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01/02/2017 | FRANCE | N°15PA04727

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 01 février 2017, 15PA04727


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Elixens a demandé au Tribunal administratif de Paris :

1°) à titre principal, de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ainsi que des rappels de taxe sur les salaires, ensemble les pénalités y afférentes, auxquels elle a été assujettie au titre des années 2006 et 2007 pour un montant total de 84 500 euros ;

2°) à titre subsidiaire, de prononcer la décharge, pour un montant de 3 844 euros, du rappel de taxe sur les salaires auquel elle a été assuje

ttie au titre de l'année 2007.

Par un jugement n° 1414242/2-2 du 26 octobre 2015, le Tribun...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Elixens a demandé au Tribunal administratif de Paris :

1°) à titre principal, de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ainsi que des rappels de taxe sur les salaires, ensemble les pénalités y afférentes, auxquels elle a été assujettie au titre des années 2006 et 2007 pour un montant total de 84 500 euros ;

2°) à titre subsidiaire, de prononcer la décharge, pour un montant de 3 844 euros, du rappel de taxe sur les salaires auquel elle a été assujettie au titre de l'année 2007.

Par un jugement n° 1414242/2-2 du 26 octobre 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 22 décembre 2015 et 14 avril 2016, la société Elixens, représentée par Me A...B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 26 octobre 2015 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'avis de mise en recouvrement du 25 janvier 2010 est irrégulier aux motifs qu'il indique que l'une des créances est relative à la taxe sur la valeur ajoutée pour la période correspondant aux années 2006 et 2007, laquelle n'a pourtant pas fait l'objet de rappel dans la proposition de rectification du 30 juillet 2009, qu'il mentionne " l'avis de la commission " du

10 novembre 2009 et non " la réponse aux observations du contribuable " du même jour et qu'il méconnaît la doctrine administrative référencée 12 C 122 et n°2 et n°14 ;

- les prestations ayant été rendues par l'établissement français de la société EOS, au sens notamment de l'instruction 5-B-4-77 du 24 juillet 1977, la retenue à la source n'était pas due ;

- le siège social réel de la société EOS étant à Londres, la convention franco britannique est applicable et exclut l'application de la retenue à la source ;

- les modalités de calcul retenues par le service en matière de taxe sur les salaires sont erronées, les dirigeants n'ayant aucune activité dans le domaine financier ;

- la doctrine administrative référencée BOI-TPS-TS-20-30, en tant qu'elle indiquerait qu'un secteur financier ne peut être constitué que sous réserve que celui-ci dispose de moyens propres en personnel et en matériel pour la réalisation des opérations financières, ne fait pas de la loi fiscale une interprétation différente de ce qui précède.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 mars 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par la société Elixens ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 23 novembre 2016, la clôture d'instruction a été fixée au

8 décembre 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention fiscale franco-britannique du 22 mai 1968 modifiée ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Magnard,

- et les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public.

1. Considérant que la SA Elixens, anciennement SA Organsynth, qui exerce une activité de holding animatrice de groupe, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2007 ; qu'elle fait appel du jugement du

26 octobre 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions mises à sa charge à l'issue de ce contrôle ;

Sur la régularité de l'avis de mise en recouvrement :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 256 du livre des procédures fiscales : " Un avis de mise en recouvrement est adressé par le comptable public (...) à tout redevable de sommes, taxes et redevances de toute nature dont le recouvrement lui incombe lorsque le paiement n'a pas été effectué à la date d'exigibilité (...) " ; et qu'en vertu de l'article R. 256-1 du même livre : " L'avis de mise en recouvrement prévu à l'article L. 256 indique pour chaque impôt ou taxe le montant global des droits, des pénalités et des intérêts de retard qui font l'objet de cet avis. / L'avis de mise en recouvrement mentionne également que d'autres intérêts de retard pourront être liquidés après le paiement intégral des droits. / Lorsque l'avis de mise en recouvrement est consécutif à une procédure de rectification, il fait référence à la proposition prévue à l'article L. 57 ou à la notification prévue à l'article L. 76 et, le cas échéant, au document adressé au contribuable l'informant d'une modification des droits, taxes et pénalités résultant des rectifications (...) " ; que les erreurs matérielles affectant l'avis de mise en recouvrement sont sans incidence sur le bien-fondé de l'imposition sauf si, en induisant en erreur le contribuable sur le montant ou l'origine des droits, intérêts de retard et pénalités mis en recouvrement, elles l'ont privé de la possibilité de contester utilement les montants mis en recouvrement ;

