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05/10/2016 | FRANCE | N°15PA02048

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 05 octobre 2016, 15PA02048


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris de la décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2008.

Par un jugement n° 1312608 du 14 avril 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 25 mai 2015, Mme C..., représentée par Me D...A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°

1312608 du 14 avril 2015 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris de la décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2008.

Par un jugement n° 1312608 du 14 avril 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 25 mai 2015, Mme C..., représentée par Me D...A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1312608 du 14 avril 2015 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la proposition de rectification est insuffisamment motivée ;

- la procédure méconnaît l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ;

- l'administration a outrepassé sont droit de communication en demandant des documents qui ne sont pas des documents comptables dont la tenue s'impose aux sociétés ;

- l'administration ne lui a pas communiqué la proposition de rectification concernant la société DTD objet d'une procédure de vérification et contenant des renseignements communiqués au vérificateur ;

- l'administration ajoute, concernant les investissements productifs outre-mer, des conditions qui ne figurent pas dans les textes et notamment à l'article 1999 undecies B du code général des impôts ;

- la remise en cause de la réduction d'impôt pour investissement outre-mer méconnaît l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales dès lors que l'investissement en cause avait été " validé par Bercy " ;

- les attestations produites établissent la réalité de l'investissement ;

- le montant des pensions alimentaires imposées entre ses mains ne peut excéder celui admis en déduction du revenu imposable de son époux.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 septembre 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les conclusions afférentes aux pensions alimentaires sont irrecevables ;

- pour le reste, aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par une ordonnance du président de la chambre du 21 janvier 2016, la clôture de l'instruction a été fixée, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, au

9 février 2016 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de l'énergie ;

- le code de commerce ;

- le décret n° 72-1120 du 14 décembre 1972 relatif au contrôle et à l'attestation de la conformité des installations électriques intérieures aux règlements et normes de sécurité en vigueur ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Appèche, président

- les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public,

1. Considérant que Mme C... a demandé en vain au Tribunal administratif de Paris de la décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2008 et 2009 à la suite, d'une part, de la rectification du montant des pensions alimentaires imposables entre ses mains, versées par son époux et, d'autre part, de la remise en cause de la réduction d'impôt dont elle pensait pouvoir bénéficier sur le fondement du I de l'article 199 undecies B du code général des impôts à raison d'investissements outre-mer, réalisés par l'intermédiaire de sociétés en participation (SEP) dont elle était associée et consistant en l'acquisition de centrales photovoltaïques destinées à être exploitées par des sociétés locales ; que Mme C... relève appel du jugement n° 1312608 du 14 avril 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant, en premier lieu, que Mme C...reprend devant la Cour les moyens, invoqués par elle en première instance et tirés de ce que la proposition de rectification du

19 octobre 2011 était insuffisamment motivée et de ce que l'administration aurait " procédé à un abus de droit rampant " ; qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, d'écarter ces moyens comme non fondés ;

3. Considérant, en second lieu, que Mme C...soutient que les rectifications litigieuses ont été opérées après que l'administration a irrégulièrement fait usage de son droit de communication auprès d'Electricité de France (EDF) ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 81 du livre des procédures fiscales : " Le droit de communication permet aux agents de l'administration, pour l'établissement de l'assiette et le contrôle des impôts, d'avoir connaissance des documents et de renseignements mentionnés aux articles du présent chapitre dans les conditions qui y sont précisées (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 83 du même livre : " Les administrations de l'Etat, des départements et des communes, les entreprises concédées ou contrôlées par l'Etat, les départements et les communes, ainsi que les établissements ou organismes de toute nature soumis au contrôle de l'autorité administrative, doivent communiquer à l'administration, sur sa demande, les documents de service qu'ils détiennent sans pouvoir opposer le secret professionnel, y compris les données conservées et traitées par les opérateurs de communications électroniques dans le cadre de l'article L. 34-1 du code des postes et des communications électroniques et les prestataires mentionnés aux 1 et 2 du I de l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique. " ;

