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24/01/2018 | FRANCE | N°17PA01429

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 24 janvier 2018, 17PA01429


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu qui lui ont été assignées au titre des années 2008 et 2009, à concurrence des montants en base de respectivement 55 000 euros et 21 099 euros ;

Par un jugement n° 1519150/1-2 du 28 février 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés

les 27 avril et 11 décembre 2017, M. A..., représenté par Me E...B...(D...), demande à la Cour :

...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu qui lui ont été assignées au titre des années 2008 et 2009, à concurrence des montants en base de respectivement 55 000 euros et 21 099 euros ;

Par un jugement n° 1519150/1-2 du 28 février 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 27 avril et 11 décembre 2017, M. A..., représenté par Me E...B...(D...), demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée devant le tribunal, et d'ordonner le remboursement des sommes indument payées, majorées des intérêts moratoires ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'il n'avait pas contesté, dans sa réclamation contentieuse, les suppléments d'impôt mis à sa charge au titre de l'année 2009 ;

- lorsque le bénéficiaire de distributions rembourse des sommes à la société antérieurement à la clôture de l'exercice au cours duquel ont été versées les distributions, ces remboursements viennent en déduction du montant des sommes imposables entre ses mains ; les sommes de

20 000 euros et 30 000 euros qu'il a remboursées en 2008 doivent donc être déduites des revenus réputés distribués pris en compte au titre de cette année ;

- c'est en méconnaissance de la dévolution de la charge de la preuve que le service a exigé de lui qu'il rapporte la preuve de l'absence d'appréhension de la somme de 21 098, 98 euros ;

- c'est à tort que l'administration a imposé au titre de 2009 comme revenu réputé distribué une somme de 21 099 euros inscrite au 31 décembre au crédit du compte courant ouvert à son nom dans la comptabilité de la société Les eaux bleues du lagon, alors que, ayant démissionné de ses fonctions de gérant le 10 novembre 2009 et cédé la totalité de ses parts le 12 novembre 2009, il n'a pas pu appréhender cette somme.

Par un mémoire en défense enregistré le 11 août 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par ordonnance du 24 novembre 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au

11 décembre 2017 à 12h.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Appèche,

- les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public,

- et les observations orales M. A..., présent à l'audience.

Une note en délibéré a été déposée le 11 janvier 2018 par Me B...pour M.A....

1. Considérant que M.A..., qui était associé gérant de la SARL Les eaux bleues du lagon, a fait l'objet, en 2012, d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle portant sur les années 2009, 2010 et 2011 ; qu'à l'issue de ce contrôle, lui ont notamment été notifiés des rehaussements de ses revenus imposables au titre des années 2008 et 2009, pour des montants en base de 85 626 euros et 85 678 euros, assorties de pénalités ; que les réclamations présentées par

M. A...ayant fait l'objet de décisions de rejet les 26 mars 2014, 24 septembre 2014 et

23 septembre 2015, l'intéressé a porté le litige devant le Tribunal administratif de Paris ; que par un jugement n° 1519150/1-2 du 28 février 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M. A..., laquelle ne portait que sur une partie des impositions supplémentaires mises à sa charge ; que M. A... relève appel de ce jugement ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 200-2 du livre des procédures fiscales : " (...)/Le demandeur ne peut contester devant le tribunal administratif des impositions différentes de celles qu'il a visées dans sa réclamation à l'administration " ; qu'à l'appui de sa demande présentée devant le Tribunal administratif de Paris, M. A... joignait la lettre en date du 23 septembre 2015 par laquelle l'administration fiscale a rejeté sa réclamation formée par un courrier en date du

