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08/03/2018 | FRANCE | N°16PA01697

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 08 mars 2018, 16PA01697


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée unipersonnelle (SASU) Europe propreté partenaire service industriel (EPPSI) a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler la décision en date du 14 avril 2010 par laquelle l'inspecteur du travail de la section de l'aéroport d'Orly de la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle du Val-de-Marne a autorisé la société ISS Abilis France (devenue ISS Propreté) à lui transférer le contrat de travail de

M. C... A...,

salarié protégé.

Par un jugement n° 1402715 du 23 mars 2016, le Tribunal adminis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée unipersonnelle (SASU) Europe propreté partenaire service industriel (EPPSI) a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler la décision en date du 14 avril 2010 par laquelle l'inspecteur du travail de la section de l'aéroport d'Orly de la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle du Val-de-Marne a autorisé la société ISS Abilis France (devenue ISS Propreté) à lui transférer le contrat de travail de

M. C... A..., salarié protégé.

Par un jugement n° 1402715 du 23 mars 2016, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 24 mai 2016 et 5 juillet 2017, la société EPPSI, représentée par Me Reny, demande à la Cour :

1°) de juger inapplicable la décision de l'inspecteur du travail du 14 avril 2010 ;

2°) à titre subsidiaire, de juger que cette décision ne lui est pas opposable ;

3°) à titre très subsidiaire, d'annuler cette décision ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail sont inapplicables en l'espèce ;

- la décision contestée ne lui est pas opposable, dès lors qu'elle n'a pas été invitée à présenter ses observations et que cette décision ne lui a pas été notifiée ;

- aucun délai ne courrait à son encontre pour contester la décision en litige, dès lors que cette décision ne lui a pas été notifiée par l'administration, mais par la société ISS Propreté par courrier du 19 avril 2010 et qu'elle n'a pas été informée des voies et délais de recours.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 juillet 2016, la société par actions simplifiée ISS Propreté, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la société EPPSI au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de la société EPPSI enregistrée devant le Tribunal administratif de Melun le 25 mars 2014 à l'encontre de la décision du 14 avril 2010 était tardive en application de la théorie de la connaissance acquise, dès lors que la société EPPSI est tierce à la décision, qu'elle en a reçu une copie comportant mention des voies et délais de recours le 19 avril 2010 et qu'elle en a fait mention dans un courrier du 26 avril 2010 ;

- les moyens soulevés par la société EPPSI ne sont pas fondés.

Par un mémoire, enregistré le 6 juillet 2017, la ministre du travail conclut au rejet de la requête.

Elle indique s'associer aux écritures de la société ISS Propreté.

La requête a été communiquée à M. C... A..., qui n'a pas présenté de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bernard,

- les conclusions de M. Sorin, rapporteur public,

- et les observations de Me Reny, avocat de la société EPPSI.

Considérant ce qui suit :

1. Par la présente requête, la société EPPSI demande l'annulation du jugement du 23 mars 2016 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 14 avril 2010 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé la société ISS Abilis France (devenue ISS Propreté) à lui transférer le contrat de travail de M. C... A..., salarié protégé en sa qualité de membre du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail.

2. En vertu des dispositions du code du travail, les salariés protégés bénéficient d'une protection exceptionnelle instituée dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, afin d'éviter que ces salariés ne fassent l'objet de mesures discriminatoires dans le cadre d'une procédure de licenciement ou de transfert partiel d'entreprise. Le transfert d'un salarié protégé doit être autorisé par l'inspecteur du travail non seulement lorsque sont réunies les conditions prévues à l'article L. 1224-1 du code du travail mais également lorsque le transfert partiel résulte, en cas de perte d'un marché, des stipulations d'une convention collective ou d'un accord collectif.

3. En vertu des dispositions de l'article R. 2421-17 du code du travail, la procédure applicable en cas de demande d'autorisation de transfert d'un salarié protégé est notamment régie par les dispositions de l'article R. 2421-12 du même code, lesquelles prévoient que l'inspecteur du travail notifie sa décision à l'employeur, au salarié et, le cas échéant, à l'organisation syndicale intéressée.

4. Il résulte de ces dispositions que cette procédure administrative, qui est instituée aux seules fins de s'assurer que le salarié protégé dont le transfert est demandé ne fait pas l'objet d'une mesure discriminatoire, ne concerne que l'employeur qui demande l'autorisation et le salarié intéressé. Ainsi, l'entreprise destinée à devenir l'employeur du salarié protégé en cas d'autorisation du transfert a la qualité de tiers par rapport à cette décision.

5. Par ailleurs, les dispositions de l'article R. 421-5 du code de justice administrative, aux termes desquelles " les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ", ne sont pas applicables aux recours administratifs ou contentieux formés par des tiers contre de telles décisions.

6. Il ressort des pièces du dossier que la société EPPSI a obtenu une copie de la décision du 14 avril 2010 en litige par un courrier du 19 avril 2010 de la société ISS Propreté. La société EPPSI a eu communication de cette décision le 20 avril 2010, date à laquelle elle a indiqué à la société ISS Propreté, par un courrier du 26 avril 2010, avoir reçu son courrier du 19 avril ainsi que la décision en litige. Par ailleurs, il résulte de ce qui a été dit au point 4 ci-dessus que la société EPPSI avait la qualité de tiers par rapport à cette décision. Par suite, la demande de la société EPPSI enregistrée au greffe du Tribunal administratif de Melun le 25 mars 2014, soit au-delà du délai de recours de deux mois prévu par l'article R. 421-1 du code de justice administrative, était tardive et donc irrecevable.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la société EPPSI n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 14 avril 2010 de l'inspecteur du travail. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées pour la première fois en appel tendant à ce que cette décision lui soit jugée inapplicable ou inopposable ne peuvent qu'être rejetées, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur leur recevabilité.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la société EPPSI demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la société EPPSI une somme de 1 500 euros à verser à la société ISS Propreté sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société EPPSI est rejetée.

Article 2 : La société EPPSI versera à la société ISS Propreté une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société EPPSI, à la société ISS Propreté, à la ministre du travail et à M. C... A....

Délibéré après l'audience du 15 février 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Luben, président assesseur,

- Mme Bernard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 mars 2018.

Le rapporteur,

A. BERNARDLe président,

J. LAPOUZADE

Le greffier,

C. POVSELa République mande et ordonne à la ministre du travail en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA01697


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA01697
Date de la décision : 08/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Procédure - Introduction de l'instance - Délais - Point de départ des délais - Circonstances diverses déterminant le point de départ des délais - Connaissance acquise.

Travail et emploi - Transferts.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Aurélie BERNARD
Rapporteur public ?: M. SORIN
Avocat(s) : RENY

Origine de la décision
Date de l'import : 13/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-03-08;16pa01697 ?
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