Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le syndicat indépendant de la préfecture de police-UNSA a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler les élections du 4 décembre 2014 relatives à la désignation des représentants des agents de surveillance de Paris (ASP) siégeant à la commission administrative paritaire n° 8, groupe n° 2 de la préfecture de police.
Par un jugement n° 1502069/5-1 du 24 septembre 2015, le Tribunal administratif de Paris a annulé ces opérations électorales.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 20 novembre 2015 et le 24 novembre 2015, le préfet de police demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1502069/5-1
du 24 septembre 2015 ;
2°) de rejeter la demande présentée par le syndicat indépendant de la préfecture de police-UNSA devant le Tribunal administratif de Paris.
Il soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé ;
- il a fait une exacte application des dispositions énoncées par l'article 16 bis du décret du 28 mai 1982 ;
- le retrait de l'une des deux listes, " CGT ASP " et " syndicat de la préfecture de police ", aurait en tout état de cause été sans incidence sur les résultats du scrutin ;
- le grief tiré de ce que ni le syndicat " CGT ASP ", ni le " syndicat de la préfecture de police " ne disposeraient de statuts légalement déposés manque en fait ;
- le " syndicat général des personnels de la préfecture de police-Force Ouvrière
(SGP-PP-FO) " n'a pas été dissous ;
- la comptabilisation de onze bulletins de la liste " CFDT Interco " comprenant par erreur cinq noms au lieu de six est sans incidence sur le résultat du scrutin.
Par des mémoires en intervention enregistrés le 25 avril 2016 et le 4 mai 2016, le syndicat CGT du corps des agents de surveillance de Paris (CGT-ASP), représenté par MeA..., conclut à l'annulation du jugement attaqué et au rejet de la demande, et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge du syndicat indépendant de la préfecture de police (SIPP-UNSA) sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- son intervention est recevable ;
- le tribunal administratif ne pouvait procéder à l'annulation du scrutin pour le seul groupe n° 2 alors que les résultats du scrutin ne distinguent pas les deux groupes ;
- il n'y a eu aucune violation de l'article 9 bis de la loi du 13 juillet 1983 dès lors que le syndicat CGT ASP était le seul habilité à déposer une liste portant le sigle CGT, à la différence de la liste " syndicat de la préfecture de police " qui ne mentionne aucune affiliation ;
- aucune confusion n'a pu altérer la sincérité du scrutin.
Par un mémoire en défense enregistré le 20 mai 2016, le syndicat indépendant de la préfecture de Police SIPP-UNSA, représenté par MeB..., demande à la Cour :
1°) de rejeter la requête ;
2°) de condamner le préfet de police à lui verser une somme de 7 476 euros à titre de dommages et intérêts.
3°) de mettre à la charge du syndicat CGT ASP le versement d'une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le syndicat CGT ASP n'établit pas que le jugement attaqué préjudicie à ses droits ;
- les deux syndicats CGT ASP et " syndicat de la préfecture de police " étaient bien, lors du scrutin, affiliés à la même union de syndicats CGT en méconnaissance de l'article 9 bis de la loi du 13 juillet 1983 ;
- l'appellation " syndicat de la préfecture de police " a pu induire en erreur les électeurs ;
- le préfet de police lui a causé un préjudice matériel et moral à hauteur de 7 476 euros en favorisant le syndicat CGT-ASP.
