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06/04/2017 | FRANCE | N°16PA02428

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 06 avril 2017, 16PA02428


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté en date du 17 juin 2015 par lequel le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours en fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 1600724 du 23 juin 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 23 juillet 2016, MmeC..., représentée p

ar Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1600724 du 23 juin 2016 du Tribunal...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté en date du 17 juin 2015 par lequel le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours en fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 1600724 du 23 juin 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 23 juillet 2016, MmeC..., représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1600724 du 23 juin 2016 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 17 juin 2015 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " visiteur " ou la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir, ou à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

S'agissant de la décision de refus de séjour :

-elle n'est pas suffisamment motivée quant au refus de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " visiteur " ;

-elle a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors que le préfet de police aurait dû saisir la commission du titre de séjour ;

-la condition tenant à la présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes n'est pas une condition préalable et indispensable à l'obtention d'un titre de séjour ;

-elle remplit les conditions pour obtenir un titre de séjour en sa qualité d'ascendant de ressortissant français ; elle est à la charge de ses enfants de nationalité française ;

-la décision contestée méconnaît les dispositions de l'article L. 313-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle est revenue vivre chez l'une de ses filles et que ses enfants la prennent en charge ;

-elle est entachée d'une contradiction de motif ;

-elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'elle vit en France depuis le 6 juin 2009, que tous les membres de sa famille, en particulier ses trois filles, ont la nationalité française et résident en France, que ses parents sont décédés et qu'elle a été titulaire de titres de séjour portant la mention visiteur depuis 2011 ;

-elle justifie d'une présence continue en France depuis plus de cinq ans comme l'exigent les circulaires des 12 mai 1998 et 28 novembre 2012 ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

-le préfet de police n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation comme le démontre l'insuffisante motivation de la décision ;

-la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

-le préfet de police a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 octobre 2016, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention entre la République française et la République du Cameroun du 24 janvier 1994 relative à la circulation et au séjour des personnes ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Larsonnier a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que MmeC..., de nationalité camerounaise, entrée en France le 6 juin 2009 sous couvert d'un visa Schengen de court séjour, a bénéficié d'un titre de séjour portant la mention " visiteur " valable du 2 février 2012 au 1er février 2013, renouvelé jusqu'au 20 octobre 2014 ; que Mme C...a sollicité du préfet de police le changement de son statut de " visiteur " pour celui de " salarié " ; que, par un arrêté en date du 17 juin 2015, le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours en fixant le pays de destination ; que Mme C...fait appel du jugement du 23 juin 2016 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable à la date de la décision contestée : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. (...) " ;

3. Considérant qu'il est constant que Mme C...n'est titulaire d'aucun contrat de travail visé par les autorités compétentes ; qu'elle ne remplit donc pas les conditions pour se voir attribuer un titre de séjour portant la mention " salarié " en application des dispositions précitées ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire délivrée à l'étranger qui apporte la preuve qu'il peut vivre de ses seules ressources et qui prend l'engagement de n'exercer en France aucune activité professionnelle porte la mention " visiteur " " ;

5. Considérant, d'une part, que si la requérante soutient que le préfet de police n'a pas suffisamment motivé son refus de renouveler son titre de séjour portant la mention " visiteur ", il ressort toutefois des termes de la décision contestée que celle-ci vise l'article L. 313-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'elle mentionne que l'intéressée ne remplit plus les conditions prévues par cet article et qu'elle ne peut pas justifier de ressources personnelles suffisantes au moins égales au SMIC ; qu'ainsi, la décision contestée comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision contestée doit être écarté ;

6. Considérant, d'autre part, que Mme C...ne démontre pas pouvoir vivre de ses seules ressources sans exercer aucune activité professionnelle en France ; que les pièces versées au dossier, en particulier les bulletins de salaire de sa fille et de son gendre domiciliés dans l'Hérault, la déclaration de revenus au titre de 2014 du foyer d'une autre de ses filles, l'attestation de sa fille en date du 16 juillet 2015 et celle rédigée par la requérante le même jour, soit postérieurement à la décision contestée, sont insuffisantes pour établir qu'à la date de la décision de refus de renouveler son titre de séjour Mme C...était prise en charge par ses enfants alors qu'au demeurant, elle avait indiqué, lors de sa demande de titre de séjour, être hébergée chez un tiers en région parisienne ; que, dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le préfet de police a méconnu les dispositions de l'article L. 313-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

