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21/09/2016 | FRANCE | N°16PA00342

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 21 septembre 2016, 16PA00342


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...C...ont demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, en droits et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009 et 2010.

Par un jugement n° 1400745/7 du 17 décembre 2015, le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 25 janvier 2016, M. et MmeC..., représentés par MeB..., demandent à la Cour

:

1°) d'annuler le jugement n° 1400745/7 du 17 décembre 2015 du Tribunal administratif de Melun...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...C...ont demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, en droits et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009 et 2010.

Par un jugement n° 1400745/7 du 17 décembre 2015, le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 25 janvier 2016, M. et MmeC..., représentés par MeB..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400745/7 du 17 décembre 2015 du Tribunal administratif de Melun;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les dispositions des articles L. 53 et L. 57 du livre des procédures fiscales ont été méconnues, dès lors que la proposition de rectification leur a été directement adressée et que les SEP dont ils sont les associés n'ont fait l'objet d'aucune procédure de rectification, ni d'une proposition de rectification, alors qu'elles étaient les seules en possession des documents nécessaires à l'établissement d'une défense utile ;

- aucune disposition législative ou réglementaire ne subordonne le bénéfice du crédit d'impôt institué par les dispositions des articles 199 undecies B du code général des impôt à la condition que l'investissement productif fasse l'objet d'une exploitation effective ; ces dispositions n'imposent pas que l'investissement en cause soit raccordé au réseau électrique, ni qu'il ait obtenu une certification Consuel ; le fait générateur de l'avantage fiscal est constitué par la seule livraison effective et matérielle du bien au sens de l'article 1604 du code civil ;

- le panneau photovoltaïque est, par nature, productif d'énergie par sa seule installation et son raccordement à un onduleur ; l'énergie produite peut être stockée avant tout raccordement au réseau et par, la suite, être revendue à Electricité de France ; la capacité de production d'énergie d'une centrale photovoltaïque est indépendante de son raccordement au réseau électrique ;

- en raison du moratoire institué par le décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010, les demandes de raccordement formulées avant le 9 décembre 2010, qui n'avaient pas encore été traitées par Electricité de France, ont été considérées comme non avenues en sorte que les contribuables ont dû formuler une nouvelle demande de raccordement à l'issue du moratoire ;

- la doctrine BOI 5-B-2-07 du 30 janvier 2007, invocable sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, prévoit expressément que l'année de réalisation de l'investissement est celle au cours de laquelle l'investissement est livré au sens de l'article 1604 du code civil.

Par un mémoire en défense enregistré le 26 mai 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme C...ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 13 juin 2016, la clôture de l'instruction a été fixée au 30 juin 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le livre des procédures fiscales et le code général des impôts ;

- le décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010 suspendant l'obligation d'achat de l'électricité produite par certaines installations utilisant l'énergie radiative du soleil ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Brotons,

- et les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public.

1. Considérant que M. et Mme C...ont porté, dans les déclarations de revenus qu'ils ont souscrites au titre des années 2009 et 2010, le montant des réductions d'impôt dont ils pensaient pouvoir bénéficier sur le fondement du I de l'article 199 undecies B du code général des impôts à raison des investissements réalisés outre-mer, par l'intermédiaire de sociétés en participation dont ils étaient associés, et qui consistaient en l'acquisition de centrales photovoltaïques destinées à être exploitées par des sociétés locales ; qu'à l'issue du contrôle sur pièces de leurs déclarations, l'administration fiscale a remis en cause la réduction d'impôt pratiquée, au motif que les centrales photovoltaïques mises à la disposition des sociétés exploitantes n'étaient pas, aux dates des 31 décembre 2009 et 2010, raccordées au réseau électrique et qu'elles n'avaient pas reçu l'attestation de conformité délivrée par le comité national pour la sécurité des usagers et de l'électricité (CONSUEL), de sorte que les investissements correspondants ne pouvaient être regardés comme ayant été réalisés au sens du I de l'article 199 undecies B du code général des impôts ; que M. et Mme C...relèvent appel du jugement n° 1400745/7 du 17 décembre 2015, par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu qui leur ont été assignés, en conséquence de cette remise en cause, au titre des années 2009 et 2010 ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 53 du livre des procédures fiscales : " En ce qui concerne les sociétés dont les associés sont personnellement soumis à l'impôt pour la part des bénéfices correspondant à leurs droits dans la société, la procédure de vérification des déclarations déposées par la société est suivie entre l'administration des impôts et la société elle-même. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 57 de ce livre : " L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) " ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les suppléments d'impôt en litige font suite à un contrôle sur pièces du dossier fiscal des requérants et que l'administration n'a utilisé que les renseignements obtenus par elle, dans le cadre de l'exercice de son droit de communication auprès d'Electricité de France, pour remettre en cause la réduction d'impôt litigieuse ; qu'aucune disposition législative ou règlementaire ne faisait obligation à l'administration de procéder, avant la notification à M. et Mme C...de la reprise de l'avantage fiscal dont ils avaient ainsi entendu bénéficier, au contrôle sur place des sociétés en participation propriétaires des investissements ; qu'en l'absence de vérification et de rectification des résultats déclarés par ces sociétés, la proposition de rectification notifiée à

