Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société nationale des chemins de fer français (SNCF) a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner la société anonyme d'économie mixte Paris Seine (SemPariSeine) à lui verser, au principal, la somme de 469 057,96 euros au titre des travaux d'aménagement d'un parvis piétonnier et de la réalisation d'une passerelle dans la zone d'aménagement concerté (ZAC) " Citroën Cévennes " ainsi qu'une somme de 40 821,42 euros au titre de frais d'expertise.
Par un jugement n° 1308248 du 17 décembre 2015, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.
Procédure devant la Cour :
Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 15 février, 30 mars et 13 octobre 2016, SNCF Réseau, venant aux droits de la SNCF, représentée par la SCP B. Odent, L. Poulet, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de condamner la SemPariSeine à lui verser la somme de 469 057,96 euros, assortis des intérêts moratoires à compter du 3 juillet 2002 et de la capitalisation des intérêts à compter du 6 février 2005 au titre des travaux d'aménagement d'un parvis piétonnier et de la réalisation d'une passerelle dans la zone d'aménagement concerté (ZAC) " Citroën Cévennes " ;
3°) de mettre à la charge de la SemPariSeine une somme de 40 821,42 euros au titre de frais d'expertise ;
4°) de mettre à la charge de la SemPariSeine le versement d'une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
SNCF Réseau soutient que :
- contrairement à ce qu'a estimé le tribunal administratif de Paris, la juridiction administrative est compétente pour connaître de cette affaire ;
- conformément à la position de l'expert, SemPariSeine est responsable des surcoûts exposés par le groupement conjoint d'entreprises constitué de la société CM Paimboeuf et de la société Spie Citra IDF à hauteur d'une somme de 469 057,96 euros au principal,
- compte tenu de la répartition finale des surcoûts entre elle et la SemPariSeine, celle-ci doit supporter 72 % du montant des frais d'expertise ;
Par des mémoires en défense, enregistrés les 19 septembre 2016 et 21 avril 2017, la société anonyme d'économie mixte Paris Seine (SemPariSeine) conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de SNCF Réseau le versement d'une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La SemPariSeine soutient que les moyens invoqués par SNCF Réseau ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Boissy, rapporteur,
- les conclusions de M. Rousset, rapporteur public,
- les observations de Me Odent, avocat de la SNCF Réseau,
- et les observations de Me Marès, avocat de la société anonyme d'économie mixte Paris Seine.
Une note en délibéré, enregistrée le 9 mai 2017, a été présentée par la SCP B. Odent et L. Poulet pour SNCF Réseau.
1. Considérant, en premier lieu, qu'après que le conseil de Paris a décidé, par une délibération du 25 février 1980, de concéder à la société d'économie mixte d'équipement et d'aménagement du 15ème arrondissement (SEMEA XV) la réalisation de la zone d'aménagement concerté (ZAC) " Citroën Cévennes ", créée en vertu d'un arrêté ministériel du 29 mai 1979, la ville de Paris et la SEMEA XV ont conclu, le 4 février 1982, un traité de concession à cette fin ; que, dans le cadre du plan d'aménagement de zone (PAZ) de cette ZAC " Citroën Cévennes " et au titre des équipements publics, la SEMEA XV a, le 20 mars 1998, conclu avec Réseau Ferré de France (RFF) et la SNCF une convention relative à la construction et à l'aménagement d'une dalle de couverture au dessus de la gare RER du boulevard Victor, dénommée parvis Henri de France, destinée à relier le boulevard Martial Valin et le quai André Citroën à la rue Delbarre et à permettre ainsi la desserte du nouveau quartier ; qu'en vertu de cette convention, la SEMEA XV a confié à la SNCF un mandat de maîtrise d'ouvrage et de maîtrise d'oeuvre pour les travaux de réalisation de la dalle de couverture, de ses appuis et de son étanchéité y compris sa protection à l'exclusion de l'éclairage, de l'assainissement et de l'aménagement de la surface ; que, par deux lettres de commande des 20 mars et 23 avril 1998, la SNCF, agissant pour le compte de la SEMA XV, a confié à un groupement conjoint d'entreprises constitué de la société
CM Paimboeuf et de la société Spie Citra IDF, aux droits de laquelle est ultérieurement venue la société Spie Batignolles Tpci, d'une part, la réalisation d'études d'exécution pour la construction de la dalle et, d'autre part, la réalisation des travaux, la partie des travaux concernant l'exécution des pieux et micropieux étant par ailleurs sous-traitée à la société Spie Fondations ; qu'alors que le délai d'exécution contractuel, d'une durée de 430 jours prévoyait un achèvement des travaux le 10 mai 1999, le parvis n'a été remis, à l'exclusion du belvédère, qu'en mars 2000 ; que, le
24 mai 2000, une expertise portant sur les conditions d'exécution des travaux du parvis Henri de France, a alors été ordonnée ; que la réception des travaux a ensuite été prononcée avec effet au 15 mars 2001 ; qu'un différend s'est noué entre les parties, en juillet 2002, à l'occasion du règlement financier de ces marchés qui a été porté devant le juge du contrat le 31 mars 2003 ; qu'après la remise du rapport de l'expert, le 11 avril 2007, le tribunal administratif de Paris, par un jugement n° 0304746 en date du 28 avril 2009, a condamné la SNCF à verser aux
