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05/10/2017 | FRANCE | N°16PA02169

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 05 octobre 2017, 16PA02169


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société AJMT a demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge des cotisations de taxe professionnelle et des cotisations foncières des entreprises auxquelles elle a été assujettie au titre, respectivement, de l'année 2009 et des années 2010 et 2011 dans les rôles de la commune de Chanteloup-en-Brie (Seine-et-Marne).

Par un jugement n° 1402432 du 21 avril 2016, le Tribunal administratif de Melun a prononcé la décharge demandée et mis à la charge de l'Etat une somme de 1

000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société AJMT a demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge des cotisations de taxe professionnelle et des cotisations foncières des entreprises auxquelles elle a été assujettie au titre, respectivement, de l'année 2009 et des années 2010 et 2011 dans les rôles de la commune de Chanteloup-en-Brie (Seine-et-Marne).

Par un jugement n° 1402432 du 21 avril 2016, le Tribunal administratif de Melun a prononcé la décharge demandée et mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

Par un recours, enregistré le 5 juillet 2016, le ministre des finances et des comptes publics demande à la Cour :

1°) d'annuler les articles 1er et 2 du jugement n° 1402432 du 21 avril 2016 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) de juger que la société AJMT sera rétablie, au titre des années 2009, 2010 et 2011, au rôle de la taxe professionnelle et des cotisations foncières des entreprises de la commune de Chanteloup-en-Brie (Seine-et-Marne), à raison des droits supplémentaires dont la décharge a été prononcée à tort par les premiers juges.

Le ministre soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont prononcé la décharge de la totalité des cotisations de taxe professionnelle et de cotisations foncières des entreprises réclamées au titre des années 2009, 2010 et 2011 à la société AJMT, alors que la société, qui avait obtenu le dégrèvement d'une fraction de ces impositions au titre du plafonnement en fonction de la valeur ajoutée, avait limité le montant de ses prétentions aux sommes restant dues ;

- les impositions en litige ne procèdent pas de rehaussements et ne peuvent donc être contestées sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales ;

- la société AJMT, qui n'a pas produit de document établi en son nom et comportant une prise de position formelle de l'administration la concernant, notamment sur les modalités d'assujettissement à la taxe professionnelle puis à la cotisation foncière des entreprises, ne peut se prévaloir d'aucune prise de position prise en son nom, qui serait opposable à l'administration ; les courriers adressés à la SAS Babou ne peuvent constituer une prise de position de l'administration à son égard, dès lors qu'elle n'est pas dans la même situation que cette société et qu'elle n'a pas été désignée dans les courriers du service ;

- la prise de position du service était caduque.

Vu les diligences effectuées par le greffe de la Cour pour communiquer le recours du ministre des finances et des comptes publics à la société AJMT.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Poupineau,

- et les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public.

1. Considérant que la société Babou exerce une activité de distribution au travers de magasins dont elle confie la gérance à des entreprises indépendantes ; que, pour son imposition à la taxe professionnelle au titre des années 2002 à 2005, l'administration fiscale avait estimé que les locaux commerciaux restaient à la disposition de la société Babou pour l'exercice de son activité professionnelle ; qu'en application de l'article 1467 du code général des impôts, elle avait, dès lors, intégré leur valeur locative dans ses bases d'imposition ; que, par des arrêts du 23 décembre 2010, la Cour administrative d'appel de Lyon a infirmé cette analyse au motif que les locaux étaient sous le contrôle des mandataires auxquels la société Babou en confiait l'exploitation ; que l'administration fiscale a alors intégré la valeur locative des magasins de la société Babou dans la base imposable à la cotisation foncière des entreprises de chacun des exploitants ; que la société AJMT, qui, par des conventions de gérance-mandat conclues avec la société Babou exploitait un fonds de commerce de distribution au détail de produits d'équipement du foyer et de la personne sur le territoire de la commune de Chanteloup-en-Brie (Seine-et-Marne), s'est ainsi vue notifier le rehaussement de sa base d'imposition à la taxe professionnelle pour l'année 2009 et à la cotisation foncière des entreprises pour les années 2010 et 2011 par deux courriers en date des 28 août et 11 septembre 2012 ; que le ministre des finances et des comptes publics fait appel du jugement en date du 21 avril 2016 par lequel le Tribunal administratif de Melun a prononcé la décharge des impositions réclamées à la société AJMT et mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales : " La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable : / 1° Lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal (...) " ; que peuvent se prévaloir de cette garantie, pour faire échec à l'application de la loi fiscale, les contribuables qui se trouvent dans la situation de fait sur laquelle l'appréciation invoquée a été portée, ainsi que les contribuables qui, à la date de la prise de position de l'administration, ont été partie à l'acte ou participé à l'opération qui a donné naissance à cette situation, sans que les autres contribuables puissent utilement invoquer une rupture à leur détriment du principe d'égalité ;

