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18/11/2016 | FRANCE | N°14PA04703

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 18 novembre 2016, 14PA04703


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Maxlinear Asia Limited a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer en sa faveur le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée pour l'année 2012.

Par un jugement n° 1313649 du 23 septembre 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 21 novembre 2014 et le

21 mai 2015, la Société Maxlinear Asia Limited, représentée par le Cabinet

Taylor Wessing , demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1313649 du 23 septembre 2014 du Trib...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Maxlinear Asia Limited a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer en sa faveur le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée pour l'année 2012.

Par un jugement n° 1313649 du 23 septembre 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 21 novembre 2014 et le

21 mai 2015, la Société Maxlinear Asia Limited, représentée par le Cabinet Taylor Wessing , demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1313649 du 23 septembre 2014 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer le remboursement en sa faveur du crédit de taxe sur la valeur ajoutée pour l'année 2012 d'un montant de 11 920 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'administration fiscale une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens.

Elle soutient que :

à titre principal,

- elle a la qualité d'assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée en tant qu'entreprise nouvellement créée, elle a déclaré son intention de réaliser des opérations ouvrant droit à déduction qui est suffisamment étayée par ailleurs par des éléments objectifs ; elle justifie des factures concernant sa demande de remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée pour un montant total de 11 920 euros qui font apparaître que ces dépenses sont manifestement liées à l'exploitation ;

- l'absence de réalisation d'opérations ouvrant droit à déduction ne remet pas en cause sont droit à déduction ; la qualité d'assujetti, et partant, le droit à déduction ne sont aucunement subordonnés à la réalisation effective et préalable de recettes taxables, ni à une reconnaissance formelle de la qualité d'assujetti par l'administration fiscale ;

à titre subsidiaire,

- elle exerce une activité économique en toute indépendance ; les transactions internes à une société entrent dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée, comme l'a retenu la Cour de Justice de l'Union européenne ; elle justifie du contrat de services conclu avec la société mère en date du 1er juin 2011 pour une durée d'un an renouvelable par tacite reconduction et possède dès lors la qualité d'assujetti ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 mars 2015 le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la qualité d'assujetti est une condition indispensable à l'exercice du droit à déduction et il appartient au contribuable qui demande la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée d'établir qu'il remplit les critères pour être considéré comme assujetti ;

- la requérante n'a pas produit d'élément de nature à prouver la sincérité de son intention d'effectuer des opérations ouvrant droit à déduction, les factures de matériel fournies ne permettant pas d'établir la nature des opérations qu'elle envisageait ni a fortiori le caractère imposable de celles-ci ni aucun élément relatif à l'acquisition des moyens d'exploitation propres à la réalisation de projets, à l'embauche de salariés, à la réalisation d'étude de marché, à des dépenses de publicité ;

- la requérante n'a déclaré comme seules opérations réalisées que des opérations non imposables qui ne génèrent pas de droit à taxe déductible.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la réclamation préalable ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mosser, président assesseur,

- et les conclusions de M. Rousset, rapporteur public.

1. Considérant que la société Maxlinear Asia Limited, succursale de la société Maxlinear Asia Limited de droit malaisien située en Malaisie et membre d'un groupe fournissant du matériel électronique, a été immatriculée le 29 juin 2011 au registre du commerce et des sociétés ; qu'elle a déposé le