sociétés Spie Batignolles Tpci, CM Paimboeuf et Spie Fondations une somme globale, au principal de 545 586,62 euros majorée de la taxe sur la valeur ajoutée et mis à la charge de celle-ci les frais de l'expertise d'un montant de 47 459,76 euros ; que, par un arrêt n° 09PA04249 du
18 octobre 2011, devenu définitif, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par la SNCF contre ce jugement ;
2. Considérant, en deuxième lieu, qu'à la suite de cette première phase de travaux, une seconde phase, concernant l'aménagement du parvis Henri de France, a été mise en oeuvre et divisée en deux lots A et B ; qu'au titre du lot A, la SEMEA XV a confié les travaux de fondations et gros oeuvre, de structure métallique, de revêtement de sol à un groupement solidaire constitué par les sociétés urbaine de travaux et Sefi par un marché conclu le
5 février 1999 ; qu'en raison du retard de la première phase des travaux et d'autres difficultés survenues au cours de l'exécution de la seconde phase, un litige s'est également noué entre les parties lors du règlement financier du marché, en juillet 2002 ; que, par un jugement n° 0911872 du 13 juillet 2012, devenu définitif, le tribunal administratif de Paris a condamné la SemPariSeine, venue aux droits de la SEMA XV, à verser à un groupement solidaire constitué par les sociétés urbaines de travaux et Sefi une somme s'élevant, au principal, à 85 505,58 euros, condamné la SNCF à garantir la SemPariSeine à hauteur de 44 576, 08 euros au principal et par ailleurs mis les frais d'expertise, d'un montant de 56 696,56 euros pour moitié à la charge de la SemPariSeine et, pour l'autre à la charge de la SNCF ;
3. Considérant, enfin, que, le 12 juin 2013, la SNCF a demandé au tribunal administratif de Paris, en premier lieu, de condamner la SemPariSeine à lui verser, au principal, une somme de 469 057,96 euros TTC, correspondant à une partie du montant de la condamnation prononcée à son encontre par le jugement n° 0304746 du 28 avril 2009 ; qu'en second lieu, la SNCF a demandé que les frais concernant l'expertise qui a été commune aux instances n° 0304746 et n° 0911872, et qui se sont élevés à 56 696,56 euros, soient mis à la charge de la SemPariSeine à hauteur de 40 821,42 euros ; que, par un jugement du 17 décembre 2015, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ; que SNCF Réseau, venue aux droits de la SNCF, relève appel de ce jugement ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation et de condamnation :
4. Considérant que SNCF Réseau, venant aux droits de la SNCF, recherche la responsabilité contractuelle de la SemPariSeine, nouvelle dénomination de la SEMEA XV, en raison des manquements qu'elle reproche à celle-ci d'avoir commis dans l'exécution de la convention conclue le 20 mars 1998 définie au point 1 en se fondant, en particulier, sur les stipulations de l'article 5.1 de cette convention ;
5. Considérant que le litige né de l'exécution d'un marché portant sur l'exécution de travaux publics et opposant des participants à l'exécution de ces travaux relève de la compétence de la juridiction administrative, quel que soit le fondement juridique de l'action engagée, sauf si les parties en cause sont unies par un contrat de droit privé ;
6. Considérant, d'une part, qu'il ne ressort pas de l'analyse de cette convention que celle-ci comporterait des clauses qui impliqueraient, dans l'intérêt général, qu'elle relevât du régime exorbitant des contrats administratifs ;
7. Considérant, d'autre part que la SEMEA XV a réalisé une opération d'aménagement pour son propre compte et que la SNCF a exécuté, moyennant le versement d'une rémunération, une prestation de maitrise d'ouvrage déléguée et de maitrise d'oeuvre sans rapport direct avec le service public des transports dont elle a la charge ; que la circonstance que, dans le cadre de cette même convention, RFF a délégué à la SNCF sa maitrise d'ouvrage pour des travaux portant sur l'aménagement des voies ferrés n'a, contrairement à ce que soutient SNCF Réseau, aucune incidence sur la qualification des relations contractuelles unissant la SEMEA XV à la SNCF ; qu'ainsi, cette convention n'a pas davantage pour objet l'exécution d'un service public ;
8. Considérant, dès lors, que la convention du 20 mars 1998 a le caractère d'un contrat de droit privé ; que, par suite, toute action en responsabilité contractuelle fondée sur l'exécution de ce contrat doit être formée devant le juge judiciaire ;
9. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que SNCF Réseau n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SemPariSeine, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande SNCF Réseau au titre des frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de SNCF Réseau le versement de la somme que demande la SemPariSeine au titre de ces mêmes frais ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de SNCF Réseau est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la SemPariSeine tendant à l'application de
l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à SNCF Réseau et à la société anonyme d'économie mixte Paris Seine.
Délibéré après l'audience du 5 mai 2017 à laquelle siégeaient :
- Mme Heers, président de chambre,
- Mme Mosser, président assesseur,
- M. Boissy, premier conseiller.
Lu en audience publique le 19 mai 2017.
Le rapporteur,
L. BOISSYLe président,
M. HEERSLe greffier,
F. DUBUY
La République mande et ordonne au ministre chargé des transports en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 16PA00642 2