M. et Mme C...n'avait pas à être précédée d'une proposition de rectification adressée auxdites sociétés ; qu'enfin, les requérants, qui ont fait l'objet d'un contrôle sur pièces de leurs déclarations, ont bénéficié des garanties attachées à la procédure de rectification contradictoire ; qu'en particulier, en leur adressant une proposition de rectification motivée, mentionnant l'exercice de son droit de communication ainsi que les raisons justifiant la rectification envisagée, l'administration a mis M. et Mme C...en mesure de solliciter, dans les délais requis, les renseignements transmis par Electricité de France fondant la reprise de la réduction d'impôt en cause, et de contester utilement les impositions en litige en apportant tous les éléments justificatifs qui leur paraissaient utiles ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 199 undecies B du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : " I. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer (... ) dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34 (...) " ; qu'aux termes de l'article 95 Q de l'annexe II à ce code : " La réduction d'impôt prévue au I de l'article 199 undecies B du code général des impôts est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'immobilisation est créée par l'entreprise ou lui est livrée (...) " ; qu'aux termes de l'article 95 K de cette annexe : " Les investissements productifs neufs réalisés dans les départements d'outre-mer (...) qui ouvrent droit à la réduction d'impôt prévue au I de l'article 199 undecies B du code général des impôts sont les acquisitions ou créations d'immobilisations corporelles, neuves et amortissables, affectées aux activités relevant des secteurs éligibles en vertu des dispositions du I de cet article " ; qu'il résulte de ces dispositions que le fait générateur de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B du code général des impôts est la date à laquelle, du fait de sa livraison effective ou de sa création dans le département ou le territoire d'outre-mer dont s'agit, l'immobilisation peut être effectivement exploitée ; que, dans le cas d'une création d'immobilisation, la date à retenir est celle à laquelle l'entreprise dispose matériellement de l'investissement productif et peut commencer son exploitation effective ; qu'il appartient au juge de l'impôt de constater, au vu de l'instruction, qu'un contribuable remplit ou non les conditions lui permettant de se prévaloir de l'avantage fiscal institué par l'article 199 undecies B du code général des impôts ;

5. Considérant que des centrales photovoltaïques destinées à la revente d'électricité auprès d'Electricité de France, ne peuvent être effectivement exploitées sans être intégrées dans une installation et raccordées au réseau électrique, la conformité aux normes de sécurité en vigueur de cette installation devant impérativement, conformément aux dispositions alors en vigueur du décret n° 72-1120 du 14 décembre 1972 relatif au contrôle et à l'attestation de la conformité des installations électriques intérieures aux règlements et normes de sécurité en vigueur, dans sa version issue du décret n° 2010-301 du 22 mars 2010, faire l'objet d'une attestation visée par le comité national pour la sécurité des usagers de l'électricité avant que les centrales ne puissent être effectivement exploitées ; qu'en relevant que ces conditions n'étaient pas remplies aux 31 décembre 2009 et 2010, l'administration fiscale n'ajoute ainsi pas à la loi mais se borne à mettre en oeuvre les conditions auxquelles un investissement peut être regardé comme réalisé au sens du I de l'article 199 undecies B du code général des impôts ;

6. Considérant qu'il ressort des informations obtenues par l'administration auprès d'Electricité de France que les sociétés exploitantes des investissements réalisés par M. et Mme C... n'avaient pas déposé de demandes de raccordement complètes auprès d'Electricité de France ni obtenu de certificat de conformité de leurs installations aux normes de sécurité électrique aux 31 décembre 2009 et 2010 ; qu'en l'absence de toute demande de raccordement, les requérants ne peuvent utilement se prévaloir, pour contester les suppléments d'impôt mis à leur charge, de l'existence d'un moratoire résultant de l'entrée en vigueur des dispositions du décret susvisé du 9 décembre 2010, suspendant l'obligation d'achat pour Electricité de France de l'électricité produite par certaines installations utilisant l'énergie radiative du soleil ;

7. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. " ;

8. Considérant que M. et Mme C...invoquent, sur le fondement de ces dispositions, l'instruction fiscale BOI 5 B-2-07 du 30 janvier 2007 dont le paragraphe n° 148, relatif à l'année au titre de laquelle la réduction d'impôt est pratiquée, précise que: " Conformément aux dispositions du vingtième alinéa du I de l'article 199 undecies B, la réduction d'impôt est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'investissement est réalisé. Le premier alinéa de l'article 95 Q de l'annexe II prévoit que l'année de réalisation de l'investissement s'entend de l'année au cours de laquelle l'immobilisation est créée, c'est-à-dire achevée, par l'entreprise ou lui est livrée au sens de l'article 1604 du code civil, ou est mise à disposition dans le cadre d'un contrat de crédit-bail (...) " ; que, toutefois, il résulte de ce paragraphe qu'il exclut expressément que la réduction d'impôt puisse être pratiquée si l'immobilisation n'a pas été achevée au cours de l'année en cause ; que des centrales photovoltaïques ne constituant pas, par elles-mêmes, comme indiqué au point 5., des moyens d'exploitation permanents ou durables capables, avant toute installation, de fonctionner de manière autonome, l'interprétation donnée par la doctrine invoquée de la notion de livraison est, en l'espèce, sans incidence sur le fait générateur du droit à déduction ; que, par suite, M. et Mme C...ne peuvent utilement se prévaloir de cette doctrine ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande ; que doivent, par voie de conséquence, être rejetées leurs conclusions présentées sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...C...et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l'audience du 7 septembre 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Appèche, président assesseur,

- M. Magnard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 septembre 2016.

Le président rapporteur,

I. BROTONSL'assesseur le plus ancien

S. APPECHE

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 16PA00342


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA00342
Date de la décision : 21/09/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Isabelle BROTONS
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : DUTERTRE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/09/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-09-21;16pa00342 ?
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