Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner le Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) à lui verser la somme de 22 033,77 euros, assortie des intérêts de droits et de leur capitalisation, en réparation des préjudices résultant des fautes commises par cet établissement public liés aux ajournements dont elle a été l'objet, effectués en 2011 et 2012, pour l'obtention du diplôme de psychologue du travail et du refus d'inscription au certificat de spécialisation de psychopathologie du travail qui lui a été opposé, et d'enjoindre au Conservatoire national des arts et métiers d'assurer une composition différente du jury de soutenance dans l'hypothèse où elle déciderait de se présenter une dernière fois.
Par un jugement n° 1401096/2-1 du 19 décembre 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure contentieuse devant la Cour :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 18 février et 26 août 2015, MmeA..., représentée par MeB..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement susvisé du Tribunal administratif de Paris du 19 décembre 2014 ;
2°) de condamner le Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) à lui verser la somme de 22 033,77 euros, à parfaire, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation à compter du 13 septembre 2013, en réparation de ses préjudices, soit 19 033,77 euros au titre de son préjudice matériel au 31 décembre 2013, 1 500 euros au titre des troubles dans ses conditions d'existence et 1 500 euros pour son préjudice moral ;
3°) d'enjoindre au CNAM d'assurer une composition différente du jury de soutenance dans l'hypothèse où elle déciderait de se présenter une dernière fois ;
4°) de mettre à la charge du CNAM le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les premiers juges ont méconnu leur office et ont insuffisamment motivé leur jugement ;
- les premiers juges ont méconnu les droits de la défense et le droit au procès équitable en s'abstenant de prescrire les mesures d'instruction qui s'imposaient ;
- la composition des jurys de soutenance du mémoire méconnaissait le règlement de délivrance du titre professionnel de psychologue du travail et les principes d'impartialité et d'égalité de traitement entre les candidats ;
- le jury s'est fondé sur des motifs étrangers à l'appréciation de ses mérites professionnels, a imposé des modalités de soutenance du mémoire non prévues au règlement et a fait preuve de discrimination à son égard ;
- l'avis défavorable du jury ne lui a pas été notifié conformément à l'article 7 du règlement applicable, ce qui l'a privée d'une garantie substantielle de nature à vicier la procédure ;
- le CNAM a irrégulièrement omis de l'inscrire à la formation du certificat de spécialisation en psychopathologie du travail, alors qu'elle avait déposé un dossier complet et qu'elle remplissait l'ensemble des conditions ;
- les irrégularités précitées sont constitutives de fautes de nature à engager la responsabilité du CNAM, en lien direct avec son préjudice matériel, les troubles dans les conditions d'existence et le préjudice moral dont elle demande la réparation ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 juillet 2015, le CNAM, représenté par
MeB..., conclut au rejet de la requête et à ce que le versement de la somme de 1 500 euros soit mis à la charge de la requérante sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que :
- à titre principal, la demande indemnitaire de Mme A...ayant été réévaluée devant le tribunal administratif et reposant sur des fautes nouvellement alléguées était irrecevable en l'absence du recours administratif préalable exigé par l'article 7 du règlement et de liaison du contentieux ;
- à titre subsidiaire, les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'éducation ;
- le décret n° 88-413 du 22 avril 1988 relatif au Conservatoire national des arts et métiers ;
- le règlement de délivrance du titre professionnel de psychologue du travail par le Conservatoire national des arts et métiers du 12 juin 2007 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Dellevedove,
- les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public,
- et les observations de MeB....
Une note en délibéré, enregistrée le 23 février 2017, a été présentée pour Mme A....