13 mai 2013 une demande de remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée au titre de l'année 2012 pour un montant de 11 920 euros qui a été rejetée par l'administrations fiscale par une décision du 24 juillet 2013 ; qu'elle relève appel du jugement du Tribunal administratif de Paris du 23 septembre 2014 qui a rejeté sa requête en remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 256 du code des impôts : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel(...) " ; qu'aux termes de l'article 256 A du même code : " Sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée les personnes qui effectuent de manière indépendante une des activités économiques mentionnées au cinquième alinéa, quels que soient le statut juridique de ces personnes, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de leur intervention (...) Les activités économiques visées au premier alinéa se définissent comme toutes les activités de producteur, de commerçant ou de prestataire de services, y compris les activités extractives agricoles ou celles des professions libérales ou assimilées (...) " ; qu'aux termes du paragraphe 2 de l'article 17 de la sixième directive 77/388/CEE du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires : " Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de ses opérations taxées, l'assujetti est autorisé à déduire de la taxe dont il est redevable : / a ) la taxe sur la valeur ajoutée due ou acquittée pour les biens qui lui sont ou lui seront livrés et pour les services qui lui sont ou lui seront rendus par un autre assujetti (...) " ; que ces dispositions ont été transposées en France par le premier alinéa de l'article 271 du code général des impôts, aux termes duquel : " La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération " ;

3. Considérant que, dans son arrêt du 23 mars 2006, FCE Bank (aff. C-210/04), la Cour de justice des communautés européenne a notamment dit pour droit que les articles 2, paragraphe 1, et 9, paragraphe 1, de la sixième directive, repris respectivement à l'article 2, paragraphe 1, points a ) et c ) et à l'article 43 de la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 - dont les articles 256 et 256 A du code général des impôts assurent la transposition - doivent être interprétés en ce sens que, dans la mesure où il n'exerce pas une activité économique indépendante, un établissement stable, qui n'est pas une entité juridique distincte de la société dont il relève, établi dans un autre Etat et auquel la société fournit des prestations de services, ne doit pas être considéré comme un assujetti en raison des coûts qui lui sont imputés au titre desdites prestations ;

4. Considérant, d'une part, que le montant de 85 367 euros figurant sur la déclaration " TVA CA12 " de la succursale de la société requérante au titre du chiffre d'affaires non imposable, correspond à la facturation de services liant cette succursale à la société mère ; qu'aucun autre chiffre d'affaires imposable n'a été déclaré ; qu'il résulte de l'instruction que l'article 2.3 du contrat relatif aux relations entre les parties prévoit que le représentant agit à titre de contractant indépendant dans ses relations avec la société mère ; que, toutefois, l'article 2.2 relatif aux limites de la mission du représentant prévoit que le représentant ne dispose ni des pouvoirs, ni de l'autorité de vendre des produits, conclure des contrats ou accords opposables portant sur les produits ou accepter ou remplir des commandes de produits ; que l'article 5.1 du contrat prévoit que la rémunération du représentant en contrepartie des services accomplis consiste en un pourcentage des revenus générés ; que l'article 5.4 du contrat relatif au remboursement des frais, précise que la société remboursera " toutes les taxes non recouvrables nationales, locales sur la valeur ajoutée, les biens et services, les taxes de consommation et toutes les autres taxes à l'exclusion des impôts sur le revenu net du représentant payées par le représentant dans le cadre de l'exécution des services au titre du contrat " ; qu'un certain nombre de dispositions du contrat sont relatives aux droits de propriété intellectuelle dont la société mère conserve la propriété ; qu'ainsi, la succursale de la société, dépourvue de personnalité juridique et ne constituant pas, par suite, une entité juridique distincte ne peut être regardée comme autonome par rapport à son siège, ni n'exerce une activité économique indépendante ; que, par suite, les sommes versées par la société mère en rémunération des prestations de service que lui procure sa succursale ne constituent pas des sommes versées par un tiers en contrepartie d'un service ; que le fait générateur faisant défaut, les produits issus des activités de la succursale, conduites au profit du siège, n'ont donc pas le caractère de recettes entrant dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée tel qu'il est défini à l'article 256 A du code général des impôts et qu'elles n'ouvrent ainsi pas droit à déduction conformément aux dispositions de l'article 271 du même code ;

