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04/07/2017 | FRANCE | N°15PA01158

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 04 juillet 2017, 15PA01158


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 10 février 2014 par lequel le préfet de police a refusé de l'admettre au séjour et de lui enjoindre, à titre principal, de lui délivrer une carte de résident ou un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", ou à défaut de réexaminer sa situation en lui délivrant une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte et dans le délai d'un mois.

Par un jugement n° 1412811/6-3 du 4 décembre 201

4, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédures devant la Cour :
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 10 février 2014 par lequel le préfet de police a refusé de l'admettre au séjour et de lui enjoindre, à titre principal, de lui délivrer une carte de résident ou un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", ou à défaut de réexaminer sa situation en lui délivrant une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte et dans le délai d'un mois.

Par un jugement n° 1412811/6-3 du 4 décembre 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédures devant la Cour :

I - Par une requête enregistrée le 17 mars 2015, MmeA..., représentée par Me Bremaud, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1412811/6-3 du

4 décembre 2014 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 10 février 2014 portant refus d'admission au séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français, en fixant le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de Paris de lui délivrer, à titre principal, une carte de résident ou un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", ou à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation, en lui accordant durant cet examen une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte et dans le délai d'un mois ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Mme A...soutient que :

- le préfet a méconnu l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en rejetant de manière implicite la demande formulée en son nom le 13 décembre 2012 ;

- le préfet a également entaché son arrêté du 10 février 2014 d'une erreur de droit en ne lui transmettant pas l'avis du médecin chef de la préfecture du 14 février 2013 ;

- sa situation n'a pas fait l'objet d'un examen, puisqu'en dépit des nombreuses preuves de présence en France depuis 15 ans, la commission du titre de séjour n'a pas été saisie ;

- le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a commis une erreur manifeste d'appréciation dès lors que les maladies dont elle souffre ne peuvent être soignées dans son pays d'origine ;

- le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du même code dès lors qu'elle vit depuis plus de 15 ans en France ;

- le préfet a entaché d'illégalité les décisions portant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de destination en ne respectant pas les principes généraux du droit de l'Union européenne et les stipulations de sa charte des droits fondamentaux.

II - Par une requête déposée au greffe du Tribunal administratif de Paris et transmise à la Cour par ordonnance du 18 mars 2015, Mme A...demande l'annulation du jugement susmentionné du 4 décembre 2014 et de l'arrêté préfectoral du 10 février 2014 ;

La requête a été communiquée au préfet de police, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 février 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Privesse,

- et les observations de Me Bremaud, avocat de MmeA....

1. Considérant que MmeA..., ressortissante malienne née en 1956, entrée régulièrement en France le 30 juin 1999 à partir de Budapest, a sollicité le 11 juillet 2013 le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement, notamment précisé sur le formulaire préfectoral de demande rempli le 2 mai 2013, de sa présence de 10 ans en France dans le cadre des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que pour raison de santé selon les dispositions de l'article L. 313-11 11° du même code, arguant également de sa vie privée et familiale sur le territoire français ; que, par le jugement attaqué du 4 décembre 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de Mme A...d'annulation de la décision du 10 février 2014 du préfet de police de refus d'admission au séjour, celle-ci faisant appel de ce jugement ;

Sur la requête n° 15PA01516 :

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la requête n° 15PA01516 n'est que la réitération par Mme A...de ses écritures contenues dans sa requête n° 15PA01158, laquelle doit être regardée comme seule faisant foi ; que, par suite, il y a lieu de rayer la requête n° 15PA01516 des rôles de la Cour, et de statuer sur la seule requête n° 15PA01158 ;

Sur la requête n° 15PA01158 :

En ce qui concerne les conclusions tendant à l'annulation du refus de délivrance d'une carte de résident :

