais en date du 29 juin 2012 ; que si les auteurs du plan ont cru utile d'ajouter, dans le rapport de présentation du plan local d'urbanisme approuvé le 21 mars 2013, des développements justifiant de sa compatibilité avec le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux du Bassin de Seine Normandie, développements qui n'étaient d'ailleurs prescrits par aucun texte et notamment pas par l'article invoqué L. 123-1-2 du code de l'urbanisme, au surplus inapplicable en l'espèce comme dit au point 5 puisqu'issu de la loi n° 2010-788, la circonstance que le rapport de présentation contenu dans le projet de plan soumis aux personnes publiques associées ne comportait pas ces développements est sans incidence sur la régularité de leur consultation ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 123-9 du code de l'urbanisme doit être écarté ;

En ce qui concerne l'enquête publique :

10. Considérant qu'en vertu des dispositions alors applicables de l'article L. 123-10 du code de l'urbanisme, le projet de plan local d'urbanisme est soumis à enquête publique par le maire et le dossier soumis à l'enquête comprend, en annexe, les avis des personnes publiques consultées ;

11. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier et, en particulier, du rapport du commissaire enquêteur que le dossier soumis à enquête publique comportait, notamment, la délibération du 29 juin 2012, le projet de plan local d'urbanisme arrêté, ainsi que les avis des personnes publiques associées ; que, pour les mêmes motifs qu'exposés au point 9, la circonstance que le rapport de présentation du projet de plan local d'urbanisme arrêté n'ait comporté aucun développement concernant la compatibilité du futur plan local d'urbanisme avec le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux du Bassin de Seine Normandie est sans incidence sur la régularité de la composition du dossier soumis à enquête publique ; qu'enfin, aucune disposition du code de l'urbanisme ne prévoit que le projet de plan local d'urbanisme arrêté doit être modifié pour tenir compte de l'avis des personnes publiques associées avant qu'il ne soit mis à disposition du public dans le cadre de l'enquête publique ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le dossier soumis à enquête publique était incomplet au regard des dispositions de l'article L. 123-10 du code de l'urbanisme doit être écarté ;

En ce qui concerne l'adoption de modifications du plan local d'urbanisme après enquête publique :

12. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 123-10 du code de l'urbanisme, la délibération du conseil municipal qui approuve le plan local d'urbanisme peut y apporter des modifications, destinées à tenir compte des avis qui ont été joints au dossier, des observations du public et du rapport du commissaire ou de la commission d'enquête ; que ces modifications toutefois doivent présenter un caractère mineur n'altérant pas l'économie générale de ce plan et n'exigeant donc pas l'organisation d'une autre enquête publique ;

13. Considérant que la société requérante, qui se borne à renvoyer à la liste des modifications précisée par la délibération litigieuse, soutient, sans apporter la moindre démonstration à l'appui du moyen qu'elle soulève, que ces modifications, d'une part, ne résulteraient pas de l'enquête publique ou des avis des personnes associées, d'autre part, ne présenteraient pas un caractère mineur et altèreraient ainsi l'économie générale du plan local d'urbanisme ; que le moyen, tel qu'il est articulé, tant en première instance qu'en appel, n'est pas assorti des précisions suffisantes pour permettre d'en apprécier le bien fondé ; qu'il doit donc être écarté ;

Sur la légalité interne de la délibération litigieuse :

En ce qui concerne l'intelligibilité du règlement de la zone N :

14. Considérant, d'une part, que la société Promogil soutient que l'article 1er du chapitre II du titre V du règlement du plan local d'urbanisme, concernant les " occupations et utilisations du sol interdites " dans l'ensemble des zones Na, Nb, Nc, Nd et Ne qui constituent au sein de la zone N des " secteurs de taille et de capacité d'accueil limitée " au sens de l'article R. 123-8 du code de l'urbanisme, est inapplicable dès lors qu'il renvoie, à quatre reprises, à un article " Na, Nb, Nc, Nd 2 " qui n'existe pas ; que, toutefois, il y a lieu de considérer que l'article 1er n'a pas entendu renvoyer à un article " Na, Nb, Nc, Nd 2 " effectivement inexistant, mais seulement, dans les quatre occurrences, à l'article 2 du même chapitre, relatif aux " occupations et utilisations du sol soumises à des conditions particulières " ; qu'en l'absence de doute sur la portée de la disposition ainsi adoptée par le conseil municipal, il y a lieu pour la Cour, afin de donner le meilleur effet à sa décision, non pas d'annuler les dispositions erronées de cet article, mais de leur conférer leur exacte portée et de prévoir que le texte ainsi rétabli sera rendu opposable par des mesures de publicité appropriées, en rectifiant l'erreur matérielle commise et en prévoyant la publication de l'extrait de l'arrêt dans les conditions prévues pour la publication des délibérations du conseil municipal ; que le maire de la commune devra informer la Cour des mesures prises à cette fin ;