5. Considérant qu'en l'espèce, l'administration a demandé à EDF, d'une part, la communication de la liste des installations pour lesquelles une demande de raccordement a été réalisée et de celles effectivement raccordées au réseau et, d'autre part, la communication de la liste des installations pour lesquelles une demande de raccordement aurait été formulée par la société Lynx Industrie Caraïbes, intermédiaire des sociétés en participation auprès d'EDF, ainsi que de la liste des installations effectivement raccordées au réseau ; qu'en réponse à cette demande, EDF a confirmé l'absence totale de raccordement ;

6. Considérant, d'une part, que, si l'article L. 85 du livre des procédures fiscales dispose que : " Les contribuables doivent communiquer à l'administration, sur sa demande, les livres dont la tenue est rendue obligatoire par les articles L. 123-12 à L. 123-28 du code de commerce ainsi que tous les livres et documents annexes, pièces de recettes et de dépenses. /- A l'égard des sociétés, le droit de communication porte également sur le rapport de gestion mentionné à l'article L. 232-1 du code de commerce, ainsi que sur les registres de transfert d'actions et d'obligations et sur les feuilles de présence aux assemblées générales. ", il résulte de l'instruction que l'administration a exercé son droit de communication auprès d'EDF, sur le fondement des articles L. 81 et L. 83 du livre des procédures fiscales énoncés ci-dessus, et non sur le fondement de l'article L. 85 dudit livre ; que Mme C...ne peut, dès lors, utilement faire valoir que les documents communiqués à l'administration par EDF ne seraient pas des documents comptables dont la tenue est rendue obligatoire pour les sociétés en vertu des articles L. 123-12 à L. 123-18 du code de commerce ; que l'administration était en droit, sur le fondement de l'article L. 83 susénoncé, de demander à EDF la communication de toute pièce de nature à établir un droit ou à faire la preuve d'un fait se rapportant à l'exécution des tâches dont les administrations, entreprises, établissements ou organismes visés à cet article ont la charge ; que, dès lors, le moyen susanalysé doit être écarté, la requérante n'étant pas davantage fondée à soutenir que l'administration aurait mis en oeuvre de manière irrégulière le droit de communication qui lui est conféré vis-à-vis des tiers ou qu'elle en aurait usé dans un but étranger à sa finalité ;

7. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. " ; que la proposition de rectification dont Mme C...a été destinataire indiquait de manière suffisamment complète et précise la nature et la teneur des renseignements obtenus par l'administration dans l'exercice de son droit de communication, notamment auprès d'EDF, et dont elle s'est servie pour opérer les rectifications des bases d'imposition à l'impôt sur le revenu de l'intéressée au titre des années en cause, ce que ne conteste d'ailleurs pas la requérante ; que, dans ces conditions, cette dernière ne peut utilement soutenir qu'elle n'a pas été destinataire de la proposition de rectification adressée à un autre contribuable, à savoir la société DTD. dont elle n'est d'ailleurs pas associée ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne la remise en cause de la réduction d'impôt au titre des investissements productifs outre-mer :

8. Considérant qu'aux termes de l'article 199 undecies B du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : " I. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer (...) dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34 (...) " ; qu'aux termes de l'article 95 Q de l'annexe II à ce code : " La réduction d'impôt prévue au I de l'article 199 undecies B du code général des impôts est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'immobilisation est créée par l'entreprise ou lui est livrée (...) " ; qu'aux termes de l'article 95 K de cette annexe : " Les investissements productifs neufs réalisés dans les départements d'outre-mer (...) qui ouvrent droit à la réduction d'impôt prévue au I de l'article 199 undecies B du code général des impôts sont les acquisitions ou créations d'immobilisations corporelles, neuves et amortissables, affectées aux activités relevant des secteurs éligibles en vertu des dispositions du I de cet article " ; qu'il résulte de ces dispositions que le fait générateur de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B du code général des impôts intervient à la date à laquelle, du fait de sa livraison effective ou de sa création dans le département ou le territoire d'outre-mer dont s'agit, l'immobilisation peut être effectivement exploitée ; que, dans le cas d'une création d'immobilisation, la date à retenir est celle à laquelle l'entreprise dispose matériellement de l'investissement productif et peut commencer son exploitation effective ; qu'il appartient au juge de l'impôt de constater, au vu de l'instruction, qu'un contribuable remplit ou non les conditions lui permettant de se prévaloir de l'avantage fiscal institué par ledit article 199 undecies B ;