19 mai 2015 ; que si ce courrier de M. A... ne précise clairement ni les impositions qu'il conteste ni les années d'imposition concernées, il indique faire suite à un précédent courrier de l'administration en date du 6 mai 2015 ; que ce dernier courrier portait rejet d'une réclamation précédente faite par lettre datée du 3 novembre 2014, et indiquait qu'il portait sur les impositions visées en objet soit : " Impôt sur les revenus et contributions sociales 2005/2006/2007/2008/2009 " ; que dans ces conditions, et nonobstant sa totale imprécision, la réclamation formée le 19 mai 2015 par M. A... devait être regardée comme portant sur les mêmes impositions ; qu'il suit de là que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que sa réclamation ne concernait que les impositions afférentes à l'année 2008 et ont, en application des dispositions susénoncées, rejeté comme irrecevables les conclusions en décharge portant sur celles afférentes à l'année 2009 ; que M. A... est par suite en droit d'obtenir l'annulation pour irrégularité du jugement en tant qu'il rejette comme irrecevables ses conclusions relatives aux impositions afférentes à l'année 2009 ;

3. Considérant qu'il a y a lieu pour la Cour d'évoquer l'affaire en tant qu'elle porte sur les impositions afférentes à l'année 2009 contestées par M. A...et saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres conclusions présentées en appel par l'intéressé ;

Sur le bien-fondé des suppléments d'impositions litigieux et majorations y afférentes :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 109-1-1° du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices " ;

5. Considérant qu'une procédure judiciaire ouverte auprès du Tribunal de grande instance de Paris pour escroquerie, faux et usage de faux et abus de biens sociaux, communiquée au vérificateur en application de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales a mis en évidence que M. A...a élaboré de fausses factures fournisseurs au sein de la SARL Les eaux bleues du lagon, lesdites factures étant réglées par chèques encaissés sur ses comptes personnels ; que les produits des détournements n'ayant pas été déclarés, l'administration fiscale a procédé en conséquence à des rehaussements des revenus déclarés par M. et Mme A...au titre notamment des années 2008 et 2009 ;

En ce qui concerne l'année 2008 :

6. Considérant que M. A... soutient que le rehaussement de 85 626 euros opéré par l'administration doit-être minoré de 50 000 euros correspondant a des remboursements de 20 000 et 30 000 euros qu'il a spontanément effectués au bénéfice de la SARL Les eaux bleues du lagon les 19 et 30 décembre 2008 ;

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment de la copie de chèque produite par le requérant et de la copie de son relevé de compte bancaire ainsi que de la copie du bordereau de remise de chèque, qu'un chèque de 20 000 euros a bien été tiré le 19 décembre 2008 sur le compte bancaire de M. A...au bénéfice de la SARL Les eaux bleues du lagon et qu'un virement de 30 000 euros a été effectué le 30 décembre 2008 depuis le compte de M. A...vers un compte détenu par la SARL ; que cependant la circonstance que M.A..., par ailleurs associé et gérant de la SARL, aurait procédé à ces versements à hauteur de 50 000 euros au profit de cette dernière, ne suffit pas à établir que lesdits versements avaient pour objet le remboursement de sommes détournées au cours de la même année et effectivement imposées à ce titre ; que le jugement du Tribunal de grande instance de Paris en date du 3 avril 2013, dans lequel le juge pénal se borne, statuant sur l'action civile, à considérer que le préjudice de la société de 348 002,28 euros, doit-être diminué des sommes de 55 000 euros, 17 000 euros, 40 000 euros et 20 000 euros, ne permet pas, en l'absence notamment de précision sur les dates des remboursements mentionnés dans ce jugement, d'établir avec certitude que M. A...aurait procédé au cours de l'année 2008, et alors que les détournements n'ont été découverts qu'en novembre 2009, à des versements au profit de la société Les eaux bleues du Lagon dont l'objet aurait été effectivement de rembourser, à hauteur de 50 000 euros, les sommes détournées imposées au titre de l'année 2008 ; qu'il en est de même de la lettre de l'avocat de la société, en date du 14 décembre 2010, qui ne permet aucun recoupement avec les remboursements invoqués ; que, par suite, en l'état du dossier, la somme de 85 626 euros imposée au titre de l'année 2008 ne peut qu'être regardée comme correspondant au montant net des sommes détournées à la date du 31 décembre 2008 ;

En ce qui concerne l'année 2009 :

8. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le vérificateur a constaté qu'au

