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27/03/2017 | FRANCE | N°15PA02082

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 27 mars 2017, 15PA02082


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le conseil national de l'ordre des médecins a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 9 septembre 2013 de la ministre des affaires sociales et de la santé, publié au journal officiel du 30 octobre 2013, qui a autorisé M. C...A...à exercer en France la profession de médecin dans la spécialité " neurologie " en application de l'article L. 4111-2 du code de la santé publique.

Par un jugement n° 1318684/6-2 du 24 mars 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa dem

ande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, un mémoire complémentaire et d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le conseil national de l'ordre des médecins a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 9 septembre 2013 de la ministre des affaires sociales et de la santé, publié au journal officiel du 30 octobre 2013, qui a autorisé M. C...A...à exercer en France la profession de médecin dans la spécialité " neurologie " en application de l'article L. 4111-2 du code de la santé publique.

Par un jugement n° 1318684/6-2 du 24 mars 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, un mémoire complémentaire et deux mémoires en réplique, enregistrés les 26 mai, 10 juillet et 11 août 2015 et 23 décembre 2016, le conseil national de l'ordre des médecins, représenté par la SCP Barthélémy - Matuchansky - Vexliard - Poupot, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1318684/6-2 du 24 mars 2015 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 9 septembre 2013 de la ministre des affaires sociales et de la santé ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les premiers juges, qui n'ont pas complètement répondu aux moyens qu'il avait invoqués, ont insuffisamment motivé le jugement attaqué ;

- c'est à tort que le tribunal a considéré que M. A...présentait les qualifications professionnelles et une expérience suffisantes pour être autorisé à exercer la médecine dans la spécialité de " neurologie " ;

- la formation théorique et l'expérience pratique de M. A...sont manifestement insuffisantes au regard des conditions habituellement requises pour l'obtention de la qualification de spécialiste quant au niveau de diplômes et de degré de responsabilité et d'autonomie dans la pratique professionnelle ;

- la commission d'autorisation d'exercice a émis un avis défavorable à l'unanimité en recommandant à l'intéressé de valider deux autres diplômes universitaires ou diplômes inter-universitaires dans le champ de la spécialité et d'exercer l'équivalent d'une année à temps plein dans un service agréé pour recevoir des internes, de préférence, dans un centre hospitalier universitaire ;

- M.A..., qui n'a validé qu'une formation de 18 mois en neurochirurgie en Ukraine, ne peut attester d'aucune formation initiale dans la spécialité de " neurologie " laquelle ne peut être compensée par les formations complémentaires suivies par l'intéressé et, au demeurant, insuffisantes ;

- la pratique professionnelle de M.A..., qui se limite à cinq années, sans autonomie, en qualité de praticien attaché associé dans le service d'un centre hospitalier général, ne peut suffire à évaluer sa compétence.

M. A...a produit deux mémoires, présentés sans ministère d'avocat et qui n'ont pas été communiqués, les 17 août 2015 et 8 novembre 2016.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 18 octobre 2016 et 7 mars 2017, la ministre des affaires sociales et de la santé conclut au rejet de la requête et soutient qu'aucun des moyens n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bonneau-Mathelot,

- les conclusions de M. Sorin, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., substituant la SCP Barthélémy - Matuchansky - Vexliard - Poupot, avocat du conseil national de l'ordre des médecins.

Considérant ce qui suit :

1. Le conseil national de l'ordre des médecins relève appel du jugement n° 1318684/6-2 du 24 mars 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 septembre 2013 de la ministre des affaires sociales et de la santé ayant autorisé M. A... à exercer en France la profession de médecin dans la spécialité " neurologie " en application de l'article L. 4111-2 du code de la santé publique.

Sur la recevabilité des mémoires produits par M.A... :

