Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision en date du 27 décembre 2013 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a autorisé l'Association des Cités du Secours Catholique à le licencier.
Par un jugement n° 1430776/3-2 - 1430803/3-2 du 21 octobre 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la requête de M. A...B....
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 24 décembre 2015, M. A...B..., représenté par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1430776/3-2 - 1430803/3-2 du 21 octobre 2015 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler la décision du 27 décembre 2013 du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social ;
3°) de refuser d'autoriser son licenciement ;
4°) de mettre à la charge de l'Association des Cités du Secours Catholique et de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
Sur la procédure de licenciement :
- la procédure est irrégulière dès lors que le vote des membres du comité d'entreprise ne s'est pas tenu à bulletin secret en méconnaissance de l'article R. 2421-9 du code du travail ;
- les dispositions de l'article R. 2421-6 du code du travail ont été méconnues dès lors que la demande d'autorisation de licenciement présentée à l'inspectrice du travail était tardive ;
- l'inspectrice du travail qui s'est prononcée était territorialement incompétente.
Sur le bien fondé du licenciement :
- les obligations du contrôle judiciaire auquel M. A...B...était soumis n'étaient pas incompatibles avec les fonctions de celui-ci dès lors, d'une part, qu'il n'était pas susceptible de rencontrer la mère des victimes présumées et, d'autre part, qu'il aurait pu poursuivre ses missions, dans l'exercice desquelles il n'était en contact qu'avec des personnes majeures, durant la procédure judiciaire ;
- l'Association des Cités du Secours Catholique ne prouve pas que ses partenaires auraient pu avoir une vision négative de l'association si M. A...B...n'avait pas été licencié ;
- aucun trouble objectif de nature à justifier le licenciement de M. A...B...n'est caractérisé par l'Association des Cités du Secours Catholique.
La requête a été communiquée à la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Par un mémoire en défense enregistré le 10 mai 2016, l'Association des Cités du Secours Catholique, représentée par Me Auberty Jacolin, conclut, à titre principal, à la confirmation du jugement attaqué, au rejet de la requête de M. A...B...et à ce que la somme de 1 000 euros soit versée à l'Association des Cités du Secours Catholique au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, à titre subsidiaire, à l'annulation de la décision du 29 avril 2013 par laquelle l'inspectrice du travail a refusé le licenciement de M. A... B..., ainsi que de la décision implicite du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social rejetant son recours hiérarchique.
Elle soutient que :
- la requête est irrecevable dès lors que M. A...B...s'est désisté de son recours tendant aux mêmes fins devant le Tribunal administratif de Paris ;
- si, toutefois, la requête était jugée recevable, les moyens invoqués par M. A...B...ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Luben,
- les conclusions de M. Sorin, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., substituant Me Auberty Jacolin, avocat de l'Association des Cités du Secours Catholiques.
Considérant ce qui suit :
1. M. A...B...a été recruté par l'Association Jean-Baptiste Caillaud à compter du 4 avril 2011 en qualité de conseiller en insertion professionnelle. Cette association a été absorbée par l'Association des Cités du Secours Catholique (ACSC) en janvier 2012. M. A... B...était délégué du personnel au sein de la Cité Jean-Baptiste Caillaud, gérée par l'ACSC, et représentant du personnel, au sein de cette association, au comité d'entreprise. Le 27 février 2013, l'ACSC a demandé à l'inspectrice du travail l'autorisation de licencier M. A... B..., ce qui lui a été refusé par une décision du 29 avril 2013. Le 27 juin 2013, l'ACSC a formé auprès du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social un recours hiérarchique contre ce refus. Le 1er novembre 2013, une décision implicite de rejet est née du silence de l'administration, qui a été remplacée par une décision expresse du ministre du travail du 27 décembre 2013 autorisant le licenciement du requérant. M. A...B...relève appel du jugement du 21 octobre 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en annulation de la décision du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en date du 27 décembre 2013.