5. Considérant que, d'autre part, la société requérante, qui n'a réalisé aucun chiffre d'affaires en France sur la période en litige, soutient qu'en tant qu'entreprise nouvellement créée ayant déclaré son intention de réaliser des opérations ouvrant droit à déduction, la succursale bénéficie de la qualité d'assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée, que le fait de ne pas avoir effectué d'opérations ouvrant droit à déduction pour des raisons indépendantes de sa volonté ne saurait justifier la remise en cause rétroactive de sa qualité d'assujettie et que c'est à bon droit qu'elle a demandé le

2 mai 2013 le remboursement de la taxe acquittée au cours de l'année 2012 ; que si la reconnaissance de la qualité d'assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée naît dès la présentation d'éléments objectifs confirmant l'intention de commencer l'exercice d'une activité donnant lieu à des opérations taxables et si l'administration fiscale doit prendre en considération l'intention alors déclarée de l'entreprise, encore faut-il toutefois que cette activité puisse être exercée en toute indépendance ; qu'il résulte de l'instruction que la société Maxlinear Asia Limited s'est établie en France sous la forme d'une succursale, dotée d'un représentant légal ; qu'elle a procédé à cette fin à son immatriculation au registre du commerce et des sociétés auprès du greffe du tribunal de commerce de Paris à la date du 29 juin 2011 ; que cette démarche constitue une présomption de sincérité de l'intention de réaliser des opérations ouvrant droit à déduction ; que, toutefois, la succursale n'a aucune autonomie juridique et conclut toutes ses ventes au nom de la maison mère ; que les contrats étant signés au nom de la société mère, la succursale n'assume pas le risque économique découlant de son activité et n'exerce par suite aucune activité économique indépendante, alors même qu'elle doit disposer d'équipement, de personnel et de l'expertise nécessaire afin de commercialiser des produits et d'accomplir diverses prestations ; qu'il n'est pas établi, ni même allégué que la succursale serait membre d'un groupement de personnes pouvant être considérées comme un seul assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, ce qui ne permet pas, contrairement à ce que soutient la société requérante, de retenir que les prestations de service fournies par l'établissement principal établi dans un pays tiers à sa succursale établie dans un Etat membre, rendraient la succursale de la société requérante redevable de la taxe sur la valeur ajoutée exigible ; que, par suite, la société requérante et sa succursale, qui a en outre pour objet le développement des activités de Maxlinear en Europe, ne peuvent pas utilement se prévaloir des règles applicables aux entreprises nouvellement créées qui auraient déclaré leur intention de réaliser des opérations ouvrant droit à déduction, ni des règles relatives aux entreprises qui, n'ayant pas concrétisé leur intention de réaliser des opérations soumises à la taxe sur la valeur ajoutée, ne perdent pas rétroactivement leur qualité d'assujetti, pour soutenir que la succursale est assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée et par suite, qu'elle serait en droit de déduire la taxe sur la valeur ajoutée en litige ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que l'administration fiscale a retenu que la succursale de la société mère Maxlinear Asia Limited n'avait pas la qualité d'assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée pour refuser le droit à déduction de la taxe à la valeur ajoutée qu'elle avait acquittée au titre de l'année 2012 ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Maxlinear Asia Limited n'est pas fondée à se plaindre, que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; qu'il en est de même, en tout état de cause, de ses conclusions relatives aux dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Maxlinear Asia Limited est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Maxlinear Asia Limited et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l'audience du 4 novembre 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Driencourt, président de chambre,

- Mme Mosser, président assesseur,

- M. Boissy, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 18 novembre 2016.

Le rapporteur,

G. MOSSERLe président,

L. DRIENCOURT Le greffier,

F. DUBUY

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 14PA04703


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA04703
Date de la décision : 18/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-01 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Personnes et opérations taxables.


Composition du Tribunal
Président : Mme DRIENCOURT
Rapporteur ?: Mme Geneviève MOSSER
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : CABINET TAYLOR WESSING

Origine de la décision
Date de l'import : 17/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-11-18;14pa04703 ?
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