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02/03/2017 | FRANCE | N°15PA02728

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 02 mars 2017, 15PA02728


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...ont demandé au Tribunal administratif de Melun, d'une part, l'annulation des avis d'imposition portant sur les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2008 à 2010 et, d'autre part, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2008 à 2010 et des majorations correspondantes.

Par un jugement n° 1309147 du 13 avril 2015 le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande.


Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 6 juille...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...ont demandé au Tribunal administratif de Melun, d'une part, l'annulation des avis d'imposition portant sur les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2008 à 2010 et, d'autre part, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2008 à 2010 et des majorations correspondantes.

Par un jugement n° 1309147 du 13 avril 2015 le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 6 juillet 2015, le 29 septembre 2016 et le 1er décembre 2016, M. et MmeA..., représentés par Me Lichtenstern, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1309147 du 13 avril 2015 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

- en méconnaissance de l'article L. 9 du code de justice administrative, le Tribunal n'a pas statué sur leur moyen pris de ce que le délai de reprise de l'année 2008 était prescrit en application de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales dès lors que le rôle et l'avis d'imposition mis en recouvrement le 30 novembre 2012 avaient rapporté ceux initialement émis en 2009 et étaient irréguliers faute de mentionner un événement interruptif du délai de reprise de l'année 2008 ;

En ce qui concerne la procédure d'imposition :

- en méconnaissance des articles L. 104 et L. 252 A du livre des procédures fiscales et des articles 1658 et 1659 du code général des impôts, l'extrait de rôle d'imposition qui leur a été délivré ne comportait ni le nom de l'agent ayant homologué le rôle, ni la formule exécutoire, ni le visa de l'article 1658 du code général des impôts et de l'arrêté préfectoral de délégation de pouvoir au directeur des services fiscaux et aux collaborateurs de celui-ci ayant au moins le grade de directeur divisionnaire ; les extraits de rôle ne comportaient aucune date limite de paiement en méconnaissance des dispositions de l'article L. 253, alinéa 2, du livre des procédures fiscales et 1659, alinéa 1er, de l'article 1659 du code général des impôts et de la doctrine administrative ; ils ne précisent pas la nature des revenus imposés ni aucune mention relative à la nature ou à l'origine de l'imposition supplémentaire ;

- les extraits de rôle ne mentionnent ni date d'exigibilité ni date limite de paiement en méconnaissance de la doctrine fiscale contenue dans la réponses Masson, Sénat, 20 novembre 1995 page 4924 n° 20381, réponse Zimmerman, assemblée nationale 11 mai 1998 page 2655 n° 11161 et de l'instruction du 1er mars 1995 95-027-A1 titre 2 chap. 1 modifiée et de la doctrine référencée BOI-REC-PART-10-10-10 n°90 du 12 septembre 2012, opposable à l'administration en vertu de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales et qui reprend une instruction antérieure n° 95-027-A1 du 1er mars 1995 ;

- l'administration ne justifie pas de l'existence d'un rôle complémentaire régulier pour la mise en recouvrement des impositions supplémentaires et n'établit pas que le rôle des trois années d'impositions a été régulièrement homologué ; la décision d'homologation du rôle du 19 novembre 2012 produite par le ministre ne permet pas d'en justifier dès lors qu'elle ne mentionne pas le nom des requérants, est imprécise en ce qui concerne les droits concernés et porte sur un montant différent de celui auquel ils ont été assujettis ;

- les avis d'imposition étaient irréguliers faute de résulter d'un rôle régulièrement homologué et en l'absence de diverses mentions ;

- les premiers juges ont regardés à tort comme inopérants leurs moyens pris des doctrines qu'ils invoquaient à l'appui du moyen contestant la régularité de l'extrait de rôle alors que la procédure d'imposition relève du contentieux d'assiette et que des doctrines comportent une interprétation de la loi fiscale au sens de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

- en ce qui concerne l'année 2010, la proposition de rectification du 4 octobre 2011 méconnaît les dispositions de l'article L. 49 du livre des procédures fiscales relatives à l'information du contribuable quant aux conséquences financières du contrôle dès lors qu'aucune modification des réductions d'impôt n'est mentionnée ; l'article L. 49 du livre des procédures fiscales leur était applicable dès lors que ce texte est applicable " même en l'absence de rectifications " ;

- en l'absence de précision des conséquences financières quant aux droits et pénalités résultant des rehaussements, la proposition de rectification était en outre insuffisamment motivée en violation des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales en ce qui concerne l'année 2010 ;

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions et pénalités :

- le délai de reprise de l'année 2008 était prescrit en application de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales dès lors que le rôle et l'avis d'imposition mis en recouvrement le 30 novembre 2012 avaient rapporté ceux initialement émis en 2009 et étaient irréguliers faute de mentionner un événement interruptif du délai de reprise de l'année 2008 ;

- les dons qu'ils ont effectués en faveur de l'association Tri Max sont éligibles à la réduction d'impôt prévue par les dispositions de l'article 200 du code général des impôts dès lors qu'elle est un organisme d'intérêt général et a un caractère sportif ;

- aucun critère tenant au nombre de bénéficiaires n'est fixé par la loi pour apprécier le caractère d'intérêt général d'une association ; le critère pris de l'absence de fonctionnement au profit d'un cercle restreint de personnes ne résulte que de la doctrine 5 B-3311 n° 12 et suivants et 4 C-712 n° 11 et suivants, qui est illégale et n'est pas opposable au contribuable ; à titre subsidiaire, l'association Tri Max remplit en réalité les conditions de ces doctrines ;

- l'administration n'est pas en droit de contester pour la première fois devant la Cour le caractère sportif de l'association Tri Max ;