15. Considérant, en second lieu, que, contrairement à ce que fait valoir la commune en défense, la légalité d'une disposition réglementaire peut être utilement appréciée au regard de l'objectif constitutionnel d'accessibilité et d'intelligibilité des normes ;

16. Considérant que l'article 1er du chapitre II du titre V du règlement du plan local d'urbanisme interdit notamment, dans l'ensemble des zones Na, Nb, Nc, Nd et Ne, " les constructions à destination d'hébergement hôtelier ", " les parcs ou terrains de sport ou de loisirs ", " l'aménagement de terrains destinés à l'accueil des campeurs et des caravanes " ou " le stationnement des caravanes isolées " ; que l'article 2 du même chapitre autorise cependant dans la zone Nc, qui correspond aux parcelles bâties du domaine de Mémorant, les " destinations loisirs et tourisme ", " sous réserve qu'elles s'établissent dans le volume des bâtiments existants à la date d'approbation du PLU " et " que les besoins en infrastructures et réseaux ne soient pas augmentés de façon significative " ; que ces articles 1er et 2 ne sont pas ainsi en eux-mêmes contradictoires, dès lors que les destinations loisirs et tourisme constituent une catégorie largement entendue d'activités qui n'impliquent en soi ni des infrastructures importantes ni la réalisation d'aménagements interdits par l'article 1er ; que, par suite, la rédaction des articles 1er et 2 du plan local d'urbanisme n'est pas entachée d'une contradiction la rendant inintelligible ; que l'absence de définition des notions utilisées dans ces dispositions réglementaires n'est pas davantage de nature à en affecter l'intelligibilité, dès lors qu'elles ne sont pas entachées d'imprécision ni susceptibles d'équivoque eu égard à leur acception courante ; que le moyen tiré de l'intelligibilité du règlement doit donc être écarté ;

En ce qui concerne la méconnaissance de la liberté du commerce et de l'industrie :

17. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme alors applicable, il appartient aux auteurs des plans locaux d'urbanisme de préciser les affectations des sols selon les usages qui peuvent en être fait et, notamment de délimiter des zones dans lesquelles l'implantation de certains établissements industriels et commerciaux est interdite ou réglementée ; que les auteurs du plan ne sont liés ni par les usages qui étaient précédemment fait des parcelles ni par l'affectation que souhaiteraient leur donner leurs propriétaires ; que dans les circonstances de l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en interdisant l'aménagement de " parcs de loisirs " dans les secteurs de la commune classés en en zone naturelle N, c'est à dire, selon l'article R. 123-8 du code de l'urbanisme, les secteurs à protéger en raison de leur caractère d'espaces naturels ou de la qualité des sites, des milieux naturels, des paysages et de leur intérêt esthétique, historique ou écologique, le plan local d'urbanisme de Perthes-en-Gâtinais aurait porté une atteinte disproportionnée à la liberté du commerce et de l'industrie ou à la liberté d'entreprendre ; que le moyen doit être écarté ;

En ce qui concerne la contradiction entre les dispositions du règlement et les orientations du plan d'aménagement et de développement durable et le rapport de présentation :

18. Considérant, d'une part, qu'en vertu des dispositions de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme, dans sa version applicable au litige, le règlement fixe les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols " en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables " qui lui-même définit " les orientations générales d'aménagement et d'urbanisme retenues pour l'ensemble de la commune " ;

19. Considérant que le plan d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme de Perthes en Gâtinais comporte notamment l'orientation suivante : " Développer le potentiel touristique en utilisant l'attrait touristique de Barbizon et de la forêt de Fontainebleau. / La commune possède un potentiel touristique (patrimoine paysager, architectural et écologique) qui pourrait se développer : l'extension des capacités d'hébergement notamment par la reconversion du patrimoine rural (gîtes ou chambres d'hôtes) pourrait contribuer à ce développement. / Proposer une offre complémentaire aux grands sites touristiques proches par la valorisation du petit patrimoine et des paysages en aménageant les chemins ruraux pour la randonnée et la promenade. / Aménager et rendre plus lisible le centre historique du bourg aux abords de l'église. " ; que contrairement à ce qui est soutenu, cette orientation, qui vise au développement d'une offre touristique centrée sur le patrimoine rural et écologique, n'implique nullement que les dispositions du règlement de la zone N du plan local d'urbanisme, ou celle de la zone Nc qui regroupe certaines parcelles du domaine de Mémorant, autorisent la création d'un parc de loisirs dédié au cirque ;

