Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A...C...a demandé au tribunal administratif de la Polynésie française d'annuler les décisions des 3 août et 30 septembre 2015 par lesquelles le président de la Polynésie française lui a infligé la sanction disciplinaire de la révocation et l'a radiée du cadre d'emplois des conseillers socio-éducatifs de la fonction publique de la Polynésie française.
Par un jugement n° 1500592 du 27 septembre 2016, le tribunal administratif de la Polynésie française, d'une part, a annulé les décisions des 3 août et 30 septembre 2015 et, d'autre part, a ordonné à la Polynésie française de réintégrer Mme C...à la date de sa révocation et de procéder le cas échéant à la reconstitution de sa carrière.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 9 décembre 2016 et
31 mai 2017, la Polynésie française, représentée par la SCP de Chaisemartin-Courjon, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande de MmeC... ;
3°) de mettre à la charge de Mme C...le versement d'une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La Polynésie française soutient que :
- son appel n'est pas tardif ;
- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la formation de la commission administrative paritaire siégeant en conseil de discipline le 28 juillet 2015 était irrégulièrement composée et que cette irrégularité avait privé Mme C...d'un garantie ;
- les autres moyens invoqués par Mme C...en première instance ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 mars 2017, MmeC..., représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la Polynésie française le versement d'une somme de 226 000 francs CFP en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Mme C...soutient que :
- la requête d'appel de la Polynésie française, tardive, est irrecevable ;
- le moyen invoqué par la Polynésie française n'est pas fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;
- la délibération n° 95-215 AT du 14 décembre 1995 portant statut général de la fonction publique de la Polynésie française ;
- la délibération n° 95-222 du 14 décembre 1995 relative à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires du territoire de la Polynésie française ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Boissy, rapporteur,
- les conclusions de Mme Mielnik-Meddah, rapporteur public ;
- les observations de Me de Chaisemartin, avocat de la Polynésie française.
1. Considérant que MmeC..., conseillère socio-éducative principale de la fonction publique de la Polynésie française, responsable de la circonscription d'action sociale de Punaauia-Paea, a fait l'objet d'une procédure disciplinaire à l'issue de laquelle le président de la Polynésie française lui a infligé, le 3 août 2015, la sanction disciplinaire de la révocation et, le 30 septembre 2015, l'a radiée du cadre d'emplois des conseillers socio-éducatifs de la fonction publique de la Polynésie française ; que, par un jugement du 27 septembre 2016, dont la Polynésie française relève appel, le tribunal administratif de la Polynésie française, d'une part, a annulé ces décisions des 3 août et 30 septembre 2015 et, d'autre part, a ordonné à la Polynésie française de réintégrer Mme C...à la date de sa révocation et de procéder le cas échéant à la reconstitution de sa carrière ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée à la requête de la Polynésie française :
2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 46 de la délibération
n° 95-215AT du 14 décembre 1995 : " Les commissions administratives paritaires comprennent un nombre égal de représentants de l'administration et de représentants du personnel élus. (...) " ; qu'aux termes de l'article 47 de la même délibération : " Les commissions administratives paritaires sont présidées par le ministre de la fonction publique ou son représentant. " ; qu'aux termes du dernier alinéa de l'article 48 de cette délibération : " Les commissions administratives paritaires siègent de manière identique en formation plénière et en formation disciplinaire. " ; qu'aux termes de l'article 86 de cette délibération : " Le pouvoir disciplinaire appartient au Président du gouvernement après avis de la commission administrative paritaire siégeant en conseil de discipline. (...) Le conseil de discipline délibère valablement lorsque le quorum, fixé, pour chacune des représentations du personnel et de l'administration, à la moitié plus une voix de leurs membres respectifs, est atteint. (...) Si le quorum n'est pas atteint lors de la première réunion, le conseil de discipline, après une nouvelle convocation, délibère valablement quel que soit le nombre des présents (...) " ;
3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 4 de la délibération
n° 95-222 AT du 14 décembre 1995 : " Le fonctionnaire poursuivi peut présenter devant le conseil de discipline des observations écrites ou orales, citer des témoins et se faire assister par un ou plusieurs défenseurs de son choix. Le droit de citer des témoins appartient également à l'administration. Les frais de déplacement et de séjour des témoins cités par le fonctionnaire poursuivi ainsi que les frais de déplacement et de séjour de son ou de ses défenseurs ne sont pas remboursés par l'administration " ; qu'aux termes de l'article 4 de la même délibération : " Le fonctionnaire poursuivi est convoqué par le président du conseil de discipline 15 jours au moins avant la date de la réunion, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Ce conseil peut décider, à la majorité des membres présents, de renvoyer, à la demande du fonctionnaire ou de son ou de ses défenseurs, l'examen de l'affaire à une nouvelle réunion. Un tel report n'est possible qu'une seule fois " ; qu'aux termes de l'article 5 de cette délibération : " (...) Le conseil de discipline entend séparément chaque témoin cité. (...) Le fonctionnaire et, le cas échéant, son ou ses défenseurs peuvent, à tout moment de la procédure devant le conseil de discipline, demander au président l'autorisation d'intervenir afin de présenter des observations orales (...) " ;
4. Considérant qu'il résulte des dispositions citées au point 2 et 3 qu'en vue de préparer utilement sa défense, et en particulier de lui permettre de présenter des observations écrites ou orales, de citer des témoins et de se faire assister par un ou plusieurs défenseurs de son choix, le fonctionnaire poursuivi est convoqué quinze jours au moins avant la date de la réunion du conseil de discipline ; qu'il en va ainsi non seulement pour la réunion initiale mais aussi pour celle qui se tient, le cas échéant, après le report d'une première réunion décidé à la suite d'une demande du fonctionnaire ou d'un défaut du quorum ;
5. Considérant que si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, lors de la première réunion du conseil de discipline à laquelle Mme C...a été convoquée, qui s'est tenue le 21 juillet 2015, le quorum n'a pas été atteint ; que si l'intéressée a été convoquée à une seconde réunion, prévue le 28 juillet 2015, par un courrier du 22 juillet 2015 remis à son époux le 24 juillet suivant, elle n'a en tout état de cause pas disposé du délai de quinze jours imposé par l'article 4 de la délibération n° 95-222 AT du 14 décembre 1995 lui permettant de préparer utilement sa défense ; que ce vice de procédure, qui a en l'espèce privé Mme C...d'une garantie, a entaché la décision du 3 août 2015 d'une illégalité ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la Polynésie française n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Polynésie française, d'une part, a annulé la décision du 3 août 2015 et, par voie de conséquence, l'arrêté du 30 septembre 2015 et, d'autre part, lui a ordonné de réintégrer Mme C...et de procéder, le cas échéant, à la reconstitution de sa carrière ; que ses conclusions aux fins d'annulation doivent par suite être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de MmeC..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que demande la Polynésie française au titre des frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la Polynésie française le versement de la somme que demande Mme C...au titre de ces mêmes frais ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la Polynésie française est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par Mme C...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la Polynésie française et à Mme A...
C....
Délibéré après l'audience du 12 janvier 2018 à laquelle siégeaient :
- Mme Heers, président de chambre,
- M. Auvray, président-assesseur,
- M. Boissy, premier conseiller,
Lu en audience publique le 2 février 2018.
Le rapporteur,
L. BOISSYLe président,
M. HEERSLe greffier,
F. DUBUY
La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Polynésie française, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 16PA03678 2