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22/02/2018 | FRANCE | N°17PA01716

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 22 février 2018, 17PA01716


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...épouse C...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 7 juin 2016 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite.

Par un jugement n° 1617490/2-1 du 21 février 2017, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enreg

istrée le 19 mai 2017, complétée le 15 novembre 2017 d'un dépôt de pièces, MmeC..., représentée par ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...épouse C...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 7 juin 2016 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite.

Par un jugement n° 1617490/2-1 du 21 février 2017, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 mai 2017, complétée le 15 novembre 2017 d'un dépôt de pièces, MmeC..., représentée par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1617490/2-1 du 21 février 2017 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 7 juin 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du jugement à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le préfet était tenu de saisir la commission du titre de séjour en application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile car elle justifie de dix ans de présence en France à la date de la décision litigieuse ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ;

- il a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 10 août 2017, le préfet de police a conclu au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de Mme C...ne sont pas fondés.

Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris du 28 avril 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Pellissier a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que Mme A...épouseC..., ressortissante camerounaise née en octobre 1974 et entrée en France en novembre 2005 munie d'un visa court séjour délivré par les autorités belges, y a sollicité le 2 février 2016 son admission exceptionnelle au séjour dans le cadre de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que par un arrêté du 7 juin 2016, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de renvoi ; que Mme C...relève appel du jugement du 21 février 2017 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code d'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans " ;

3. Considérant que MmeC..., qui démontre être entrée en Belgique le 4 novembre 2005 munie d'un visa de court séjour, a fait appel aux services sociaux pour l'héberger en France pour la première fois le 17 novembre 2005 et y a obtenu le 12 février 2006 l'aide médicale d'Etat constamment renouvelée depuis lors ; qu'elle est hébergée depuis septembre 2007 au CHRS Laumière de l'association Emmaüs ; que pour démontrer sa résidence habituelle en France depuis plus de dix ans à la date de la décision litigieuse de juin 2016, elle fournit, pour la période allant de juin 2006 à l'été 2011 des attestations et reçus d'hébergement, des preuves d'envoi d'argent à son mari à l'étranger, les attestations annuelles d'admission à l'aide médicale d'Etat et de très nombreuses pièces médicales, convocations, certificats médicaux, résultats d'examens et analyses et ordonnances revêtues du cachet du pharmacien ; qu'à partir de septembre 2011, elle fournit en outre des bulletins de salaires, des relevés de livret d'épargne et les déclarations et avis d'impôt sur le revenu ; que les pièces ainsi produites forment un ensemble cohérent et sont suffisamment nombreuses et variées pour démontrer la résidence habituelle en France de Mme C...depuis plus de dix ans à la date de la décision litigieuse ; qu'ainsi celle-ci est fondée à soutenir que le préfet de police ne pouvait rejeter sa demande de titre de séjour sans saisir au préalable la commission du titre de séjour mentionnée à l'article L. 312-1 du code d'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le moyen tiré du vice de procédure résultant du défaut de la saisine de cette commission, qui constitue une garantie, doit donc être accueilli ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme C...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français pris par le préfet de police le 7 juin 2016 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Considérant que le présent arrêt n'implique pas que le préfet de police délivre un titre de séjour à Mme C...mais uniquement qu'il la munisse d'une autorisation provisoire de séjour et réexamine sa demande en respectant l'obligation de la soumettre à la commission du titre de séjour s'il n'entend pas y faire droit ; qu'il y a lieu de lui enjoindre de procéder à ce réexamen dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

6. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser au conseil de Mme C...sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, au titre des frais de procédure que Mme C... aurait exposés si elle n'avait bénéficié de l'aide juridictionnelle totale ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1617490/2-1 du 21 février 2017 du tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 7 juin 2016 du préfet de police sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de réexaminer la demande de titre de séjour de Mme C... dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 1 000 euros à Me D...sur le fondement des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme C...est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié Mme B...C..., au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 8 février 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- M. Legeai, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 février 2018.

Le président-assesseur,

S. DIÉMERTLa présidente de chambre,

rapporteur

S. PELLISSIERLe greffier,

A. LOUNISLa République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA01716


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17PA01716
Date de la décision : 22/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: Mme Sylvie PELLISSIER
Rapporteur public ?: M. ROMNICIANU
Avocat(s) : LGAVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 27/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-02-22;17pa01716 ?
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