Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Les syndicats UNSA éducation et de l'administration et de l'intendance UNSA ont demandé au Tribunal administratif de Polynésie française d'annuler la décision du 16 septembre 2014 par laquelle le vice-recteur de cette académie a intégré directement Mme B...A...épouse C...dans le corps des adjoints administratifs de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur, à compter du 1er décembre 2014, ainsi que la décision implicite de rejet de leur demande tendant au retrait de cette décision d'intégration.
Par un jugement n° 1500227 du 10 novembre 2015, le Tribunal administratif de Polynésie française a annulé cette décision du 16 septembre 2014 et a rejeté le surplus de la demande des syndicats requérants.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire en réplique, respectivement enregistrés les 12 février et 14 juin 2016, MmeC..., représentée par la société civile professionnelle d'avocats Chaisemartin - Courjon, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Polynésie française n° 1500227 du 10 novembre 2015 ;
2°) de rejeter la demande présentée par les syndicats UNSA éducation et de l'administration et de l'intendance UNSA devant ce même tribunal administratif ;
3°) de mettre à la charge de ces organisations syndicales une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Mme C...soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;
- les syndicats requérants ne justifient pas d'une décision les autorisant à agir en justice ;
- ayant chacun un ressort national, ils n'avaient pas qualité pour agir contre une décision concernant la Polynésie française ;
- la publication de la fiche de poste concernée sur le site Internet du vice rectorat constituait la procédure habituelle de recrutement pour les postes de catégorie C ;
- ils avaient pleine connaissance acquise de la décision à la date de son adoption, après l'avis rendu par la commission administrative paritaire au cours de sa séance du 15 septembre 2014, au cours de laquelle leurs trois représentants s'étaient prononcés favorablement à l'égard du recrutement litigieux et pour l'un d'entre eux, avait signé le procès-verbal ;
- la demande de retrait de cette décision, formulée le 18 février 2015, était tardive et, a fortiori, le recours juridictionnel du 1er avril 2015 ;
- la procédure d'intégration directe utilisée était légale ;
- le vice recteur, ayant reçu délégation de pouvoir du ministre, était compétent pour procéder audit recrutement ;
- ce recrutement ne s'inscrivait pas dans le cadre de la procédure ouverte par l'arrêté du
13 janvier 2014.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 mai 2016, présenté pour les syndicats UNSA éducation et de l'administration et de l'intendance UNSA, par la SELARL Jurispol, ceux-ci concluent au rejet de la requête, à la confirmation du jugement attaqué et à ce que soit mis à la charge de la requérante une somme de 400 000 francs CFP au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- ils ont pour objet la défense des intérêts des personnels de l'administration de l'Etat ;
- la procédure de recrutement par intégration directe en qualité d'adjoint administratif de l'éducation nationale n'avait jamais été auparavant utilisée, d'autant qu'un concours de recrutement dans le même corps a été organisé en septembre 2014 ;
- Mme C...était la seule candidate pour ce recrutement sans concours, qui n'a fait l'objet d'aucune publicité ;
- les syndicats requérants ont reçu les mandats nécessaires pour ester en justice ;
- les fins de non-recevoir relatives à l'intérêt pour agir et fondées sur la théorie de la connaissance acquise, opposées par la requérante, doivent être écartées ;
- les dispositions de la loi du 13 juillet 1983, notamment son article 14, qui ne visent pas les fonctionnaires de la Polynésie française, ne pouvaient s'appliquer à MmeC..., de même que les lois des 3 août 2009 et 12 mars 2012 ;
- le poste concerné n'a pas fait l'objet d'une publicité suffisante ;
- le certificat administratif concernant l'affichage du poste sur le site du vice rectorat, versé in extremis sur demande réitérée des syndicats, n'a aucune valeur probante, cet affichage n'étant pas intervenu conformément aux prescriptions légales ;
- le recours à la procédure de recrutement par intégration directe n'était pas justifié par l'intérêt du service, mais par des considérations étrangères à celui-ci, contraires au principe d'égal accès aux emplois publics ;
- la décision contestée est entachée de détournement de pouvoir, constitutive d'une infraction pénale, et doit être regardée comme étant inexistante.
Par un mémoire, enregistré le 19 décembre 2016, le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche fait connaître à la Cour que la requête n'appelle, de sa part, aucune observation.
Les parties ont été informées, le 22 mars 2017, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la Cour était susceptible de soulever d'office le moyen tiré de ce que le jugement attaqué, qui a annulé une décision inexistante, n'a pu préjudicier à la requérante, sa requête étant dès lors irrecevable.