20. Considérant, d'autre part, que le rapport de présentation indique que l'impact important sur la circulation et les aménagements routiers du projet de création, sur le domaine de Mémorant, d'un parc d'attraction lié aux arts du cirque, ainsi que les contraintes d'aménagement tenant au " caractère naturel, boisé, humide et patrimonial " de ce domaine ont conduit à ne permettre, dans le cadre du plan local d'urbanisme, que " les aménagements dans les bâtiments existant sans aucune extension pour les loisirs ou le tourisme " ; que le règlement des zones N et Nc, applicable aux parcelles du domaine de Mémorant, ne révèle aucune contradiction avec cette présentation ;

En ce qui concerne le classement des parcelles du domaine de Mémorant :

21. Considérant qu'aux termes de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme, dans sa version alors applicable : " (...) Les plans locaux d'urbanisme comportent un règlement qui fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durable, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés à l'article L. 121-1, qui peuvent notamment comporter l'interdiction de construire, délimitent les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger et définissent, en fonction des circonstances locales, les règles concernant l'implantation des constructions. / A ce titre, ils peuvent : / 1° Préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être fait ou la nature des activités qui peuvent y être exercées ; / 2° Définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 123-8 du même code, dans sa version applicable au plan litigieux : " Les zones naturelles et forestières sont dites " zones N ". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison soit de la qualité des sites, des milieux naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique, soit de l'existence d'une exploitation forestière, soit de leur caractère d'espaces naturels. (...) des constructions peuvent être autorisées dans des secteurs de taille et de capacité d'accueil limitées, à la condition qu'elles ne portent atteinte ni à la préservation des sols agricoles et forestiers ni à la sauvegarde des sites, milieux naturels et paysages " ; qu'il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir et de fixer, en conséquence, le zonage et les possibilités de constructions ; que leur appréciation, sur ces différents points, ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts ;

22. Considérant que la société Promogil soutient que les parcelles du domaine de Mémorant ont été classées à tort en zone N et Nc et fait valoir que ce classement, qui découpe artificiellement les parcelles sur lesquelles elle exerce son activité en plusieurs zones, ne lui permet que de maintenir son activité existante, sans pouvoir ni étendre les bâtiments existants, ni développer cette activité pour l'orienter vers le parc de loisirs dédié aux arts du cirque qu'elle a en projet et que ce classement et les règles applicables dans ces zones ne sont justifiées par aucun motif d'urbanisme dès lors que la protection de l'environnement et la charte du parc naturel régional du Gâtinais n'interdisent pas l'implantation d'une telle activité ;

23. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le domaine de Mémorant, qui, à l'exception de deux parcelles en zone agricole, était classé en zone naturelle par l'ancien plan d'occupation des sols, se situe, hors des zones urbanisées de la commune, à proximité immédiate de vastes terrains agricoles classés en zone Atvb (" trame verte et bleue ") et d'espaces boisés classés ; que la charte du parc naturel régional du Gâtinais, dont la commune de Perthes-en-Gâtinais est membre, identifie les constructions de ce domaine comme un corps de ferme remarquable et l'ensemble dans lequel elles se trouvent comme un secteur à enjeu paysager prioritaire à préserver et prévoit qu'un urbanisme durable doit maintenir et protéger les espaces naturels pour conserver leur fonction, leur valeur paysagère et écologique ; que, d'une part, les auteurs d'un plan d'occupation des sols ne sont pas tenus de faire coïncider les limites des différentes zones avec les limites de propriété et peuvent notamment attribuer un classement différent aux terrains nus et aux terrains supportant des constructions ; que, d'autre part, la circonstance qu'un terrain ait été antérieurement classé dans une zone constructible ou agricole ne peut, par elle-même, faire obstacle à son classement en zone naturelle par le plan local d'urbanisme ; qu'enfin, la circonstance que le classement en zone naturelle N et Nc des terrains appartenant à la requérante rend difficile, voire impossible, la réalisation de son projet de parc d'attraction est, par elle-même, sans incidence sur la légalité du classement retenu au regard des dispositions du code de l'urbanisme citées au point 21 ; que, dans les circonstances de l'espèce, compte tenu de la situation et de la qualité environnementale, paysagère et historique des parcelles composant le domaine de Mémorant, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que les auteurs du plan ont, en procédant à leur classement en zones N et Nc, entaché leur décision d'erreur de droit ou d'erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne la zone Nd :

