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19/10/2016 | FRANCE | N°15PA04496

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 19 octobre 2016, 15PA04496


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité (SARL) Procton Labs a demandé au Tribunal administratif de Paris le remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée dont elle s'estime titulaire au titre de la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2013.

Par un jugement n° 1424122/2-2 du 12 octobre 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement le 12 décembre 2015 et le

21 mai 2016

, la société Procton Labs, représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité (SARL) Procton Labs a demandé au Tribunal administratif de Paris le remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée dont elle s'estime titulaire au titre de la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2013.

Par un jugement n° 1424122/2-2 du 12 octobre 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement le 12 décembre 2015 et le

21 mai 2016, la société Procton Labs, représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1424122/2-2 du 12 octobre 2015 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer le remboursement sollicité ;

3°) d'enjoindre au directeur régional des finances publiques de réexaminer sa situation dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 300 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

5°) de condamner l'Etat aux entiers dépens.

Elle soutient que :

- la motivation du jugement est insuffisante au regard des exigences du droit à un procès équitable protégé par l'article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le jugement méconnaît l'article 6 §3 de la dite convention ;

- la procédure de vérification de sa comptabilité repose sur des expertises irrégulières ;

- les travaux de recherche menés par WZ Consulting, sont bien réels comme l'atteste le rapport d'expert qu'elle produit ;

- c'est à tort que l'administration a remis en cause la réalité des prestations et la déductibilité de la taxe facturée ;

- l'avis rendu par un expert désigné par le ministère de la recherche, sur l'éligibilité de ses recherches au crédit d'impôt pour l'année 2011 est intervenu en violation de l'article 19-1 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Par un mémoire en défense enregistré le 4 avril 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par une ordonnance du 23 mai 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 23 juin 2016, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Appèche

- les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public,

- et les observations présentées par le gérant de la société.

Connaissance prise de la note en délibéré produite à l'audience, complétée les 6 et

17 octobre 2016, par la société requérante.

1. Considérant que la SARL Procton Labs, société spécialisée dans la recherche en systèmes d'information et en robotique, a décidé d'inscrire, le 20 décembre 2013, au crédit du compte courant d'associé de M. W.Z., qui est l'associé majoritaire de cette société, une somme de 149 810 euros correspondant au paiement d'une partie des prestations qui auraient été réalisées par le titulaire du compte, aux mois d'avril, mai et juin 2011 et facturées par l'entreprise de M. W.Z, sous l'enseigne WZ Consulting ; que, l'administration fiscale ayant refusé d'admettre le caractère déductible de la taxe correspondante, la société requérante a, en vain, demandé au Tribunal administratif de Paris de lui accorder le remboursement du crédit de taxe de 7 810 euros auquel elle estimait avoir droit pour la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2013 ; qu'elle relève appel du jugement de ce tribunal rejetant sa demande ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que le jugement attaqué, qui répond précisément à chacun des moyens invoqués devant le tribunal, satisfait à l'exigence de motivation posée par l'article L. 9 du code de justice administrative ; que la société Procton Labs ne peut, à cet égard, invoquer les stipulations de l'article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, pour prétendre qu'elle n'aurait pas bénéficié du droit à un procès équitable garanti par cet article, dès lors que celui-ci ne trouve pas à s'appliquer au présent litige qui l'oppose à l'administration fiscale et dans lequel le juge de l'impôt ne statue pas en matière pénale et ne tranche pas de contestations sur des droits et obligations à caractère civil ;

3. Considérant que les premiers juges n'ont pas, dans le cadre du présent litige et avant de se prononcer sur le fond de celui-ci, ordonné une quelconque expertise ; que par suite, la société requérante ne peut utilement contester la régularité du jugement attaqué en invoquant les prétendues irrégularités et manquements, au regard des droits de la défense, du caractère contradictoire de la procédure et du principe d'impartialité, prétendument intervenus, dans le cadre d'autres litiges l'opposant à l'administratin fiscale et concernant au surplus d'autres années d'imposition ;

4. Considérant, qu'en l'absence d'accusation de caractère pénal, la société requérante ne saurait utilement se prévaloir de la méconnaissance des stipulations de l'article 6-3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la régularité de la procédure fiscale :

5. Considérant que la SARL Procton Labs ne peut utilement, dans le présent litige portant sur le seul refus de remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée afférent à la période correspondant à l'année 2013, invoquer les irrégularités qui auraient, selon elle, entaché les procédures de vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet au titre d'autres années et ayant notamment conduit à la remise en cause des crédits d'impôt recherche auxquels elle estimait pouvoir prétendre ;

6. Considérant que, si la SARL Procton Labs a entendu invoquer à nouveau en appel l'insuffisance de motivation et le défaut de base légale de la décision de rejet de sa réclamation préalable, de tels moyens sont inopérants, toute irrégularité de cette décision, à la supposer même établie, demeurant sans incidence sur la régularité de la procédure;

