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11/01/2018 | FRANCE | N°16PA02860

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 11 janvier 2018, 16PA02860


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société SIFDDA Centre, la société Sarval Sud-Est SAS et la société SECANIM Bretagne ont demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à leur verser les sommes respectives de 2 184 047 euros, 3 102 326 euros et 3 745 308 euros, assorties des intérêts de droit et de la capitalisation des intérêts.

Par un jugement n°s 1507458, 158631, 158921 du 30 juin 2016, le tribunal administratif de Paris a joint et rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une r

equête et un mémoire, enregistrés les 2 septembre 2016 et 16 octobre 2017, la société Sarval Su...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société SIFDDA Centre, la société Sarval Sud-Est SAS et la société SECANIM Bretagne ont demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à leur verser les sommes respectives de 2 184 047 euros, 3 102 326 euros et 3 745 308 euros, assorties des intérêts de droit et de la capitalisation des intérêts.

Par un jugement n°s 1507458, 158631, 158921 du 30 juin 2016, le tribunal administratif de Paris a joint et rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 2 septembre 2016 et 16 octobre 2017, la société Sarval Sud-Est, représentée par Me Chetrit, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 1507458, 158631, 158921 du 30 juin 2016 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 102 326 euros assortie des intérêts de droit et de la capitalisation des intérêts ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué a omis de se prononcer sur le moyen tiré de ce que la note du 27 décembre 2013 a fautivement dispensé les aires d'optimisation logistique de la procédure d'enregistrement prévue à l'article 23 du règlement communautaire 1069/2009 ;

- le jugement attaqué a omis de se prononcer sur le moyen tiré de ce que l'administration a commis une faute en accordant, par la note du 15 mai 2014, aux exploitants d'aires d'optimisation logistique un délai d'un an pour régulariser leur situation au regard de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement ;

- le ministère de l'agriculture a commis une faute en faisant bénéficier la société ATEMAX d'un avantage concurrentiel en l'autorisant, au cours de l'année 2013, à constituer des aires d'optimisation logistique pour l'activité de collecte d'animaux morts et d'équarrissage, par dérogation, d'une part, à la réglementation sanitaire, en la dispensant de la procédure d'enregistrement prévue à l'article 23 du règlement 1069/2009 et des conditions de fonctionnement et d'équipement requises par le règlement n° 2011/142 du 25 février 2011 en cas de rattachement à un établissement agréé, et d'autre part, à la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement ;

- l'administration a commis une faute en omettant d'informer les autres opérateurs économiques de sa validation en 2013 du recours aux aires d'optimisation logistique, révélée par la note du 27 décembre 2013, en dépit de ses prises de positions antérieures ;

- le ministère de l'agriculture a commis une faute en pérennisant la situation irrégulière des aires d'optimisation logistique au regard de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement par sa note de service du 15 mai 2014 qui a laissé un délai d'un an aux exploitants d'aires d'optimisation logistique pour régulariser leur situation ; un tel délai a permis la prolongation de la situation irrégulière de l'aire de Blavozy au détriment de son établissement de Saint-Chély jusqu'en 2015 ;

- ces griefs sont à l'origine d'une rupture d'égalité entre la société ATEMAX et ses concurrents ;

- cette situation caractérise l'existence d'une violation du principe de confiance légitime ;

- cette situation caractérise l'existence d'une violation du principe constitutionnel qui interdit de porter atteinte aux situations légalement acquises et de remettre en cause les effets qui pouvaient être légitimement attendus de la législation, en particulier de l'obligation d'enregistrement qu'elle impose ;

- cette situation caractérise l'existence d'une violation du principe d'impartialité ;

- cette situation caractérise l'existence d'une violation des dispositions de l'article L. 420-1 du code du commerce qui interdit à l'administration de faire obstacle au libre jeu de la concurrence ;

- il existe un lien de causalité entre ces fautes de l'administration et le préjudice qu'elle a subi.