Les parties ont été informées, par application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt de la Cour était au moins pour partie susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré du caractère nouveau en appel des conclusions indemnitaires présentées par le syndicat SIPP-UNSA.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- le décret n° 82-451 du 28 mai 1982 relatif aux commissions administratives paritaires ;
- le décret n° 2011-184 du 15 février 2011 relatif aux comités techniques dans les administrations et les établissements publics de l'Etat ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Hamon,
- et les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public ;
1. Considérant que le 4 décembre 2014 ont eu lieu les élections des représentants des agents de surveillance de Paris (ASP) siégeant à la commission administrative paritaire n° 8, groupe n° 2 de la préfecture de police ; qu'après le rejet d'un recours administratif formé devant le préfet de police, le syndicat indépendant de la préfecture de Police SIPP-UNSA a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler ces opérations électorales ; que le préfet de police fait appel du jugement du 24 septembre 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a fait droit à cette demande et a annulé ces opérations électorales ;
Sur l'intervention du syndicat CGT-ASP :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 832-1 du code de justice administrative : " Toute personne peut former tierce opposition à une décision juridictionnelle qui préjudicie à ses droits, dès lors que ni elle ni ceux qu'elle représente n'ont été présents ou régulièrement appelés dans l'instance ayant abouti à cette décision. " ; qu'une tierce-opposition contre un jugement rendu par le tribunal administratif formée après qu'une partie a frappé ce jugement d'appel est irrecevable ; que la personne qui aurait eu qualité pour former tierce-opposition est dans ce cas recevable à intervenir dans la procédure d'appel ou, si elle n'a été ni présente ni représentée devant la juridiction d'appel, à former tierce-opposition contre l'arrêt rendu par celle-ci, s'il préjudicie à ses droits ; que la personne recevable à intervenir dans la procédure d'appel acquiert la qualité de partie dans cette instance ;
3. Considérant que le syndicat CGT du corps des agents de surveillance de Paris (CGT- ASP) a formé, le 23 novembre 2015, une tierce opposition contre le jugement attaqué
du 24 septembre 2015 ; que cette tierce-opposition ayant été enregistrée après l'enregistrement de la requête d'appel du préfet de police a été rejetée comme irrecevable par un jugement du 4 mai 2016 ; que, toutefois, le syndicat CGT-ASP ayant qualité pour former cette tierce opposition contre un jugement qui préjudicie à ses droits, dès lors qu'il annule des opérations électorales à l'issue desquelles un siège lui a été attribué, est de ce fait recevable à intervenir dans la présente procédure d'appel ; qu'il y a donc lieu d'accueillir son intervention ;
Sur les conclusions indemnitaires du syndicat SIPP-UNSA :
4. Considérant que les conclusions du syndicat SIPP-UNSA tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 7 476 euros, présentées directement devant la Cour, sont irrecevables comme nouvelles en appel ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
5. Considérant que le Tribunal administratif de Paris a répondu au moyen soulevé en défense tiré de ce que le préfet avait respecté les dispositions énoncées par l'article 16 bis du décret du 28 mai 1982, en relevant que celles-ci ont été méconnues du fait de la présence dans le scrutin de deux listes affiliées à la CGT ; qu'après avoir pris en compte les résultats du scrutin, les premiers juges ont considéré que la sincérité de ceux-ci a pu être altérée par cette irrégularité compte tenu du mode d'attribution des sièges ; que le jugement attaqué est suffisamment motivé ;
Sur le bienfondé du jugement attaqué :
6. Considérant qu'aux termes de l'article 9 bis de la loi du 13 juillet 1983 : " Peuvent se présenter aux élections professionnelles : / 1° Les organisations syndicales de fonctionnaires qui, dans la fonction publique où est organisée l'élection, sont légalement constituées depuis au moins deux ans à compter de la date de dépôt légal des statuts et satisfont aux critères de respect des valeurs républicaines et d'indépendance ; / 2° Les organisations syndicales de fonctionnaires affiliées à une union de syndicats de fonctionnaires qui remplit les conditions mentionnées au 1°. (...)/ Les organisations affiliées à une même union ne peuvent présenter des listes concurrentes à une même élection. (...) " ; qu'aux termes de l'article 16 bis du décret susvisé du 28 mai 1982 : " Lorsque plusieurs organisations syndicales affiliées à une même union de syndicats de fonctionnaires ont déposé des listes concurrentes pour une même élection, l'administration en informe, dans un délai de trois jours à compter de la date limite de dépôt des listes, les délégués de chacune des listes. Ces derniers disposent alors d'un délai de trois jours pour transmettre les modifications ou les retraits de liste nécessaires. / Si, après l'expiration de ce dernier délai, ces modifications ou retraits ne sont pas intervenus, l'administration informe dans un délai de trois jours l'union de syndicats dont les listes se réclament. Celle-ci dispose alors d'un délai de cinq jours pour indiquer à l'administration, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, la liste qui pourra se prévaloir de l'appartenance à l'union pour l'application du présent décret (...) " ;
