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21/03/2017 | FRANCE | N°15PA04221

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 21 mars 2017, 15PA04221


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Tahiti Solaire et M. C...A...B...dit A...ont demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française de condamner la Polynésie française à verser la somme de 186 000 000 F CFP en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis.

Par un jugement n° 1500119-1 du 29 septembre 2015, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire

, enregistrés les 20 novembre 2015 et

16 février 2017, la SARL Tahiti Solaire et M. C...A...B...dit...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Tahiti Solaire et M. C...A...B...dit A...ont demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française de condamner la Polynésie française à verser la somme de 186 000 000 F CFP en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis.

Par un jugement n° 1500119-1 du 29 septembre 2015, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 20 novembre 2015 et

16 février 2017, la SARL Tahiti Solaire et M. C...A...B...ditA..., représentés par la SELARL Jurispol, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1500119-1 du 29 septembre 2015 du Tribunal administratif de la Polynésie française ;

2°) de condamner la Polynésie française à verser à la SARL Tahiti Solaire la somme de 102 000 000 XFP et à M. A...la somme de 85 000 000 XPF ;

3°) de mettre à la charge de la Polynésie française le versement de la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'administration fiscale a commis une faute résultant de la mise à la charge de la société des sommes exorbitantes pour des motifs injustifiés, de la durée excessive de la procédure et du refus des garanties proposées ;

- la société a subi un préjudice résultant de l'engagement d'honoraires de défense, une perte de clientèle et une atteinte à l'image de la marque ;

- M. A...a subi un préjudice personnel à raison de la perte de valeur des diverses sociétés dont il est propriétaire suite à la perte de clientèle consécutive aux redressements fiscaux de la SARL Tahiti Solaire dont il est le gérant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 mai 2016, la Polynésie française, représentée par la SELARL Groupavocats, conclut au rejet de la requête et à ce que le versement de la somme de

2 000 euros soit mis à la charge de la SARL Tahiti Solaire sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les fautes de nature à engager sa responsabilité ne sont pas établies ;

- il n'est pas justifié du préjudice allégué.

La Polynésie française a déposé un mémoire en réplique enregistré le 1er mars 2017 à

19 h 34.

Vu :

- la réclamation préalable ;

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;

- le code des impôts de la Polynésie française ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mosser,

- et les conclusions de M. Rousset, rapporteur public.

1. Considérant qu'à la suite d'une vérification de comptabilité en janvier 2012 portant sur la période du 28 octobre 2008 au 30 juin 2011, et par voie de taxation d'office, des impositions supplémentaires ont été mises à la charge de la SARL Tahiti Solaire, qui exerce une activité de production d'électricité d'origine photovoltaïque ; que l'administration fiscale a mis en recouvrement, en décembre 2012, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, sur les bénéfices des sociétés, sur les revenus des capitaux mobiliers, des contributions supplémentaires de solidarité territoriale, des cotisations supplémentaires sur les patentes et la taxe sur la valeur locative, et a procédé à des rappels de taxes sur la valeur ajoutée en janvier 2013 ; qu'à la suite de réclamations contentieuses, l'administration a procédé aux dégrèvements de l'ensemble de ces impositions ; que la SARL Tahiti Solaire et M. C...A...B...dit A...relèvent appel du jugement en date du 29 septembre 2015 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté leur demande tendant à obtenir réparation des préjudices respectivement subis par chacun ;

2. Considérant qu'une faute commise par l'administration lors de l'exécution d'opérations se rattachant aux procédures d'établissement ou de recouvrement de l'impôt est de nature à engager la responsabilité de l'Etat à l'égard du contribuable ou de toute autre personne si elle leur a directement causé un préjudice ; qu'un tel préjudice, qui ne saurait résulter du seul paiement de l'impôt, peut être constitué des conséquences matérielles des décisions prises par l'administration et, le cas échéant, des troubles dans ses conditions d'existence dont le contribuable justifie ; que le préjudice invoqué ne trouve pas sa cause directe et certaine dans la faute de l'administration si celle-ci établit soit qu'elle aurait pris la même décision d'imposition si elle avait respecté les formalités prescrites ou fait reposer son appréciation sur des éléments qu'elle avait omis de prendre en compte, soit qu'une autre base légale que celle initialement retenue justifie l'imposition ; qu'enfin, l'administration peut invoquer le fait du contribuable ou, s'il n'est pas le contribuable, du demandeur d'indemnité comme cause d'atténuation ou d'exonération de sa responsabilité ;

3. Considérant que la SARL Tahiti Solaire soutient que les fautes de l'administration fiscale qui résulteraient de la durée excessive de la procédure, du refus des garanties de paiement proposées et de celles relatives aux opérations d'établissement des impositions mises à sa charge sont pour elle à l'origine de préjudices tenant à l'engagement de frais d'honoraires de défense, de perte de clientèle et d'atteinte à l'image de marque de la société ; que M. A...soutient pour sa part que ces mêmes fautes lui ont causé un préjudice personnel correspondant à la perte de valeur des diverses sociétés dont il est propriétaire suite à la perte de clientèle consécutive aux redressements fiscaux ;