Sur la fin de non-recevoir opposée par l'Association des Cités du Secours Catholique :
2. Il ressort des pièces du dossier que M. A...B...avait initialement saisi le Tribunal administratif de Paris et le Tribunal administratif d'Orléans de la même demande tendant à l'annulation de la décision du 27 décembre 2013 du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Par un courrier du 24 novembre 2014 adressé à M. A...B..., le greffe du Tribunal administratif de Paris a constaté qu'une requête ayant le même objet que celle qu'il avait déposée à Paris était enregistrée au Tribunal administratif d'Orléans, " territorialement compétent ", et l'a invité à se désister de cette instance et à produire ses écritures au seul Tribunal administratif d'Orléans. En réponse à cette lettre, l'avocat de M. A...B..., par un courrier du 2 décembre 2014, a déclaré se désister de l'instance " compte tenu de la compétence territoriale du Tribunal administratif d'Orléans ". Cependant, par une ordonnance du 9 décembre 2014, le président du Tribunal administratif d'Orléans a transmis le dossier au Tribunal administratif de Paris. Enfin, par une ordonnance du 24 avril 2015, le vice-président du Tribunal administratif de Paris a pris acte du courrier du 2 décembre 2014 de M. A...B...et lui a donné acte du désistement de sa requête. Il résulte de ce qui précède que ce désistement doit être regardé comme un désistement d'instance, et non comme un désistement d'action, et ne saurait donc emporter désistement de la demande initialement enregistrée au Tribunal administratif d'Orléans et transmise par ce dernier au Tribunal administratif de Paris, qui a donné lieu au jugement dont appel est relevé. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par l'Association des Cités du Secours Catholique doit être écartée.
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
3. Aux termes de l'article L. 2421-3 du code du travail : " Le licenciement envisagé par l'employeur d'un délégué du personnel ou d'un membre élu du comité d'entreprise titulaire ou suppléant (...) est soumis au comité d'entreprise, qui donne un avis sur le projet de licenciement " et aux termes de l'article R. 2421-9 du code du travail : " L'avis du comité d'entreprise est exprimé au scrutin secret après audition de l'intéressé ". Il résulte de ces dispositions que le caractère secret du scrutin, dont la finalité est de protéger le salarié dont le projet de licenciement est soumis à l'avis du comité d'entreprise et les membres du comité d'entreprise des pressions, directes ou indirectes, qui pourraient être exercées sur eux ou des effets d'entraînement propres à tout groupe humain, constitue une garantie qui ne saurait être méconnue, sauf à entacher la décision ultérieure de l'inspecteur du travail et, le cas échéant, du ministre chargé du travail, d'irrégularité.
4. Il ressort des pièces du dossier que le comité d'entreprise, lors de sa séance du 25 février 2013, a émis son avis sur le licenciement de M. A...B...en procédant à un vote à main levée, en méconnaissance des dispositions précitées de l'article R. 2421-9 du code du travail. Cette irrégularité est de nature à entraîner l'annulation de la décision du ministre du 27 décembre 2013, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que les six membres du comité d'entreprise ont émis, à l'unanimité, un vote en défaveur du licenciement de M. A...B.... M. A... B...est ainsi fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Sur les conclusions de l'ACSC tendant à l'annulation de la décision du 29 avril 2013 par laquelle l'inspectrice du travail a refusé l'autorisation de licenciement de M. A... B...et de la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique :
5. Si l'ACSC demande, à titre subsidiaire, l'annulation de la décision du 29 avril 2013 par laquelle l'inspectrice du travail a refusé l'autorisation de licenciement de M. A...B...et de la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique, il ressort des pièces du dossier que, par une décision du 27 décembre 2013, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a annulé ladite décision de l'inspectrice du travail, retiré sa décision implicite et autorisé le licenciement du salarié. Dès lors, les conclusions à fin d'annulation de l'ACSC étaient sans objet à la date à laquelle elles ont été présentées et sont, par suite, irrecevables.
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A...B..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que l'Association des Cités du Secours Catholique demande au titre des frais d'instance. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à M. A...B...au titre des frais de même nature.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1430776/3-2 - 1430803/3-2 du 21 octobre 2015 du Tribunal administratif de Paris et la décision du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social du 27 décembre 2013 sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera à M. A...B...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions présentées à titre subsidiaire par l'Association des Cités du Secours Catholique dans son mémoire en défense, ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'Association des Cités du Secours Catholique, à M. E... A...B..., et à la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
Copie en sera adressée au directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France.
Délibéré après l'audience du 13 février 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président de chambre,
- M. Luben, président assesseur,
- Mme Bernard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 27 mars 2017.
Le rapporteur,
I. LUBENLe président,
J. LAPOUZADE
Le greffier,
Y. HERBERLa République mande et ordonne au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°15PA04769