Par un mémoire en défense enregistré le 8 septembre 2017, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le jugement attaqué n'a pas omis de se prononcer sur les deux griefs allégués ;

- l'administration n'a pas commis les fautes alléguées par la requérante ;

- le lien de causalité entre la note du 27 décembre 2013 et les préjudices allégués par la société n'est pas établi ;

- l'évaluation faite par la requérante de son préjudice ne pourra être retenue ;

- le comportement de l'administration n'a pas été constitutif d'une rupture d'égalité entre les opérateurs économiques.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (CE) n° 1774/2002 du Parlement européen et du Conseil du 3 octobre 2002 établissant des règles sanitaires applicables aux sous-produits animaux non destinés à la consommation humaine ;

- le règlement (CE) n° 1069/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 établissant des règles sanitaires applicables aux sous-produits animaux et produits dérivés non destinés à la consommation humaine et abrogeant le règlement (CE) n° 1774/2002 ;

- le règlement (UE) n° 142/2011 de la Commission du 25 février 2011 portant application du règlement (CE) n° 1069/2009 du Parlement européen et du Conseil établissant des règles sanitaires applicables aux sous-produits animaux et produits dérivés non destinés à la consommation humaine et portant application de la directive 97/78/CE du Conseil en ce qui concerne certains échantillons et articles exemptés des contrôles vétérinaires effectués aux frontières en vertu de cette directive ;

- le code de commerce ;

- la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Nguyên Duy,

- les conclusions de M. Romnicianu, rapporteur public,

- et les observations de Me Chetrit, avocat de la société Sarval Sud-Est.

1. Considérant qu'au cours de l'année 2013, les associations dites " ATM " (" animaux trouvés morts ") ont procédé, pour le compte des éleveurs qui y sont affiliés, au renouvellement des contrats d'enlèvement et de traitement des animaux morts dans leur exploitation ; qu'à l'issue des négociations menées avec les quatre opérateurs qui se partagent le marché de l'équarrissage, les associations " ATM " ont attribué, en novembre 2013, certains de ces contrats à la société ATEMAX, qui avait proposé un système de collecte de sous-produits animaux inédit reposant sur la mise en place " d'aires d'optimisation logistique " ; qu'estimant que le ministère chargé de l'agriculture avait permis à la société ATEMAX de bénéficier d'un avantage concurrentiel en validant le principe du recours aux aires d'optimisation logistique, les précédents bénéficiaires de ces contrats, la société SIFDDA centre, la société SARVAL Sud-Est et la société SECANIM Bretagne, filiales du groupe Saria, ont saisi le tribunal administratif de Paris d'un recours tendant à l'indemnisation du préjudice qu'elles estiment avoir subi du fait des fautes commises par l'Etat ; que les premiers juges ont rejeté leurs demandes par un jugement du 30 juin 2016 dont la société Sarval Sud-Est interjette régulièrement appel en ce qui la concerne ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'il ressort des termes mêmes du point 10 du jugement attaqué que les premiers juges ont répondu au moyen tiré de ce que la note du 27 décembre 2013 aurait dispensé les aires d'optimisation logistique de la procédure d'enregistrement prévue à l'article 23 du règlement communautaire n° 1069/2009 du 21 octobre 2009 ; qu'il ressort également des visas et du point 14 du jugement attaqué qu'en réponse au moyen tiré de ce que l'administration a commis une faute en accordant aux exploitants d'aires d'optimisation logistique, par la note du 15 mai 2014, un délai d'un an pour régulariser leur situation au regard de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement, les premiers juges ont relevé qu' " eu égard à la nature de leurs demandes indemnitaires fondées sur les pertes financières consécutives à la réattribution des marchés d'équarrissage fin 2013, elles ne justifient, en tout état de cause, pas avoir subi un préjudice du fait du comportement allégué de l'administration qui aurait toléré un fonctionnement irrégulier des aires d'optimisation logistiques ou tardé à en obtenir la mise aux normes " ; qu'ainsi la requérante n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué aurait omis de se prononcer sur ces deux griefs ;

Sur la responsabilité de l'Etat :

3. Considérant, en premier lieu, que la requérante soutient que le ministère de l'agriculture a commis une faute en faisant bénéficier la société ATEMAX d'un avantage concurrentiel en l'autorisant, au cours de l'année 2013, à constituer des aires d'optimisation logistiques pour l'activité de collecte d'animaux morts et d'équarrissage, par dérogation, d'une part, à la réglementation sanitaire, et d'autre part, à la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement ;

4. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 23 du règlement n° 1069/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 : " 1. En vue de l'enregistrement, les exploitants : / a) signalent à l'autorité compétente, avant le début de leurs opérations, les établissements et usines sous leur contrôle, actifs à un stade quelconque de la production, du transport, de la manipulation, de la transformation, de l'entreposage, de la mise sur le marché, de la distribution, de l'utilisation ou de l'élimination des sous-produits animaux et des produits dérivés ; / b) fournissent des informations à l'autorité compétente sur : i ) la catégorie des sous-produits animaux ou des produits dérivés sous leur contrôle ; ii) la nature des opérations réalisées à partir de sous-produits animaux ou de produits dérivés comme matériels de départ. / 2. Les exploitants fournissent à l'autorité compétente des informations à jour sur tous les établissements ou usines sous leur contrôle visés au paragraphe 1, point a), notamment en lui notifiant toute modification significative des activités et toute fermeture d'une usine ou d'un établissement existant (...) / 4. Par dérogation au paragraphe 1, aucune notification préalable à l'enregistrement n'est nécessaire pour les activités pour lesquelles les établissements qui produisent des sous-produits animaux ont déjà été agréés ou enregistrés en vertu des règlements (CE) n° 852/2004 ou (CE) n° 853/2004, ni pour les activités pour lesquelles des établissements ou des usines ont déjà été agréés en vertu de l'article 24 du présent règlement " ; qu'aux termes du point 3 du chapitre IV de l'annexe IX du règlement d'application n° 142/2011 de la Commission du 25 février 2011 : " Les exploitants enregistrés transportant des sous-produits animaux ou des produits dérivés entre des endroits autres que des locaux du même exploitant doivent en particulier : a) disposer d'informations d'identification de leurs véhicules qui permettent de vérifier l'utilisation des véhicules en rapport avec le transport de sous-produits animaux ou de produits dérivés ; b) nettoyer et désinfecter leurs véhicules s'il y a lieu ; c) prendre toutes autres mesures nécessaires pour empêcher la contamination et la propagation de maladies transmissibles à l'homme ou aux animaux " ;

5. Considérant que la note du 27 décembre 2013 du directeur général de l'alimentation du ministère chargé de l'agriculture (DGAL) adressée aux directeurs départementaux de la protection des populations et aux directeurs départementaux de la cohésion sociale et de la protection des populations a relevé que " le dispositif de transport par train de containers avec dépôt intermédiaire sur une aire d'optimisation logistique " " ne contrevenait à aucune règle sanitaire prévue par les textes en vigueur " ; que cette note, qui se borne ainsi à indiquer que le dispositif des aires d'optimisation logistique n'est pas contraire aux règles sanitaires applicables, ne peut donc être regardée comme ayant dispensé les aires d'optimisation logistique du respect de ces règles, contrairement à ce que soutient la requérante ; que la note rappelle d'ailleurs que les véhicules et containers appartenant à une société de sous-traitance doivent notifier leur activité en vue de leur enregistrement en application de l'article 23 du règlement n° 1069/2009 du 21 octobre 2009 précité ; que ce n'est que dans le cas où les camions et containers sont déjà rattachés à un établissement d'entreposage ou de transformation agréé au titre de l'article 24 du même règlement, que la note a prévu qu'un simple courrier devrait être envoyé, à l'exclusion d'une notification d'activité en vue d'un enregistrement, ainsi que le permet d'ailleurs le point 4 de l'article 23 de ce règlement ; que la circonstance que la note du 27 décembre 2013 rappelle les obligations d'enregistrement et d'information des autorités compétentes résultant de l'article 23 du règlement du 21 octobre 2009 implique nécessairement que l'administration a entendu soumettre les aires d'optimisation logistique au respect des règles sanitaires prises pour son application, notamment celles du point 3 du chapitre IV de l'annexe IX du règlement d'application n° 142/2011 de la Commission du 25 février 2011 ;

6. Considérant, d'autre part, qu'ainsi que l'a jugé le Conseil d'Etat dans sa décision du 12 mai 2015 n° 376152, la note du 27 décembre 2013 ne prend pas position sur l'interprétation de la réglementation des installations classées pour la protection de l'environnement et sur son application aux aires d'optimisation logistique ; que le moyen tiré de ce que cette note donnerait de cette réglementation une interprétation qui en méconnaît le sens et la portée en excluant de son champ d'application les aires d'optimisation logistique ne peut, dès lors, qu'être écarté ; que, dès lors qu'il résulte également de la note de service du 15 mai 2014 que l'administration a entendu soumettre les aires d'optimisation logistique à cette législation, la requérante n'est pas fondée à soutenir que l'administration aurait entendu exclure les aires d'optimisation logistique du champ d'application de la réglementation sur les installations classées pour la protection de l'environnement ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 5 et 6 que les moyens tirés de la méconnaissance du principe de confiance légitime et du respect des situations légalement acquises doivent être écartés, pour les mêmes motifs ;

8. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 7 de la loi du 17 juillet 1978, alors applicable : " Font l'objet d'une publication les directives, les instructions, les circulaires, ainsi que les notes et réponses ministérielles qui comportent une interprétation du droit positif ou une description des procédures administratives. / (...) Toutefois, sauf dispositions législatives contraires, les documents administratifs qui comportent des mentions entrant dans le champ d'application de l'article 6 ou, sans préjudice de l'article 13, des données à caractère personnel ne peuvent être rendus publics qu'après avoir fait l'objet d'un traitement afin d'occulter ces mentions ou de rendre impossible l'identification des personnes qui y sont nommées. " ;

9. Considérant que la requérante soutient que l'administration a commis une faute en omettant d'informer les opérateurs économiques autres que la société ATEMAX du fait qu'elle a jugé valide en 2013 le recours aux aires d'optimisation logistique, comme le révèle la note du 27 décembre 2013, et ce en dépit de ses prises de positions antérieures ;

10. Considérant, d'une part, que, contrairement à ce que soutient la requérante, l'administration n'aurait pu rendre publique la position qu'elle a adoptée sur les aires d'optimisation logistique dans le cadre de ses échanges avec la société ATEMAX au cours de l'année 2013, sans porter atteinte au secret industriel et commercial de cette société, protégé par le II de l'article 6 de la loi du 17 juillet 1978, alors que la renégociation des contrats de transports d'animaux morts et d'équarrissage était en cours et qu'une occultation du nom de la société n'aurait pas permis de rendre impossible son identification, compte tenu du faible nombre d'opérateurs sur ce marché et la part importante occupée par la société ATEMAX dans celui-ci ; qu'à supposer même que la société ATEMAX ait bénéficié d'un avantage concurrentiel à compter du moment où elle a eu connaissance de la validation du dispositif des aires d'optimisation logistique par le ministre chargé de l'agriculture, cet avantage n'est pas la conséquence de la décision de l'administration, mais résulte des choix stratégiques, technologiques et économiques que la société a opérés et qui lui ont permis de se distinguer de ses concurrents ;

11. Considérant, d'autre part, que la circonstance qu'en 2006, le ministère de l'agriculture avait considéré qu'un dispositif similaire à celui des aires d'optimisation logistique, proposé par le groupe Saria, était contraire aux règles de sécurité sanitaire alors applicables ne saurait suffire à établir qu'il a changé de position, en 2013, dans le but de favoriser la société ATEMAX ; qu'il résulte, au contraire, de l'instruction que le règlement (CE) n° 1069/2009 du 21 octobre 2009 a abrogé le régime mis en place par le règlement (CE) n° 1774/2002 du 3 octobre 2002, au vu duquel la demande du groupe Saria avait été examinée, et a notamment supprimé les dispositions qui prévoyaient que la manipulation et/ou l'entreposage temporaire de matières non transformées des catégories 1 (et 2) en vue de leur transport vers une destination finale ne pouvait être effectué que dans des établissements intermédiaires agréés de catégorie 1 ; que les acteurs de la filière, dont la société requérante fait partie, devaient ainsi être regardés comme étant informés de la possible évolution des obligations sanitaires résultant de cette modification de la réglementation communautaire ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 10 et 11 que la requérante n'est pas fondée à soutenir que l'administration aurait méconnu le principe d'impartialité, ni qu'elle aurait violé les dispositions de l'article L. 410-1 du code de commerce qui interdit à l'administration de faire obstacle au libre jeu de la concurrence ;

13. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des termes mêmes de la note de service du 15 mai 2014 du ministre chargé de l'agriculture que celle-ci se borne à inviter les directions départementales de la protection des populations et les directions départementales de la cohésion sociale et de la protection des populations à mettre en demeure les exploitants d'aires d'optimisation logistique de régulariser leur situation au regard de la réglementation des installations classées pour la protection de l'environnement, au titre de la rubrique 2731 de la nomenclature de ces installations, par le dépôt d'une demande d'agrément ; que si elle recommande de veiller à laisser à l'exploitant un délai suffisant pour ce faire, en mentionnant à titre indicatif un délai d'un an, cette note ne faisait nullement obstacle à ce que les services destinataires mettent en oeuvre les pouvoirs dont ils disposent en vertu de l'article L. 171-7 du code de l'environnement dans le cas où il serait apparu nécessaire d'y recourir ; qu'ainsi, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que le ministre chargé de l'agriculture aurait commis une faute en accordant, par sa note de service du 15 mai 2014, un délai d'un an aux exploitants d'aires d'optimisation logistique pour régulariser leur situation sans suspendre leur activité ;