3. Considérant que si l'avis de mise en recouvrement du 25 janvier 2010 identifie la créance n°1002710 d'un montant de 41 250 euros comme une créance de taxe sur la valeur ajoutée alors qu'il s'agit d'une retenue à la source, il se réfère à la proposition de rectification du 30 juillet 2009, qui vise à la fois l'article 182 B du code général des impôts et la documentation de base DB 5-B-7124 n°55 du 1er août 2001 relative à la retenue à la source et mentionne précisément les montants des droits rappelés au titre de la retenue à la source des années 2006 et 2007 ; qu'ainsi cette erreur matérielle n'a pu induire en erreur le contribuable sur la nature des impositions mises à sa charge ni le priver de la possibilité de critiquer utilement ces impositions ; qu'il en est de même de l'erreur par laquelle l'avis de mise en recouvrement contesté fait, à tort, référence à " l'avis de la commission " du 10 novembre 2009 et non à " la réponse aux observations du contribuable " du même jour, dès lors que le montant des conséquences financières mentionné dans la proposition de rectification n'a pas été modifié par la suite ; que la doctrine administrative référencée 12C122 et n°2 et n°14 ne peut être utilement invoquée à l'encontre de la procédure d'imposition ; qu'il suit de là que le moyen tiré par la SA Elixens de l'irrégularité de l'avis de mise en recouvrement du 25 janvier 2010 doit être écarté ;

Sur la taxe sur la valeur ajoutée :

4. Considérant qu'aucune imposition n'a été mise à la charge de la société Elixens en matière de taxe sur la valeur ajoutée, les mentions de l'avis de mise en recouvrement faisant référence à cet impôt étant, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, entachées d'une simple erreur matérielle ; que les moyens tendant à la décharge de la taxe sur la valeur ajoutée sont dépourvus d'objet ;

Sur la retenue à la source :

5. Considérant qu'aux termes de l'article 182 B du code général des impôts dans sa rédaction applicable au litige : " I Donnent lieu à l'application d'une retenue à la source lorsqu'ils sont payés par un débiteur qui exerce une activité en France à des personnes ou des sociétés, relevant de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, qui n'ont pas dans ce pays d'installation professionnelle permanente : (...) c. Les sommes payées en rémunération des prestations de toute nature fournies ou utilisées en France. (...) / II Le taux de la retenue est fixé à 33 1/3 %. " ;

6. Considérant en premier lieu qu'il est constant que la société requérante a conclu le

29 décembre 2005 avec la société One Equity Strategy (OES) un contrat en vue duquel cette dernière société s'engageait à fournir des prestations de conseil pour la recherche de partenaires stratégiques ; que les factures établies par la société OES en exécution de ce contrat mentionnaient une adresse à Jersey ; que les règlements ont été effectués sur un compte bancaire ouvert à Jersey ; qu'en se bornant à produire un document de présentation et une copie d'une carte de visite faisant état d'une adresse parisienne, la société requérante ne fournit pas d'éléments permettant d'établir que la société OES disposait en France d'une installation professionnelle permanente ; que le moyen tiré de ce qu'en raison de l'existence d'une telle installation, les dispositions précitées ne seraient pas applicables ne peut, en conséquence, qu'être écarté ; que le passage invoqué de l'instruction 5-B-4-77 du 24 juillet 1977 ne fait pas de la loi fiscale une interprétation différente de ce qui précède et ne peut par suite être utilement invoqué sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

7. Considérant en deuxième lieu qu'il résulte clairement des stipulations de l'article 2-1 de la convention franco-britannique susvisée que cette dernière ne s'applique pas aux résidents de l'île anglo-normande de Jersey ; qu'en se bornant à produire quelques courriers émanant de ou adressés au directeur d'OES, ainsi qu'une copie de carte de visite de ce dernier, mentionnant une adresse à Londres, la société requérante ne produit pas d'éléments permettant de regarder la société OES comme résident du Royaume-Uni au sens des stipulations de l'article 3 de cette convention, en l'absence notamment de tout document établissant que cette société y est assujettie à l'impôt en raison de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue ; qu'elle n'est par suite pas fondée à se prévaloir des stipulations de l'article 14 de la convention fiscale franco-britannique du 22 mai 1968 modifiée aux termes desquelles : " Les revenus qu'un résident d'un Etat contractant tire d'activités indépendantes ne sont imposables que dans cet Etat, à moins que ce résident ne dispose de façon habituelle dans l'autre Etat contractant d'une base fixe pour l'exercice de ses activités. " ;

Sur la taxe sur les salaires :

8. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 231 du code général des impôts :