- l'association Tri Max correspond à la définition d'organisme sportif énoncée dans les doctrines 4C-713, 5B-3311 n° 20 du 23 juin 2000 et BOI-IR-RICI-10-20-10-20121001 opposables à l'administration en vertu de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

- il est sans incidence que les fonds aient été versés par les sociétés CTN et ITAC dès lors que les requérants établissent que ces sommes avaient été prélevées sur la rémunération due à M. A... par ces sociétés ou sur ses comptes courants d'associé auprès de ces sociétés ;

- le versement de 10 000 euros effectué le 31 décembre 2010 par M. A...a été imputé par erreur sur l'année 2010 et doit l'être sur l'année 2011, année de l'encaissement effectif du chèque ;

- le fait que M. A...soit à la fois le président de l'association Trimax et le principal donateur est sans incidence sur le caractère déductible des dons qu'il effectue en faveur de cette association ;

En ce qui concerne les pénalités :

- la majoration prévue à l'article 1729 du code général des impôts est infondée.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 18 août 2016 et le 28 octobre 2016, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les premiers juges étaient en droit de ne pas répondre au moyen pris de la prescription du droit de reprise dès lors que ce moyen était inopérant du fait que la prescription des impositions de l'année 2008 avait été interrompue par une proposition de rectification du 4 octobre 2011 ;

- les requérants ne peuvent utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 48 et L. 49 du livre des procédures fiscales, qui ne leur étaient pas applicables dès lors qu'ils ont fait l'objet d'un simple contrôle sur pièce au titre de l'année 2010 ;

- les irrégularités qui peuvent entacher les avis relatifs aux impositions recouvrées par voie de rôle étant sans influence sur la régularité ou le bien-fondé de l'imposition elle-même, les requérants ne peuvent utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 253 du livre des procédures fiscales ;

- les autres moyens soulevés par M. et Mme A...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Notarianni,

- les conclusions de M. Blanc, rapporteur public,

- et les observations de Me Lichtenstern, avocate de M. et MmeA....

1. Considérant M. et Mme A...relèvent appel du jugement du 13 avril 2015 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande de décharge en droits et pénalités des compléments d'impôt sur le revenu mis à leur charge au titre des années 2008 à 2010 pour un montant global de 54 809 euros, à la suite d'un contrôle sur pièces, à raison de la remise en cause des réductions d'impôts dont ils avaient bénéficié au cours de ces années sur le fondement des dispositions de l'article 200 du code général des impôts pour avoir effectué des dons au profit de l'association Tri Max, qui a pour objet l'accompagnement de jeunes triathlètes au plus haut niveau, et dont M. A...était le président ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 252 A du livre des procédures fiscales : " Le recouvrement des impôts est confié aux comptables publics compétents par arrêté du ministre chargé du budget ", qu'aux termes de l'article 1658 du code général des impôts : " Les impôts directs et les taxes y assimilées sont recouvrés en vertu de rôles rendus exécutoires par arrêté du préfet ou d'avis de mise en recouvrement. Pour l'application de la procédure de recouvrement par voie de rôle prévue au premier alinéa, le représentant de l'Etat dans le département peut déléguer ses pouvoirs aux agents de catégorie A placés sous l'autorité des directeurs départementaux des finances publiques ou des responsables de services à compétence nationale, détenant au moins un grade fixé par décret en Conseil d'Etat. La publicité de ces délégations est assurée par la publication des arrêtés de délégation au recueil des actes administratifs de la préfecture " ; qu'il résulte des dispositions qui précèdent qu'il appartient à l'administration, conformément aux dispositions précitées de l'article 1658 du code général des impôts, de procéder au recouvrement de la créance fiscale dont elle se prévaut en vertu d'un rôle homologué ; que ce rôle doit comporter l'identification du contribuable, ainsi que le total par nature d'impôt et par année des sommes à acquitter ;

3. Considérant qu'il appartient à l'administration de justifier que le rôle a été homologué conformément aux prescriptions de l'article 1658 du code général des impôts ; qu'à cette fin, le ministre de l'économie et des finances produit devant la Cour la décision d'homologation du rôle du 19 novembre 2012, laquelle mentionne la date de mise en recouvrement, fixée au 30 novembre 2012, et vise l'arrêté préfectoral du 30 juillet 2012 portant délégation de pouvoir et la signature du comptable public qui a procédé à son homologation et précise le total par nature d'impôt en indiquant que la créance fiscale est constituée de cotisations d'impôt sur le revenu ; que, toutefois, elle ne comporte pas l'identification du contribuable ni le total par année des sommes à acquitter et, en outre, porte sur une créance d'impôt sur le revenu d'un montant global de 56 859 euros supérieur à celui mis en recouvrement au nom de M. et Mme A...et donc distinct de ce dernier ; que les requérants sont dès lors fondés à soutenir que l'administration ne justifie pas par le document qu'elle produit de l'existence d'un rôle complémentaire régulier pour la mise en recouvrement des impositions supplémentaires en litige ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. et Mme A...sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1309147 du 13 avril 2015 du Tribunal administratif de Melun est annulé.

Article 2 : M. et Mme A...sont déchargés des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2008 à 2010 et des majorations correspondantes.

Article 3 : L'Etat versera à M. et Mme A...une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris (pôle fiscal parisien 1).

Délibéré après l'audience du 9 février 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- M. Dalle, président assesseur,

- Mme Notarianni, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 2 mars 2017.

Le rapporteur,

L. NOTARIANNI

Le président,

C. JARDIN

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15PA02728


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA02728
Date de la décision : 02/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-05 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Établissement de l'impôt.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: Mme Laurence NOTARIANNI
Rapporteur public ?: M. BLANC
Avocat(s) : SOCIÉTÉ ELERE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-03-02;15pa02728 ?
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