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01/02/2017 | FRANCE | N°16PA02008

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 01 février 2017, 16PA02008


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du préfet de police du 31 mars 2015 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à défaut de respecter cette obligation dans le délai qui lui a été imparti.

Par un jugement n° 1518420/2-3 du 3 mars 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

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Par une requête enregistrée le 23 juin 2016, M. B..., représenté par Me A...C..., demande à l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du préfet de police du 31 mars 2015 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à défaut de respecter cette obligation dans le délai qui lui a été imparti.

Par un jugement n° 1518420/2-3 du 3 mars 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 23 juin 2016, M. B..., représenté par Me A...C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1518420/2-3 du 3 mars 2016 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté préfectoral du 31 mars 2015 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve de renonciation à la part contributive de l'Etat.

Il soutient que :

- l'arrêté préfectoral contesté n'est pas suffisamment motivé ;

- cet arrêté n'a pas été précédé d'un examen particulier, par l'autorité préfectorale, de sa situation personnelle ;

- le refus de titre de séjour a été pris en méconnaissance des dispositions de l'article

L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- ce refus contrevient aux dispositions de l'article L. 313-14 dudit code et aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'obligation de quitter le territoire est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- cette obligation a été édictée en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale car un retour dans son pays l'exposerait à des traitements dégradants et inhumains.

Par une décision du 13 septembre 2016, le président de la chambre a décidé qu'il n'y avait pas lieu à instruction, en application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 13 mai 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, ensemble le décret du 3 mai 1974 portant publication de la convention ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Appèche a été entendu au cours de l'audience publique ;

1. Considérant que M. B..., après avoir en vain contesté devant le Tribunal administratif de Paris l'arrêté du préfet de police du 31 mars 2015 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à défaut de respecter cette obligation dans le délai qui lui a été imparti, relève appel du jugement n° 1518420/2-3 du 3 mars 2016 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande ;

Sur les moyens dirigés contre l'ensemble des décisions contestées contenues dans l'arrêté préfectoral du 31 mars 2015 :

2. Considérant que l'arrêté contesté expose, de manière suffisamment précise, les circonstances de droit et de fait sur lesquelles s'est fondé le préfet de police pour refuser à M. B...le titre de séjour qu'il demandait en qualité d'étudiant, et pour assortir ce refus d'une obligation de quitter le territoire français ; que le préfet de police, qui indique dans cet arrêté, que M. B...est guinéen et précise au surplus qu'il n'encourrait aucun risque de traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays, a également suffisamment motivé la décision fixant le pays à destination duquel M. B... est susceptible d'être reconduit d'office à défaut de respecter cette obligation dans le délai qui lui a été imparti ; que le moyen tiré du défaut de motivation doit, par suite, être écarté comme non fondé ;

3. Considérant qu'il ressort des termes mêmes de l'arrêté contesté, que le préfet de police, avant de prendre cet arrêté, a procédé à un examen particulier de la situation de M.B... ;

Sur les moyens dirigés contre le refus de titre de séjour :

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention "étudiant". En cas de nécessité liée au déroulement des études [...], l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée et sous réserve d'une entrée régulière en France " ; qu'aux termes de l'article L. 311-7 dudit code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour "compétences et talents" sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois " ; qu'aux termes de l'article R. 313-1 du même code : " L'étranger qui, n'étant pas déjà admis à résider en France, sollicite la délivrance d'une carte de séjour temporaire présente à l'appui de sa demande : / (...) 3° Sauf stipulation contraire d'une convention internationale applicable en France, un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois autre que celui mentionné au 3° de l'article R. 311-3 (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-10 du même code : " Peut être exempté, sur décision du préfet, de l'obligation de présentation du visa de long séjour prescrite au 3° de l'article R. 313-1 : / 1° L'étranger qui suit en France un enseignement ou y fait des études, en cas de nécessité liée au déroulement des études. Sauf cas particulier, l'étranger doit justifier avoir accompli quatre années d'études supérieures et être titulaire d'un diplôme, titre ou certificat au moins équivalent à celui d'un deuxième cycle universitaire ou d'un titre d'ingénieur. Il est tenu compte des motifs pour lesquels le visa de long séjour ne peut être présenté à l'appui de la demande de titre de séjour, du niveau de formation de l'intéressé, ainsi que des conséquences que présenterait un refus de séjour pour la suite de ses études ; 2° L'étranger qui a suivi une scolarité en France depuis au moins l'âge de seize ans et qui y poursuit des études supérieures. A l'appui de sa demande, l'étranger doit justifier du caractère réel et sérieux des études poursuivies " ;

5. Considérant, que M. B...soutient qu'après avoir obtenu une licence d'anglais en Guinée, il s'est inscrit, en 2014, en master 1 de langues, littérature, civilisations étrangères et régionales (LLCER) mention " études anglophones " au sein de l'université Sorbonne nouvelle-Paris III ; que, toutefois, il est constant qu'il ne disposait pas du visa de long séjour prévu par l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et par le 3° de l'article R. 313-1 du même code ; que M. B...n'établit ni même n'allègue qu'il se trouvait, à la date de l'arrêté contesté, dans un des cas où, en vertu des dispositions de l'article R. 313-10 rappelé ci-dessus, le préfet peut exempter un étranger, qui souhaite suivre des études en France, de l'obligation de présentation d'un visa de long séjour ; que, par suite, et dans les circonstances de l'espèce, le préfet de police a pu, sans méconnaitre les dispositions précitées des articles L. 313-7 et R. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui refuser la délivrance d'un titre de séjour au motif qu'il n'était pas titulaire d'un visa de long séjour ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1 - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2 - Il ne peut y avoir ingérence d' une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