1. Considérant que Mme A... a suivi, depuis octobre 2006, les enseignements dispensés par le Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) en vue d'obtenir le titre professionnel de psychologue du travail délivré par cet établissement ; qu'elle a été ajournée à deux reprises, après avoir échoué à l'épreuve de soutenance du mémoire d'application professionnelle de fin de formation, présentée le 15 décembre 2011 et le 5 juillet 2012, avec les notes éliminatoires de, respectivement, 8 sur 20 et 10 sur 20, lesquelles sont inférieures à la note minimale de 12 sur 20 requise pour cette épreuve ; qu'en outre, le CNAM a rejeté sa demande d'inscription formulée en juillet 2012 en vue de suivre la formation pour l'obtention du certificat de spécialisation de psychopathologie du travail au titre de l'année universitaire 2012-2013 ; que, par une décision du 16 décembre 2013, l'administrateur général du CNAM a rejeté la réclamation de Mme A... tendant à l'indemnisation des préjudices résultant, selon elle, des illégalités fautives entachant ces ajournements et ce refus d'inscription ; que Mme A... relève appel du jugement du 19 décembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation du CNAM à l'indemniser de ces préjudices et à enjoindre à cet établissement public d'assurer une composition différente du jury de soutenance dans l'hypothèse où elle déciderait de se présenter une dernière fois ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'il résulte des termes mêmes du jugement attaqué que les premiers juges ont relevé qu'il n'appartient pas au juge administratif de contrôler l'appréciation souveraine portée par un jury sur un candidat dès lors que cette appréciation a été portée dans des conditions conformes au règlement de l'examen et qu'elle ne repose pas sur des faits étrangers aux mérites du candidat ; qu'après avoir statué sur les conditions de cette appréciation portée par le jury sur la candidate, en s'appuyant de manière circonstanciée sur les textes applicables et les faits de l'espèce, les premiers juges en ont déduit que le moyen tiré de l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation commise par le jury de soutenance du mémoire était inopérant ; que, sans qu'il soit besoin de prescrire des mesures d'instruction visant à éclairer davantage le tribunal sur les discriminations alléguées, les premiers juges n'ont pas méconnu leur office, ni les droits de la défense ou les règles du procès équitable, et ont suffisamment motivé leur jugement ; qu'à supposer qu'ils aient commis à cet égard des erreurs concernant la matérialité des faits et leur qualification juridique, ou des contradictions de motifs, de telles critiques se rapportent, en tout état de cause, au bien-fondé et non à la régularité du jugement attaqué ;
Sur le fond :
En ce qui concerne la responsabilité du CNAM imputable aux ajournements de
Mme A...à l'examen professionnel de psychologue du travail :
3. Considérant qu'aux termes de l'article 1er du règlement de délivrance du titre professionnel de psychologue du travail signé par l'administrateur général du CNAM le 12 juin 2007: " (...) 2- Le titre professionnel Psychologue du travail est délivré sur proposition d'un jury, par l'administrateur général du Conservatoire national des arts et métiers en exercice. / 3 - Le jury de délivrance du titre professionnel (...) comprend : / - l'administrateur général du CNAM ou son représentant, / - le directeur national des formations ou son représentant, / - le responsable pédagogique du titre, / - deux enseignants responsables, / - deux professionnels du domaine concerné dans le titre professionnel. / 4 - Le jury vérifie que les candidats ont : / - satisfait aux conditions d'accès au titre, / - validé l'ensemble des composantes de la certification. " ; qu'aux termes de l'article 3 de ce règlement : " Les conditions de réussite du cursus sont : / - obtenir les unités d'enseignement prévues dans le cursus (...) ou valider des acquis de l'expérience (Cf. article 4) ; / - être admis à l'examen probatoire (...) ; / - rédiger et soutenir avec succès (note égale ou supérieure à 12/20) le mémoire d'application professionnelle (...) ; qu'aux termes de l'article 7 de ce règlement : " (...) Le titre professionnel de psychologue du travail est délivré par l'administrateur général (...) sur proposition du jury, décrit dans l'article premier, aux candidats ayant satisfait aux conditions prévues aux articles 2, 3, 4 et 5. / Les décisions du jury sont souveraines et sans appel sauf pour vice de forme ou erreur matérielle appréciés par le conseil de perfectionnement, saisi par l'administrateur général. Le conseil de perfectionnement peut demander au jury de délibérer à nouveau. / En cas d'avis défavorable à la délivrance du titre, la décision est notifiée au candidat qui peut apporter des compléments d'information permettant le réexamen de la demande par le jury dans l'année qui suit (...) " ;
4. Considérant, en premier lieu, que Mme A...invoque en appel les moyens déjà présentés devant le tribunal administratif tirés de la méconnaissance des règles régissant la composition et le mode de désignation des membres du jury de l'épreuve de soutenance du mémoire pour l'obtention du titre professionnel de psychologue du travail, leur convocation et le principe d'impartialité s'imposant au jury sans apporter aucun élément nouveau susceptible de remettre en cause l'analyse et la motivation que les premiers juges ont à bon droit portée sur les mérites de sa demande sur ces points ; que, dès lors, ces moyens doivent être écartés par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il n'est pas établi que lors des deux sessions litigieuses, le jury de l'épreuve de soutenance de mémoire aurait fondé son appréciation sur des considérations autres que la valeur de Mme A...ou fait preuve de discrimination à son égard ; qu'en l'absence de telles irrégularités, l'intéressée ne peut contester ni les principes de correction retenus par le jury, ni l'appréciation qu'il a porté sur la valeur de ses prestations, lesquels ne sont pas susceptibles d'être contestés devant le juge administratif ; qu'elle ne saurait ainsi utilement critiquer au contentieux ni le plan type imposé par le jury pour la présentation des travaux des candidats, ni les notes éliminatoires qui lui ont été attribuées ;