31 décembre 2009 le compte courant d'associé ouvert au nom du requérant dans les comptes de la SARL Les eaux bleues du lagon a été crédité de 21 098,98 euros et que cette somme a été identifiée sous le libellé suivant " rémunération de M.A... " ; qu'après avoir considéré dans un premier temps, comme cela ressort de la proposition de rectification du 6 décembre 2012, que cette somme non déclarée par M. A... devait être imposée dans la catégorie des " traitements et salaires ", l'administration, dans une décision du 26 mars 2014 de rejet de réclamation du 7 octobre 2013, a finalement estimé que cette somme, inscrite au 31 décembre 2009, constituait un revenu réputé distribué au sens du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts ;

9. Considérant que l'inscription de sommes à un compte courant d'associé vaut, sauf preuve contraire, appréhension par le bénéficiaire ; que par suite, contrairement à ce que soutient M. A..., ce n'est pas à l'administration mais à lui-même qu'il appartient de démontrer qu'il n'a pas eu la disposition de la somme en cause ;

10. Considérant, d'une part, que M. A... se prévaut de ce qu'il n'avait plus la qualité d'associé, ayant cédé le 12 novembre 2009 la totalité des parts qu'il détenait dans la société Les eaux bleues du lagon ; que toutefois il résulte de l'instruction que l'acte de cession en cause n'a été enregistré que le 13 janvier 2011 ; que, dès lors, faute d'avoir date certaine avant son enregistrement, il ne suffit pas à démontrer que la cession invoquée a effectivement été réalisée avant le 31 décembre 2009 ; que M. A... n'est, par suite, pas fondé à soutenir qu'il n'était plus associé à la date à laquelle la somme litigieuse a été portée au crédit de son compte courant d'associé et qu'il n'aurait pu, de ce fait, avoir la disposition de la somme litigieuse ;

11. Considérant, d'autre part, que si M. A...soutient qu'il entretenait des relations conflictuelles avec la société susmentionnée, dont la co-gérante avait en effet déposé une plainte contre lui le 11 novembre 2009, à la suite de laquelle il avait été convenu entre les parties qu'il rembourserait à la société les sommes qu'il lui devait, cette circonstance ne saurait suffire à démontrer l'impossibilité pour l'intéressé d'appréhender la somme de 21 098,98 euros susmentionnée, inscrite sur un compte à son nom ;

12. Considérant, enfin, que les sommes inscrites au crédit d'un compte courant d'associé ont, sauf preuve contraire apportée par l'associé titulaire du compte, le caractère de revenus et sont imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ; que M. A... ne verse pas au dossier de justificatif probant de nature à démontrer le caractère de salaires de la somme en cause ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... est seulement fondé à obtenir l'annulation, pour irrégularité, du jugement attaqué, en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à la décharge des suppléments d'imposition et majorations y afférentes mis à sa charge au titre de l'année 2009 ; que les conclusions présentées par M. A...devant le tribunal administratif à fin de décharge desdits suppléments, ainsi que les conclusions à fin de décharge présentées dans sa requête d'appel doivent être rejetées ; qu'il en va de même, par voie de conséquence, de ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, l'Etat n'ayant pas dans la présente instance la qualité de partie perdante ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1519150/1-2 du Tribunal administratif de Paris en date du

28 février 2017 est annulé en tant qu'il a rejeté comme irrecevables les conclusions de M. A... tendant à la décharge des suppléments d'impositions et majorations y afférentes mis à sa charge au titre de l'année 2009.

Article 2 : Les conclusions présentées par M. A... devant le tribunal administratif et tendant à la décharge des suppléments d'impositions et majorations y afférentes mis à sa charge au titre de l'année 2009 sont rejetées, ainsi que le surplus de sa requête présentée devant la Cour.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal d'Ile-de-France.

Délibéré après l'audience du 10 janvier 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Appèche, président assesseur,

- Mme Jimenez, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 24 janvier 2018.

Le rapporteur,

S. APPECHELe président,

I. BROTONS

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA01429


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA01429
Date de la décision : 24/01/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Sylvie APPECHE
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : SELARL PLMC

Origine de la décision
Date de l'import : 30/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-01-24;17pa01429 ?
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