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01/12/2016 | FRANCE | N°16PA00223

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 01 décembre 2016, 16PA00223


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 24 juin 2015 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande tendant au renouvellement de son titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1512093/2-3 du 17 décembre 2015, le Tribunal administratif de Paris a d'une part, annulé cet arrêté, et d'autre part, enjoint au préfet de police d'accorder à M. A...un titre de séjour portant la mention "

vie privée et familiale ".

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 24 juin 2015 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande tendant au renouvellement de son titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1512093/2-3 du 17 décembre 2015, le Tribunal administratif de Paris a d'une part, annulé cet arrêté, et d'autre part, enjoint au préfet de police d'accorder à M. A...un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ".

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 19 janvier 2016, le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1512093/2-3 du 17 décembre 2015 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris ;

Il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont annulé son arrêté, dès lors, qu'il n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. A...;

- s'agissant des autres moyens soulevés par M.A..., il s'en rapporte à ses écritures de première instance.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 mars 2016, M.A..., représenté par Me Meriau, avocat, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

S'agissant de la décision de refus de séjour :

- le préfet de police aurait dû saisir la commission de titre de séjour avant le rejet de sa demande de titre de séjour ;

- il a méconnu les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'il est arrivé en France à l'âge de 16 ans et vit avec son père, résident de longue date ;

- il a méconnu les stipulations du point 4 de l'article 42 de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006 modifié, dès lors qu'il est titulaire de plusieurs diplômes obtenus en France et a des compétences pour travailler en qualité d'électricien ;

S'agissant de la décision de la décision portant obligation de quitter le territoire :

- le préfet de police a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

S'agissant du délai de départ volontaire de trente jours :

- le préfet de police, en fixant un délai de départ volontaire à trente jours, sans motivation spécifique, n'a pas procédé à un réel examen de sa situation personnelle ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par ordonnance du 25 mars 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 22 avril 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006 relatif à la gestion concertée des flux migratoires entre la France et le Sénégal, modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Stoltz-Valette,

- et les observations de Me Meriau, avocat de M.A....

1. Considérant que, M.A..., ressortissant sénégalais né en 1991, entré en France en 2007, a sollicité le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que par arrêté du 24 juin 2015, le préfet de police a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que le préfet de police relève appel du jugement n° 1512093/2-3 du 17 décembre 2015, par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté susmentionné ;

2. Considérant que pour juger que l'arrêté attaqué était entaché d'erreur manifeste d'appréciation le tribunal a notamment retenu que M.A..., confié à l'aide sociale à l'enfance en 2008 comme mineur isolé étranger, a obtenu en 2013, un baccalauréat professionnel, spécialité " électrotechnique énergie équipements communicants " et qu'il présente une promesse d'embauche en qualité d'électricien en date du 22 juin 2015 ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressé aurait poursuivi ses études ou qu'il se serait inséré sur le marché du travail après l'obtention de son dernier diplôme ; que, par ailleurs, il est célibataire, sans charge de famille et n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident sa mère, sa fratrie et où il a vécu jusqu'à l'âge de seize ans ; que dans ces conditions, et alors même que son père est titulaire d'une carte de résident, le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a jugé que l'arrêté litigieux était entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

3. Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M.A..., tant devant le Tribunal administratif de Paris que devant elle ;

En ce qui concerne la décision de refus de séjour :

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes des articles L. 312-1 et L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour (...) La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12 (...) " ; que M.A..., qui n'établit pas être au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour en application des dispositions des articles susmentionnés du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne saurait utilement soutenir que le refus de titre de séjour qui lui a été opposé serait illégal faute d'avoir été précédé de la consultation de cette commission ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'administration n'aurait pas procédé à un examen complet de sa situation au regard des dispositions législatives et réglementaires applicables et le préfet de police n'était pas obligé de faire usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation ; qu'ainsi, le moyen tiré du défaut d'examen de l'arrêté contesté manque en fait ;

6. Considérant, en troisième lieu, que le préfet de police n'est pas tenu d'examiner d'office si l'intéressé pouvait prétendre à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions relatives à l'admission exceptionnelle ; que, par conséquent, M.A..., qui n'établit ni même n'allègue avoir présenté une demande de délivrance d'un titre de séjour sur ce fondement, ne peut utilement soutenir qu'il remplit les conditions du paragraphe 42 de l'article 4 de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006, dans sa rédaction issue du point 31 de l'article 3 de l'avenant signé le 25 février 2008, pour pouvoir prétendre à la délivrance d'un tel titre de séjour : qu'il ne peut non plus invoquer la circulaire ministérielle du 28 novembre 2012, laquelle, dépourvue de valeur réglementaire, ne fixe pas de lignes directrices mais contient de simples orientations générales ;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

8. Considérant que s'il ressort des pièces du dossier que M. A...établit résider habituellement en France depuis 2007 et y avoir suivi des études, il est constant qu'il est célibataire, sans charge de famille en France et qu'il n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où résident sa mère et sa fratrie et où il a vécu jusqu'à l'âge de seize ans ; que, par suite, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit de M. A...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'ainsi, cet arrêté n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

9. Considérant, en premier lieu, que les moyens dirigés contre la décision portant refus de titre de séjour ayant été écartés, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée par M. A...à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écartée par voie de conséquence ;

10. Considérant, en second lieu, que pour les mêmes motifs que ceux exposés au point ci-dessus, il y a lieu d'écarter les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant dont serait entachée la décision contestée ;

En ce qui concerne la décision lui accordant un délai de trente jours pour quitter volontairement le territoire français :

11. Considérant, en premier lieu, que les moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ayant été écartés, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée par M. A...à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant un délai de trente jours pour quitter le territoire français ne peut qu'être écartée par voie de conséquence ;

12. Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté contesté, qui vise les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne que M. A...ne remplit pas les conditions des dispositions précitées ; qu'il n'atteste pas de l'intensité de la vie privée et familiale sur le territoire français, qu'aucune atteinte n'est portée aux droits de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale dès lors qu'il est célibataire et sans charges de famille, qu'il n'atteste pas être dénué de toute attache familiale dans son pays d'origine, où réside sa mère, et qu'il doit quitter le territoire français dans un délai de trente jours ; qu'ainsi, la décision portant obligation de quitter le territoire, en tant qu'elle prévoit qu'un délai de trente jours est laissé à M. A...pour quitter le territoire, doit être regardée comme comportant l'ensemble des considérations de fait et de droit sur lesquelles elle se fonde ; que par suite, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de l'insuffisance de motivation ;

13. Considérant, en troisième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux exposés précédemment, la décision contestée n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur la situation personnelle de M.A... ;

14. Considérant, qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 24 juin 2015 et à demander l'annulation de ce jugement ; que la demande de M. A...présentée devant le Tribunal administratif de Paris doit être rejetée ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme de 1 300 euros que M. A...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1512093/2-3 du 17 décembre 2015 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris ainsi que ses conclusions présentées en appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B...A....

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 17 novembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Dalle, président,

- Mme Notarianni, premier conseiller,

- Mme Stoltz-Valette, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 1er décembre 2016.

Le rapporteur,

A. STOLTZ-VALETTELe président,

D. DALLE

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA00223


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA00223
Date de la décision : 01/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. DALLE
Rapporteur ?: Mme Alexandra STOLTZ-VALETTE
Rapporteur public ?: M. BLANC
Avocat(s) : MERIAU

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-12-01;16pa00223 ?
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