3. Considérant que Mme A...fait valoir qu'elle sollicite l'annulation de la décision implicite de rejet, contenue dans la décision expresse du 10 février 2014, de sa demande de carte de résident ; que si elle joint à cet effet une lettre la concernant, datée du 13 décembre 2012, émanant de la fédération nationale des associations franco-africaines, portant demande de délivrance d'une carte de résident à titre dérogatoire sur le fondement de l'article L. 314-8 § 1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la réception de ce courrier par le préfet n'est pas établie par les pièces du dossier ; qu'il n'est pas davantage établi que, lors de sa présentation en préfecture, le 2 mai et le 11 juillet 2013, Mme A...ait sollicité une telle carte de résident, alors que " la fiche de salle " qu'elle a alors remplie ne mentionne qu'une demande relative à ses 10 ans de présence en France et que la mention " carte de résidence " est expressément rayée ; qu'en tout état de cause, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code ; que, par suite, les conclusions de Mme A...tendant à l'annulation d'un prétendu refus de délivrance d'une carte de résident ne peuvent qu'être rejetées ;

En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 10 février 2014 portant rejet d'une carte de séjour temporaire, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. " ; qu'aux termes de l'article L. 312-1 du même code : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour (...) " ;

5. Considérant que Mme A...soutient qu'elle vit habituellement en France depuis 1999, soit plus de dix ans à la date de l'arrêté litigieux du 10 février 2014 ; que, s'agissant de sa présence au cours des années 2004 à 2014, contestée par le préfet, elle produit pour chacune des années de très nombreuses pièces établissant la réalité de son séjour, dont l'authenticité n'est pas utilement contestée ; que l'intéressée apportant la preuve de sa résidence habituelle en France, au cours des 10 années précédant la décision contestée, le préfet de police ne pouvait, comme il l'a fait, rejeter sa demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sans consultation préalable de la commission du titre de séjour ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 février 2014 portant refus de délivrance d'une carte de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français, et fixant le pays de destination ;

En ce qui concerne les conclusions à fin d'injonction :

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé " ; qu'aux termes de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Si l'obligation de quitter le territoire est annulée (...) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que le préfet ait à nouveau statué sur son cas " ;

8. Considérant que le présent arrêt implique seulement qu'il soit fait droit à la demande de réexamen de sa situation présentée par MmeA... ; que, par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet de police de munir l'intéressée d'une autorisation provisoire de séjour et de procéder au réexamen de sa situation, en saisissant, pour avis, la commission du titre de séjour de la demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée par l'intéressée, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

9. Considérant que Mme A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Bremaud renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat aux missions d'aide juridictionnelle qui lui ont été confiées, de condamner l'Etat à lui verser à ce titre une somme de 1 500 euros ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête n° 15PA01516 de Mme A...est radiée des registres de la Cour.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1412811/6-3 du 4 décembre 2014 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de Mme A...tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 février 2014 portant refus de délivrance d'une carte de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français, en fixant le pays de destination, de même que l'arrêté du 10 février 2014.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de police, sous réserve d'un changement substantiel dans la situation de droit ou de fait de MmeA..., et dans un délai maximum de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, de délivrer à celle-ci une autorisation provisoire de séjour, et de procéder au réexamen de sa situation en saisissant, pour avis, la commission du titre de séjour.

Article 4 : L'Etat versera à Me Bremaud la somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A...est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A..., au préfet de police, au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à Me Bremaud.

Délibéré après l'audience du 23 mai 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Even, président de chambre,

- M. Privesse, premier conseiller,

- M. Dellevedove, premier conseiller.

Lu en audience publique le 4 juillet 2017.

Le rapporteur,

J-C PRIVESSELe président,

B. EVEN

Le greffier,

I. BEDR

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

Nos 15PA01158...


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Jean-Claude PRIVESSE
Rapporteur public ?: Mme ORIOL
Avocat(s) : BREMAUD

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Date de la décision : 04/07/2017
Date de l'import : 18/07/2017

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 15PA01158
Numéro NOR : CETATEXT000035140347 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-07-04;15pa01158 ?
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