24. Considérant que la société requérante soutient que le classement en zone Nd de parcelles sur lesquelles se trouve une activité artisanale existante est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que le règlement du plan local d'urbanisme autorise le développement de cette activité artisanale ; qu'il ressort des pièces du dossier que la zone Nd, qui se trouve au sud ouest de la zone AUx, est bordée à l'ouest par des parcelles classées en zone Aa et au sud-ouest par des parcelles en espaces boisés classés et que le règlement applicable à la zone Nd, qui prévoit, notamment, que l'activité artisanale existante " doit pouvoir se développer dans le respect du caractère naturel des lieux ", limite les possibilités de construire tant en ce qui concerne les constructions à usage d'habitation que les constructions artisanales ; que la seule circonstance que les auteurs du plan local d'urbanisme aient entendu favoriser le développement d'une activité existante, au demeurant de très faible ampleur, alors qu'ils n'ont pas souhaité le faire pour les activités de la société requérante, ne constitue pas un détournement de pouvoir et n'est pas constitutive d'une atteinte au principe d'égalité, la société requérante ne se trouvant pas, eu égard tant à son activité qu'au projet de parc d'attractions dédié au cirque qu'elle envisage d'implanter sur le domaine de Mémorant, dans une situation identique à celle de l'entreprise implantée en zone Nd ; qu'enfin, aucune des dispositions du code de l'urbanisme applicables au plan local d'urbanisme en litige n'oblige les auteurs du plan local d'urbanisme à définir une affectation dominante pour la zone en cause ; que, par suite, la société Promogil n'est pas fondée à soutenir que le classement en zone Nd des parcelles concernées et le règlement de cette zone sont entachés d'une erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne la zone Ne :

25. Considérant que la société Promogil soutient que le classement en zone Ne des terrains sur lesquels est implantée la station d'épuration est contraire aux dispositions, citées au point 21, de l'article R. 123-8 du code de l'urbanisme, compte tenu de la destination de cet équipement ; que, toutefois, l'implantation de l'équipement public que constitue une station d'épuration n'est pas, par elle-même, interdite dans une zone naturelle et notamment dans un " secteur de taille et de capacité d'accueil limitées " au sens de cet article ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le classement en zone Ne du plan local d'urbanisme d'un terrain nécessaire à la station d'épuration intercommunale, partiellement implantée sur le territoire de Perthes-en-Gâtinais, serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne le détournement de pouvoir :

26. Considérant que si la société Promogil soutient qu'en interdisant l'activité de parc de loisirs sur le domaine du Mémorant, la commune de Perthes-en-Gâtinais a pour but réel d'obtenir le contournement de son territoire par la route départementale 372, il ressort des pièces du dossier que, comme dit notamment aux point 20 et 23 ci-dessus, le conseil municipal a entendu préserver un élément remarquable du patrimoine naturel et historique de la commune tout en protégeant l'environnement communal des prévisibles conséquences négatives du projet de parc d'attraction porté par la société requérante en terme d'augmentation du trafic routier, du moins aussi longtemps que les infrastructures afférentes n'auront pas été adaptées à ces inconvénients par les autorités compétentes à cette fin ; qu'ainsi, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

Sur les frais liés à l'instance :

27. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la société Promogil, qui succombe à titre principal dans la présente instance, en puisse invoquer le bénéfice ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à sa charge le versement à la commune de Perthes-en-Gâtinais d'une somme de 1 500 euros sur le même fondement ;

DÉCIDE :

Article 1er : Dans l'article 1er du chapitre II du titre V du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Perthes-en-Gâtinais, tel qu'approuvé par la délibération du conseil municipal de cette commune en date du 21 mars 2013, les quatre mentions de " l'article Na, Nb, Nc, Nd2 " s'entendent comme la mention de " l'article 2 " du même chapitre.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la société Promogil est rejeté.

Article 3 : La société Promogil versera à la commune de Perthes-en-Gâtinais une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Un extrait du présent arrêt, comprenant l'article 1er de son dispositif et les motifs qui en sont le support, sera publié par le maire de Perthes-en-Gâtinais, dans les conditions prévues par le code général des collectivités territoriales pour la publication des délibérations du conseil municipal, dans le délai d'un mois à compter de sa notification.

Le maire de Perthes-en-Gâtinais informera la Cour des mesures prises pour l'application du présent article.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Promogil et à la commune de Perthes-en-Gâtinais.

Copie en sera adressée au préfet de Seine-et-Marne.

Délibéré après l'audience du 22 février 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, président de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- Mme Nguyên-Duy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 mars 2018.

Le rapporteur,

S. DIÉMERTLa présidente,

S. PELLISSIER Le greffier,

A. LOUNISLa République mande et ordonne au préfet de Seine-et-Marne en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA02481


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 16PA02481
Date de la décision : 15/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Plans d'aménagement et d'urbanisme. Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d'urbanisme (PLU). Légalité des plans.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Stéphane DIEMERT
Rapporteur public ?: M. ROMNICIANU
Avocat(s) : SAINT LOUIS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 20/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-03-15;16pa02481 ?
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