3. Considérant que, pour demander la décharge des cotisations de taxe professionnelle et de cotisation foncière des entreprises auxquelles elle a été assujettie du fait de l'intégration dans sa base imposable de la valeur locative des locaux commerciaux mis à sa disposition par la société Babou, la société AJMT a opposé à l'administration fiscale, sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, sa prise de position résultant de deux courriers en date des 20 décembre 2005 et 30 mai 2007 par lesquels elle indiquait à la société Babou que celle-ci avait, au sens et pour l'application de l'article 1467 du code général des impôts, la disposition, pour l'exercice de son activité professionnelle, des locaux commerciaux dont elle confiait la gestion à des tiers et que leur valeur locative entrait, en conséquence, dans l'assiette de son imposition à la taxe professionnelle au titre des années 2002 à 2003 ; que, dès lors que la valeur locative de ces locaux ne pouvait être prise en compte, pour l'imposition à la taxe professionnelle, devenue cotisation foncière des entreprises, que dans l'assiette soit de la société Babou, soit de son cocontractant auquel elle en avait confié la gérance, ces courriers, en l'absence d'un changement de circonstance de fait ou de droit, étaient susceptibles de constituer une prise de position dont les contribuables pouvaient se prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales ; que, toutefois, cette prise de position ne concernait que la société Babou, à laquelle les courriers étaient adressés, ainsi que les entreprises titulaires des contrats de gérance-mandat pour l'exploitation d'un magasin de la société Babou qui avaient fait l'objet de l'analyse de l'administration menée pour les impositions des années 2002 à 2005 et qui étaient identifiées en annexe du courrier du 30 mai 2007 ; qu'il résulte de l'instruction que les contrats par lesquels la société Babou a mis à disposition de la société AJMT les locaux commerciaux pour l'exploitation d'un magasin à Chanteloup-en-Brie ont été conclus les 1er octobre 2008, 2009 et 2010, postérieurement à la prise de position de l'administration fiscale résultant de ses courriers des 20 décembre 2005 et 30 mai 2007 ; que, par suite, la société AJMT ne pouvait se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, de cette prise de position pour demander la décharge des cotisations de taxe professionnelle et de cotisation foncière des entreprises en litige ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du recours, que le ministre des finances et des comptes publics est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a prononcé la décharge des cotisations de taxe professionnelle et de cotisations foncières des entreprises auxquelles la société AJMT a été assujettie au titre, respectivement, de l'année 2009 et des années 2010 et 2011 ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1402432 du 21 avril 2016 du Tribunal administratif de Melun est annulé.

Article 2 : La société AJMT est rétablie dans les rôles de la commune de Chanteloup-en-Brie à raison des cotisations de taxe professionnelle et de cotisations foncières des entreprises auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2009, 2010 et 2011.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'action et des comptes publics et à la Sarl AJMT. Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Île-de-France et du département de Paris (Pôle de gestion fiscale Paris Centre et services spécialisés).

Délibéré après l'audience du 21 septembre 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- Mme Poupineau, président assesseur,

- Mme Larsonnier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 octobre 2017.

Le rapporteur,

V. POUPINEAULe président,

S.-L. FORMERYLe greffier,

N. ADOUANE

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

3

N°16PA02169


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA02169
Date de la décision : 05/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-01-03-01 Contributions et taxes. Généralités. Textes fiscaux. Opposabilité des interprétations administratives (art. L. 80 A du livre des procédures fiscales). Existence.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: Mme Valérie POUPINEAU
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE

Origine de la décision
Date de l'import : 10/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-10-05;16pa02169 ?
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