14. Considérant, en quatrième lieu, que la requérante soutient que les services déconcentrés du ministère de l'agriculture ont commis une faute en s'abstenant de prononcer la suspension d'activité des aires d'optimisation logistique le temps nécessaire à la régularisation de leur situation au regard de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement, alors que, selon elle, aucun motif d'intérêt général ni aucune considération d'ordre économique ou social ne permettait de justifier la poursuite de cette activité dans des conditions irrégulières ; que s'il ressort des pièces du dossier que la société Atemax a cessé d'exploiter l'aire d'optimisation logistique de Blavozy (Haute-Loire) à compter du 13 juillet 2015, l'administration n'apporte aucune précision sur le respect par cette aire d'optimisation logistique, antérieurement à cette date, de la réglementation sur les installations classées pour la protection de l'environnement ni sur les mesures qui auraient été prises par le préfet du département à son égard, pas plus que sur les motifs susceptibles de justifier la poursuite de son activité dans l'hypothèse où elle n'aurait pas appliqué la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement ; qu'ainsi, l'état du dossier ne permettant pas à la Cour de statuer sur l'existence de la faute invoquée par la société Sarval Sud-Est, il y a lieu, avant dire droit sur les conclusions de la requête relatives à cette faute, d'ordonner un supplément d'instruction tendant à ce que l'administration apporte les précisions ainsi demandées ;

15. Considérant que, dans l'hypothèse où il résulterait des éléments ainsi recueillis que l'administration a commis une faute en ne faisant pas assurer le respect, par l'aire d'optimisation logistique de Blavozy, de la réglementation relative aux installations classées pour la protection de l'environnement, l'état du dossier ne permet pas non plus de déterminer le montant du préjudice subi par la requérante ; que si la société Sarval Sud-Est, qui fait valoir que cette aire concurrençait illégalement depuis le 1er janvier 2014 les activités de son centre de collecte de Saint-Chély, demande la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 3 102 326 euros correspondant, selon elle, à la perte de deux années de marge opérationnelle et aux coûts de restructuration induits par la diminution des effectifs, elle produit des tableaux peu lisibles qui ne permettent pas de comprendre l'organisation géographique des différents centres de dépôt lui appartenant et l'impact de la création de l'aire d'optimisation logistique de Blavozy sur leur activité, ni, par conséquent, de déterminer avec précision la perte de tonnages et donc de marge nette subie par ces différents centres ; que, s'agissant des licenciements auxquels elle a dû procéder, la requérante ne produit aucune pièce justificative, telles que des fiches de paie et des lettres de licenciements, permettant d'en apprécier la réalité ; qu'ainsi, dans l'hypothèse où la Cour retiendrait une faute à l'encontre de l'Etat, la société requérante ne la met pas à même d'évaluer le préjudice subi ; que, dès lors, il y a lieu d'ordonner, avant dire droit sur les conclusions de la requête relatives à ce chef de préjudice, un supplément d'instruction afin que la société Sarval Sud-Est produise ces éléments d'information ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les conclusions tendant à l'indemnisation des préjudices subis du fait des fautes mentionnées aux points 3 à 13 du présent arrêt sont rejetées.

Article 2 : Avant de statuer sur les conclusions de la société requérante tendant à l'indemnisation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de la faute mentionnée au point 14, il sera procédé à un complément d'instruction tendant à la production, par le ministre chargé de l'agriculture, des précisons mentionnées au point 14 des motifs du présent arrêt, et, par la société Sarval Sud-Est, des précisions mentionnées au point 15.

Article 3 : Ces éléments devront parvenir à la cour dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : Tous autres droits et moyens des parties sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société Sarval Sud-Est SAS et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

Délibéré après l'audience du 14 décembre 2017, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente,

- M. Diémert, président-assesseur,

- Mme Nguyên Duy, premier conseiller.

Lu en audience publique le 11 janvier 2018.

Le rapporteur,

P. NGUYÊN DUY La présidente,

S. PELLISSIER Le greffier,

M. A...La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de l'alimentation, en ce qui le concerne ou à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA02860


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 16PA02860
Date de la décision : 11/01/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

17-05-01-02 Compétence. Compétence à l'intérieur de la juridiction administrative. Compétence en premier ressort des tribunaux administratifs. Compétence territoriale.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: Mme Pearl NGUYÊN-DUY
Rapporteur public ?: M. ROMNICIANU
Avocat(s) : CABINET CHETRIT DPE

Origine de la décision
Date de l'import : 16/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-01-11;16pa02860 ?
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