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07/07/2016 | FRANCE | N°16PA00784

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 07 juillet 2016, 16PA00784


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 2 mars 2015 en tant que le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1511485/5-3 du 9 décembre 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 25 février 2016, et un nouveau mémoire enregistré le 19 ju

in 2016, M. A..., représenté par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1511485...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 2 mars 2015 en tant que le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1511485/5-3 du 9 décembre 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 25 février 2016, et un nouveau mémoire enregistré le 19 juin 2016, M. A..., représenté par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1511485/5-3 du 9 décembre 2015 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 2 mars 2015 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me C...sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors qu'il n'est pas suffisamment motivé ;

- la décision de refus de titre de séjour n'est pas suffisamment motivée ;

- le préfet de police ne lui a pas communiqué l'avis du médecin chef du service médical de la préfecture de police concomitamment à la décision de refus de titre de séjour ;

- la décision de refus de titre de séjour méconnait le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences qu'elle emporte sur sa situation personnelle ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas suffisamment motivée ;

- elle méconnaît l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences qu'elle emporte sur sa situation personnelle ;

- la décision fixant le pays de destination n'est pas suffisamment motivée ;

- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 juin 2016, le préfet de police conclut au rejet de la requête de M.A....

Il soutient qu'aucun des moyens invoqués par le requérant n'est fondé.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 22 janvier 2016.

Par un courrier adressé aux parties le 9 mai 2016, la Cour les a informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, qu'elle était susceptible de rejeter les conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination, qui sont nouvelles en appel.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Blanc a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.A..., ressortissant marocain, né en 1968, qui déclare être entré sur le territoire français au cours du mois d'août 2006, a sollicité le 8 avril 2014 la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en se prévalant de la gravité de son état de santé ; que, par un arrêté du 2 mars 2015, le préfet de police a toutefois rejeté la demande de M.A..., lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que celui-ci relève appel du jugement du 9 décembre 2015, par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté en tant que le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés " ; qu'il ressort du jugement attaqué que les premiers juges ont répondu, par une motivation qui rappelle tant les textes applicables que les faits de l'espèce, à l'ensemble des conclusions et des moyens opérants soulevés par M. A...pour contester l'arrêté litigieux ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement doit être écarté ;

Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 : "La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;

4. Considérant qu'il ressort des termes de l'arrêté du 2 mars 2015 que le préfet de police a visé les dispositions dont il a fait application et a fait référence à l'avis du 7 juillet 2014 rendu par le médecin, chef du service médical de la préfecture de police, en relevant que si l'état de santé de M. A... nécessitait une prise en charge dont le défaut pourrait entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que le préfet de police a indiqué qu'après examen de sa situation, l'intéressé ne remplissait pas les conditions fixées au 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour bénéficier d'un titre de séjour sur ce fondement ; qu'il a également indiqué que M. A...était célibataire, sans charge de famille et n'atteste pas être démuni d'attaches familiales à l'étranger où résident ses parents et une de ses soeurs ; que, par suite, le refus de séjour litigieux, qui énonce les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, est suffisamment motivé ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que si M. A...reproche au préfet de police de ne pas lui avoir communiqué l'avis du médecin prévu par les dispositions précitées de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, aucune disposition législative ou réglementaire ne fait obligation à l'autorité administrative de communiquer à l'intéressé cet avis médical préalablement ou simultanément à la décision litigieuse ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...)(...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat " ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...souffre d'une pathologie chronique hépatique et de troubles psychologiques pour lesquels il est suivi depuis 2009 en France ; qu'aux termes de l'avis du 7 juillet 2014, au vu duquel le préfet de police s'est prononcé sur la demande dont il était saisi, le médecin, chef du service médical de la préfecture de police, a estimé que l'état de santé de M. A...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'il existait un traitement approprié pour sa prise en charge dans son pays d'origine ; que si M. A...soutient qu'il ne pourra effectivement bénéficier du traitement approprié à sa pathologie dans son pays d'origine en raison de son coût, il résulte des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code précité, dans leur rédaction issue de l'article 26 de la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011, et en l'absence de circonstance humanitaire exceptionnelle au sens de ce texte, que cette circonstance n'a pas d'incidence sur la légalité de la décision attaquée ; que le requérant, qui ne conteste pas que le suivi médical auquel il est soumis en France est disponible au Maroc, ne peut utilement se prévaloir de ce qu'une telle prise en charge ne serait pas accessible dans sa ville natale ou sa région d'origine ; que, par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse a été prise en méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

8. Considérant, en quatrième et dernier lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

9. Considérant que M. A...fait valoir qu'il vit en France depuis le mois d'août 2006 et que cinq de ses frères et soeurs y résident régulièrement ou ont la nationalité française ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que M. A...est célibataire et sans charge de famille, qu'il ne rapporte la preuve de sa résidence sur le territoire national que depuis l'année 2009, qu'il ne justifie pas d'une intégration particulière dans la société française et n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales au Maroc, où il a vécu, à tout le moins, jusqu'à l'âge de 38 ans et où résident ses parents ainsi que l'une de ses soeurs ; que, dans ces conditions, en rejetant, par l'arrêté contesté, sa demande de titre de séjour, le préfet de police n'a pas porté au droit de M. A...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise, et n'a, dès lors, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, il n'a pas non plus commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M.A... ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

10. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III . (...) " ;

11. Considérant que la motivation de l'obligation de quitter le territoire français prise sur le fondement du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile se confond avec celle du refus du titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas de mention spécifique, dès lors que, comme c'est le cas en l'espèce, ce refus est lui-même motivé et que les dispositions législatives permettant de l'assortir d'une mesure d'éloignement ont été rappelées ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de cette décision ne peut qu'être écarté ;

12. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...) " ; que, compte tenu de ce qui a été dit au point 7 du présent arrêt, le moyen tiré de la violation de ces dispositions ne peut qu'être écarté ;

13. Considérant, en troisième lieu, que les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise le préfet de police au regard de la situation personnelle de M. A..., qui reprennent ce qui a été précédemment développé pour contester la légalité du refus de titre de séjour, doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 9 ;

14. Considérant en quatrième et dernier lieu, que le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français litigieuse, qui n'impose pas par elle-même de destination à l'intéressé ;

Sur les conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination :

15. Considérant M. A...n'a pas contesté en première instance la légalité de la décision du préfet de police fixant le pays de destination ; que les conclusions de sa requête dirigées contre cette décision, présentées directement devant la Cour, sont, dès lors, irrecevables comme nouvelles en appel ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 23 juin 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- M. Dalle, président assesseur,

- M. Blanc, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 7 juillet 2016.

Le rapporteur,

P. BLANCLe président,

C. JARDIN Le greffier,

C. BUOT La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 16PA00784


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA00784
Date de la décision : 07/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: M. Philippe BLANC
Rapporteur public ?: Mme ORIOL
Avocat(s) : AGAHI-ALAOUI

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-07-07;16pa00784 ?
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