9. Considérant que des centrales photovoltaïques destinées à la revente d'électricité auprès d'EDF ne peuvent être effectivement exploitées sans être intégrées dans une installation et raccordées au réseau électrique, et sans que la conformité aux normes de sécurité en vigueur de cette installation soit impérativement établie, conformément aux dispositions alors en vigueur du décret susvisé n° 72-1120 du 14 décembre 1972, par une attestation visée par l'un des organismes compétents désignés à l'article 4 dudit décret, avant que les centrales ne puissent être effectivement exploitées ; qu'en relevant que ces conditions n'étaient pas remplies au 31 décembre des années 2008 et 2009 dès lors qu'aucune déclaration d'achèvement de travaux n'a été présentée par la société DTD sur la période 2008 et 2009, qu'aucun certificat de conformité n'a été délivré et visé par un organisme agréé, qu'aucune demande de raccordement au réseau EDF n'a même été formulée au cours des années 2008 et 2009, l'administration fiscale n'ajoute ainsi pas à la loi mais se borne à mettre en oeuvre les conditions auxquelles un " investissement productif " peut être regardé comme réalisé au sens du I de l'article 199 undecies B du code général des impôts ; que les attestations produites par Mme C...ne sont pas de nature à démontrer que le service fiscal aurait à tort considéré qu'elle ne remplissait pas les conditions au 31 décembre des années 2008 et 2009 pour prétendre aux réductions d'impôt pour investissements productifs outre-mer qu'elle avait portées sur les déclarations souscrites par elle au titre de ces années ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " (...) / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente " ; qu'aux termes de l'article L. 80 B du même livre : " La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable : 1° Lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal (...) " ;

11. Considérant que, si Mme C...fait valoir que les investissements en cause avaient été validés par le ministère des finances, les documents auxquels elle fait référence, et notamment les courriers datés de mars et avril 2009 émanant du ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique et celui du 29 octobre 2009 émanant du contrôleur général économique et financier, ne contiennent aucune prise de position, dont la requérante pourrait se prévaloir sur le fondement des dispositions susénoncées, concernant notamment les conditions d'exploitation effective des centrales photovoltaïques en cause et la date à laquelle les conditions requises pour bénéficier de la réduction d'impôt pouvaient être considérées comme réunies ;

En ce qui concerne les montants des pensions alimentaires pris en compte au titre des années 2008 et 2009 :

12. Considérant qu'il est constant que les pensions alimentaires imposables entre les mains de Mme C...ont été ramenées par l'administration de 36 000 euros à 23 279 euros au titre de l'année 2008, soit le montant admis en déduction pour M. C...qui les a versées, et à zéro au titre de l'année 2009 et que le dégrèvement correspondant a été prononcé à ce titre

le 14 décembre 2012 ; que, par suite, Mme C...n'est pas fondée à soutenir que le montant des pensions alimentaires imposées entre ses mains excèderait le montant admis en déduction du revenu imposable de son époux et à revendiquer, en appel, une décharge pour ce motif ; que ses conclusions sur ce point, présentées en appel, doivent être rejetées, sans qu'il soit besoin d'examiner leur recevabilité ;

Sur les intérêts moratoires :

13. Considérant que, si Mme C...a entendu demander à la Cour la condamnation de l'administration au versement d'intérêts moratoires, de telles conclusions sont, en tout état de cause, comme le relève le ministre, irrecevables faute de litige né et actuel sur ce point ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins de décharge et de condamnation au versement d'intérêts moratoires présentées devant la Cour doivent être rejetées ; qu'il en va de même, en conséquence, de celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, l'Etat n'ayant pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante ;

DÉCIDE :

Article 1er La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C...et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l'audience du 21 septembre 2016 où siégeaient :

- Mme Appèche, président,

- Mme Tandonnet-Turot, président,

- Mme Jimenez, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 5 octobre 2016.

Le président assesseur,

En application de l'article R. 222-26 du code

de justice administrative

S. APPECHEL'assesseur le plus ancien,

S. TANDONNET-TUROT

Le greffier,

P. LIMMOIS

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA02048


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA02048
Date de la décision : 05/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme APPECHE
Rapporteur ?: Mme Sylvie APPECHE
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : SANCHEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-10-05;15pa02048 ?
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