4. Considérant, d'une part, que pour justifier de son préjudice, la SARL Tahiti Solaire produit un courrier de la Banque de Polynésie en date du 17 février 2014 précisant que son compte ne présentait pas une provision suffisante pour faire face à ses échéances bancaires ; que, toutefois, la SARL Tahiti Solaire ne précise aucunement les suites qui ont été données à ce courrier, ni les conséquences qui en auraient résulté ; que si elle invoque encore un courrier de la direction générale des finances publiques l'informant qu'en l'absence de paiement significatif des impôts territoriaux mis à sa charge, une procédure de redressement judiciaire serait très prochainement diligentée, il ne résulte pas de l'instruction qu'une suite ait été donnée à ce courrier, ni qu'une procédure de redressement ait été engagée ; que la circonstance invoquée par la SARL Tahiti Solaire qu'elle s'est trouvée " virtuellement " en cessation de paiement, ne suffit pas à établir le préjudice qu'elle aurait subi qui ne peut résulter, ainsi qu'il résulte du point 2, du seul paiement de l'impôt ; que d'ailleurs, il résulte de l'extrait Kbis du 3 octobre 2016, que les associés ont simplement décidé de mettre en sommeil la société par un acte du 3 juin 2016, soit postérieurement au remboursement des sommes indument perçues ; qu'enfin ni le tableau établi par la SARL Tahiti Solaire portant mention d'échéances impayées, mais également mention que ce relevé n'a aucune " valeur fiscale ", ni la liste d'établissements d'enseignements portant le montant de sommes correspondant à du matériel et des fournitures et des prestations d'installations ne permettent d'établir le préjudice que la société soutient avoir subi ; que si, en ce qui concerne les frais de procédure, la SARL Tahiti Solaire produit quatre notes d'honoraires de son avocat, trois de ces notes sont relatives à la présente procédure d'engagement de la responsabilité de la Polynésie française du fait des services fiscaux dont elle est susceptible d'obtenir le paiement pour des frais engagés et non compris dans les dépens sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que la quatrième note, d'un montant de 550 000 F CFP, soit 4 609 euros, est relative aux honoraires de défense engagés pour la saisine de la commission des impôts ; que l'engagement de tels frais annexes aux procédures contentieuses est réparé dans le cadre des textes relatifs aux frais de l'instance ; qu'il résulte de l'instruction, que saisi d'une demande en décharge des impositions contestées, le tribunal administratif a fixé, dans son jugement du 4 novembre 2014, le montant des frais engagés et non compris dans les dépens dont le versement a été mis à la charge de la Polynésie française ; qu'ainsi, la société ne démontre pas la réalité des préjudices invoqués tenant à l'engagement de frais d'honoraires de défense, de perte de clientèle et d'atteinte à l'image de marque de la société ;

5. Considérant, d'autre part, que si M. A...justifie des difficultés subies par les autres sociétés dont il a la charge, il n'apporte aucun justificatif permettant de retenir qu'il existerait un lien entre les rehaussements mis à la charge de la SARL Tahiti Solaire et les difficultés rencontrées par ces autres sociétés ; que s'il soutient n'avoir pu obtenir aucun marché à compter du mois de juillet 2012, il ne justifie pas avoir candidaté vainement à un quelconque marché ; qu'ainsi, il n'établit pas non plus avoir subi un préjudice direct et certain ;

6. Considérant qu'il résulte des points 4 et 5 que les requérants n'établissent pas les préjudices qu'ils invoquent à raison des fautes alléguées de l'administration fiscale, ni par suite ne sont fondés à rechercher la responsabilité de la Polynésie française à leur égard ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL Tahiti Solaire et M. A...ne sont pas fondés à se plaindre que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la Polynésie française, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la SARL Tahiti Solaire et M. A...demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la SARL Tahiti Solaire et de M. A...une somme de

1 500 euros à verser à la Polynésie française sur le fondement des mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Tahiti Solaire et de M. A...est rejetée.

Article 2 : La SARL Tahiti Solaire et M. A...verseront à la Polynésie française une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée Tahiti Solaire, à M. C...A...B...dit A...et à la Polynésie française.

Copie en sera adressée au haut-commissaire de la République en Polynésie française.

Délibéré après l'audience du 3 mars 2017, à laquelle siégeaient :

- Mme Heers, président de chambre,

- Mme Mosser, président assesseur,

- M. Boissy, premier conseiller.

Lu en audience publique le 21 mars 2017.

Le rapporteur,

G. MOSSER

Le président,

M. HEERSLe greffier,

C. DABERT

La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Polynésie française, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15PA04221


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA04221
Date de la décision : 21/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-04-01 Responsabilité de la puissance publique. Réparation. Préjudice.


Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: Mme Geneviève MOSSER
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : SELARL JURISPOL

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-03-21;15pa04221 ?
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