Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Melun dans l'instance n° 1403730 d'annuler la décision du 23 décembre 2013 par laquelle le procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Créteil a refusé de renouveler son habilitation d'agent de sûreté aéroportuaire et d'enjoindre au procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Créteil de lui délivrer l'habilitation sollicitée et dans l'instance n° 1500499, d'annuler la décision du 10 décembre 2014 par laquelle le préfet du Val-de-Marne lui a retiré son habilitation à accéder aux zones réservées de l'aéroport d'Orly, d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer une habilitation permettant l'accès aux zones réservées de l'aéroport d'Orly dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de ré-instruire son dossier sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n°s 1403730-1500499 du 2 octobre 2015 le tribunal administratif a annulé d'une part la décision du 23 décembre 2013 par laquelle le procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Créteil a refusé de renouveler l'agrément d'agent de sûreté aéroportuaire dont M. A...bénéficiait et d'autre part la décision du 10 décembre 2014 par laquelle le préfet du Val-de-Marne lui a retiré l'habilitation nécessaire pour accéder en zone réservée de l'aéroport d'Orly et a enjoint au procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Créteil de délivrer à M.A..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, un agrément en qualité d'agent de sûreté aéroportuaire prévu par les dispositions de l'article L. 6342-4 du code des transports.
Procédure devant la Cour :
Par un recours et un mémoire enregistrés les 2 décembre 2015 et 23 mai 2016, le garde des Sceaux, ministre de la justice demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Melun ;
2°) de rejeter la requête de M.A....
Il soutient que le jugement attaqué qui a considéré que l'administration n'établissait pas que les faits reprochés à l'intéressé seraient incompatibles avec l'exercice d'une activité dans les zones réservées de l'aéroport est entaché d'erreur manifeste d'appréciation, compte tenu de ce que le vol litigieux a été commis sur le lieu de travail de M. A...et dans le cadre de l'exercice de ses fonctions.
Par un mémoire en défense enregistré le 7 avril 2016 M. A...demande à la Cour :
1°) de rejeter le recours du garde des Sceaux, ministre de la justice ;
2°) d'enjoindre au procureur de Créteil de lui accorder un agrément ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 8 avril 2016, la clôture de l'instruction a été fixée au 29 avril 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'aviation civile ;
- le code des transports ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
- l'arrêté du 22 décembre 1997 relatif au dossier d'agrément des agents appelés à participer aux visites de sûreté sur les aérodromes ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Labetoulle,
- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,
- et les observations de MeB..., pour M.A....
1. Considérant que M.A..., employé en qualité d'agent de sécurité opérateur de sécurité aéroportuaire par la société ICTS a été habilité, par une décision du 3 février 2011, à accéder aux zones de sûreté à accès réglementé de l'aéroport d'Orly et a également été mis en possession, le 26 mai 2008, de l'agrément du procureur de la république lui permettant d'exercer les fonctions d'agent de sûreté aéroportuaire ; que le 25 février 2013 il a été convoqué au Tribunal de grande instance de Créteil pour comparaitre sur reconnaissance de culpabilité et a été jugé pour le vol, le 2 avril 2012 sur son lieu de travail, de deux flacons de gel douche, et condamné pour ces faits au paiement d'une amende de 300 euros, dont 200 avec sursis ; que, saisi par l'employeur de M. A... d'une demande de renouvellement de l'agrément dont il bénéficiait et qui arrivait à expiration en mars 2013, le procureur de la République a avisé l'intéressé par lettre du 9 juillet 2013 que sa condamnation était susceptible de faire obstacle au renouvellement de son agrément ; que l'intéressé a fait valoir ses observations mais par décision du 23 décembre 2013 le procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Créteil a refusé de faire droit à cette demande de renouvellement d'agrément ; que par une décision du 10 décembre 2014, le préfet du Val-de-Marne a ensuite retiré à M. A...son habilitation ; que saisi par M. A...le juge des référés du Tribunal administratif de Melun a prononcé la suspension de ces deux décisions, qui ont ensuite été annulées par jugement de ce tribunal du 2 octobre 2015 dont le garde des Sceaux interjette appel en tant qu'il a annulé le refus de renouvellement d'agrément du procureur de la république en date du 23 décembre 2013 ;
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 6342-4 du code des transports : " Les opérations d'inspection-filtrage des personnes, des objets qu'elles transportent et des bagages ainsi que les opérations d'inspection des véhicules peuvent être réalisées, sous le contrôle des officiers de police judiciaire et des agents des douanes, par des agents de nationalité française ou ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, désignés par les entreprises ou organismes mentionnés à l'article L. 6341-2 ou les entreprises qui leur sont liées par contrat. /Ces agents doivent avoir été préalablement agréés par le représentant de l'Etat dans le département et le procureur de la République. Ils ne procèdent à la fouille des bagages à main et des autres objets transportés qu'avec le consentement de leur propriétaire et à des palpations de sûreté qu'avec le consentement de la personne. La palpation de sûreté est faite par une personne du même sexe que la personne qui en fait l'objet. (....)/ IV. - Les agréments prévus au II sont précédés d'une enquête administrative donnant lieu, le cas échéant, à consultation du bulletin n° 2 du casier judiciaire et des traitements automatisés de données à caractère personnel gérés par les services de police et de gendarmerie nationales relevant des dispositions de l'article 26 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, à l'exception des fichiers d'identification " ; qu'aux termes de l'article R. 213-5 du code de l'aviation civile : " III.-L'agrément visé au II de l'article L. 6342-4 du code des transports est délivré, refusé et retiré par le préfet compétent sur l'aérodrome dans lequel l'agent accomplit ses fonctions et par le procureur de la République près le tribunal de grande instance dans le ressort duquel est situé cet aérodrome " ;
