Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 26 janvier 2015 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit à l'expiration de ce délai.
Par un jugement n° 1502533 du 21 octobre 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 23 novembre 2015 et 23 février 2016, M. C...A..., représenté par MeB..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1502533 du 21 octobre 2015 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 26 janvier 2015 du préfet de police ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour, sous la même astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me B...sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
En ce qui concerne la décision de refus de séjour :
- le préfet de police devait assortir sa décision de refus d'admission au séjour d'une mesure d'éloignement ;
- la décision n'est pas suffisamment motivée en fait et en droit au regard des dispositions de la loi n°79-587 du 11 juillet 1979 ;
- elle a été prise en méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour ;
- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève et des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 juin 2016, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. C...A...ne sont pas fondés.
M. C...A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 22 janvier 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Larsonnier a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M. C...A..., ressortissant bangladais, est entré en France le 17 septembre 2010 selon ses déclarations ; que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides lui a refusé le bénéfice du statut de réfugié par une décision du 6 mai 2011, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 11 septembre 2012 ; que M. C...A...a sollicité le réexamen de sa demande d'asile ; que le préfet de police a, par une décision du 1er octobre 2014, refusé son admission au séjour sur le fondement du 4° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par une décision du 28 octobre 2014, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a, à nouveau, rejeté la demande d'asile de M. C...A... ; que, par un arrêté du 26 janvier 2015, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement du 8° de l'article L. 314-11 et de l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a prononcé une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel M. C...A...pourrait être reconduit à l'expiration de ce délai ; que M. C...A...fait appel du jugement du 21 octobre 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la légalité de la décision de refus de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'il est admis à séjourner en France en application des dispositions du chapitre Ier du présent titre, l'étranger qui demande à bénéficier de l'asile se voit remettre un document provisoire de séjour lui permettant de déposer une demande d'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. L'office ne peut être saisi qu'après la remise de ce document au demandeur. Après le dépôt de sa demande d'asile, le demandeur se voit délivrer un nouveau document provisoire de séjour. Ce document est renouvelé jusqu'à ce que l'office statue et, si un recours est formé devant la Cour nationale du droit d'asile, jusqu'à ce que la cour statue. " ; qu'aux termes de l'article L. 742-3 du même code : " L'étranger admis à séjourner en France bénéficie du droit de s'y maintenir jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. Le a du 3° du II de l'article L. 511-1 n'est pas applicable. " ; que l'article L. 741-4 de ce code, dans sa rédaction applicable à la date de la décision contestée, dispose : " Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : (...) 4° La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente. Constitue, en particulier, un recours abusif aux procédures d'asile la présentation frauduleuse de plusieurs demandes d'admission au séjour au titre de l'asile sous des identités différentes. Constitue également un recours abusif aux procédures d'asile la demande d'asile présentée dans une collectivité d'outre-mer s'il apparaît qu'une même demande est en cours d'instruction dans un autre Etat membre de l'Union européenne. Constitue une demande d'asile reposant sur une fraude délibérée la demande présentée par un étranger qui fournit de fausses indications, dissimule des informations concernant son identité, sa nationalité ou les modalités de son entrée en France afin d'induire en erreur les autorités. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 742-6 de ce code : " L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la décision de l'office. (...) " ;
3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable à la date de la décision contestée : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue à l'article L. 313-11 est délivrée de plein droit à l'étranger qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire en application de l'article L. 712-1 du présent code, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 314-11 de ce code, dans sa rédaction applicable à la date de la décision contestée : " Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : (...) 8° A l'étranger qui a obtenu le statut de réfugié en application du livre VII du présent code (...) ; " :
4. Considérant, contrairement à ce que soutient M. C...A..., que le préfet de police ne pouvait pas, sans méconnaître les dispositions précitées, assortir sa décision du 1er octobre 2014 refusant son admission au séjour sur le fondement du 4° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'une mesure d'éloignement, dès lors que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, saisi selon la procédure prioritaire de sa demande de réexamen de son dossier d'asile, n'avait pas encore statué sur cette demande ; que sa demande de réexamen ayant été rejetée par l'office le 28 octobre 2014, le préfet de police a pu légalement, par l'arrêté en litige du 26 janvier 2015, refuser à M. C...A...la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 8° de l'article L. 314-11 et de l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, prononcer une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixer le pays à destination duquel il pourrait être reconduit à l'expiration de ce délai ;
5. Considérant, en deuxième lieu, que la décision de refus de titre de séjour vise le 8° de l'article L. 314-11 ainsi que l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, fait mention des décisions de rejet de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile, et ajoute qu'il n'est pas porté au droit de M. C... A...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée ; que le préfet de police a visé également l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et a indiqué que M. C...A...n'établissait pas être exposé à des peines ou traitements contraires à cette même convention en cas de retour dans son pays d'origine : que, par suite, la décision contestée est suffisamment motivée ;
6. Considérant, en troisième lieu, que, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à un titre de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé ; qu'il en résulte que M. C...A..., qui a fondé sa demande sur les seules dispositions du 8° de l'article L. 314-11, et de l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne peut utilement invoquer le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du même code à l'encontre du refus opposé à sa demande de titre de séjour ;
7. Considérant, en quatrième et dernier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. C...A..., entré en France le 17 septembre 2010 selon ses déclarations, vit en concubinage avec une compatriote, titulaire d'une carte de résident en qualité de réfugiée, depuis le mois de juin 2013, soit dix-huit mois à la date de la décision contestée, et que le couple suit un traitement médical contre l'infertilité ; que, postérieurement à la décision contestée, ils ont, le 20 avril 2015, conclu un pacte civil de solidarité ; qu'eu égard à la faible durée de la vie commune des intéressés à la date de la décision en litige et alors que M. C...A...n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de 34 ans, le préfet de police n'a pas, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette décision a été prise ; que, par suite, il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
9. Considérant, en premier lieu, que les moyens dirigés contre la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour ayant été écartés, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée par M. C...A...à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écartée ;
10. Considérant, en deuxième lieu, que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7°de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui reprennent les éléments qui ont été développés à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour, doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 8 du présent arrêt ;
11. Considérant, enfin, qu'aucune des circonstances invoquées par M. C...A...ne permet de regarder la décision contestée comme entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
12. Considérant qu'aux termes de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 : " 1. Aucun des Etats Contractants n'expulsera ou ne refoulera, de quelque manière que ce soit, un réfugié sur les frontières des territoires où sa vie ou sa liberté serait menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques 2. Le bénéfice de la présente disposition ne pourra toutefois être invoqué par un réfugié qu'il y aura des raisons sérieuses de considérer comme un danger pour la sécurité du pays où il se trouve ou qui, ayant été l'objet d'une condamnation définitive pour un crime ou délit particulièrement grave, constitue une menace pour la communauté dudit pays. " ; qu'aux termes de l'article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Le droit de toute personne à la vie est protégée par la loi (...) "; qu'aux termes de l'article 3 de la même convention : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;
13. Considérant que M. C...A...fait valoir qu'il craint de subir des traitements inhumains et dégradants en cas de retour dans le pays dont il a la nationalité ; que, toutefois, il n'établit pas, par les pièces versées aux débats, être personnellement exposé à de tels risques ; que le statut de réfugié lui a, par ailleurs, été refusé par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées ne peut qu'être écarté ;
14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C...A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police
Délibéré après l'audience du 16 juin 2016, à laquelle siégeaient :
- Mme Coiffet, président,
- M. Platillero, premier conseiller,
- Mme Larsonnier, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 30 juin 2016.
Le rapporteur,
V. LARSONNIERLe président,
V. COIFFET Le greffier,
S. JUSTINE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA04249