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08/11/2017 | FRANCE | N°16PA03624

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 08 novembre 2017, 16PA03624


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à lui verser la somme de 26 000 euros en réparation du préjudice financier et du préjudice moral qu'il estime avoir subis du fait de son éviction illégale du service.

Par un jugement n° 1509447/5-1 du 6 octobre 2016 le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 5 décembre 2016, M. B..., représenté par le cabinet Alcalex, demande à la

Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1509447/5-1 du 6 octobre 2016 du Tribunal administratif de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à lui verser la somme de 26 000 euros en réparation du préjudice financier et du préjudice moral qu'il estime avoir subis du fait de son éviction illégale du service.

Par un jugement n° 1509447/5-1 du 6 octobre 2016 le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 5 décembre 2016, M. B..., représenté par le cabinet Alcalex, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1509447/5-1 du 6 octobre 2016 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de condamner l'Etat à lui payer les sommes de 19 500 euros au titre des dommages et intérêts venant réparer le préjudice financier lié à la résiliation abusive de son contrat d'engagement et de 6 500 euros venant réparer le préjudice moral subi ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que, faute de saisine préalable de la commission de recours des militaires, sa demande contentieuse était irrecevable ; la résiliation de contrat à l'origine des préjudices dont il demande réparation, est une décision de nature disciplinaire et son recours indemnitaire échappe donc à la compétence de la commission de recours des militaires ;

- il a subi, du fait de cette résiliation, des préjudices financiers, à compter de cette éviction et au moins jusqu'au terme de son contrat le 1er mars 2011, puisqu'il n'a plus perçu de rémunération ; il est en droit d'en obtenir la pleine et entière réparation ;

- il a perdu, du fait de cette résiliation de contrat, une chance sérieuse de percevoir les indemnités dues en cas de congé de longue durée pour maladie ;

- il a subi un préjudice moral tenant notamment aux conditions dans lesquelles il a été déclaré à tort déserteur et est en droit d'obtenir une indemnité à ce titre.

Par un mémoire en défense enregistré le 11 juillet 2017, le ministre des armées conclut à l'annulation du jugement du tribunal administratif et au rejet des conclusions indemnitaires présentées par M.B....

Il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la commission de recours des militaires aurait dû être saisie par M.B..., alors que son recours indemnitaire se rattachait à l'exercice du pouvoir disciplinaire et échappait à la compétence de cette commission ;

- aucun des moyens de la requête tendant à l'obtention d'une indemnisation n'est fondé.

Par ordonnance du 15 septembre 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au

29 septembre 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la défense ;

- le code de justice militaire ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Appèche,

- les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public,

1. Considérant que, par un arrêté du 1er février 2010, le chef du bureau des ressources humaines de la brigade de sapeurs pompiers de Paris a résilié le contrat d'engagement de cinq ans de M. B...pour servir en qualité d'engagé volontaire de l'armée de terre à la brigade de sapeurs-pompiers de Paris ; que, par un jugement du 31 mai 2012, devenu définitif, le Tribunal administratif de Paris a, sur la requête de M.B..., annulé cet arrêté pour incompétence du signataire et insuffisance de motivation ; que, par un nouvel arrêté du 21 septembre 2012, le général, commandant la brigade des sapeurs-pompiers de Paris a de nouveau résilié le contrat d'engagement de M. B...à titre de sanction disciplinaire ; que, par un jugement du 30 janvier 2014, devenu définitif, le Tribunal administratif de Paris a, sur la requête de M.B..., annulé cet arrêté pour un motif de légalité interne ; que, par un courrier du 19 février 2015, M. B...a sollicité auprès du ministre de la défense la réparation des préjudices résultant de son éviction illégale du service entre le 1er février 2010 et le 1er mars 2011, date à laquelle son contrat devait prendre fin ; que le silence gardé par l'administration a fait naître une décision implicite de rejet ; que, M. B... a saisi du litige le Tribunal administratif de Paris et demandé la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 26 000 euros en réparation du préjudice financier et du préjudice moral résultant selon lui de l'illégalité de la mesure de résiliation de contrat dont il a fait l'objet le