3. Considérant que pour annuler la décision du procureur de la République, les premiers juges ont considéré qu'eu égard à la nature et au caractère isolé des faits reprochés, le procureur de la République avait entaché sa décision d'erreur d'appréciation ; que le ministre soutient en appel que les faits de vol justifiaient le refus de renouvellement de l'agrément dont M. A...bénéficiait ; que M. A...fait valoir dans ses écritures devant la Cour qu'il aurait simplement ramassé les objets en cause sans savoir de quel bagage ils étaient tombés, qu'il les auraient mis de côté avec l'intention de les déposer ensuite au service des objets trouvés, oubliant seulement ensuite d'effectuer cette remise; qu'il n'aurait jamais eu l'intention de les dérober et n'aurait initialement admis le contraire que parce qu'il était " mal conseillé " ; que toutefois, M. A...a été condamné par jugement définitif du 25 février 2013 du Tribunal de grande instance de Créteil, à une amende de 300 euros dont 200 euros avec sursis pour des faits de vol de deux flacons de gel douche, commis dans l'enceinte de l'aéroport d'Orly où il exerce ses fonctions ; que la matérialité de ces faits est donc établie ; que si M. A...fait état de la faible valeur des objets ainsi dérobés et du caractère isolé de ces faits, ceux-ci ont été commis sur le lieu de travail de l'intéressé, dans l'exercice de ses fonctions, et en avril 2012 soit un an et demi seulement avant l'intervention de la décision de refus contestée ; que dans ces conditions, le garde des Sceaux, ministre de la justice est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif a annulé la décision litigieuse au motif qu'elle était entachée d'une erreur d'appréciation ;
4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés en première instance par M. A... ;
5. Considérant que la décision attaquée vise la demande d'agrément déposée par la société ICTS pour M.A..., ainsi que l'ensemble des textes applicables et retient que : " le comportement et les agissements de cet (te) dernier(e) ne présentent pas les garanties requises au regard de la sûreté de l'Etat, de la sécurité publique, de la sécurité des personnes, ou de l'ordre public, et s'avèrent incompatibles avec l'exercice d'une activité dans les zones réservées des aérodromes " avant de rejeter cette demande ; que cette décision a été précédée d'un courrier en date du 9 juillet 2013 adressé à M. A...par lequel le procureur de la République lui indiquait que l'enquête diligentée dans le cadre de la demande de renouvellement de son agrément " a fait apparaitre que vous avez fait l'objet le 1er avril 2012 d'une procédure pénale pour faits de vols commis dans un lieu d'accès à un moyen de transport collectif de voyageurs, en l'espèce au sein de l'aéroport d'Orly où vous étiez employé par la société ICTS . Compte tenu de la nature de ces faits et du contexte dans lequel ils ont été commis j'envisage de ne pas vous délivrer l'agrément sollicité " ; que dès lors M.A..., qui avait ainsi été mis à même de connaître les motifs de ce refus d'agrément, n'est pas fondé à soutenir que la décision du 23 décembre 2013, qui fait suite à la lettre du 9 juillet 2013, serait insuffisamment motivée ;
6. Considérant que pour les motifs susénoncés au point 3, M. A...n'est pas non plus fondé à soutenir que la décision contestée serait entachée d'erreur d'appréciation ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le garde des Sceaux, ministre de la justice est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé la décision du 23 décembre 2013 par laquelle le procureur de la République a rejeté la demande de renouvellement de l'agrément d'agent de sûreté aéroportuaire dont M. A... bénéficiait et a enjoint au procureur de la République de lui délivrer un tel agrément ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. A...demande sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : Les articles 1 et 3 du jugement n°s 1403730-1500499 du Tribunal administratif de Melun du 2 octobre 2015 sont annulés.
Article 2 : Les conclusions de M. A...présentées devant le tribunal administratif et tendant d'une part à l'annulation de la décision du 23 décembre 2013 par laquelle le procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Créteil a refusé de renouveler son agrément d'agent de sûreté aéroportuaire, et d'autre part à ce qu'il soit enjoint au procureur de la République de lui délivrer un tel agrément et ses conclusions présentées en appel devant la Cour sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au garde des Sceaux, ministre de la justice.
Délibéré après l'audience du 10 janvier 2017, à laquelle siégeaient :
- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
- M. Niollet, président assesseur,
- Mme Labetoulle, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 24 janvier 2017.
Le rapporteur,
M-I. LABETOULLE
Le président,
O. FUCHS TAUGOURDEAU
Le greffier,
A-L. CHICHKOVSKY PASSUELLO
La République mande et ordonne au garde des Sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
3
N° 15PA04367