7. Considérant qu'il résulte des points 2 à 6 que le préfet de police a pu, sans entacher sa décision d'une contrariété de motifs, rejeter la demande de titre de séjour portant la mention " salarié " de Mme C...et refuser de renouveler son titre de séjour portant la mention " visiteur " en estimant qu'elle ne justifiait pas exercer une activité professionnelle, ni être à la charge de ses enfants ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : (...) 2° A l'enfant étranger d'un ressortissant de nationalité française si cet enfant est âgé de dix-huit à vingt et un ans ou dans les conditions prévues à l'article L. 311-3 ou s'il est à la charge de ses parents ainsi qu'aux ascendants d'un tel ressortissant et de son conjoint qui sont à sa charge, sous réserve qu'ils produisent un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois " ;

9. Considérant que si Mme C...entend soutenir que le préfet de police a méconnu les dispositions précitées, elle n'établit pas, comme il a déjà été dit, qu'elle serait à la charge de ses enfants de nationalité française ; que, par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté ;

10. Considérant, en quatrième lieu, que, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de police n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé ; qu'il en résulte que la requérante ne peut utilement invoquer le moyen tiré de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'encontre du refus de séjour qui lui a été opposé, alors qu'il ressort du formulaire de demande de titre de séjour rempli par l'intéressée le 22 septembre 2014 qu'elle n'a pas présenté sa demande de titre de séjour sur ce fondement ;

11. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 de ce code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer (...) une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314 -12 ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 (...) " ; que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à l'article L. 313-11 ou à l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et non du cas de tous les étrangers qui se prévalent du bénéfice de ces dispositions ;

12. Considérant que Mme C...n'ayant pas sollicité de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et ne remplissant pas les conditions pour obtenir de plein droit une carte de résident sur le fondement de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de police n'était pas tenu de consulter la commission du titre de séjour avant de statuer sur sa demande ;

13. Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance / 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

14. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que MmeC..., entrée en France le 6 juin 2009, a été titulaire de titres de séjour portant la mention " visiteur " du 2 février 2012 au 20 octobre 2014 ; que ses trois enfants de nationalité française, nés en 1970, 1981 et 1984, résident en France depuis 1994 ; que la requérante a vécu séparée de ses enfants jusqu'en 2009, date à laquelle elle est entrée en France à l'âge de 59 ans ; que si l'intéressée produit l'acte de décès de son père, elle n'établit pas être dépourvue de toutes attaches au Cameroun où elle a vécu la majeure partie de sa vie ; que, dans ces conditions, le préfet de police n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par la décision portant refus de titre de séjour ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

15. Considérant, enfin, que Mme C...ne saurait utilement se prévaloir de la méconnaissance de la circulaire ministérielle du 12 mai 1998 qui est dépourvue de caractère réglementaire, ainsi que des énonciations de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 qui ne constituent que des orientations générales adressées aux préfets pour la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

16. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier ainsi que des termes de la décision contestée qui comprend l'énoncé des éléments de droit et de fait sur lesquels elle se fonde, que le préfet de police a procédé à l'examen particulier de la situation de Mme C...avant de prendre sa décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

17. Considérant, en deuxième lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui reprend les éléments qui ont été développés à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour, doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 14 du présent arrêt ;

18. Considérant, enfin, qu'aucune des circonstances invoquées par Mme C... ne permet de regarder la décision contestée comme entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

19. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 23 mars 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- Mme Coiffet, président assesseur,

- Mme Larsonnier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 avril 2017.

Le rapporteur,

V. LARSONNIER

Le président,

S.-L. FORMERY

Le greffier,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 16PA02428 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA02428
Date de la décision : 06/04/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: Mme Virginie LARSONNIER
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE
Avocat(s) : BISALU

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-04-06;16pa02428 ?
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