2. M. A...a produit deux mémoires, enregistrés les 17 août 2015 et 8 novembre 2016, qui ont été présentés sans ministère d'avocat. Il ressort des pièces du dossier que M. A...avait été informé, ainsi que cela ressort de la mention figurant sur le courrier de notification du jugement attaqué, de la présentation de l'appel par la voie du ministère d'avocat conformément à l'article R. 751-5 du code de justice administrative. En tout état de cause, la demande de régularisation adressée à M.A..., en application de l'article R. 811-7 du même code, est restée infructueuse. Dans ces conditions, les deux mémoires susmentionnés sont irrecevables et n'ont, par suite, pas été communiqués.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Le conseil national de l'ordre des médecins soutient que le jugement attaqué est insuffisamment motivé dès lors que les premiers juges n'ont pas complètement répondu aux moyens qu'il avait soulevés devant le Tribunal administratif de Paris. Ce moyen, qui n'est pas assorti des précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé, ne peut qu'être écarté. En tout état de cause, l'insuffisance de motivation invoquée manque en fait.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. Aux termes de l'article L. 4111-2 du code de la santé publique : " I.- Le ministre chargé de la santé peut, après avis d'une commission comprenant notamment des délégués des conseils nationaux des ordres et des organisations nationales des professions intéressées, choisis par ces organismes, autoriser individuellement à exercer les personnes titulaires d'un diplôme, certificat ou autre titre permettant l'exercice de la profession de médecin, chirurgien-dentiste ou sage-femme dans le pays d'obtention de ce diplôme, certificat ou titre. / Ces personnes doivent avoir satisfait à des épreuves anonymes de vérification des connaissances, organisées par profession, discipline ou spécialité, et justifier d'un niveau suffisant de maîtrise de la langue française. Les personnes ayant obtenu en France un diplôme interuniversitaire de spécialisation, totalisant trois ans de fonction au-delà de leur formation et justifiant de fonctions médicales rémunérées en France au cours des deux années précédant la publication de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires sont réputées avoir satisfait à l'exigence de maîtrise de la langue française. Des dispositions réglementaires fixent les conditions d'organisation de ces épreuves. Le nombre maximum de candidats susceptibles d'être reçus à ces épreuves pour chaque profession et pour chaque discipline ou spécialité est fixé par arrêté du ministre chargé de la santé en tenant compte, notamment, de l'évolution des nombres d'étudiants déterminés conformément aux dispositions du troisième alinéa de l'article L. 631-1 du code de l'éducation et de vérification du niveau de maîtrise de la langue française. / Le nombre maximum mentionné à l'alinéa précédent n'est pas opposable aux réfugiés, apatrides, bénéficiaires de l'asile territorial et bénéficiaires de la protection subsidiaire et aux Français ayant regagné le territoire national à la demande des autorités françaises. / Les lauréats, candidats à la profession de médecin, doivent en outre justifier de trois ans de fonctions accomplies dans un service ou organisme agréé pour la formation des internes. Toutefois, les fonctions exercées avant la réussite à ces épreuves peuvent être prises en compte après avis de la commission mentionnée au premier alinéa, dans des conditions fixées par voie réglementaire. / Les lauréats, candidats à la profession de chirurgien-dentiste, doivent en outre justifier d'une année de fonctions accomplies dans un service ou organisme agréé pour la formation des internes. Toutefois, les fonctions exercées avant la réussite à ces épreuves peuvent être prises en compte après avis de la commission mentionnée au premier alinéa, dans des conditions fixées par voie réglementaire. / Les lauréats, candidats à la profession de sage-femme, doivent en outre justifier d'une année de fonctions accomplies dans l'unité d'obstétrique d'un établissement public de santé ou d'un établissement privé participant au service public. Les sages-femmes sont recrutées conformément aux dispositions du 4° de l'article L. 6152-1 dans des conditions fixées par voie réglementaire. / Nul ne peut être candidat plus de trois fois aux épreuves de vérification des connaissances et à l'autorisation d'exercice ".

5. Il ressort des pièces versées au dossier que M.A..., français d'origine ukrainienne, est titulaire du diplôme de docteur en médecine délivré le 3 janvier 1992 par l'université nationale de médecine de Lviv en Ukraine et qu'il a, par ailleurs, obtenu, dans ce même Etat, le 28 janvier 2000, le titre de médecin spécialiste en neurochirurgie. Il est, en outre, titulaire d'une attestation de formation spécialisée approfondie de neurochirurgie du 19 octobre 2006 correspondant à quatre semestres de formation validée, d'un diplôme inter-universitaire en pathologie neuro-vasculaire délivré en 2010 et a suivi plusieurs formations dont les " cours et ateliers pratiques en épileptologie " du 17 au 19 juin 2011 et l'enseignement pratique d'électroencéphalographie du 31 mars au 3 avril 2011 et du 20 au 23 octobre 2011. Il n'est, en outre, pas contesté que M. A...a participé à un stage de perfectionnement en neurochirurgie du 21 août 2003 au 16 mars 2004 et à la garde commune de neurochirurgie / neurologie au centre hospitalier de Lons-le-Saunier de juin 2004 à avril 2007, et a occupé les fonctions de " faisant fonction d'interne " en médecine du 2 mai au 1er novembre 2007 au sein de cet établissement hospitalier. Depuis cette date, il a été recruté en qualité de praticien hospitalier associé à raison de dix demi-journées par semaine et a intégré l'équipe neurologique régionale. Il ressort, également, des pièces du dossier qu'il a participé à une communication collective le 16 mai 2009 sur l'angiolipome intrarachidien et la compression médullaire et a donné des cours destinés à des élèves infirmiers en neurologie et neurochirurgie respectivement les 6 et 10 avril 2009 et 2 et 9 mars 2009 sur les processus obstructifs.