Sur le bien-fondé du rejet de la demande de remboursement de taxe sur la valeur ajoutée :

7. Considérant, qu'en vertu des dispositions combinées des articles 271, 272 et 283 du code général des impôts, un contribuable n'est pas en droit de déduire, de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations, la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui ne lui a fourni aucun bien ou aucune prestation de services ; que dans le cas où l'auteur de la facture était régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés et assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, il appartient à l'administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y était mentionnée, d'établir qu'il s'agissait d'une facture fictive ou d'une facture de complaisance ; que si l'administration apporte des éléments suffisants permettant de penser que la facture ne correspond pas à une opération réelle, il appartient alors au contribuable d'apporter toutes justifications utiles sur la réalité de cette opération ;

8. Considérant que la SARL Procton Labs fait grief à l'administration d'avoir remis en cause le caractère déductible de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé trois factures établies en avril, mai et juin 2011 par l'entreprise WZ Consulting, pour des prestations de recherche et qui auraient été acquittées partiellement en 2013 par inscription d'une somme de 149 810 euros au crédit du compte courant ouvert dans sa comptabilité au nom de M. W.Z, gérant et unique associé de l'entreprise WZ Consulting, son fournisseur ;

9. Considérant que l'administration, pour refuser à la SARL Procton Labs le droit de déduire la taxe mentionnée sur les factures de l'entreprise WZ Consulting, relève que ces trois factures, intitulées " bulletin de rémunération " ont été émises pour des montants strictement identiques, qu'elles décrivent les prestations afférentes respectivement aux mois d'avril, mai et juin 2011 en des termes généraux et identiques, que les prestations facturées étaient servies dans le cadre d'une convention et d'un acte de mise à disposition de personnel pour un coût mensuel fixe et sans contrôle de la part du donneur d'ordre ; qu'en effet, l'administration souligne que l'entreprise WZ Consulting, émettrice de ces factures, est une entreprise unipersonnelle dont le gérant et unique associé est M. W.Z., lequel est également associé de la société Procton Labs et fils de la gérante en droit de cette entreprise, dont il assure la gestion de fait ; que ces éléments, corroborés par les pièces du dossier, sont suffisants pour mettre en doute le caractère réel des prestations facturées à la société Procton Labs ; qu'il appartient, en conséquence, à cette dernière d'apporter des justifications de la réalité des prestations en cause ; que si la société Procton Labs se prévaut d'un rapport établi le

23 octobre 2015, à sa demande, par un ingénieur expert en informatique et en technologie de l'information, les éléments contenus dans ce document, qui analyse le projet de recherche au titre duquel la société requérante estimait pouvoir bénéficier d'un crédit impôt recherche, ne sont pas suffisants pour démontrer la réalité des prestations prétendument fournies en contrepartie des sommes qui lui ont été facturées en avril, mai et juin 2011 par la société WZ Consulting ; que la société Procton Labs n'apporte pas non plus de justification utile, en se bornant à invoquer le principe de liberté de gestion des entreprises, lequel ne saurait la dispenser d'avoir à produire des justificatifs, et pas davantage, en tout état de cause, en se prévalant du principe de présomption d'innocence, ou en critiquant le contenu de rapports établis par d'autres experts sur l'éligibilité au bénéfice d'un crédit d'impôt recherche, de certains de ses projets de recherche, cette question n'étant pas l'objet du présent litige ; qu'ainsi, il résulte de l'instruction que l'administration était fondée à considérer que les factures en cause ne correspondaient pas à des prestations réellement fournies ;

10. Considérant, que si la SARL Procton Labs invoque la méconnaissance du principe communautaire de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée, ce principe ne fait pas obstacle au non remboursement d'une taxe déduite indûment en raison du caractère fictif de la prestation correspondante ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Procton Labs n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a refusé de faire droit à sa demande ; que les conclusions à fin d'annulation dudit jugement et de remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée au titre de l'année 2013 doivent être rejetées ; qu'il en va de même, en tout état de cause, des conclusions de la requérante aux fins d'injonction et d'astreinte, le présent arrêt n'impliquant pas de réexamen par l'administration fiscale de sa situation ; qu'il suit de là que les conclusions de la société Procton Labs présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être également rejetées, l'Etat n'ayant pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante : qu'il en va de même de celles présentées sur le fondement de l'article R. 761-1 dudit code, en l'absence de dépens exposés dans la présente instance ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Procton Labs est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Procton Labs et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l'audience du 5 ocotbre 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Appèche, président assesseur,

- M. Magnard, premier conseiller

Lu en audience publique, le 19 octobre 2016

Le rapporteur,

S. APPECHELe président,

I. BROTONS

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA04496


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA04496
Date de la décision : 19/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Sylvie APPECHE
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : GUEREKOBAYA

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-10-19;15pa04496 ?
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