Par un mémoire enregistré le 23 mars 2017, présenté pour les syndicats UNSA éducation et de l'administration et de l'intendance UNSA, par la SELARL Jurispol, font valoir que :
- ils avaient demandé au tribunal administratif la rectification de cette erreur, cette demande ayant été rejetée en raison de l'expiration du délai de recours applicable ;
- il incombe dès lors à la Cour, saisie également d'une telle demande, de procéder à cette rectification d'erreur matérielle ;
- la décision litigieuse est, en tout état de cause, parfaitement identifiable.
Par un mémoire enregistré le 29 mars 2017, présenté pour MmeC..., en réponse au moyen d'ordre public qui lui a été adressé par la Cour, celle-ci fait valoir que :
- si sa requête en appel est irrecevable, alors l'appel incident des syndicats qui sollicitent la rectification d'une erreur matérielle, est lui-même irrecevable ;
- les syndicats requérants de première instance avaient la faculté, en temps utile, de demander une telle rectification, ce défaut de vigilance leur étant imputable.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;
- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 modifiée portant statut d'autonomie de la Polynésie française, et la loi n° 2004-193 du 27 février 2004 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française ;
- la loi n° 2009-972 du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique ;
- le décret n° 2006-1760 du 23 décembre 2006 relatif aux dispositions statutaires communes applicables aux corps d'adjoints administratifs des administrations de l'Etat ;
- la délibération n° 95-215 AT du 14 décembre 1995 portant statut général de la fonction publique du territoire de la Polynésie française ;
- l'arrêté du 8 février 2010 portant délégation de pouvoirs du ministre chargé de l'éducation nationale aux vice-recteurs des îles Wallis et Futuna, de Mayotte, de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie française en matière de recrutement et de gestion de certains personnels titulaires et stagiaires relevant du ministre chargé de l'éducation nationale ;
- le code de justice administrative.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Privesse, rapporteur,
- et les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public.
1. Considérant que MmeC..., agent de la fonction publique de la Polynésie française a, par une décision du vice-recteur de Polynésie française du 16 septembre 2014, été recrutée par voie d'intégration directe en qualité d'adjoint administratif de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur de première classe, pour occuper un emploi de gestionnaire de courrier et d'accueil au vice rectorat, après consultation de la commission administrative paritaire le 15 septembre 2014 ; que sur demande émanant des syndicats UNSA Education et UNSA de l'Administration et de l'Intendance, le Tribunal administratif de la Polynésie française a, par le jugement attaqué du 10 novembre 2015, annulé cette décision et rejeté les conclusions tendant à ce qu'elle soit retirée ; que Mme C...relève appel de ce jugement en tant que le tribunal administratif a partiellement accueilli les prétentions des deux syndicats ;
Sur les conclusions des syndicats afférentes à la rectification d'une erreur matérielle entachant le jugement du tribunal administratif attaqué :
2. Considérant que tribunal administratif a mentionné à tort, à l'article 1er du dispositif du jugement attaqué, la date du 16 septembre 2015 comme étant celle de la décision annulée, alors qu'il s'agit du 16 septembre 2014 ; qu'il y a lieu de réformer ce jugement en rectifiant l'erreur matérielle dont il est entaché ; que, par voie de conséquence, la requête d'appel de Mme C...est recevable ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. Considérant, en premier lieu, que le tribunal administratif a suffisamment répondu en son point 6 à la fin de non recevoir tirée de l'irrecevabilité de la demande qui lui était présentée en raison du défaut d'habilitation à agir du secrétaire général de l'UNSA Education ; qu'un avocat pouvant agir en justice pour le compte de son client sans justifier de la production d'un mandat qu'il est réputé détenir, les premiers juges ont pu traiter par prétérition le moyen tiré de ce que le mandat donné par le secrétaire général de la fédération UNSA Education à son conseil, le 20 février 2015, n'aurait pas été suffisamment large ;
4. Considérant, en second lieu, qu'il ressort des écritures de première instance que la question de l'absence de publicité du poste attribué à Mme C...a été débattue en première instance, les syndicats requérants ayant explicitement invoqué la méconnaissance des obligations légales destinées à garantir le principe de transparence et d'égal accès aux emplois publics ; que, par suite, les premiers juges n'ont pas méconnu leur office en accueillant ce moyen après avoir cité l'article 61 de la loi n° 84-14 du 11 janvier 1984 portant statut de la fonction publique de l'Etat, évoqué par les requérants, sans répondre expressément au moyen tiré de ce que la publication de la fiche de poste concernée sur le site Internet du vice rectorat constituerait la procédure habituelle de recrutement pour les postes de catégorie C ;
Sur les fins de non-recevoir opposées en première instance :