6. Le conseil national de l'ordre des médecins fait valoir que la formation théorique et l'expérience pratique de M. A...sont manifestement insuffisantes au regard des conditions habituellement requises pour l'obtention de la qualification de spécialiste quant au niveau de diplômes et de degré de responsabilité et d'autonomie dans la pratique professionnelle.

7. D'une part, au soutien de son argumentation tirée d'une insuffisance de formation théorique ou fondamentale, le conseil national de l'ordre des médecins soutient, à l'appui de l'avis défavorable émis par la commission d'autorisation d'exercice lors de sa séance du 9 novembre 2012, que M. A...devrait justifier d'un diplôme universitaire ou inter-universitaire dans le domaine de sa spécialité. Toutefois, les dispositions précitées du I de l'article L. 4111-2 du code de la santé publique, qui se bornent à " autoriser individuellement à exercer les personnes titulaires d'un diplôme, certificat ou autre titre permettant l'exercice de la profession de médecin, chirurgien-dentiste ou sage-femme dans le pays d'obtention de ce diplôme, certificat ou titre ", n'exigent nullement que le pétitionnaire justifie d'un diplôme afférent à une spécialité mais seulement la réussite aux " épreuves anonymes de vérification des connaissances, organisées par profession, discipline ou spécialité ". Or, il ressort des pièces du dossier que M. A...a obtenu aux épreuves de vérification des connaissances en neurologie, à la session 2011, la note de 19/20 à l'épreuve de vérification des connaissances fondamentales. Dans ces conditions, le conseil national de l'ordre des médecins ne peut invoquer l'absence de toute équivalence avec le diplôme d'études universitaires " neurologie " ou encore celle de toute formation initiale en neurologie justifiant une formation diplômante ou l'insuffisance de sa formation en neurochirurgie.

8. D'autre part, au soutien de son argumentation tirée d'une insuffisance de pratique professionnelle, le conseil national de l'ordre des médecins allègue que M.A..., qui n'a exercé que dans un centre hospitalier général, en qualité de praticien attaché associé, pendant cinq ans, avec peu d'autonomie, devrait compléter son activité pratique d'une année dans un service agréé pour la spécialité, notamment un centre hospitalier universitaire. Toutefois, les dispositions sus-rappelées du I de l'article L. 4111-2 du code de la santé publique n'imposent pas qu'un candidat justifie d'une pratique professionnelle dans un centre hospitalier universitaire ou dans un établissement agréé pour la formation des internes. En tout état de cause, le ministre chargé de la santé indique, dans ses écritures, que le service dans lequel M. A...exerce depuis 2007 est agréé pour la formation des internes en neurologie et possède une unité neuro-vasculaire. En outre, il ressort du rapport d'évaluation produit que M. A...est un " excellent praticien neurologue ".

9. Dans ces conditions, le conseil national de l'ordre des médecins n'est pas fondé à soutenir que la ministre des affaires sociales et de la santé aurait entaché l'arrêté en litige d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation.

10. Il résulte de tout ce qui précède que le conseil national de l'ordre des médecins n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter les conclusions que le conseil national de l'ordre des médecins a présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du conseil national de l'ordre des médecins est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au conseil national de l'ordre des médecins, à la ministre des affaires sociales et de la santé et à M. C...A....

Délibéré après l'audience du 13 mars 2017 à laquelle siégeaient :

- M. Luben, président,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller,

- Mme Bernard, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 27 mars 2017.

Le rapporteur,

S. BONNEAU-MATHELOTLe président,

I. LUBENLe greffier,

Y. HERBERLa République mande et ordonne au ministre des affaires sociales et de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15PA02082


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA02082
Date de la décision : 27/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

55-02-01 Professions, charges et offices. Accès aux professions. Médecins.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Sonia BONNEAU-MATHELOT
Rapporteur public ?: M. SORIN
Avocat(s) : SCP MATUCHANSKY-VEXLIARD et POUPOT

Origine de la décision
Date de l'import : 11/04/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-03-27;15pa02082 ?
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