6. Considérant, en troisième lieu, que, s'il est vrai, ainsi que le soutient à juste titre la requérante sans être contredite sur ce point, que, en méconnaissance du 3° de l'article 1er du règlement précité, la composition du jury général de délivrance du titre professionnel était entachée d'irrégularité en 2012 dès lors qu'il ne comportait pas parmi ses membres le directeur national des formations ou son représentant, ainsi que l'atteste le procès-verbal de délibération correspondant, la nature de cette irrégularité est en tout état de cause insusceptible d'avoir exercé une influence sur la teneur et le bien-fondé de l'ajournement dont Mme A...a été l'objet, qui est justifié par la note éliminatoire attribuée souverainement par le jury en charge de l'épreuve de soutenance du mémoire ;
7. Considérant, en quatrième lieu, que les conditions de notification d'une décision administrative sont sans incidence sur sa légalité ; que, par suite, la circonstance que les décisions d'ajournement prononcées par le jury de délivrance du titre professionnel de psychologue du travail n'ont pas été notifiées par écrit à Mme A..., en méconnaissance des termes de l'article 7 du règlement précité, est sans incidence sur leur légalité ;
8. Considérant, en cinquième lieu, que ces irrégularités de notification n'ont pas empêché Mme A...de faire valoir utilement ses arguments contre ces décisions d'ajournement, en la privant des motifs de ces décisions, dès lors qu'il résulte de l'instruction qu'elles reposent exclusivement sur les notes éliminatoires à l'épreuve de soutenance de mémoire attribuées souverainement par le jury de soutenance ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, d'une part, que, dans les circonstances de l'espèce, les irrégularités susmentionnées aux points 6, 7 et 8 n'ont pas privé Mme A...d'une chance sérieuse d'être admise au diplôme professionnel de psychologue du travail délivré par le CNAM ; que, d'autre part, les autres prétendues irrégularités invoquées par Mme A...et analysées ci-dessus ne sont pas établies ; que, dès lors, Mme A... n'est pas fondée à rechercher la responsabilité du CNAM pour les ajournements à ce diplôme prononcés par cet établissement ;
En ce qui concerne la responsabilité du CNAM résultant du refus d'inscription de
Mme A...à la formation destinée à préparer le certificat de spécialisation de psychopathologie du travail :
10. Considérant que pour établir l'illégalité de ce refus d'inscription qui lui a été opposé par le CNAM, qui l'aurait ainsi privée d'une chance sérieuse d'obtenir le certificat de spécialisation de psychopathologie du travail en 2013, Mme A... se borne à soutenir qu'elle répondait aux conditions d'inscription et qu'elle aurait reçu de l'administration une réponse favorable à ce sujet ; qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est pas contesté que l'inscription à cette formation est subordonnée à un agrément et au nombre de places disponibles, les candidatures devant être adressées en mai, pour que les agréments puissent être accordés début juillet ; que Mme A... n'a contacté le service compétent que le 16 juillet 2012, alors qu'il n'y avait plus de places pour l'année universitaire 2012-2013, ce qui n'est pas contesté ; que la circonstance que la documentation qui lui a été adressée en réponse par courriel à l'intéressée le 7 septembre 2012 comportait également un bulletin d'inscription ne saurait faire regarder ce courriel, purement informatif, comme constituant une autorisation ou une promesse d'inscription de la part du CNAM ; qu'en rejetant sa demande d'inscription au titre de cette année universitaire, le CNAM n'a donc commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité à l'égard de Mme A...;
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par le CNAM, que Mme A... n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
12. Considérant qu'excepté les cas prévus par les articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative, il n'appartient pas au juge administratif d'adresser des injonctions à l'administration ; que le présent arrêt, qui rejette les conclusions de la requête à fin d'annulation et d'indemnisation de Mme A...n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du CNAM, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais exposés par Mme A... et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions du CNAM présentées sur le fondement de ces mêmes dispositions ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête susvisée de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...et au Conservatoire national des arts et métiers (CNAM).
Délibéré après l'audience du 21 février 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Even, président de chambre,
- Mme Hamon, président assesseur,
- M. Dellevedove, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 21 mars 2017.
Le rapporteur,
E. DELLEVEDOVE Le président,
B. EVEN
Le greffier,
S. GASPAR
La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA00744