5. Considérant, en premier lieu, qu'une union de syndicats est recevable à engager une action contre une décision qui porte atteinte aux intérêts qu'elle défend ; que, s'agissant en l'espèce de la nomination sur place dans une collectivité territoriale d'un agent public dont il est allégué qu'elle serait contraire aux règles statutaires, les unions de syndicats requérantes justifient d'un intérêt à agir qui n'est pas limité à la métropole ;
6. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des dispositions de l'article 11 de ses statuts que le secrétaire général de l'UNSA Education a la capacité de représenter celui-ci en justice ; qu'en outre, les conseils étant réputés agir sur mandat, il n'appartenait pas au tribunal administratif d'analyser si le mandat délivré par ce secrétaire général au cabinet de conseil Jurispol aurait été trop étroit ;
7. Considérant, en troisième lieu, que la commission administrative paritaire compétente n'a émis qu'un avis avant l'édiction de la décision litigieuse par le vice-recteur, lequel n'était pas lié par cet avis ; que Mme C...n'est pas fondée à invoquer la théorie de la connaissance acquise par les représentants des syndicats requérants lors de la séance de cette commission administrative paritaire pour caractériser la tardiveté de leur saisine du tribunal administratif ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, alors que la décision portant nomination de Mme C...n'a pas été l'objet d'une publication de nature à faire courir les délais de recours contentieux, les fins de non-recevoir susvisées doivent être écartées ;
Sur le moyen d'appel de Mme C...:
9. Considérant qu'aux termes de l'article 61 de la loi susvisée n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant statut de la fonction publique d'Etat, applicable en l'espèce : " Les autorités compétentes sont tenues de faire connaître au personnel, dès qu'elles ont lieu, les vacances de tous emplois, sans préjudice des obligations spéciales imposées en matière de publicité par la législation sur les emplois réservés. " ; qu'aux termes de l'article 7 du décret n° 2008-1010 du 29 septembre 2008 alors en vigueur : " (...) II. - L'avis de recrutement est affiché, quinze jours au moins avant la date limite de dépôt des candidatures, dans les locaux de l'administration qui réalise le recrutement. Cet avis peut en outre être affiché dans les agences locales pour l'emploi de l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 du code du travail situées dans le ou les départements concernés. / III.-L'avis de recrutement est en outre publié dans le même délai sur le service de communication publique en ligne du ou des services organisant le recrutement et dans un journal local. " ; qu'il résulte de ces dispositions combinées que toute vacance d'emploi par un fonctionnaire ou un agent contractuel doit faire l'objet d'une publication, dans les locaux de l'administration qui réalise le recrutement, 15 jours au moins avant la date limite de dépôt des candidatures ; qu'en outre, l'avis de recrutement doit être publié dans le même délai en ligne par les services organisant le recrutement ;
10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si cette mise en ligne a été effectuée sur l'un des sites internet du vice rectorat du 22 août au 15 septembre 2014, l'existence d'un affichage de l'avis de vacance de poste et de recrutement dans les services du vice-rectorat durant le délai prescrit n'est pas établi ; que, dès lors, la nomination de Mme C...est intervenue selon une procédure irrégulière ;
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 10 novembre 2015, le Tribunal administratif de Nouvelle Calédonie a annulé la décision du 16 septembre 2014 portant recrutement par voie d'intégration directe de Mme B...A...épouseC..., à compter du 1er décembre 2014, dans le corps des adjoints administratifs de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées sur le même fondement par les syndicats UNSA Education et UNSA de l'Administration et de l'Intendance à l'encontre de la Polynésie française ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Polynésie française n° 1500227 du
10 novembre 2015 est modifié ainsi qu'il suit : en page 7, à l'article 1er du dispositif, les mots " La décision du 16 septembre 2015 " sont remplacés par les mots " La décision du 16 septembre 2014 ".
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme C...est rejeté.
Article 3 : Les conclusions présentées par les syndicats UNSA Education et UNSA de l'Administration et de l'Intendance dirigées contre la Polynésie française tendant au versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...C..., au syndicat UNSA Education, au syndicat UNSA de l'Administration et de l'Intendance et au ministre de l'éducation nationale.
Copie en sera adressée au haut-commissaire de la République en Polynésie française.
Délibéré après l'audience du 23 mai 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Even, président,
- M. Privesse, premier conseiller,
- M. Dellevedove, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 juillet 2017.
Le rapporteur,
J-C. PRIVESSE
Le président,
B. EVEN Le greffier,
I. BEDR
La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16PA00630