21 septembre 2012 ; qu'il relève appel du jugement n° 1509447/5-1 du 6 octobre 2016 de ce tribunal rejetant sa demande ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant, qu'aux termes de l'article R. 4125-1 du code de la défense : " I.-Tout recours contentieux formé par un militaire à l'encontre d'actes relatifs à sa situation personnelle est précédé d'un recours administratif préalable, à peine d'irrecevabilité du recours contentieux. / Ce recours administratif préalable est examiné par la commission des recours des militaires, placée auprès du ministre de la défense. / La saisine de la commission est seule de nature à conserver le délai de recours contentieux jusqu'à l'intervention de la décision prévue à l'article R. 4125-10. /- II.- Les dispositions de la présente section ne sont pas applicables aux recours contentieux formés à l'encontre d'actes ou de décisions : - 1° Concernant le recrutement du militaire ou l'exercice du pouvoir disciplinaire (...) " ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la saisine de la commission des recours des militaires s'impose, à peine d'irrecevabilité d'un recours contentieux formé par un militaire à l'encontre d'actes relatifs à sa situation personnelle, que ce recours tende à l'annulation d'une décision ou à l'octroi d'une indemnité à la suite d'une décision préalable ayant lié le contentieux ; que ce principe comporte toutefois une exception pour les matières que lesdites dispositions ont entendu écarter expressément de la procédure du recours préalable obligatoire et au nombre desquelles figure "l'exercice du pouvoir disciplinaire" ; que la demande indemnitaire formée par un militaire tendant à la réparation de l'ensemble des préjudices découlant d'une sanction disciplinaire prononcée illégalement à son encontre, comme le recours contentieux qui tend aux mêmes fins après rejet implicite de ladite demande, se rattachent nécessairement à l'exception prévue par les dispositions textuelles précitées concernant "l'exercice du pouvoir disciplinaire" ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté, que la résiliation du contrat d'engagement souscrit par M. B...est intervenue pour des motifs disciplinaires ; qu'ainsi, M.B..., qui a demandé par un courrier du 19 février 2015 au ministre de la défense la réparation des préjudices résultant de son éviction illégale du service entre le

1er février 2010 et le 1er mars 2011, date à laquelle son contrat devait prendre fin, n'était pas tenu de contester devant la commission des recours des militaires, préalablement à la saisine du tribunal administratif, la décision implicite portant rejet de sa demande indemnitaire dès lors que les préjudices financiers et moraux invoqués par l'intéressé résultent de cette résiliation de nature disciplinaire ; que dès lors, M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est entaché d'irrégularité, le Tribunal administratif de Paris a rejeté comme irrecevable sa demande, et à obtenir l'annulation dudit jugement ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner sa recevabilité, qu'il n'y a plus lieu pour la Cour de statuer sur l'appel incident présenté en défense ;

6. Considérant que dans les circonstances de l'espèce il y a lieu de renvoyer au Tribunal administratif de Paris le jugement de l'affaire, la Cour ne disposant pas, en l'état du dossier, des éléments suffisants pour statuer par la voie de l'évocation sur les conclusions indemnitaires présentées par M. B...;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions susmentionnées ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1509447/5-1 du 6 octobre 2016 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée devant le Tribunal administratif de Paris.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur l'appel incident présenté par le ministre des armées dans son mémoire du 11 juillet 2017.

Article 4 : L'Etat versera à M. B... une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M.A... B... et au ministre des armées.

Délibéré après l'audience du 18 octobre 2017, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Appèche, président assesseur,

- Mme Jimenez, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 novembre 2017.

Le rapporteur,

S. APPECHELe président

I. BROTONS

Le greffier,

P. LIMMOIS

La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA03624


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA03624
Date de la décision : 08/11/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Sylvie APPECHE
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : CABINET ALCALEX

Origine de la décision
Date de l'import : 14/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-11-08;16pa03624 ?
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