Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 22 mai 2014 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice a rejeté sa demande tendant au changement de son nom en " C...-B... ".
Par un jugement n° 1411120 du 1er octobre 2015, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 2 décembre 2015, M. C..., représenté par la SCP Vallerotonda-Genin-Thuilleaux et associés, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1411120 du 1er octobre 2015 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler la décision du 22 mai 2014 du garde des sceaux, ministre de la justice ;
3°) d'enjoindre au garde des sceaux, ministre de la justice de procéder au changement de nom sollicité ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que le garde des sceaux, ministre de la justice a commis une erreur d'appréciation dès lors qu'il justifie de l'intérêt légitime requis par l'article 61 du code civil pour l'obtention du changement de nom sollicité ; qu'il souhaite, en adjoignant à son nom le nom de sa grand-mère paternelle, exprimer son attachement exceptionnel à celle-ci et à ses origines géographiques et qu'il fait un usage constant et ininterrompu de ce nom depuis 1996.
Par un mémoire en défense enregistré le 14 novembre 2016, le garde des sceaux, ministre de la justice conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Amat,
- les conclusions de M. Romnicianu, rapporteur public.
1. Considérant que M. A... C..., né le 22 juillet 1972, a sollicité le changement de son nom en " C...-B... ", afin d'y adjoindre le patronyme de sa grand-mère paternelle ; qu'il relève appel du jugement du 1er octobre 2015 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du garde des sceaux, ministre de la justice du 22 mai 2014 refusant d'autoriser le changement de nom sollicité ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 61 du code civil : " Toute personne qui justifie d'un intérêt légitime peut demander à changer de nom. / Le changement de nom peut avoir pour objet d'éviter l'extinction du nom porté par un ascendant ou un collatéral du demandeur jusqu'au quatrième degré. / Le changement de nom est autorisé par décret. " ;
3. Considérant, en premier lieu, que contrairement à ce que soutient M. C...l'adjonction du nom de sa grand-mère paternelle au sien constitue un changement de nom au sens des dispositions précitées de l'article 61 du code civil ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que M. C... soutient qu'il utilise le nom " C...-B... " depuis l'année 1996 et que cet usage constant pendant vingt ans lui donne un intérêt légitime à changer de nom ; que, d'une part, il ne saurait utilement se prévaloir d'une " possession acquisitive " au sens de l'article 2255 du code civil, qui concerne les biens et non l'état civil des personnes ; que, d'autre part, il produit divers documents au nom de " C...-B... " ou " C...B... ", notamment une attestation, non datée, de ses services militaires pour la période du 1er octobre 1996 au 8 novembre 1996, une attestation d'emploi comme attaché temporaire d'enseignement et de recherche datée d'octobre 2003 et son nouveau contrat d'engagement d'octobre 2004, des extraits de ses publications dans des revues scientifiques en 2003, 2004 et 2006, le diplôme de docteur délivré par l'Ecole centrale de Lyon en décembre 2004, un arrêté de juillet 2006 modifiant son arrêté de nomination comme maitre de conférences en 2005, le diplôme d'habilitation à diriger des recherches délivré par l'Université de Lyon I en janvier 2014 ainsi que divers documents postérieurs à juillet 2003 tels que des factures, quittances de loyer, documents bancaires et avis d'imposition ; que, toutefois, ces documents, compte tenu de leurs dates et de leur caractère épars, ne sont pas de nature à établir qu'il utiliserait de manière continue et ininterrompue le nom " C...-B... " depuis 1996 ni à justifier d'un intérêt légitime à changer de nom au sens des dispositions de l'article 61 du code civil ; qu'en outre, la circonstance que l'administration ait émis, le 2 avril 2014, un passeport et, en juin 2014, un certificat d'immatriculation d'un véhicule au nom de " C...-B... ", sans d'ailleurs que le requérant n'explique les conditions dans lesquelles il a obtenu ces documents, ne saurait être regardée comme l'ayant conforté dans l'usage du nom de sa grand-mère paternelle à la date de la décision de refus de changement de nom litigieuse intervenue concomitamment ;
5. Considérant, en troisième lieu, que des motifs d'ordre affectif peuvent, dans des circonstances exceptionnelles, caractériser l'intérêt légitime requis par l'article 61 du code civil pour déroger aux principes de dévolution et de fixité du nom établis par la loi ; que si M. C... soutient éprouver un attachement exceptionnel à sa grand-mère paternelle, qui l'aurait pris en charge à l'adolescence, et au territoire corse sur lequel il se rend régulièrement, où réside une partie de sa famille et où est implantée une maison familiale, il ne l'établit pas dans la mesure où les attestations produites par ses parents indiquent qu'il a été confié à sa grand-mère entre 1992 et 1994 alors qu'il avait 20 ans, qu'en outre, il ne produit aucun élément justifiant de liens affectifs particuliers qu'il aurait entretenus avec sa grand-mère paternelle ni justifiant d'un attachement particulier à ses origines corses ; qu'enfin, si, M. C... allègue que le refus de changement de nom entrainerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité pour son activité professionnelle et sa vie privée, il ne produit aucune pièce permettant de l'établir, la seule circonstance qu'il utilise un nom d'usage qui ne correspond pas à son patronyme ne pouvant constituer une circonstance exceptionnelle ;
6. Considérant, en quatrième lieu, que si M. C...soutient que le patronyme " B... " est susceptible de s'éteindre, il est constant que de nombreuses personnes de sa famille paternelle portent le nom " B... " ; que la circonstance que plusieurs d'entre elles soient des femmes ne permet pas de caractériser un risque d'extinction du nom compte tenu, notamment, des dispositions des articles 311-23 et 311-21 du code civil qui permettent à la mère de transmettre son patronyme à son enfant ;
7. Considérant, en dernier lieu, que la circonstance que la publication de la demande de M. C... au Journal Officiel n'ait donné lieu à aucune contestation, notamment de la part de sa famille paternelle, est sans incidence sur la légalité de la décision ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. A... C...et au garde des sceaux, ministre de la justice.
Délibéré après l'audience du 22 juin 2017, à laquelle siégeaient :
- Mme Pellissier, président de chambre,
- M. Diémert, président-assesseur,
- Mme Amat, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 18 juillet 2017.
Le rapporteur,
N. AMATLe président,
S. PELLISSIERLe greffier,
A. LOUNISLa République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA04361