" 1. Les sommes payées à titre de rémunérations sont soumises à une taxe sur les salaires égale à 4,25 % de leur montant, évalué selon les règles prévues aux chapitres Ier et II du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale (...), et à la charge des personnes ou organismes, (...), qui paient ces rémunérations lorsqu'ils ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l'ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d'affaires au titre de l'année civile précédant celle du paiement desdites rémunérations. L'assiette de la taxe due par ces personnes ou organismes est constituée par une partie des rémunérations versées, déterminée en appliquant à l'ensemble de ces rémunérations le rapport existant, au titre de cette même année, entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total. Le chiffre d'affaires qui n'a pas été assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée en totalité ou sur 90 p. 100 au moins de son montant, ainsi que le chiffre d'affaires total mentionné au dénominateur du rapport s'entendent du total des recettes et autres produits, y compris ceux correspondant à des opérations qui n'entrent pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée. Le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée mentionné au numérateur du rapport s'entend du total des recettes et autres produits qui n'ont pas ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée. (...) " ; que la taxe sur les salaires des personnels concurremment affectés à plusieurs secteurs doit être établie en appliquant à leurs rémunérations le rapport existant pour l'entreprise dans son ensemble entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total ;

9. Considérant, d'autre part, que les fonctions de président directeur général d'une société anonyme confèrent à leur titulaire les pouvoirs les plus étendus dans la direction de la société ; que, s'agissant d'une société holding, ces pouvoirs s'étendent en principe au secteur financier, même si le suivi des activités est sous-traité à des tiers ou confié à des salariés spécialement affectés à ce secteur et si le nombre des opérations relevant de ce secteur est très faible ; que, toutefois, s'il résulte des éléments produits par l'entreprise que certains de ses dirigeants n'ont pas d'attribution dans le secteur financier, notamment lorsque, compte tenu de l'organisation adoptée, l'un d'entre eux est dépourvu de tout contrôle et responsabilité en la matière, la rémunération de ce dirigeant doit être regardée comme relevant entièrement des secteurs passibles de la taxe sur la valeur ajoutée et, par suite, comme placée hors du champ de la taxe sur les salaires ;

10. Considérant, en premier lieu, qu'il est constant que la société Elixens était imposable à la taxe sur la valeur ajoutée sur moins de 90 % de son chiffre d'affaires ; qu'elle était donc imposable de ce seul fait à la taxe sur les salaires ; que les moyens tirés de ce qu'elle n'avait pas constitué de secteurs distincts d'activité en matière de taxe sur la valeur ajoutée, de ce qu'elle a perçu des dividendes qui n'entraient pas dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée, de ce qu'elle ne saurait être regardée comme ayant un " secteur financier " et de ce que les placements de trésorerie avaient un caractère accessoire sont par suite à cet égard inopérants ;

11. Considérant, en deuxième lieu, que la SA Elixens n'apporte pas d'élément de nature à établir que son président et son directeur financier auraient été dessaisis de leur pouvoir de contrôle dans le secteur financier en se contentant d'affirmer que ce secteur ne nécessitait pas de travail particulier et que la perception des dividendes distribués s'effectuait de manière purement passive, notamment lors de l'examen et de l'approbation des comptes de ses filiales au cours de l'assemblée générale ; que l'administration fiscale a ainsi assujetti à bon droit les rémunérations de ces dirigeants à la taxe sur les salaires ;

12. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction que l'administration a appliqué, pour la détermination de la taxe sur les salaires due au titre de l'année 2007, aux rémunérations susmentionnées le rapport existant durant l'année 2006 entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée, soit les dividendes, produits de valeurs mobilières et gains de change, pour un montant total de 2 051 517 euros et le chiffre d'affaires total pour un montant de 5 849 868 euros, constitué de la somme du chiffre d'affaires soumis à la taxe sur la valeur ajoutée et du montant susmentionné de 2 051 517 euros non soumis à cette taxe ; qu'en se prévalant d'un chiffre d'affaires total de 5 150 168 euros et d'un montant de produit financier de 2 058 908 euros, la société Elixens ne développe aucune argumentation susceptible de réduire le montant du rapport appliqué auxdites rémunérations ; qu'en invoquant les règles de la comptabilité d'engagement, et en l'absence de toute précision chiffrée permettant d'en apprécier le bien-fondé et la portée, la société Elixens ne conteste pas utilement le calcul du service ;

13. Considérant enfin que la doctrine administrative référencée BOI-TPS-TS-20-30, en tant qu'elle indiquerait qu'un secteur financier ne peut être constitué que sous réserve que celui-ci dispose de moyens propres en personnel et en matériel pour la réalisation des opérations financières, ne fait pas de la loi fiscale une interprétation différente de ce qui précède ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Elixens n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que la requérante demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Elixens est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Elixens et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal d'Ile-de-France.

Délibéré après l'audience du 18 janvier 2017, à laquelle siégeaient :

Mme Brotons, président de chambre,

Mme Appèche, président assesseur,

M. Magnard, premier conseiller.

Lu en audience publique le 1er février 2017.

Le rapporteur,

F. MAGNARDLe président,

I. BROTONS

Le greffier,

P. LIMMOIS

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA04727


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA04727
Date de la décision : 01/02/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : SCP POMMIER, COHEN et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 14/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-02-01;15pa04727 ?
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