7. Considérant, en premier lieu, que le syndicat " CGT de la préfecture de police " et le syndicat CGT-ASP ayant déposé des listes concurrentes se réclamant de l'affiliation à la CGT pour l'élection des représentants des ASP à la commission administrative paritaire n°8, le préfet de police les a, par un courrier en date du 21 octobre 2014, invités à modifier ou retirer leurs listes, dans un délai de trois jours ; qu'après que le secrétaire général de la CGT ait, par un courrier adressé à la préfecture de police le 23 octobre 2014, habilité le seul syndicat CGT ASP à déposer des listes CGT pour les élections professionnelles en cause, le syndicat " CGT de la préfecture de police " a maintenu sa liste en la renommant " syndicat de la préfecture de police ", sans mentionner une affiliation à la CGT ;
8. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par ce même courrier du 23 octobre 2014, le secrétaire général de la CGT a habilité le syndicat " CGT de la préfecture de police " à déposer une liste se revendiquant de l'affiliation à la CGT pour le scrutin organisé en vue de la désignation des représentants des ASP siégeant au comité technique des administrations parisiennes ; qu'en outre, il résulte des statuts modifiés le 22 septembre 2014 du syndicat " CGT de la préfecture de police ", des statuts du syndicat CGT-ASP, ainsi que de l'attestation en date du 29 septembre 2014 établie par ce même syndicat, que ces deux syndicats avaient conservé, à la date des élections contestées, leur adhésion à la CGT ; que, dans ces conditions, le syndicat CGT ASP et le " syndicat de la préfecture de police " doivent être regardés comme ayant déposé, pour le scrutin en litige, des listes concurrentes en étant tous deux affiliés à la même union de syndicats, en méconnaissance des dispositions susmentionnées énoncées par le 2° de l'article 9 bis de la loi du 13 juillet 1983 ;
9. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que le syndicat CGT-ASP, qui a irrégulièrement participé au scrutin en cause, a recueilli 169 suffrages sur les 730 exprimés, et a obtenu en conséquence un siège sur les trois qui étaient à pourvoir dans le groupe n° 2 de la CAP n° 8 ; que, compte tenu tant du mode de scrutin que du nombre de listes candidates, la présence de cette liste affiliée à la CGT a eu une influence sur le résultat de ces élections ;
10. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte des articles 6, 15 et 22 du décret du
28 mai 1982 que les listes candidates aux élections des membres des commissions administratives paritaires sont présentées distinctement pour chaque grade composant le corps représenté dans une commission, et que les sièges sont également attribués par grade ; que, dès lors, le tribunal administratif a pu valablement limiter l'annulation prononcée au seul groupe n° 2, correspondant au grade " agents de surveillance de la ville de Paris ", de la CAP n° 8 ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé les opérations électorales du 4 décembre 2014, en vue de l'élection des représentants des agents de surveillance de Paris (ASP) siégeant à la commission administrative paritaire n° 8, groupe n° 2 de la préfecture de police ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du syndicat SIPP-UNSA, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que le syndicat CGT-ASP demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que, par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du syndicat CGT-ASP le versement de la somme que le SIPP-UNSA demande sur le fondement des mêmes dispositions ;
DECIDE :
Article 1er : L'intervention du syndicat CGT-ASP est admise.
Article 2 : La requête du préfet de police est rejetée.
Article 3 : Les conclusions du syndicat SIPP-UNSA présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au préfet de police, au syndicat indépendant de la préfecture de police-UNSA et au syndicat CGT du corps des agents de surveillance de Paris.
Délibéré après l'audience du 9 mai 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Even, président de chambre,
- Mme Hamon, président assesseur,
- Mme d'Argenlieu, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 23 mai 2017.
Le rapporteur,
P. HAMONLe président,
B. EVEN
Le greffier,
S. GASPARLa République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°15PA04206