7. Considérant que M.B..., qui selon ses déclarations, a quitté son pays en 2011 pour se rendre d'abord en Belgique, où sa demande d'asile a été rejetée, et est entré en France en septembre 2012, était, à la date de l'arrêté contesté, célibataire et âgé de 29 ans ; qu'ayant vécu dans son pays jusqu'à l'âge de 26 ans, il y disposait d'attaches privées et familiales ; que si, depuis son arrivée en France, il a suivi des études universitaires en master 1 de langues, littérature, civilisations étrangères et régionales (LLCER) mention " études anglophones " au sein de l'université Sorbonne nouvelle-Paris III et s'est impliqué dans l'activité d'une association en apportant un soutien scolaire en langue anglaise à des collégiens et lycéens, il ne peut toutefois être regardé comme ayant, à la date de l'arrêté attaqué, tissé en France des liens d'une ancienneté, d'une nature et d'une intensité telles, qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'étudiant, motif pris de l'absence de visa de long séjour, le préfet de police aurait méconnu les stipulations rappelées ci-dessus ;

8. Considérant, enfin, que M. B...a sollicité, par son courrier daté du 1er décembre 2014 reçu par le préfet de police le 30 janvier 2015, un titre de séjour en qualité d'étudiant et non un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'en effet, à supposer que le préfet de police ait été destinataire, antérieurement à l'arrêté contesté, d'un courrier en date du 16 juin 2014 émanant de M. B...et dont l'objet était " demande de secours et de régularisation ", il ne résulte pas des termes de la copie de ce courrier versée au dossier qu'il constituait une demande de titre de séjour présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile susmentionné, mais au contraire qu'il s'agissait d'une simple demande de régularisation à titre de gracieux présentée au préfet de police dans le cadre du pouvoir général dont ce dernier dispose pour régulariser le séjour d'un étranger ne remplissant pourtant pas toutes les conditions requises pour prétendre à l'octroi d'un titre de séjour ; que, dans ces conditions, le préfet de police n'était pas tenu d'examiner si M. B...pouvait bénéficier d'un titre de séjour sur un autre fondement que celui sur lequel était présentée sa demande ; que M. B...ne saurait donc se prévaloir de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de police s'étant borné à examiner sa demande sur le fondement de l'article

L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'en tout état de cause, eu égard aux conditions d'entrée et de séjour en France de M.B..., à sa situation décrite ci-dessus, l'intéressé n'est pas fondé à prétendre qu'il justifiait, à la date de l'arrêté contesté, de circonstances exceptionnelles ou de considérations humanitaires telles que l'autorité préfectorale n'aurait pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, lui refuser la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur les moyens dirigés contre l'obligation de quitter le territoire français :

9. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus, que M. B...n'est pas fondé, pour contester l'obligation de quitter le territoire qui lui est faite, à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé ;

10. Considérant, que pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7 ci-dessus, l'obligation litigieuse, dont la légalité s'apprécie à la date à laquelle elle a été édictée, ne contrevient pas aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur le moyen dirigé contre le pays de destination :

11. Considérant, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ;

12. Considérant que M. B...soutient qu'il serait exposé à des traitements inhumains et dégradants en cas de retour dans son pays en raison de l'engagement de sa famille en faveur de l'Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG) ; que toutefois, et alors d'ailleurs qu'il indique que la demande d'asile qu'il a déposée en Belgique a été rejetée par les autorités belges compétentes, par une décision du commissariat général aux réfugiés et apatrides en 2011 confirmée par le conseil du contentieux des étrangers en 2012, M. B...ne verse pas au dossier de documents qui, eu égard à leur nature et à leur précision, seraient suffisants pour démontrer qu'il encourrait des risques personnels et effectifs pour sa sécurité en cas de retour en Guinée ; qu'ainsi, la décision attaquée, ne méconnait pas les stipulations et dispositions rappelées ci-dessus ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que les conclusions de sa requête tendant à l'annulation du jugement et des décisions préfectorales litigieuses doivent par suite être rejetées ; qu'il en va de même, en conséquence, des conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées sur le fondement des articles L.911-1 et suivants du code de justice administrative et de celles présentées sur le fondement de l'article L 761-1 dudit code et de l'article 37 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B....

Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur et au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 18 janvier 2017, à laquelle siégeaient :

Mme Brotons, président de chambre,

Mme Appèche, président assesseur,

M. Magnard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 1er février 2017.

Le rapporteur,

S. APPECHELe président,

I. BROTONS

Le greffier,

P. LIMMOIS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA02008


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA02008
Date de la décision : 01/02/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Sylvie APPECHE
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : RIMAILHO

Origine de la décision
Date de l'import : 14/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-02-01;16pa02008 ?
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